Rejet du pourvoi et condamnation de la société Unicarriers France
La Cour de cassation a rejeté le pourvoi et a condamné la société Unicarriers France aux dépens. De plus, la société Unicarriers France a été condamnée à payer à la société Corbas Manutention la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Moyen annexé à la décision
Le moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Unicarriers France contestait la décision ordonnant une expertise confiée à M. Q… H… pour évaluer le préjudice éventuellement subi par la société Corbas Manutention. La Cour a examiné les arguments des parties et a rendu sa décision en se basant sur les articles du code de procédure civile et du code civil.
Contestation de la mesure d’instruction
La société Unicarriers France contestait la mesure d’expertise ordonnée par la Cour, arguant que cela portait atteinte à ses intérêts légitimes et au secret des affaires. Cependant, la Cour a jugé que la mesure était justifiée pour établir la preuve du préjudice subi par la société Corbas Manutention, sans préjuger de la responsabilité éventuelle des parties.
Base légale de la décision contestée
La Cour de cassation a examiné si l’atteinte au secret des affaires de la société Unicarriers France était proportionnée au droit à la preuve de la société Corbas Manutention. Après avoir analysé les arguments des parties, la Cour a confirmé sa décision en se basant sur l’article 145 du code de procédure civile.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COMM.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 25 mars 2020
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10111 F
Pourvoi n° P 18-23.107
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 25 MARS 2020
La société Unicarriers France, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est […] , a formé le pourvoi n° P 18-23.107 contre l’arrêt rendu le 22 mai 2018 par la cour d’appel de Lyon (8e chambre), dans le litige l’opposant à la société Corbas manutention, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est […] , défenderesse à la cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations écrites de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Unicarriers France, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Corbas manutention, et l’avis de Mme Henry, avocat général, après débats en l’audience publique du 4 février 2020 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Henry, avocat général, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.
1. Le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.
EN CONSÉQUENCE, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Unicarriers France aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Unicarriers France et la condamne à payer à la société Corbas manutention la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq mars deux mille vingt.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Unicarriers France
Il est fait grief à la décision attaquée, infirmative de ce chef, d’avoir ordonné une expertise confiée à M. Q… H…, avec la mission de : 1) après avoir convoqué les parties et leurs conseils et s’être fait communiquer les contrats cédés visés en annexe 1 du contrat du 16 décembre 2013 portant sur la cession d’éléments de fonds de commerce intervenue entre la société Unicarriers France et la société Corbas Manutention et tous documents, sur tous supports, relatifs aux relations avec les clients cédés à la société Corbas Manutention, 2) rechercher et identifier parmi les clients cédés ceux qui, après la date du 16 décembre 2013, ont été démarchés par la société Unicarriers ou avec lesquels elle a poursuivi ou a repris des relations contractuelles, 3) préciser, le cas échéant, la nature et les conditions contractuelles des offres faites ou des relations poursuivies ou reprises, et de tout élément permettant d’évaluer le préjudice éventuellement subi par la société Corbas Manutention, 4) plus généralement, donner toutes informations utiles de nature à apporter éclaircissement sur les questions à examiner ;
aux motifs que « 2/ Sur les mesures conservatoires et le demande d’expertise : qu’il résulte des articles 872 et 873 du code de procédure civile que devant le tribunal de commerce, le juge des référés peut, dans tous les cas d’urgence, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend et que même en présence d’une contestation sérieuse, il peut prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu’en application des articles 1382 et 1383 du code civil, l’auteur d’actes de concurrence déloyale engage sa responsabilité et s’il apparaît que les actes incriminés sont manifestement illicites ou qu’ils exposent la personne visée à un dommage imminent, le juge des référés est habilité à prendre les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent ; que par ailleurs, l’existence d’une contestation sérieuse ne constitue pas en elle-même un obstacle à la mise en oeuvre de l’article 145 du code de procédure civile dont l’application n’implique aucun préjugé sur la responsabilité éventuelle des personnes appelées à la procédure ni sur les chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé. Il appartient cependant au juge de constater qu’un tel procès est possible, qu’il a un objet et un fondement suffisamment déterminé ; qu’en l’espèce si la société UNICARRIERS soutient que la société CORBAS MANUTENTION ne démontre pas l’existence d’un détournement systématique et intentionnel de la clientèle attachée à la marque ATLET par la société UNICARRIERS, il convient de relever qu’il résulte des échanges entre les parties que la société UNICARRIERS reconnaît elle-même que certains des chariots cédés n’ont pas été transmis à la société CORBAS MANUTENTION ; qu’aux termes du courrier électronique du 13 novembre 2014, monsieur F… L., directeur de développement de la société UNICARRIERS, indiquait que deux chariots étaient passés à travers « les mailles du filet » du parc cédé et évoquait la question de la réparation du préjudice financier de la société CORBAS ; qu’alors que les chariots litigieux ont été commandés après le contrat de cession du fonds de commerce transférant la propriété des chariots à la société CORBAS MANUTENTION, la société CORBAS MANUTENTION produit en outre des attestations de clients de nature à établir une dénigrement de la société CORBAS par la société UNICARRIERS sur ces capacités à assurer la maintenance des chariots cédés ; que ces éléments constituent pour la société CORBAS MANUTENTION un motif légitime d’obtenir avant tout procès l’organisation d’une mesure d’expertise destinée à établir si la société UNICARRIERS a, postérieurement au 16 décembre 2013, démarché ou poursuivi les relations avec les clients cédés à la société CORBAS MANUTENTION, selon la mission contenue dans le dispositif ; que la cessation de la commercialisation de marque ATLET dont fait état la société UNICARRIERS ne supprime pas l’intérêt probatoire de la mesure sollicité par la société CORBAS MANUTENTION qui ne dispose pas d’éléments de preuve suffisants et qui ne peut réunir par lui-même des éléments supplémentaires ; que cette mesure limitée à ceux des clients contenus dans le document annexé au contrat de cession ne constitue pas une mesure générale d’investigation [
] ; 4/ En ce qui concerne la demande de livraison et de pièces détachées : que par lettre du 25 novembre 2016 adressée à la société CORBAS MANUTENTION, la société UNICARRIERS faisait état de la dénonciation du contrat de concession exclusive portant sur la vente et la location et le service après-vente du matériel de manutention de la marque NISSAN signé entre les parties le 1er septembre 2013, venant à échéance le 25 septembre 2016 ; que quel que soit le bien-fondé de cette rupture des relations que la société CORBAS MANUTENTION qualifie de brutale et ses conséquences sur l’exécution de la vente de fonds de commerce, il n’entre pas dans les pouvoirs du juge des référés de mettre fin au trouble dont se prévaut la société CORBAS MANUTENTION dont le caractère manifestement illicite n’est pas établi ; que la remise de pièces, et notamment des contrats de courtes durée visés dans l’annexe, devra être faite dans le cadre de la mesure d’expertise ; que la décision déférée sera infirmée en ce qu’elle a rejeté la demande d’expertise formée par la société CORBAS MANUTENTION » ;
alors que si le secret des affaires ne fait pas en lui-même obstacle au prononcé d’une mesure d’instruction préventive, la mesure d’instruction in futurum ne peut être ordonnée qu’à la condition qu’elle soit proportionnée au droit du demandeur d’établir la preuve et à la préservation du secret des affaires du défendeur ; qu’en l’espèce, la société Uncarriers soutenait expressément dans ses conclusions que la mesure d’expertise sollicitée par la société Corbas ainsi que la demande de production forcée de pièces, qui n’était pas strictement nécessaire à l’établissement de la preuve, portait une atteinte disproportionnée à ses intérêts légitime (conclusions, p. 7) ;
qu’en se bornant pourtant à retenir, pour faire droit à la demande de la société Corbas, qu’elle ne disposerait pas des éléments de preuve suffisants et que la mesure ordonnée n’était pas une mesure générale d’investigation, sans rechercher si l’atteinte portée au secret des affaires était proportionnée au droit à la preuve de la société Corbas Manutention, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 145 du code de procédure civile.