Nouvel épilogue judiciaire
La cause animale a connu quelques remous ces derniers temps : deux des plus anciennes associations de protection des animaux se sont affrontées sur l’usage du sigle « SPA ». D’un côté, l’association Société protectrice des animaux (la SPA) qui est l’association la plus ancienne de France. Fondée en 1845, elle a été reconnue comme établissement d’utilité publique par décret du 22 décembre 1860. Elle a pour sigle la SPA, qui symbolise à la fois sa dénomination et sa devise : « sauver-protéger, aimer ». De l’autre, l’association « Défense de l’animal » qui a été créée en 1926 et reconnue d’utilité publique par décret du 1 er octobre 1990. L’association regroupe près de 260 associations de protection des animaux qui ont adopté l’appellation « SPA ». Avec le dépôt de la marque SPA de France par l’association « Défense de l’animal » en 1989, c’était là le nœud du litige.
De nombreuses décisions de justice ont été rendues opposant la SPA et des associations locales utilisant abusivement le signe SPA (Cour de cassation, 18 janvier 2007 ; CA de Limoges, 8 décembre 2005 ; CA de Douai, 12 janvier 1983 ; CA de Lyon, 12 mars 1980 ; Cour de cassation, 7 octobre 1981 ; Cour de cassation, 8 novembre 2007 ; TGI de Paris, 2 décembre 2003 ; TGI de Belley, 24 septembre 1990…).
Nullité de la marque SPA
La marque française verbale SPA de France ayant été déposée en 1989 et le caractère distinctif d’une marque s’appréciant au regard de la loi en vigueur à la date de son dépôt, les juges ont apprécié la validité de cette marque, au regard de la loi n°641360 du 31 décembre 1964 sur les marques de fabrique, de commerce ou de service, applicable au jour de leur dépôt.
Si la loi du 31 décembre 1964 n’a pas prévu de disposition particulière pour régir l’action de nullité de la marque pour fraude, à l’exception de son article 4 ayant vocation à s’appliquer au profit du titulaire d’une marque notoirement connue, dont l’application ne peut être envisagée en l’espèce l’association officielle SPA n’étant alors titulaire d’aucune marque, un recours demeure possible sur le seul fondement du principe selon laquelle la fraude corrompt tout.
L’association Défense de l’Animal, dont l’activité en faveur de la défense des animaux peut être considérée comme similaire à celle de l’association Société Protectrice des Animaux, ne pouvait pas ne pas connaître au jour du dépôt de la marque litigieuse l’existence de cette dernière, fondée en 1845 et reconnue d’utilité publique ainsi que l’usage par celle-ci du sigle SPA (notamment à la lumière des contentieux jugés).
Dès lors, le dépôt par l’association Défense de l’Animal de la marque litigieuse comprenant le sigle SPA, même combiné avec les mots « de France », pour désigner des services identiques en faveur de la protection des animaux, s’est manifestement inscrit dans une stratégie visant à priver l’association Société Protectrice des Animaux de l’usage de ce nom nécessaire à son activité et constitutif de sa dénomination statutaire, caractérisant ainsi la mauvaise foi de l’association Défense de l’Animal et entachant de fraude le dépôt effectué.
Question de la distinctivité du sigle SPA
L’article 3 de la loi du 31 décembre 1964 pose que ne peuvent être considérées comme marques « celles qui sont constituées exclusivement de la désignation nécessaire ou générique du produit ou du service ou qui comportent des indications propres à tromper le public ; celles qui sont composées exclusivement de termes indiquant la qualité essentielle du produit ou du service, ou de la composition du produit. ».
Au sens de ce texte, une dénomination est nécessaire lorsque son emploi est exigé pour la désignation de l’objet en cause ou lorsqu’il est imposé par la nature ou par la fonction de cet objet. De même, une dénomination sera considérée comme générique lorsqu’elle désigne la catégorie, l’espèce ou le genre auxquels appartient l’objet en cause.
La marque française verbale « SPA de France » a été déposée en 1989 pour désigner « toutes actions, publications ou autres diffusions tendant à promouvoir la protection et la défense des animaux et de leurs amis, ou à contribuer à ces buts ». Or, l’acronyme SPA, désignait déjà ces mêmes missions. Les juges ont donc prononcé la nullité de la marque « SPA de France ».
Condamnation pour concurrence déloyale
Si la dénomination « société protectrice des animaux » est dépourvue d’originalité en ce qu’elle est purement descriptive, cette circonstance ne peut évincer le fait que l’association Société Protectrice des Animaux fait usage de cette dénomination depuis plus de 170 ans et qu’elle bénéficie sous cette appellation d’une notoriété manifeste. L’enregistrement de cette marque par une association « concurrente » tout comme les noms de domaines associés, ne peut qu’être de nature à créer une confusion avec l’association Société Protectrice des Animaux alors que les deux associations, distinctes juridiquement, interviennent dans le même secteur d’activité et que l’association Société Protectrice des Animaux peut se prévaloir d’une antériorité sur l’usage de la dénomination SPA.
Les Legs, un des enjeux du risque de confusion
A noter que le risque de confusion portait sur un enjeu de taille puisque les juges ont dû, à plusieurs reprises, trancher la question du bénéficiaire de Legs ou des dons faits sans autre précision du testateur que « je donne à la SPA », chacune des associations revendiquant alors le bénéfice des dons et Legs. De même, plusieurs articles de presse régionale ou nationale ne font plus de différence entre l’association Société Protectrice des Animaux et les SPA localisées sur le territoire national obligeant l’association Société Protectrice des Animaux à faire publier des communiqués pour préciser qu’elle est bien une entité distincte. Au demeurant, cette confusion est aussi préjudiciable dès lors que des articles de presse ont fait état de dysfonctionnements de gestion des associations SPA sur la base d’un rapport de la cour des comptes.
En conclusion, en reprenant de manière systématique le signe « SPA de France » alors que ce terme ne constitue pas sa dénomination sociale, l’association Défense de l’Animal entretient une confusion dans l’esprit du public sur les liens supposés avec l’association Société Protectrice des Animaux dont cette dernière est fondée à solliciter la cessation et ce alors que ce faisant elle entend aussi se placer dans son sillage afin de bénéficier des dons et legs effectués pour la cause de l’animal de telle sorte que ces agissements constituent également des actes de parasitisme.
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