En l’absence de toute remontrance, critique ou sanction disciplinaire de la salariée de la part de sa supérieure hiérarchique, son licenciement quasiment concomitant à l’annonce de son état de grosses expose l’employeur à la nullité du licenciement prononcé (60 000 euros de préjudice pour la salariée).
Licenciement instantané
La salariée avait informé d’abord verbalement puis par courriel son employeur de son état de grossesse. Le même jour elle a été évincée de l’entreprise après avoir été contrainte de restituer son ordinateur. Une collègue de travail avait attesté « J’ai entendu le ton monter et j’ai notamment entendu xxx dire à yyy « tu vas sortir de cette Fondation maintenant. Puis xxx a escorté yyy jusqu’à la porte de sortie qu’elle a claquée derrière elle en disant «bonne grossesse et bonne vie».
Discrimination en raison d’un état de grossesse
Pour rappel, aux termes de l’article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie par l’article 1er de la loi du 27 mai 2008, au sens de l’article L.3221-3, en raison notamment de son sexe, de sa situation de famille ou de son état de grossesse.
En vertu de l’article L. 1134-1, lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance des dispositions qui précèdent, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
En application des dispositions qui précèdent, lorsque le salarié présente plusieurs éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
Effets de la nullité du licenciement
En considération de ces éléments, la juridiction a retenu que l’employeur échouait à rapporter la preuve que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. La proximité entre l’annonce de la grossesse et le licenciement a conduit les juges à considérer que cette mesure était en lien avec l’état de grossesse de la salariée. Il s’ensuit que le licenciement était nul.
La nullité du licenciement fondée sur l’article L.1132-1 du code du travail ouvre aussi droit au paiement des salaires qui auraient été perçus pendant la période couverte par la nullité, c’est à dire entre la date du licenciement et la fin de la période de protection soit par application de l’article L.1225-4-1 du code du travail, dans sa version applicable au litige, pendant les 10 semaines après la naissance de son enfant (et non après la fin du congé de maternité). Faute de connaître la date exacte de l’accouchement les juges retiennent la date présumée de celui-ci, sur la base du certificat de grossesse établi par la salariée.
Indemnité pour préjudice moral
Les conditions de la rupture du contrat de travail, et la discrimination dont la salariée a fait l’objet, ayant eu des répercussions sur son état de santé comme en attestaient les arrêts de travail produit, lui ont causé un préjudice moral distinct, dont elle était en droit de réclamer réparation et (20.000 euros). Télécharger la décision