Refus d’être géolocalisé par son employeur : une faute grave

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L’utilisation par un employeur d’un système de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail de ses salariés n’est licite que lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen, fût-il moins efficace que la géolocalisation. Le système de géolocalisation des salariés de la société Médiapost (« Distrio ») a été validé par les tribunaux.  

Si le dispositif  » Distrio  » ne permet pas de comptabiliser l’ensemble du temps de travail des distributeurs de presse, notamment les phases de préparation des piles de prospectus et de chargement, et si la pré-quantification du temps de travail des distributeurs est maintenue au sein de la société, ces circonstances ne sont de pas nature à rendre illégal l’usage de ce dispositif.

En effet, d’une part, la pré-quantification du temps de travail des distributeurs, qui n’est pas en soi illégale, est insuffisante pour satisfaire à l’obligation énoncée à l’article D. 3171-8 du code du travail de décompte des heures de travail accomplies par les salariés et établir, en cas de litige, la réalité de ces heures. D’autre part, le dispositif de géolocalisation a précisément pour objet de permettre d’établir les heures réellement effectuées par le salarié lors de la distribution des prospectus publicitaires, en complément de la pré-quantification des heures de travail établie en amont.

Pour rappel, aux termes de l’article D. 3171-8 du code du travail :  » Lorsque les salariés d’un atelier, d’un service ou d’une équipe, au sens de l’article D. 3171-7, ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, la durée du travail de chaque salarié concerné est décomptée selon les modalités suivantes : 1° Quotidiennement, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d’heures de travail accomplies (…) « 

En vue de procéder au décompte des heures de travail de ses distributeurs, conformément à l’article D. 3171-8 du code du travail, la société Médiapost a décidé, par une décision unilatérale du 17 février 2015 prise à la suite de l’exercice, par les organisations syndicales, de leur droit d’opposition à l’accord collectif conclu en décembre 2014, de mettre en oeuvre, à compter du 9 mars 2015, un dispositif de géolocalisation des salariés dénommé « Distrio « , dont les finalités sont d’enregistrer et de contrôler le temps de travail de ses distributeurs, de renforcer leur sécurité via un dispositif d’alerte et enfin de mesurer le taux de distribution effective des prospectus.

Ce dispositif a pour objet de décompter les heures réelles de travail des salariés lors de leurs déplacements et de la distribution, à l’exclusion des autres phases de leur travail, consistant en la préparation des piles de prospectus et en leur chargement et déchargement, en complément de la pré-quantification des heures prévues par l’article 2.2.1.2, chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe du 9 février 2004.

Un salarié (protégé) qui a été informé de la finalité de ce système de géolocalisation lors d’une réunion et formé à son utilisation, a refusé d’utiliser le boîtier  » Distrio  » lors de la phase de distribution, malgré les explications qui lui ont été fournies, à plusieurs reprises, par son employeur sur l’intérêt d’un tel dispositif.

De même, contrairement à ce que soutient M. A…, les distributeurs, qui sont tenus de respecter une feuille de route fixant les secteurs, dates et sens de distribution, ne disposent pas d’une liberté totale d’organisation de leur travail. Ainsi, le dispositif de géolocalisation n’est pas, par principe, incompatible avec leur activité de distribution.

En outre, ses données ne sont pas transmises à la société Médiapost en temps réel mais le lendemain de la tournée. Dans ces conditions, ce dispositif ne porte pas une atteinte excessive aux libertés individuelles dont jouissent les salariés, et notamment à leur liberté d’aller et venir.

Il résulte de ce qui précède que le salarié n’est pas fondé à soutenir que son refus est justifié par l’illégalité du dispositif de géolocalisation mis en place par la société Médiapost. Un tel refus, réitéré en dépit d’un avertissement, est constitutif d’une faute d’une gravité suffisante de nature à justifier le licenciement du salarié dès lors qu’il fait obstacle à l’application de l’outil de décompte de ses heures de travail effectives décidé par la société Médiapost.

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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR ADMINISTRATIVE D’APPEL DE NANCY
3ème chambre
2 juillet 2020


N° 18NC01449   
Inédit au recueil Lebon
M. WURTZ, président
M. Stéphane BARTEAUX, rapporteur
Mme SEIBT, rapporteur public
SELARL HESTIA, avocat


Lecture du jeudi 2 juillet 2020

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C… A… a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d’annuler la décision du 22 avril 2016 par laquelle le ministre en charge du travail a retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique, a annulé les décisions de l’inspecteur du travail des 18 juin et 4 septembre 2015 et a autorisé la société Médiapost à le licencier.

Par un jugement n° 1603684 du 14 mars 2018, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 mai 2018, M. C… A…, représenté par Me E…, demande à la cour :

1°) d’annuler ce jugement du 14 mars 2018 ;



2°) d’annuler la décision du 22 avril 2016 par laquelle le ministre en charge du travail a retiré sa décision implicite de rejet du recours hiérarchique, a annulé les décisions de l’inspecteur du travail des 18 juin et 4 septembre 2015 et a autorisé la société Médiapost à le licencier ;

3°) de mettre à la charge de la société Médiapost et de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Il soutient que :
– la compétence du signataire de la décision contestée n’est pas établie ;
– le boîtier de géolocalisation dit  » Distrio  » permet seulement de déterminer le temps de travail des distributeurs, laissant subsister la pré-quantification pour les autres tâches ; ce dispositif est illégal dès lors qu’il porte atteinte à la liberté d’aller et venir garantie par l’article L. 1121-1 du code du travail ;
– son refus d’utiliser le boîtier  » Distrio  » n’est pas fautif dès lors qu’il vise au respect de ses droits ;
– c’est à tort que le ministre a considéré que son acte d’insubordination constituait une faute d’une gravité suffisante pour justifier son licenciement alors qu’il s’est borné à soulever des incohérences dans le dispositif  » Distrio  » ;
– l’employeur n’a pas procédé à la déclaration du traitement des données collectées par le boîtier  » Distrio  » ;
– le tribunal n’a pas justifié sa décision en indiquant que son refus d’utiliser le boîtier constitue une faute d’une gravité suffisante pour autoriser son licenciement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 novembre 2019, le ministre du travail conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A… ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 11 décembre 2019 et le 21 février 2020, la société Médiapost, représentée par Me B…, conclut, dans le dernier état de ses écritures :

1°) à ce qu’il soit sursis à statuer dans l’attente de la décision de la cour d’appel de Lyon ;

2°) à défaut, de rejeter la requête de M. A… ;

3°) de mettre à la charge de M. A… la somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A… ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application de l’article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l’arrêt était susceptible d’être fondé sur un moyen relevé d’office tiré de ce que les conclusions de la société Médiapost tendant à l’annulation de la décision du 4 septembre 2015 par laquelle l’inspecteur du travail a refusé d’autoriser le licenciement de M. A… et de la décision implicite par laquelle le ministre a rejeté son recours hiérarchique soulèvent un litige distinct et sont, par suite, irrecevables.

Par un mémoire enregistré le 17 février 2020, la société Médiapost a présenté des observations à ce moyen d’ordre public.

Elle a fait valoir qu’il convenait de réinterpréter ses conclusions.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
– la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;
– le code du travail ;
– l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;
– le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Ont été entendus au cours de l’audience publique :
– le rapport de M. D…,
– les conclusions de Mme Seibt, rapporteur public,
– et les observations de Me B… pour la société Médiapost.

Considérant ce qui suit :

1. M. A…, salarié de la société Médiapost, filiale du groupe La Poste, exerce les fonctions de distributeur de prospectus. Il est titulaire des mandats de délégué du personnel et de délégué syndical. En vue de décompter le temps de travail effectif de ses distributeurs au cours de la phase de distribution et après une phase d’expérimentation, la société Médiapost a décidé, par une décision unilatérale du 17 février 2015, de mettre en place un dispositif de géolocalisation dénommé  » Distrio « . A la suite du refus persistant de M. A… de se munir de cet appareil pour effectuer ses tournées, la société Médiapost a demandé, le 12 juin 2015, à l’inspecteur du travail l’autorisation de le licencier pour faute. Ce dernier ayant refusé cette autorisation implicitement puis explicitement par une décision du 4 septembre 2015, la société Médiapost a adressé un recours hiérarchique au ministre du travail le 21 octobre 2015. Par une décision du 22 avril 2016, le ministre a retiré la décision implicite de rejet née du silence gardé sur ce recours, annulé la décision de l’inspecteur du travail du 4 septembre 2015 et autorisé le licenciement de M. A…. Par un jugement du 14 mars 2018, dont M. A… fait appel, le tribunal a rejeté sa demande tendant à l’annulation de cette autorisation de licenciement.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, M. A… reprend en appel le moyen tiré de l’incompétence du signataire de la décision contestée. Le jugement attaqué ayant écarté ce moyen par une motivation suffisante qui n’appelle pas de précisions en appel, il y a lieu de l’écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

3. En second lieu, d’une part, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l’intérêt de l’ensemble des salariés qu’ils représentent, d’une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement d’un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l’appartenance syndicale de l’intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l’inspecteur du travail, et le cas échéant au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l’excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d’une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l’ensemble des règles applicables au contrat de travail de l’intéressé et des exigences propres à l’exécution normale du mandat dont il est investi.

4. D’autre part, aux termes de l’article 6 alors en vigueur de la loi du 6 janvier 1978 :  » Un traitement ne peut porter que sur des données à caractère personnel qui satisfont aux conditions suivantes : /1° Les données sont collectées et traitées de manière loyale et licite (…) / 3° Elles sont adéquates, pertinentes et non excessives au regard des finalités pour lesquelles elles sont collectées et de leurs traitements ultérieurs (…) « . Aux termes de l’article L. 1121-1 du code du travail :  » Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché « . Il résulte de ces dispositions que l’utilisation par un employeur d’un système de géolocalisation pour assurer le contrôle de la durée du travail de ses salariés n’est licite que lorsque ce contrôle ne peut pas être fait par un autre moyen, fût-il moins efficace que la géolocalisation. En dehors de cette hypothèse, la collecte et le traitement de telles données à des fins de contrôle du temps de travail doivent être regardés comme excessifs au sens du 3° de l’article 6 de la loi du 6 janvier 1978 précité. Par ailleurs, aux termes de l’article D. 3171-8 du code du travail :  » Lorsque les salariés d’un atelier, d’un service ou d’une équipe, au sens de l’article D. 3171-7, ne travaillent pas selon le même horaire collectif de travail affiché, la durée du travail de chaque salarié concerné est décomptée selon les modalités suivantes : 1° Quotidiennement, par enregistrement, selon tous moyens, des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d’heures de travail accomplies (…) « 

5. Il ressort des pièces du dossier qu’en vue de procéder au décompte des heures de travail de ses distributeurs, conformément à l’article D. 3171-8 du code du travail, la société Médiapost a décidé, par une décision unilatérale du 17 février 2015 prise à la suite de l’exercice, par les organisations syndicales, de leur droit d’opposition à l’accord collectif conclu en décembre 2014, de mettre en oeuvre, à compter du 9 mars 2015, un dispositif de géolocalisation des salariés dénommé « Distrio « , dont les finalités sont d’enregistrer et de contrôler le temps de travail de ses distributeurs, de renforcer leur sécurité via un dispositif d’alerte et enfin de mesurer le taux de distribution effective des prospectus. Ce dispositif a pour objet de décompter les heures réelles de travail des salariés lors de leurs déplacements et de la distribution, à l’exclusion des autres phases de leur travail, consistant en la préparation des piles de prospectus et en leur chargement et déchargement, en complément de la pré-quantification des heures prévues par l’article 2.2.1.2, chapitre IV de la convention collective nationale de la distribution directe du 9 février 2004. M. A…, qui a été informé de la finalité de ce système de géolocalisation lors d’une réunion qui s’est tenue le 12 septembre 2014 et formé à son utilisation le 24 septembre suivant, a refusé d’utiliser le boîtier  » Distrio  » lors de la phase de distribution, malgré les explications qui lui ont été fournies, à plusieurs reprises, par son employeur sur l’intérêt d’un tel dispositif. Il n’est pas contesté que M. A… a maintenu son refus, notamment lors d’une réunion le 19 mars 2015 et à la suite d’un courrier du 20 mars 2015. Il a encore persisté dans cette attitude après un avertissement prononcé à son encontre le 13 avril 2015.

6. Si le dispositif  » Distrio  » ne permet pas de comptabiliser l’ensemble du temps de travail des distributeurs, notamment les phases de préparation des piles de prospectus et de chargement, et si la pré-quantification du temps de travail des distributeurs est maintenue au sein de la société, ces circonstances ne sont de pas nature à rendre illégal l’usage de ce dispositif. En effet, d’une part, la pré-quantification du temps de travail des distributeurs, qui n’est pas en soi illégale, est insuffisante pour satisfaire à l’obligation énoncée à l’article D. 3171-8 du code du travail de décompte des heures de travail accomplies par les salariés et établir, en cas de litige, la réalité de ces heures. D’autre part, le dispositif de géolocalisation a précisément pour objet de permettre d’établir les heures réellement effectuées par le salarié lors de la distribution des prospectus publicitaires, en complément de la pré-quantification des heures de travail établie en amont.

7. De même, contrairement à ce que soutient M. A…, les distributeurs, qui sont tenus de respecter une feuille de route fixant les secteurs, dates et sens de distribution, ne disposent pas d’une liberté totale d’organisation de leur travail. Ainsi, le dispositif de géolocalisation n’est pas, par principe, incompatible avec leur activité de distribution.

8. Si M. A… soutient également que le dispositif de géolocalisation porte atteinte aux libertés individuelles des salariés, il ressort des pièces du dossier, notamment de la notice d’utilisation du boîtier  » Distrio « , que ce dernier est activé par le distributeur au début d’un déplacement ou de la distribution et désactivé par lui à la fin du déplacement ou de la distribution et qu’il est de même désactivé puis réactivé lors de chaque interruption du travail pour des motifs personnels. Ce boîtier a pour objectif de permettre une géolocalisation du salarié au cours de la phase de déplacement depuis la plate-forme de chargement ou son domicile vers le secteur de distribution et au cours de la phase de distribution. En outre, ses données ne sont pas transmises à la société Médiapost en temps réel mais le lendemain de la tournée. Dans ces conditions, ce dispositif ne porte pas une atteinte excessive aux libertés individuelles dont jouissent les salariés, et notamment à leur liberté d’aller et venir.

9. Au surplus, les traitements des données recueillies, pour les trois finalités énoncées précédemment, ont été déclarées, en application de l’article 22 dans sa rédaction applicable au litige de la loi du 6 janvier 1978, au correspondant pour l’informatique et les libertés du groupe La Poste qui les a validés par un courrier du 13 novembre 2014, dispensant ainsi la société Médiapost de procéder à leur déclaration à la commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) en vertu des article 23 et 24 de cette même loi. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier qu’à la suite d’une vérification sur place du dispositif  » Distrio « , la CNIL, après avoir formulé quelques observations en particulier sur la période de test, a, par une décision du 10 février 2016, clôturé la procédure de contrôle en invitant seulement la société Médiapost à prendre les mesures permettant de supprimer du logiciel les  » anomalies de pointage  » pour satisfaire au principe d’adéquation, de pertinence et de caractère non excessif des données au regard des finalités pour lesquelles elles sont recueillies conformément au 3° de l’article 6 de la loi du 6 janvier 1978.

10. Enfin, si M. A… soutient qu’il existerait d’autres moyens de contrôle des heures de travail, il n’apporte aucun élément pour l’établir, alors que la société Médiapost, qui a envisagé d’autres solutions que la géolocalisation, a recensé un ensemble de procédés qui sont habituellement utilisés en justifiant des raisons pour lesquelles ils ne sont pas adaptés au métier de la distribution directe. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que d’autres procédés de contrôle du temps de travail des distributeurs, même moins efficaces que la géolocalisation, seraient adaptés aux spécificités de leur métier et, notamment, à la liberté dont ils disposent pour organiser leurs heures de distribution, dans le respect du cadre fixé par leur feuille de route.


11. Il résulte de ce qui précède que M. A… n’est pas fondé à soutenir que son refus est justifié par l’illégalité du dispositif de géolocalisation mis en place par la société Médiapost.

12. Un tel refus, réitéré en dépit d’un avertissement, est constitutif d’une faute d’une gravité suffisante de nature à justifier le licenciement de M. A…, dès lors qu’il fait obstacle à l’application de l’outil de décompte de ses heures de travail effectives décidé par la société Médiapost.

13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu’il soit besoin de surseoir à statuer dans l’attente d’un arrêt de la cour d’appel de Lyon, que M. A… n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l’annulation de la décision du ministre du travail du 22 avril 2016 autorisant son licenciement.

Sur les frais de l’instance :

14. Les dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l’Etat et de la société Médiapost, qui ne sont pas des parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. A… demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de M. A… la somme que la société Médiapost demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.


D E C I D E :


Article 1er : La requête de M. A… est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Médiapost tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me E… pour M. C… A… et à Me B… pour la société Médiapost en application des dispositions de l’article 13 de l’ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée et à la ministre du travail.

N° 18NC01449 2

Nullité du contrat d’installation de photovoltaïque

Ils font valoir que sur les documents contractuels qui leur ont été remis, la société LE PARTENAIRE DE L’HABITAT se présente comme ‘partenaire BLEU CIEL d’EDF’ alors que sur son site internet officiel, EDF avertit qu’elle ne signe aucun partenariat sur les activités photovoltaïques.

Ils prétendent qu’il s’agit d’une pratique commerciale trompeuse au sens de l’article L121-1-1 du code de la consommation, destinée à faire croire au consommateur qu’il traite avec une société partenaire dont la réputation n’est plus à faire.

Ainsi que l’a relevé le premier juge, le site internet d’EDF dont un extrait était produit par les consorts X comporte l’alerte suivante : ‘Pour information, EDF ne signe aucune convention de partenariat sur des activités photovoltaïques. Des professionnels exerçant cette activité peuvent être Partenaires Solutions Habitat d’EDF mais au titre de leurs autres domaines de compétence’ cette alerte étant destinée à lutter contre les usages frauduleux des marques commerciales d’EDF.

Contrairement à ce qu’affirme la société Z, le site internet dont elle verse un extrait aux débats n’est pas celui d’EDF mais celui de la filiale EDF ENR, qui commercialise des panneaux solaires. Il y est indiqué qu’EDF ENR recourt éventuellement, pour la pose du matériel qu’elle fournit, à des installateurs locaux en sous-traitance, ce qui est très différent de l’hypothèse d’un partenariat EDF.

La société Z affirme par ailleurs dans ses écritures que si le partenariat est mentionné sur le bon de commande, c’est uniquement parce que la société LE PARTENAIRE DE L’HABITAT bénéficiait de cet agrément pour ses compétences en menuiserie, isolation, chauffage et climatisation, et qu’il n’y a pas eu nécessairement d’intention dolosive.

Le bon de commande versé aux débats comporte dans son en-tête à droite du nom de la société, de manière très apparente en gros caractères épais et en encadré le logo ‘2013 PARTENAIRE BLEU CIEL D’EDF’ avec, accolés juste en dessous comme en sous-titre, les quatre domaines d’activité de l’entreprise soit menuiserie, chauffage/climatisation, isolation et solaire/éolienne suivis du pictogramme correspondant.

Une telle présentation est trompeuse en ce qu’elle laisse croire au client qui passe une commande portant sur des panneaux solaires qu’il contracte avec une entreprise partenaire d’EDF pour cette activité.

C’est à juste titre que le premier juge a considéré qu’un tel usage de la mention ‘PARTENAIRE BLEU CIEL D’EDF’ constituait une pratique commerciale trompeuse incriminée par les articles L121-1 et L121-1-1 anciens du code de la consommation et caractérisait une manoeuvre dolosive au sens de l’article 1116 ancien du code civil.

S’agissant d’une installation nécessitant d’une part un raccordement au réseau ERDF et un contrat de vente d’électricité à EDF, et d’autre part un matériel de haute technologie devant résister à un usage de plusieurs décennies et des travaux délicats d’intégration en toiture, la fausse assurance d’un partenariat avec EDF a nécessairement été déterminante pour le consentement des clients qui ont cru pouvoir y trouver une garantie de bonne exécution de l’opération et de fiabilité des prévisions de revenus annoncées, de sorte que la nullité du contrat pour vice du consentement est encourue.

Comme l’a justement retenu le premier juge, il ne ressort pas des éléments de la cause que Monsieur et Madame X auraient eu connaissance du vice ayant affecté leur consentement lors de la réalisation d’actes ultérieurs d’exécution du contrat, de sorte que la nullité ne saurait être considérée comme couverte au sens de l’article 1182 alinéa 3 du code civil aux termes duquel l’exécution volontaire du contrat en connaissance de la cause de nullité vaut confirmation.

Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a prononcé l’annulation du contrat de vente sur le fondement du dol.

Cette annulation entraîne de plein droit celle du contrat de crédit conformément aux dispositions de l’article L311-32 ancien du code de la consommation, le jugement étant également confirmé sur ce point.

CA_Riom_10_6_2020_ELPI.pdf

Arnaque au photovoltaique : la question du surrENdentement

Contrairement à ce qu’ils soutiennent, la décision de recevabilité de leur demande prononcée par la commission de surendettement, et non pas la saisine de la commission, emporte suspension et interdiction des seules procédures d’exécution diligentées contre les biens du débiteur mais ne fait aucunement obstacle à l’obtention par les créanciers d’un titre exécutoire portant condamnation à paiement.

Ils ne produisent cependant aucun élément de preuve de nature à établir que la société LE PARTENAIRE DE L’HABITAT n’aurait pas été couverte par une assurance décennale, ce qui en tout état de cause ne constituerait pas une cause de nullité du contrat.

S’agissant de la marque SOLASUN mentionnée sur le bon de commande et la facture, Monsieur et Madame X ne prétendent pas que les panneaux posés seraient d’une marque différente et ne démontrent pas ‘ l’inexistence’ de cette marque, qui n’est pas nécessairement celle d’un fabricant, aucune disposition n’interdisant à la société LE PARTENAIRE DE L’HABITAT d’utiliser ses propres marques.

Le nom du démarcheur, E F, est bien indiqué en page 4 du contrat.

Le fait que l’exemplaire du contrat remis au client ne comporte pas la signature du vendeur, contrairement à l’exemplaire adressé à la société Z versé aux débats, n’est pas une cause de nullité de la convention.

Il est constant que Monsieur et Madame X, qui ne sont pas commerçants, Monsieur X exerçant la profession de mécanicien en aéronautique et Madame X étant sans profession, ont fait l’objet d’un démarchage commercial à domicile s’adressant à des particuliers, à la suite duquel ils ont commandé 8 panneaux photovoltaïques d’une puissance totale de 2 kWc, destinés à être installés sur le toit de leur habitation.

Même si l’électricité produite par l’installation était destinée à être revendue en totalité à EDF, les circonstances dans lesquelles Monsieur et Madame X ont contracté à la suite d’un démarchage, la faible puissance de l’installation intégrée à la toiture de leur maison, la modicité du revenu tiré de la revente d’électricité à hauteur de 375 euros sur une période de 7 mois, à mettre en rapport avec leur propre consommation d’électricité pour un coût annuel de l’ordre de 1 200 euros, selon les pièces n°20 et 5 produites par la société Z, conduisent à considérer que l’opération ne revêt aucun caractère commercial ou professionnel mais était destinée à un usage personnel, permettant à Monsieur et Madame X d’équiper à faible coût leur domicile d’un système de production d’énergie renouvelable et de couvrir, par la revente de l’électricité produite, une partie du coût de leur propre consommation d’électricité.

Le contrat de vente de l’installation vise expressément les dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile et la société LE PARTENAIRE DE L’HABITAT n’a jamais contesté que ces dispositions étaient applicables en l’espèce.

Le contrat de crédit se réfère également aux dispositions des articles L311-1 et suivants du code de la consommation dans leur rédaction alors en vigueur.

Si comme le souligne la société Z, l’article k) des conditions générales stipule que si le crédit est supérieur à 75 000 euros ou s’il est destiné au financement d’opérations à caractère professionnel il n’entre pas dans le champs d’application des dispositions des articles L311-1 et suivants du code de la consommation, aucune mention des conditions particulières du contrat ne fait état d’une opération à caractère professionnel.

CA_Riom_10_6_2020_ELPI.pdf

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