En matière de déclaration à Pôle emploi, la prescription décennale est applicable. Pôle emploi a été jugé recevable à solliciter le remboursement, par un musicien, de près de 55 000 euros en remboursement des allocations d’ARE indues versées sur une période de près de 4 ans.
Annexe X au règlement de l’indemnisation du chômage
L’annexe X au règlement de l’indemnisation du chômage, pose le principe que, pour être indemnisés par Pôle Emploi, les salariés privés d’emploi doivent justifier d’une période d’affiliation d’au moins 507 heures de travail au cours des 319 jours qui précèdent la fin du contrat de travail.
Lorsque l’activité des artistes est déclarée sous la forme de cachets, chaque cachet est converti en heures sur la base de 1 cachet égale 8 heures ou 12 heures, selon qu’il s’agit de cachets groupés ou isolés. Le nombre maximum de cachets pris en compte pour la recherche de la durée d’affiliation requise est de 28 par mois. Constituent des cachets groupés, ceux qui couvrent une période d’emploi d’au moins 5 jours continus chez le même employeur. Pour la justification des 507 heures, seul le temps de travail effectif est retenu.
Faute ou négligence du musicien
Pour parvenir sur la période considérée à un montant de 536 heures travaillées, un musicien a pris en compte 92 heures effectuées pour le compte de son association « La Sinfonie Bohémienne ». Or, les heures effectuées pour le compte de cette association ne pouvaient être retenues compte tenu de l’activité bénévole de directeur artistique que l’intéressé exerçait en son sein depuis quasiment l’origine. Il en résulte que sur la période considérée le musicien n’était en mesure de justifier que d’une période d’affiliation de 444 heures, inférieure à 507 heures, de sorte qu’aucun droit ne lui était ouvert à ce titre.
Il a été jugé que le musicien avait exercé continûment l’activité bénévole de directeur ou responsable artistique au sein de l’association et donc, pendant et après chaque contrat de travail conclu avec cette dernière au titre des prestations musicales exécutées personnellement par l’intéressé dans le cadre des concerts de l’ensemble instrumental du même nom. Si cette activité bénévole permanente chez l’ancien employeur était bien distincte de l’activité musicale proprement dite au titre de laquelle l’intéressé était salarié, il n’en reste pas moins qu’elle contrevient aux dispositions légales et que par voie de conséquence les heures de travail salarié effectuées au sein de l’association ne pouvaient plus être prises en compte dans le cadre de l’examen de ses droits à l’ARE.
Dans le questionnaire rempli à l’intention de Pôle emploi, le musicien n’avait pas renseigné la case «’membre de l’association’» ni fait état de sa qualité de directeur artistique de l’association.
Il a ainsi établi une fausse déclaration en se présentant exclusivement comme salarié de l’association.
Prescription décennale
L’article L 5422-5 du code du travail pose que l’action en remboursement de l’allocation d’assurance indûment versée se prescrit par trois ans. En cas de fraude ou de fausse déclaration, elle se prescrit par dix ans. Ces délais courent à compter du jour du versement de ces sommes.
Il s’ensuit que c’est la prescription décennale qui est applicable et que Pôle emploi est recevable et bien fondé à solliciter le paiement de la somme totale de près de 55 000 euros en remboursement des allocations indues versées sur une période de près de 4 ans.
Trop-perçu et libertés fondamentales
C’est en vain que le musicien s’est appuyé sur l’arrêt rendu le 26 avril 2018 par la Cour européenne des droits de l’homme (Cakarevic c. Croatie n° 48921/13) pour soutenir que son obligation de rembourser le trop-perçu constituerait en tout état de cause une charge excessive et disproportionnée en violation de l’article 1 du Protocole n° 1 à la Convention européenne des droits de l’homme. En effet, contrairement à la situation soumise à la Cour européenne des droits de l’homme, d’une part le musicien qui poursuit ses activités de création et d’interprétation musicales n’est pas dépourvu de toutes ressources et d’autre part Pôle emploi n’a pas commis d’erreur dans le cadre des examens successifs des droits du musicien à l’ARE, l’indu étant dû au fait que celui-ci n’a pas déclaré à Pôle emploi son activité bénévole de directeur artistique exercée au sein de l’association parallèlement à ses activités salariées d’artiste musicien. Télécharger la décision