Propriété intellectuelle : Mallette de pâtisserie : la banalité exclut la protection

Notez ce point juridique

La commercialisation par un concurrent de mallette d’ustensiles de cuisine en plastique noir thermoformé, de dimensions comparables avec compartimentés pour permettre le rangement d’ustensiles et accessoires de pâtisserie, n’est pas fautive dès lors que la présentation générale de la mallette ne révèle aucune particularité emblématique. Le risque de confusion entre les mallettes de différentes marques est inexistant en raison de la banalisation du concept de la mallette rigide en plastique noir plutôt qu’à un prétendu comportement de suivisme du concurrent.  

Il ne peut être tiré aucun grief à l’encontre du concurrent, du fait que sa mallette contienne le même type d’ustensiles, le produit ayant nécessairement vocation à recevoir, de par sa destination, les ustensiles habituellement utilisés par les pâtissiers.

_______________________________________________________

COUR D’APPEL DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET DU 3 Mars 2021

N° RG 19/01005 – N° Portalis DBVU-V-B7D-FG3I

Arrêt rendu le trois Mars deux mille vingt et un

Sur APPEL d’une décision rendue le 18 avril 2019 par le Tribunal de commerce de CLERMONT-FERRAND (RG n° 17/003538)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président

Madame Virginie THEUIL-DIF, Conseiller

Madame Virginie DUFAYET, Conseiller

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

La société X

SAS à associé unique immatriculée au RCS de Clermont-Ferrand sous le […]

[…]

[…]

Représentants : Me Sophie LACQUIT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et Me Patrick THEROND-LAPEYRE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (plaidant)

APPELANTE

ET :

La société L’ATELIER exerçant sous le nom commercial PROCOUTEAUX – A FLEUR D’ART

SARL immatriculée au RCS de Toulouse sous le […]

[…]

[…]

Représentant : la SELARL LEXAVOUE, avocats au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et la SELARL JUNCA ET ASSOCIES, avocats au barreau de TOULOUSE (plaidant)

INTIMÉE

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, à l’audience publique du 06 Janvier 2021, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame CHALBOS et Madame THEUIL-DIF, magistrats chargés du rapport, en ont rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 03 Mars 2021 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*****

La société X et la société L’ATELIER exerçant sous le nom commercial ‘PRO COUTEAUX’ sont concurrentes dans l’activité du négoce des ustensiles de cuisine, notamment des mallettes destinées aux professionnels et aux élèves des écoles hôtelières.

La société X a mis au point une mallette de rangement en plastique noir thermoformé comportant un gros ressort à spirale assurant le maintien des couteaux, invention qu’elle a fait breveter par dépôt à l’INPI publié le 20 décembre 1991.

La société X a fait constater par huissier le 25 avril 2016 que la SARL L’ATELIER, sous le nom commercial PRO COUTEAUX, commercialisait des mallettes qui présentaient une configuration semblable et le même système de rangement des couteaux par ressort à spirale, à des prix voisins de ses propres mallettes et auprès des mêmes clientèles.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 mai 2016, la société X a mis en demeure la société L’ATELIER de ‘stopper, sans délai, la diffusion de ces produits, présentation interne de la mallette et ressort de rangement, ce qui relève de la concurrence déloyale, dédommager X du préjudice concurrentiel subi’.

Par lettre officielle de son conseil du 30 juin 2016, la société L’ATELIER a opposé une fin de non-recevoir.

Par assignation du 10 mars 2017, la société X a attrait la société L’ATELIER devant le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand pour que celui-ci :

— dise et juge que la société L’ATELIER a commis des actes de concurrence déloyale par parasitisme, recherche de confusion, recherche d’économies, critiques implicites et déloyale de la production d’X, au détriment de celle-ci,

— condamne la société L’ATELIER à payer à la société X la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts et à stopper sous astreinte la diffusion de l’emballage litigieux, et ordonne la publication du jugement à intervenir.

La société L’ATELIER a formulé une demande reconventionnelle visant à faire juger qu’X a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société L’ATELIER en portant atteinte à son nom commercial et nom de domaine ‘PRO COUTEAUX’, à faire condamner la société X à dommages et intérêts, à faire ordonner la cessation de l’usage du nom de domaine www.procouteaux.fr sous astreinte et à faire ordonner la publication du jugement à intervenir.

Par jugement en date du 18 avril 2019, le tribunal de commerce de Clermont-Ferrand a :

— débouté la société X de l’ensemble de ses demandes,

— débouté la SARL L’ATELIER de ses demandes reconventionnelles,

— dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société X aux dépens de l’instance.

Le tribunal a retenu à cet effet :

— que les deux mallettes ‘X’ et ‘PRO COUTEAUX’ diffèrent très visiblement lorsqu’elles sont fermées tant par les formats et épaisseur que par le mécanisme de fermeture,

— que lorsqu’elles sont ouvertes, les contenus (couteaux, balance électronique, ustensiles divers…) diffèrent sensiblement, à l’exception des rouleaux à pâtisserie et des gros ressorts à spirale qui paraissent identiques au premier regard, les plateaux et dispositions des rangements différant au point que la confusion entre les deux mallettes paraît impossible, même aux yeux du public non averti,

— que les parties sont d’accord sur le fait que le brevet qui protégeait le ressort à spirale pour la rangement et maintien des couteaux est échu puisqu’il avait fait l’objet d’un dépôt à l’INPI par son inventeur X en décembre 1991,

— qu’après vingt ans de protection légale, l’invention est entrée dans le domaine public,

— que c’est très licitement qu’en 2016 la société L’ATELIER avait adopté, pour ses propres mallettes, le système de ressort à spirale pour le rangement des couteaux inventé par la société X,

— que ne sont pas fondées les affirmations de la société X suivant lesquelles la société L’ATELIER aurait commis à son égard des actes de concurrence déloyale par parasitisme, recherche de confusion et d’économies et critiques implicites,

— que le fait fautif de la société L’ATELIER PRO COUTEAUX n’est pas établi, que la société X n’apporte aucune justification du préjudice qu’elle aurait subi et encore moins de justificatif du chiffrage à 50 000 euros des dommages-intérêts qu’elle réclame,

— qu’en déposant le nom de domaine www.procouteaux.fr, la société X n’a pas commis de faute par atteinte au nom commercial de la société L’ATELIER puisque, par décision devenue définitive du 19 août 2014, le collège de l’AFNIC a débouté la société L’ATELIER de sa plainte en ‘cybersquatting’ au motif que »les pièces fournies par le requérant ne permettent pas de conclure que le nom de domaine www.procouteaux.fr était susceptible de porter atteinte à un droit garanti par la loi’,

— que la société L’ATELIER ne fournit à son tour aucune explication ou justification de préjudice dont elle demande réparation à hauteur de 50 000 euros.

Par déclaration en date du 20 mai 2019, la société X a interjeté appel du jugement du 18 avril 2019 du tribunal de commerce de Clermont-Ferrand en ce qu’il a :

— débouté la société X de ses demandes de condamnation de la SARL L’ATELIER à titre de dommages et intérêts pour parasitisme, actes de concurrence déloyale, recherche de confusion et d’économies, critiques implicites et déloyales de la production d’X, à stopper sous astreinte de 500 euros par constatation de la commercialisation ou présentation de la mallette litigieuse et de l’argumentaire publicitaire litigieux et sans délai la diffusion de l’emballage litigieux, l’émission de propos et d’argumentaires déloyaux sur la détention de la technique de rangement par ressort, tout en dénigrant la qualité et la technologie de rangement de son concurrent, d’ordonner la publication de la décision à intervenir,

— rejeté sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens et en ce qu’elle a été condamnée aux dépens et plus généralement toutes dispositions faisant grief à l’appelante.

Par conclusions déposées et notifiées le 25 novembre 2020, la société X demande à la cour, vu l’article 1240 du code civil, de :

— infirmer le jugement dont appel, en ce qu’il a débouté la société X de toutes ses demandes découlant des actes de concurrence déloyale reprochés à la société L’ATELIER, et notamment :

— Le fait d’avoir perpétré des actes de concurrence déloyale,

— En se plaçant globalement dans le sillage d’X, en ce qui concerne la configuration et la présentation générale de la mallette de rangement, ainsi que la sélection des outils constituant son contenu,

— D’avoir utilisé pour l’essentiel la même présentation – caractéristique de la production et de l’image d’X – touchant à l’utilisation d’un ressort à spirale, fût-il gainé, protégé ou non, pour ranger les couteaux à l’intérieur de la mallette,

— De toutes ses demandes en dommages et intérêts, estimant ces demandes non justifiées, et non fondées, alors même qu’en matière de concurrence, celui qui prouve la faute, prouve le dommage,

— La démonstration d’une perte au franc le franc par une société plaignante à l’encontre de la société concurrente ne pouvant que s’avérer la plupart du temps parfaitement vaine,

— Pourra être retenue en revanche l’appropriation et le détournement des investissements et de l’image de la société concurrencée, en l’occurrence, X,

— La société concurrente L’ATELIER s’étant ainsi donnée des moyens de concurrence déloyaux plus économiques et ambigus,

— Car portant atteinte à l’image d’X, allant même jusqu’à laisser penser que c’est la société L’ATELIER qui serait innovante, en apposant une couche de protection sur le ressort caractéristique de la production d’X et alors même qu’X avait elle-même, par le passé procédé à l’apposition d’une protection sur le ressort, ayant déjà fait ainsi évoluer son propre procédé de rangement,

— infirmer le jugement dont appel dans ce qu’il a dès lors, et corrélativement débouté X de sa demande de publication de la décision à intervenir,

— ordonner ladite publication,

— dire et juger que :

1/- en diffusant une mallette de couteaux et d’accessoires de cuisine reproduisant le même mode de présentation des produits à l’intérieur de la mallette, en recourant à un dispositif de rangement – coque plastique – ayant rigoureusement le même aspect, et la même configuration, et comprenant le même dispositif de rangement des accessoires ;

2/- en adjoignant au bac de rangement et pour ce qui concerne les couteaux, un ressort maintenu entre deux parois de la mallette permettant de recevoir les lames de couteaux,

— en revendiquant et en mettant en exergue ce type de rangement, en revendiquant sur celui-ci un prétendu avantage technique et technologique, en déniant implicitement à son concurrent la détention d’un procédé de rangement moderne et protecteur, et donc, en le critiquant déloyalement,

La société L’ATELIER a commis et commet des actes de concurrence déloyale par parasitisme, recherche de confusion, recherche d’économies notamment, critiques implicites et déloyales de la production d’X, au détriment de la société concurrente X.

— En conséquence, condamner la société L’ATELIER :

— à payer à la société X la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts,

— à stopper, sous astreinte de 500 euros par constatation de la commercialisation ou présentation de la mallette litigieuse et de l’argumentaire publicitaire litigieux et sans délai,

— la diffusion de l’emballage litigieux, à savoir :

La coque plastique noire dans la configuration adoptée par la société L’ATELIER, nom commercial PRO COUTEAUX,

L’usage, comme mode de rangement, des lames de couteaux du ressort à spirale utilisé par la société requérante et caractéristique de son mode de rangement, ayant fait antérieurement l’objet d’un brevet régulièrement déposé auprès de l’INPI en date du 20 décembre 1991,

— à cesser l’émission de propos et d’argumentaires déloyaux sur la détention de la technique de rangement par ressort, tout en dénigrant la qualité et la technologie de rangement sur ce plan de son concurrent utilisateur historique de ce procédé,

— ordonner la publication à intervenir comme il est dit plus haut aux frais de la société PRO COUTEAUX et dans la limite de 5 000 euros par insertion,

— condamner la société L’ATELIER à payer à X la somme de 7 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

— débouter la SARL L’ATELIER en toutes demandes incidentes et reconventionnelles en principal intérêts et frais,

— dire notamment que la société X n’a commis aucun acte de concurrence déloyale ou d’appropriation illicite des noms domaine de la société L’ATELIER,

— débouter la société L’ATELIER de ses demandes de dommages-intérêts et de restitution de noms de domaine,

— débouter la société L’ATELIER de ses demandes en dommages-intérêts pour prétendu

dénigrement,

— confirmer le jugement dont appel en ce qui concerne le débouté des demandes reconventionnelles émises par la société SARL L’ATELIER,

— condamner la société L’ATELIER aux entiers dépens.

Par conclusions déposées et notifiées le 25 novembre 2020, la société L’ATELIER demande à la cour, vu les articles 1240 et suivants du code civil et les articles 16, 132, 699 et 700 du code de procédure civile, de :

— rejeter toutes conclusions contraires comme infondées et injustifiées,

— écarter des débats les pièces, invoquées au soutien des prétentions de la société X, qui n’ont pas été communiquées simultanément à la notification de ses conclusions,

— écarter des débats en particulier la pièce 12 au soutien des prétentions de la société X comme étant illisible,

— constater que la société L’ATELIER n’a pas commis d’actes de concurrence déloyale et parasitaire,

En conséquence,

— confirmer le jugement du tribunal de Clermont-Ferrand, en ce qu’il a débouté les demandes de la société X au titre de la concurrence déloyale et parasitaire alléguée,

— constater que la société X a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société L’ATELIER en portant atteinte à son nom commercial et nom de domaine ‘PRO COUTEAUX’,

En conséquence,

— infirmer le jugement du tribunal de Clermont-Ferrand, en ce qu’il a débouté les demandes de la société L’ATELIER au titre de la concurrence déloyale alléguée et par conséquent :

— condamner en conséquence la société X au paiement de la somme de 50 000 euros au profit de la société L’ATELIER en réparation de son préjudice,

— ordonner sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, la cessation immédiate de l’usage du nom de domaine ‘www.PRO COUTEAUX.fr’ et d’effectuer les formalités de suppression auprès de l’AFNIC,

— ordonner la publication par extrait du jugement à intervenir dans dix journaux au choix de la société L’ATELIER et aux frais de la société X, à concurrence de 5 000 euros HT par insertion,

— condamner la société X au paiement de la somme de 40 000 euros au profit de la société L’ATELIER au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— la condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître GUTTON, en application de l’article 699 du code de procédure civile.

La procédure a été clôturée le 17 décembre 2020.

MOTIFS :

Sur l’incident de procédure :

Il ressort de la consultation du dossier numérique de l’affaire que la société X a communiqué ses pièces 10 à 17 le 20 août 2019, qu’elle a effectué à la demande de l’intimée une nouvelle communication de la pièce n°12, qu’elle a procédé à une nouvelle communication des pièces 1 à 17 le 28 octobre 2020 et a communiqué une pièce nouvelle n°18 le 19 novembre 2011.

La société L’ATELIER qui a conclu en dernier lieu le 25 novembre 2020 a pu disposer d’un délai suffisant pour examiner l’ensemble des pièces communiquées par l’appelante.

Le conseil de la société X s’est expliqué le 21 novembre 2019 sur la qualité médiocre de la copie de la pièce n°12, s’agissant d’une feuille de fax thermique de plus de 20 ans.

La cour considère que la pièce est néanmoins lisible.

La société L’ATELIER sera déboutée de sa demande tendant à faire écarter des débats les pièces, invoquées au soutien des prétentions de la société X, qui n’ont pas été communiquées simultanément à la notification de ses conclusions et en particulier la pièce 12 comme étant illisible.

Sur la demande principale de la société X :

Sur la présentation générale de la mallette :

La société X fonde son argumentation en fait sur la comparaison des mallettes ‘pâtisserie’ commercialisées par chacune des deux parties.

Il ressort des extraits de sites internet produits par la société L’ATELIER que différentes sociétés concurrentes comme Y, Z, A, MATFER, AU NAIN, […], commercialisent des mallette d’ustensiles de cuisine en plastique noir thermoformé, de dimensions comparables (48 centimètres de long environ), équipées pour certaines de plateaux superposables (Y, Z, A,, […]), compartimentés pour permettre le rangement d’ustensiles et accessoires de pâtisserie.

Contrairement à ce que soutient la société X, la présentation générale de sa mallette ne révèle aucune particularité emblématique de sa production et le risque éventuel de confusion entre les mallettes de différentes marques tient à la banalisation du concept de la mallette rigide en plastique noir plutôt qu’à un prétendu comportement de suivisme de la société L’ATELIER.

Il ne peut être tiré aucun grief à l’encontre de la société L’ATELIER, du fait que sa mallette contienne le même type d’ustensiles que ceux contenus dans la mallette X, le produit ayant nécessairement vocation à recevoir, de par sa destination, les ustensiles habituellement utilisés par les pâtissiers.

Ainsi que l’ont relevé les premiers juges, le procès-verbal de constat dressé par huissier de justice le 9 mai 2018 à la requête de la société L’ATELIER fait apparaître que la mallette pâtisserie de cette société se différencie de celle de la société X par sa forme (celle d’X présente un côté arrondi), son épaisseur (9,5 cm contre 16 cm), son mode de fermeture, la structure des plateaux intérieurs et compartiments.

Les ustensiles contenus dans la mallette diffèrent d’une marque à l’autre par leurs forme, couleur, matières.

La société L’ATELIER établit par ailleurs, par la production de courriers émanant de quatre établissements de formation, qu’elle commercialise ses produits dans une gamme de prix supérieure à celle pratiquée par la société X, ce qui conduit certains clients à se tourner vers des fournisseurs pratiquant des prix moins élevés.

Sur l’utilisation du ressort de rangement :

La société X a équipé ses mallettes dès l’origine d’un dispositif de rangement des couteaux constitué d’un ressort à spirale maintenu entre deux parois de la mallette, invention qu’elle a fait protéger par un brevet déposé à l’INPI le 19 juin 1990.

Elle a fait constater en 2016 que la société L’ATELIER a adopté pour ses propres mallettes le système de ressort à spirales pour le rangement des couteaux.

Il n’est pas contesté que la protection tirée du brevet d’invention a pris fin en 2010, date à laquelle l’invention est tombée dans le domaine public.

Dès lors que la contrefaçon n’est plus sanctionnable, la seule exploitation, par la société L’ATELIER, d’un dispositif analogue à celui inventé par la société X est insuffisante à caractériser un acte de concurrence déloyale par parasitisme, confusion ou imitation.

Il ressort de l’examen de la plaquette de présentation des produits PRO COUTEAUX éditée le 15 novembre 2016 par la société L’ATELIER que cette société ne cherche pas spécialement à mettre en valeur l’utilisation du dispositif litigieux, peu visible sur les photographies puisque de plus petite dimension que celui utilisé par X et de couleur noire sur fond noir, simplement mentionné dans la liste des composants et rebaptisé ‘fix up’ sans utilisation du terme ‘ressort’.

La plaquette met l’accent sur la qualité des ustensiles garnissant les mallettes et s’agissant des mallettes vides, sur le système de fermeture, la solidité, le format compact.

La société L’ATELIER justifie par ailleurs de l’utilisation du ressort de rangement par un autre concurrent, la société […], ainsi qu’il ressort de l’extrait du catalogue de cette société, présentant une mallette plastique équipée de deux plateaux superposables avec une photographie sur laquelle on distingue nettement un ressort gainé blanc permettant le rangement des couteaux.

La société X fait état d’une capture d’écran du site internet de la société L’ATELIER (PRO COUTEAUX) réalisée le 25 avril 2016 par huissier de justice sur la page présentant la mallette de pâtisserie ‘Modulex’ 36 pièces.

Cette page comporte le message suivant : ‘Astucieux. Grâce au ‘Fix Up’ innovant recouvert de rilsan, le fil du couteau est mieux protégé que sur un ressort traditionnel.’

Cette communication ponctuelle permet certes d’attirer l’attention de l’internaute sur la présence du dispositif inventé par la société X mais souligne la déclinaison spécifique qu’en fait la société L’ATELIER (PRO COUTEAUX) par l’utilisation d’un revêtement qualifié d’innovant.

Contrairement à ce que soutient la société X la formule ‘mieux protégé que sur un ressort traditionnel’ ne comporte aucun propos péjoratif visant une entreprise identifiable et ne constitue pas un dénigrement implicite à son égard.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que la façon dont la société L’ATELIER utilise le dispositif inventé par la société X et communique sur ce procédé ne permet pas de caractériser un comportement constitutif de concurrence déloyale.

Le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

Sur la demande reconventionnelle de la société L’ATELIER :

La société L’ATELIER a pour nom commercial PRO COUTEAUX – À FLEUR D’ART et est titulaire du nom de domaine www.procouteaux.com qu’elle utilise pour son site internet depuis 2011.

Elle reproche à la société X d’avoir réservé et exploiter depuis 2014 le nom de domaine www.procouteaux.fr, cette adresse renvoyant au site internet d’X, afin de créer une confusion et de porter atteinte à ses droits exclusifs sur son nom commercial et son nom de domaine.

La capture d’écran produite par la société L’ATELIER en pièce n°20 confirme que l’inscription du nom complet www.procouteaux.fr dans la barre d’adresse dirige sur le site internet d’X.

Les parties versent aux débats une décision rendue le 19 août 2014 par l’AFNIC (association française pour le nommage internet en coopération) dont il résulte que la société L’ATELIER a saisi cette instance le 23 juin 2014 à la suite de l’acquisition du nom de domaine www.procouteaux.fr par la société X le 18 avril 2014, pour solliciter la transmission à son profit de ce nom de domaine, exposant qu’elle avait acquis lors de sa création les noms de domaine de www.procouteaux.com et www.procouteaux.fr et qu’à la suite d’un changement de prestataire courant 2013, le transfert du nom www.procouteaux.fr avait été malencontreusement omis, ce qui avait permis à la société X de réserver ce nom de domaine pour détourner à son profit le trafic du site internet de la société L’ATELIER.

L’AFNIC a rejeté la demande de transmission de la société L’ATELIER au motif que cette société ne justifiait pas de ses droits sur le nom de domaine www.procouteaux.com, les factures d’enregistrement présentées n’étant pas à son nom.

Cette décision n’a pas autorité de chose jugée au fond sur la demande présentée par la société L’ATELIER dans le cadre de la présente instance, qui ne tend pas aux mêmes fins.

La société X fait cependant valoir à juste titre que la société L’ATELIER ne peut valablement se prévaloir de la protection de son nom de domaine www.procouteaux.com et du nom commercial PRO COUTEAUX s’agissant d’un nom générique et descriptif de l’activité de la société.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé, par motifs substitués, en ce qu’il a débouté la société L’ATELIER de sa demande reconventionnelle.

Chacune des parties succombant partiellement sur ses prétentions conservera la charge des dépens et frais irrépétibles d’appel par elle exposés.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Déboute la société L’ATELIER de sa demande tendant à faire écarter des débats, les pièces invoquées au soutien des prétentions de la société X, qui n’ont pas été communiquées simultanément à la notification de ses conclusions et en particulier la pièce 12 comme étant illisible,

Confirme, par motifs en partie substitués, le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Dit que chacune des parties conservera la charge des dépens et frais irrépétibles d’appel par elle exposés.

Le Greffier, Le Président,

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