Nouvelle entité juridique : quel sort pour les salariés ?

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Nouvelle entité juridique : quel sort pour les salariés ?

Le transfert des contrats de travail vers une nouvelle entité juridique (cession, fusion ….) s’opère de plein droit dès lors que les conditions d’application du transfert de l’entreprise sont réunies.

L’article L.1224-1 du code du travail

L’article L.1224-1 du code du travail prévoit que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise.

Directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001

Cet article interprété à la lumière de la Directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001, s’applique en cas de transfert d’une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l’activité est poursuivie ou reprise.

La notion d’entité économique autonome

Constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d’éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre. Le transfert d’une telle entité ne s’opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l’exploitation de l’entité sont repris, directement ou indirectement, par l’exploitant.

Il n’y a pas lieu d’appliquer le principe du transfert des salariés lorsque l’entité économique a perdu son identité du fait de sa disparition pure et simple ou lorsque l’activité s’est poursuivie dans des conditions de fonctionnement très différentes de celles précédemment observées, de sorte qu’en réalité, ce n’est pas la même entreprise qui se continue.

L’exception : l’accord de volonté

Le transfert du contrat de travail peut néanmoins résulter d’un accord de volontés.

Toutefois, si les parties peuvent convenir de se soumettre volontairement aux dispositions de l’article L.1224-1 du code du travail, encore faut-il pour revendiquer le bénéfice du transfert du contrat de travail, que l’accord de la société cessionnaire soit non équivoque, ce qui nécessite que le repreneur ait entendu reprendre le salarié aux conditions résultant de son contrat de travail. De la même manière, cette application volontaire nécessite l’accord exprès du salarié.

Questions / Réponses juridiques

Quel est le contexte de l’affaire entre Mme [I] et France Télévisions ?

L’affaire concerne Mme [I], qui a été employée par France Télévisions de 2001 à 2013, d’abord sous des contrats à durée déterminée, puis sous un contrat à durée indéterminée en tant qu’assistante de rédaction.

En 2017, dans le cadre d’une réorganisation, elle a été informée qu’elle ne serait pas affectée à un poste de chef d’édition, malgré ses nombreuses candidatures et son expérience.

Elle a alors saisi le conseil de prud’hommes, arguant qu’elle avait exercé des fonctions de chef d’édition et demandant une reclassification ainsi que des dommages et intérêts pour préjudice moral.

Quelles étaient les principales revendications de Mme [I] ?

Mme [I] a formulé plusieurs revendications, notamment :

1. Reclassification : Elle a demandé à être reconnue comme chef d’édition, affirmant qu’elle avait exercé des fonctions correspondant à cette qualification depuis plusieurs années.

2. Dommages et intérêts : Elle a réclamé 10 000 euros pour préjudice moral et 20 000 euros pour inexécution déloyale du contrat de travail, en raison de la suppression de ses attributions.

3. Affectation à un poste adéquat : Elle a demandé à être affectée à un poste de chef d’édition, avec une astreinte de 120 euros par jour en cas de non-respect.

4. Frais de justice : Elle a également demandé le remboursement de ses frais de justice au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Comment la société France Télévisions a-t-elle réagi aux demandes de Mme [I] ?

France Télévisions a contesté les revendications de Mme [I] en soutenant qu’elle avait été engagée en tant qu’assistante de rédaction et qu’elle avait accepté ce poste en toute connaissance de cause.

L’entreprise a affirmé que ses fonctions correspondaient à cette qualification et qu’elle avait été régulièrement informée de ses responsabilités.

De plus, France Télévisions a souligné que les candidatures de Mme [I] à des postes de responsable d’édition n’avaient pas été retenues, ce qui démontrait qu’elle ne possédait pas les compétences nécessaires pour ces fonctions.

Quelle a été la décision de la cour d’appel de Paris concernant les demandes de Mme [I] ?

La cour d’appel de Paris a confirmé plusieurs aspects du jugement initial, notamment le fait que Mme [I] n’avait pas exercé les fonctions de chef d’édition comme elle le revendiquait.

Cependant, elle a reconnu que le retrait de certaines attributions avait causé un préjudice moral à Mme [I], en raison de son implication et des formations suivies.

En conséquence, la cour a condamné France Télévisions à verser 10 000 euros à Mme [I] pour préjudice moral et 3 000 euros pour les frais de justice, tout en déboutant Mme [I] de ses autres demandes.

Quels éléments ont été pris en compte pour évaluer le préjudice moral de Mme [I] ?

Pour évaluer le préjudice moral de Mme [I], la cour a pris en compte plusieurs éléments :

1. Historique de l’emploi : Le travail accompli par Mme [I] au sein de France Télévisions pendant plusieurs années, ainsi que son implication dans ses fonctions.

2. Formations suivies : Les formations qu’elle avait suivies en rapport avec ses attributions, renforçant son engagement professionnel.

3. Documents médicaux : Des avis médicaux attestant d’une détresse psychologique, notamment un rapport du médecin des urgences et des lettres du médecin du travail.

4. Changement brutal de poste : Le fait que Mme [I] ait été informée de manière brutale qu’elle ne serait pas affectée à un poste en rapport avec l’édition, ce qui a été perçu comme une rétrogradation.

Ces éléments ont conduit la cour à conclure qu’un préjudice moral avait été effectivement subi par Mme [I].


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