Propriété intellectuelle : Mama Shelter c/ Hey Mama Food

Notez ce point juridique

Le dépôt de la marque Hey Mama Food & Culture ne porte pas atteinte à la marque antérieure Mama. La marque antérieure et la marque contestée sont différentes et ne présentent aucune similitude visuelle, auditive ou conceptuelle.

Appréciation des similitudes 

Bien que les marques Mama et Hey Mama Food & Culture aient été déposées pour une activité commune de restauration, les activités relatives à l’hôtellerie rattachées à la marque Mama revêtent une différence marquante dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne avec les activités rattachées à la marque Hey Mama Food & Culture, de telle sorte que celui-ci pourra se rattacher à cet élément supplémentaire pour distinguer les deux marques et éviter leur confusion.

Aussi bien le graphisme utilisé pour la marque ‘HEY MAMA FOOD & CULTURE’ que le dessin qui l’accompagne, revêtent un particularisme qui permet au consommateur de renforcer la distinction entre les marques.

Le caractère distinctif d’une marque

Le caractère distinctif d’une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés et par rapport à la perception qu’en a le public auquel cette marque est destinée. 

Ainsi, ce qui rend le terme ‘MAMA’ distinctif pour la société la SAS SOCIETE MAMA SHELTER c’est qu’il est associé à des services d’hôtellerie et de restauration qui n’ont rien à voir avec le sens du mot ‘MAMA’. Les termes ‘HEY MAMA’ revêtent, quant à eux, un caractère distinctif pour la marque ‘HEY MAMA FOOD & CULTURE’ en ce que, associés ensemble, ils permettent d’ajouter une connotation interpellative marquante pour le consommateur d’attention moyenne.

Le risque de confusion

L’imitation d’une marque nécessite la démonstration d’un risque de confusion entre les signes, lequel doit être apprécié globalement à partir de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, et cette appréciation globale doit en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produit par celle-ci en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs dominants.

La perception par le consommateur 

La perception des marques que le consommateur moyen a de la catégorie de produits ou services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale du risque de confusion.

Or, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas un examen de ses différents détails. Aux fins de cette appréciation globale, le consommateur moyen de la catégorie de produits concernés est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.

Afin d’apprécier le degré de similitudes qui existe entre les marques concernées, la juridiction saisie doit déterminer leur degré de similitudes visuelle, auditive et conceptuelle.

Position de la CJUE 

La Cour de justice de l’Union Européenne a, dans un arrêt rendu le 8 mai 2014, (Bimbo, aff. C-591/12 ) considéré qu’un élément d’un signe composé ne conserve pas une position distinctive autonome s’il forme avec le ou les autres éléments du signe, pris ensemble, une unité ayant un sens différent par rapport au sens des éléments pris séparément.

Dans une décision de l’INPI n°17-2238, la SAS SOCIETE MAMA SHELTER c. MAMA GAIA CUISINE JOYEUSE ET RAISONNEE, l’INPI retient que le terme MAMA ne retiendra pas à lui seul l’attention du consommateur dans le signe contesté et que les signes pris dans leur globalité produisent une impression d’ensemble différente.

En l’espèce, la comparaison s’effectue entre une marque verbale ‘MAMA’ et une marque complexe ‘HEY MAMA FOOD & CULTURE’ accompagné d’un graphisme particulier et d’un dessin. Le fait que le signe contesté est constitué de cinq éléments verbaux présentés sur deux lignes distinctes et d’éléments figuratifs alors que la marque antérieure est constituée d’une dénomination unique, ne suffit effectivement pas à écarter tout risque de confusion dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne.

Cependant, le terme ‘MAMA’, composant les deux marques litigieuses, n’est pas, à lui seul, un élément distinctif. Effectivement, le terme MAMA, qui est le seul élément qui compose la marque verbale antérieure, est un terme usuel signifiant ‘maman’ comme l’ont relevé les parties. Ainsi, même si la Cour ne se référait pas aux nouvelles pièces versées par la société requérante, il convient de relever que le terme ‘MAMA’ revêt un caractère usuel, manifestement ancrée dans le vocabulaire et dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne. 


 
République française
Au nom du peuple français

 

MINUTE N° 172/23
Copie exécutoire à
– Me Valérie BISCHOFF – DE OLIVEIRA
Copie à M. le PG
Arrêt notifié aux parties
Le 29.03.2023
Le Greffier
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE COLMAR
PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION A
ARRET DU 29 Mars 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : 1 A N° RG 20/01302 – N° Portalis DBVW-V-B7E-HKLY
Décision déférée à la Cour : 26 Mars 2020 par Monsieur le Directeur Général de l’Institut National de la
Propriété
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Industrielle de [Localité 5]
DEMANDEURS AU RECOURS :
Monsieur [N] [V] [G]
[Adresse 1]
S.A.S. HEY MAMA prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
Représentés par Me Valérie BISCHOFF – DE OLIVEIRA, avocat à la Cour
Avocat plaidant : Me LELONG, avocat au barreau de STRASBOURG
DEFENDEUR AU RECOURS :
Monsieur le Directeur Général de l’INPI
[Adresse 2]
représenté par Mme [S] [B], sur délégation en date du 13.06.2022
PARTIE APPELEE EN LA CAUSE :
S.A.S. MAMA SHELTER prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
non comparante, non représentée,
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 14 Décembre 2022, en audience publique, un rapport ayant été présenté, devant la Cour composée de :
Mme PANETTA, Présidente de chambre
M. ROUBLOT, Conseiller
M. LAETHIER, Vice-Président placé
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Mme VELLAINE
Ministère Public :
représenté par Mme PIMMEL, substitut général, non présente aux débats mais dont les réquisitions écrites ont été communiquées aux parties.
ARRET :
– réputé contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile.
– signé par Mme Corinne PANETTA, présidente et Mme Régine VELLAINE, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS PROCÉDURE PRÉTENTIONS DES PARTIES :
M. [G] agissant pour le compte de la société HEY MAMA en cours de formation, a déposé le 22 juillet 2019, la demande d’enregistrement 19 4 569 615 portant sur le signe complexe HEY MAMA FOOD & CULTURE, signe destiné à distinguer les services de restauration et de traiteurs.
Le 16 octobre 2019, la SAS MAMA SHELTER a formé opposition à l’enregistrement de cette marque.
La marque antérieure invoquée dans cet acte est la marque de l’UE portant sur le signe verbal MAMA, déposée le 6 octobre 2016, enregistrée sous le n°15896103.
Le 30 décembre 2019, le déposant a présenté des observations en réponse à l’opposition et a invité la société opposante à produire des pièces propres à établir que la déchéance de ses droits pour défaut d’exploitation de sa marque n’était pas encourue.
Le 14 janvier 2020, Monsieur le Directeur de l’INPI a adressé aux parties un projet de décision établi au vu de l’opposition et des observations en réponse.
Le déposant a contesté le bien-fondé de ce projet de décision.
Par une décision N°OPP 19-4585/GUB notifiée le 26 mars 2020, le Directeur général de l’INPI a décidé que :
Article 1 : l’opposition est reconnue justifiée en ce qu’elle porte sur les services suivants : ‘services de restauration (alimentation) ; services de traiteurs ; tous ces services étant exclusivement rendus à l’occasion de spectacles vivants et de concerts de musique’.
Article 2 : la demande d’enregistrement est partiellement rejetée pour les services précités.
Aux motifs que, sur la comparaison des services, les deux marques proposent des services de restauration, bien que les libellés inscrits ne sont pas les mêmes quant au lieu où sont effectués lesdits services, le Directeur de l’INPI considère que ce sont des services similaires par leur nature, objet et destination dès lors qu’ils sont susceptibles de s’adresser à une même clientèle et d’être assurés par les mêmes prestataires. Il ajoute qu’en définitive les deux marques ont pour vocation de proposer des plats préparés et cuisinés à une clientèle désireuse de se restaurer.
Sur la comparaison des signes, le Directeur de l’INPI considère que le terme MAMA apparaît distinctif au regard des signes en présence, tant dans le signe contesté que dans la marque antérieure. Le Directeur de l’INPI refuse d’admettre la banalité de ce terme et ajoute que bien que le signe MAMA du déposant soit accolé à d’autres termes, ils mettent tous en exergue le terme MAMA, le terme MAMA a donc un caractère essentiel pour les deux marques. Le Directeur de l’INPI conclut qu’il résulte tant des ressemblances d’ensemble entre les signes que de la prise en considération des éléments distinctifs et dominants, un risque de confusion entre les deux signes, que par conséquent le signe contesté peut apparaître comme une déclinaison de la marque antérieure. La marque HEY MAMA est ainsi considérée comme une imitation de la marque antérieure MAMA.
Par une déclaration faite au greffe en date du 23 avril 2020, M. [G] et la SAS SOCIETE HEY MAMA ont interjeté appel de cette décision.
Par des conclusions en date du 23 août 2022, le Ministère Public s’en rapporte.
Par leurs dernières conclusions en date du 22 mai 2020 auxquelles a été joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif qui a fait l’objet d’une contestation par le directeur de l’INPI concernant les pièces 7 à 9 considérées comme nouvelles devant la Cour d’appel, les parties requérantes demandent à la Cour de :
Recevoir les appelants en leur appel et les dire bien fondés.
En conséquence,
Infirmer la décision entreprise.
Et statuant à nouveau,
1/ Sur la comparaison des signes :
– Dire que les marques MAMA et HEY MAMA ne présentent pas de similitudes visuelles, phonétiques et <
intellectuelles
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permettant de conclure à une imitation de marque.
– Dire que les marques MAMA et HEY MAMA présentent d’importantes différences visuelles, phonétiques et conceptuelles, lesquelles suscitent une impression d’ensemble distincte et excluent tout risque de confusion sur l’origine de ces deux marques pour le consommateur d’attention moyenne.
2/ Sur la comparaison des services :
– Dire que les ‘services de restauration (alimentation) ; tous ces services étant exclusivement rendus à l’occasion de spectacles vivants et de concerts de musique’ de la marque contestée ne sont pas similaires aux ‘services de restauration (alimentation), aucun des services précités n’étant rendus dans des lieux de spectacles vivants ou à l’occasion de spectacles vivants’ désignés par la marque antérieure.
– Dire que les ‘services de traiteurs ; tous ces services étant exclusivement rendus à l’occasion de spectacles vivants et de concerts de musique’ de la marque contestée ne sont pas similaires aux ‘services de restauration (alimentation), aucun des services précités n’étant rendus dans des lieux de spectacles vivants ou à l’occasion de spectacles vivants’ désignés par la marque antérieure.
3/ Sur l’absence de risque de confusion :
 
– Dire qu’aucun risque de confusion n’est susceptible de naître dans l’esprit du public entre les deux marques.
En conséquence, dans tous les cas :
– Annuler la décision de Monsieur le Directeur Général de l’INPI du 26 mars 2020, ce qui conduira à l’enregistrement de la marque HEY MAMA pour les produits et services suivants : 30, 32 et 43.
– Condamner la société MAMA SHELTER à verser à la société HEY MAMA la somme de 8.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers frais et dépens de la procédure.
Au soutien de leurs prétentions, sur l’absence de similitudes visuelles, M. [G] et la société HEY MAMA affirment que les marques ne présentent pas de similitudes visuelles, que la marque HEY MAMA est complexe car elle comporte plusieurs mots stylisés, en polices différentes et avec un élément décoratif et n’a rien à voir avec la marque verbale MAMA qui est simple. Que la seule ressemblance réside dans l’usage du terme ‘MAMA’.
 
Sur l’absence de similitudes phonétiques, M. [G] et la société HEY MAMA estiment qu’en plus de la différence visuelle, s’ajoute une différence phonétique, du fait que la marque HEY MAMA FOOD & CULTURE soit composée de plus de mots et de syllabes que la marque MAMA. Qu’en ce qui concerne le terme ‘HEY’, M. [G] et la société HEY MAMA expliquent que ce n’est pas juste une interjection mettant en exergue le terme ‘MAMA’ mais bien d’une séquence d’attaque avec une importance fondamentale, tout autant que le terme MAMA.
Sur l’absence de similitudes <
intellectuelles
>
, M. [G] et la société HEY MAMA prétendent que l’association du terme HEY et MAMA permet de distinguer conceptuellement sa marque avec MAMA. Ainsi M. [G] et la société HEY MAMA estiment qu’HEY MAMA a une signification propre car HEY sert uniquement à interpeller le consommateur et que les termes FOOD & CULTURE accolés à HEY MAMA permettent au consommateur de comprendre qu’il peut bénéficier de services de restauration à l’occasion de spectacles culturels.
Sur l’absence de risque de confusion, M. [G] et la société HEY MAMA affirment qu’en raison des différences visuelles, phonétiques et <
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>
, l’impression d’ensemble donnée par les deux marques est totalement différente. M. [G] conclut en l’absence de risque de confusion entre les deux marques.
M. [G] et la société HEY MAMA ajoutent que conférer une protection à la SAS SOCIETE MAMA SHELTER pour sa marque MAMA dans de telles circonstances, reviendrait à conférer un monopole autour du terme MAMA dans la restauration, alors que le seul terme MAMA est considéré, par M. [G] et la société HEY MAMA, comme étant usuel et banal, ce seul terme réutilisé par HEY MAMA ne peut fonder à lui seul un risque de confusion. M. [G] et la société HEY MAMA soutiennent que les deux marques peuvent coexister.
Enfin, M. [G] et la société HEY MAMA ajoutent que le fait qu’HEY MAMA propose de la restauration et un service traiteur à l’occasion de spectacles provoque une distinction avec les services proposés par MAMA qui ne propose pas de services de restauration ni de traiteurs lors de spectacles et qu’ainsi le risque de confusion entre les deux marques est d’autant plus réduit.
Par ses observations du 4 octobre 2022, auxquelles a été joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif qui n’a fait l’objet d’aucune contestation, le Directeur Général de l’INPI estime  sur le rejet des pièces nouvelles, que la société HEY MAMA et M. [G] produisent devant la Cour d’appel, des documents qui n’ont pas été soumis à son appréciation lors de la procédure d’opposition. Il poursuit en indiquant qu’en l’absence d’effet dévolutif du présent recours en annulation, les pièces 7 à 9 devront être déclarées irrecevables tout comme les extraits de ces pièces cités dans les conclusions.
Sur la comparaison des services, Monsieur le Directeur de l’INPI considère que les deux services d’alimentation, l’un rendu à l’occasion de spectacles vivants et de concerts de musique en ce qui concerne HEY MAMA, et l’autre n’étant pas rendu à l’occasion de spectacles pour MAMA, relèvent toutefois de la catégorie générale des services de restauration, d’alimentation, qu’ainsi ils partagent les mêmes nature et objet et sont rendus par les mêmes prestataires, à destination d’une même clientèle désireuse de consommer des repas sans devoir les préparer. Dès lors, le Directeur de l’INPI indique qu’il importe peu que les services soient rendus dans des lieux distincts ou lors d’occasions distinctes, que cela ne permet pas d’ôter le risque de confusion dans l’esprit du consommateur moyen.
Le Directeur de l’INPI ajoute qu’il en est de même pour les services de traiteurs proposés par HEY MAMA en comparaison des services de restauration de MAMA.
Sur la comparaison des signes, le Directeur de l’INPI considère que les signes HEY MAMA et MAMA partagent le même élément distinctif et dominant, à savoir le terme MAMA, lequel induit, selon lui, des ressemblances d’ensemble entre les signes, sur les plans visuel, phonétique et <
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.
Sur les ressemblances d’ensemble, visuellement, le Directeur de l’INPI explique que le terme MAMA occupe une part importante du signe contesté et représente le seul élément constitutif de la marque antérieure. Phonétiquement, il estime que les deux marques sont phonétiquement très similaires en prononciation et que le terme MAMA est prépondérant dans les deux cas. Intellectuellement, le Directeur de l’INPI fait valoir devant la Cour que le terme MAMA sera compris comme signifiant ‘MAMAN’, que dans HEY MAMA, le terme HEY n’est qu’une interjection se rapportant au terme MAMA. Ainsi, il conclut à la ressemblance en tous ces points des deux marques.
Sur les éléments distinctifs et dominants, le Directeur de l’INPI estime que le terme MAMA de la marque antérieure est parfaitement arbitraire pour désigner les services en cause, car il n’en constitue pas la désignation nécessaire, générique ou usuelle, ni n’en décrit une caractéristique, le terme est donc fantaisiste selon lui, qu’il est également sans emport qu’un grand nombre de marques en France puissent contenir le terme MAMA, que de plus, le terme MAMA présente un caractère dominant dans la marque HEY MAMA malgré les termes entourant MAMA, que les éléments décoratifs de la marque HEY MAMA font référence à la nourriture.
Sur l’appréciation globale du risque de confusion, le Directeur de l’INPI estime que l’enregistrement de la marque HEY MAMA pourrait conduire à un risque d’association car les deux marques possèdent le même élément caractéristique essentiel et qu’elles peuvent apparaître comme des déclinaisons servant à désigner différentes gammes de produits ou de services.
L’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 14 décembre 2022 à laquelle les parties ont développé leur argumentation et déposé les pièces au soutien de leurs allégations.
MOTIFS DE LA DECISION :
La cour entend, au préalable, rappeler que :
– aux termes de l’article 954, alinéa 3, du code de procédure civile elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion,
– ne constituent pas des prétentions, au sens de l’article 4 du code de procédure civile, les demandes des parties tendant à ‘dire et juger’ ou ‘constater’, en ce que, hors les cas prévus par la loi, elles ne sont pas susceptibles d’emporter de conséquences juridiques, mais constituent en réalité des moyens ou arguments, de sorte que la cour n’y répondra qu’à la condition qu’ils viennent au soutien de la prétention formulée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans son dispositif mais dans ses motifs.
– Sur la demande aux fins d’écarter les pièces 7 à 9 produites par la société requérante à hauteur de Cour et qui n’ont pas été soumises à l’appréciation du directeur de l’INPI dans le cadre de la procédure d’opposition et des extraits de jurisprudence cités dans les conclusions de celle-ci :
Les extraits cités dans les conclusions de la société requérante, reprennent des éléments de jurisprudence et notamment des extraits d’une décision rendue par la présente Cour.
Le règlement intérieur national de la profession d’avocat dans sa version consolidée prévoit que la jurisprudence et la doctrine sont versées aux débats si elles ne sont pas publiées et que si elles sont publiées, les références complètes sont communiquées aux autres avocats.
Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de déclarer irrecevables les éléments de jurisprudence cités pour étayer l’argumentation développée par la société HEY MAMA et Monsieur [G] devant la Cour.
Il convient de rappeler que les dispositions de l’article R.411-33 du code de la <
propriété
>
<
intellectuelle
>
prévoient que : ‘Les conclusions sont notifiées et les pièces communiquées simultanément par l’avocat de chacune des parties à celui de l’autre partie ; en cas de pluralité de demandeurs ou de défendeurs, elles doivent l’être à tous les avocats constitués. Elles sont adressées au directeur général de l’Institut national de la <
propriété
>
industrielle par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.
Copie des conclusions est remise au greffe avec la justification de leur notification.’
Aucune disposition n’interdit de déposer de nouvelles pièces, devant la Cour, seules les demandes nouvelles étant irrecevables.
Monsieur le Directeur de l’INPI sera débouté de sa demande tendant à voir écarter les pièces n° 7 à 9 produites par les parties requérantes.
– Sur le fond :
En vertu des dispositions de l’article L. 713-2 du code de la <
propriété
>
<
intellectuelle
 : ‘Est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services :
1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ;
2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque.’
L’imitation d’une marque nécessite la démonstration d’un risque de confusion entre les signes, lequel doit être apprécié globalement à partir de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce, et cette appréciation globale doit en ce qui concerne la similitude visuelle, auditive ou conceptuelle des marques en cause, être fondée sur l’impression d’ensemble produit par celle-ci en tenant compte notamment de leurs éléments distinctifs dominants.
La perception des marques que le consommateur moyen a de la catégorie de produits ou services en cause joue un rôle déterminant dans l’appréciation globale du risque de confusion.
Or, le consommateur moyen perçoit normalement une marque comme un tout et ne se livre pas un examen de ses différents détails. Aux fins de cette appréciation globale, le consommateur moyen de la catégorie de produits concernés est censé être normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.
Afin d’apprécier le degré de similitudes qui existe entre les marques concernées, la juridiction saisie doit déterminer leur degré de similitudes visuelle, auditive et conceptuelle.
La Cour de justice de l’Union Européenne a, dans un arrêt rendu le 8 mai 2014, (Bimbo, aff. C-591/12 ) considéré qu’un élément d’un signe composé ne conserve pas une position distinctive autonome s’il forme avec le ou les autres éléments du signe, pris ensemble, une unité ayant un sens différent par rapport au sens des éléments pris séparément.
Il convient de relever que dans une décision de l’INPI n°17-2238, la SAS SOCIETE MAMA SHELTER c. MAMA GAIA CUISINE JOYEUSE ET RAISONNEE, l’INPI retient que le terme MAMA ne retiendra pas à lui seul l’attention du consommateur dans le signe contesté et que les signes pris dans leur globalité produisent une impression d’ensemble différente.
En l’espèce, la comparaison s’effectue entre une marque verbale ‘MAMA’ et une marque complexe ‘HEY MAMA FOOD & CULTURE’ accompagné d’un graphisme particulier et d’un dessin. Le fait que le signe contesté est constitué de cinq éléments verbaux présentés sur deux lignes distinctes et d’éléments figuratifs alors que la marque antérieure est constituée d’une dénomination unique, ne suffit effectivement pas à écarter tout risque de confusion dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne.
 
Cependant, le terme ‘MAMA’, composant les deux marques litigieuses, n’est pas, à lui seul, un élément distinctif. Effectivement, le terme MAMA, qui est le seul élément qui compose la marque verbale antérieure, est un terme usuel signifiant ‘maman’ comme l’ont relevé les parties. Ainsi, même si la Cour ne se référait pas aux nouvelles pièces versées par la société requérante, il convient de relever que le terme ‘MAMA’ revêt un caractère usuel, manifestement ancrée dans le vocabulaire et dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne. 
Les pièces n°7 à 9 versées aux débats par la partie requérante ne font qu’étayer cette constatation.
Il est rappelé que le caractère distinctif d’une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés et par rapport à la perception qu’en a le public auquel cette marque est destinée. Ainsi, ce qui rend le terme ‘MAMA’ distinctif pour la société la SAS SOCIETE MAMA SHELTER c’est qu’il est associé à des services d’hôtellerie et de restauration qui n’ont rien à voir avec le sens du mot ‘MAMA’. Les termes ‘HEY MAMA’ revêtent, quant à eux, un caractère distinctif pour la marque ‘HEY MAMA FOOD & CULTURE’ en ce que, associés ensemble, ils permettent d’ajouter une connotation interpellative marquante pour le consommateur d’attention moyenne. Le raisonnement de l’INPI tendant à dire que le terme ‘HEY’ est secondaire et ne fait que mettre l’accent sur le terme distinctif ‘MAMA’ ne peut donc pas être retenu.
 
Or, le risque de confusion, dont se prévaut le Directeur de l’INPI dans ses conclusions, s’entendant du risque que le public puisse croire que les produits ou les services en cause proviennent de la même entreprise ou, le cas échéant, d’entreprises liées économiquement, n’est avéré que lorsqu’un élément distinctif identique fait partie des deux marques qui s’opposent.
 
Par ailleurs, d’autres éléments permettent de distinguer les deux marques. Effectivement, la société la SAS SOCIETE MAMA SHELTER a déposé la marque MAMA pour les produits et services suivants : ’43 Hôtels ; motels ; service d’hôtellerie ; services de restauration (alimentation) ; restaurants ; services de cafétérias, de salons de thé, de bars (à l’exception des clubs) ; l’hébergement temporaire ; maisons de vacances ; services de réservation de chambres d’hôtels pour voyageurs ; services de réservation de logements temporaires ; consultation et conseils (sans rapport avec la conduite des affaires) dans les domaines de l’hôtellerie et de la restauration ; location de salles de réunions et de conférences ; mise à disposition de centres d’expositions, de conférences et de réunions ; services de réservation d’hôtels et de restaurants ; mise à disposition d’information en ligne en matière de réservations d’hôtels et de restaurants. Aucun des services précités n’étant rendus dans des lieux de spectacles vivants ou à l’occasion de spectacles vivants’ ; alors que la société HEY MAMA a déposé la marque complexe ‘HEY MAMA FOOD & CULTURE’ pour les produits et services suivants : ’30 pâtisseries ; sauces (condiments) ; sandwiches ; biscuits ; sucreries ; 32 Bières ; eaux minérales (boissons) ; boissons à base de fruits ; jus de fruits ; préparations pour faire des boissons ; limonades ; nectars de fruits ; sodas ; apéritifs sans alcool ; 43 Services de restauration (alimentation) ; services de traiteurs’.
 
Bien que les deux marques aient été déposées pour une activité commune de restauration, les activités relatives à l’hôtellerie rattachées à la marque MAMA revêtent une différence marquante dans l’esprit du consommateur d’attention moyenne avec les activités rattachées à la marque HEY MAMA FOOD & CULTURE, de telle sorte que celui-ci pourra se rattacher à cet élément supplémentaire pour distinguer les deux marques et éviter leur confusion.
 
Enfin, aussi bien le graphisme utilisé pour la marque ‘HEY MAMA FOOD & CULTURE’ que le dessin qui l’accompagne, revêtent un particularisme qui permet au consommateur de renforcer la distinction entre les marques.
 
Ainsi, la marque antérieure et la marque contestée sont différentes et ne présentent aucune similitude visuelle, auditive ou conceptuelle.
 
En conséquence, la société est bien fondée dans son recours contre la décision du Directeur de l’INPI n° OPP 19-4585/GUB notifiée le 26 mars 2020, en ce qu’elle a considéré que le signe complexe contesté HEY MAMA FOOD & CULTURE ne pouvait être adopté comme marque pour désigner des services similaires, sans porter atteinte aux droits antérieurs de la société opposante sur la marque verbale MAMA et reconnue justifiée l’opposition en ce qu’elle porte sur ‘les services de restauration(alimentation), services traiteurs, tous ces services étant exclusivement rendus à l’occasion de spectacles vivants et de concerts de musique’ et décidé que la demande d’enregistrement est partiellement rejetée pour les services précités.
Cette décision sera annulée et la demande d’enregistrement de la marque HEY MAMA FOOD & CULTURE pourra être adoptée à titre de marque pour l’intégralité des produits et services désignés au dépôt.
Succombant, Monsieur le Directeur de l’INPI doit supporter les dépens de la présente procédure.
L’équité ne commande pas l’application de l’article 700 du code de procédure civile au profit des parties requérantes.
 
P A R C E S M O T I F S
 
La Cour,
 
Rejette la demande de Monsieur le Directeur de l’INPI aux fins de voir écarter les pièces n° 7 à 9 produites par les parties requérantes à hauteur de Cour et qui n’ont pas été soumises à l’appréciation du directeur de l’INPI, dans le cadre de la procédure d’opposition et des extraits de jurisprudence cités dans les conclusions de celle-ci :
Déclare bien fondé le recours de M. [N] [V] [G] et la SAS SOCIETE HEY MAMA formé contre la décision du Directeur de l’INPI N° OPP 19-4585/GUB notifiée le 26 mars 2020, en ce qu’elle a considéré que le signe complexe contesté HEY MAMA FOOD & CULTURE ne pouvait être adopté comme marque pour désigner des services similaires, sans porter atteinte aux droits antérieurs de la société opposante sur la marque verbale MAMA et reconnue justifiée l’opposition en ce qu’elle porte sur ‘les services de restauration (alimentation), services traiteurs, tous ces services étant exclusivement rendus à l’occasion de spectacles vivants et de concerts de musique’ et décidé que la demande d’enregistrement est partiellement rejetée pour les services précités,
Annule la décision précitée du directeur de l’INPI,
Dit que la demande d’enregistrement n°19 4 569 615 portant sur le signe complexe HEY MAMA FOOD & CULTURE pourra être adoptée à titre de marque pour l’intégralité des produits et services désignés au dépôt, soit  pour les produits et services suivants : ’30 pâtisseries ; sauces (condiments) ; sandwiches ; biscuits ; sucreries ; 32 Bières ; eaux minérales (boissons) ; boissons à base de fruits ; jus de fruits ; préparations pour faire des boissons ; limonades ; nectars de fruits ; sodas ; apéritifs sans alcool ; 43 Services de restauration (alimentation) ; services de traiteurs’,
Condamne Monsieur le Directeur de l’INPI aux dépens de la présente procédure,
Dit n’y avoir lieu à appliquer l’article 700 du code de procédure civile, au profit de la société HEY MAMA et de Monsieur [G].
Le Greffier : la Présidente :

 

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