L’affaire jugée concerne la nullité du licenciement de Mme [O] pour harcèlement moral. Selon les articles du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements de harcèlement moral. Mme [O] invoque plusieurs éléments pour prouver le harcèlement, mais certains sont jugés vagues et imprécis. La société Action Logement Services doit prouver que les faits reprochés ne constituent pas du harcèlement. En ce qui concerne l’absence de Mme [O] sur certains organigrammes, l’absence de carte de visite et le non-renouvellement de sa carte SNCF, la société démontre que ces faits ne sont pas constitutifs de harcèlement. La nullité du licenciement pour défaut de qualité de la signataire de la lettre de licenciement est également rejetée. En ce qui concerne la contestation du bien-fondé du licenciement pour insuffisance professionnelle, la cour relève que l’employeur n’a pas rempli son obligation d’adaptation de la salariée à son poste de travail, privant ainsi le licenciement de cause réelle et sérieuse. Mme [O] est donc indemnisée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le préjudice moral invoqué par Mme [O] est rejeté faute de preuves. La société Action Logement Services est condamnée à verser des dommages et intérêts à Mme [O] ainsi qu’à rembourser les indemnités de chômage versées par Pôle Emploi. Enfin, la société est condamnée à verser des frais à Mme [O] au titre des frais exposés.
Les notions clefs de cette affaire
nullité, licenciement, harcèlement moral, insuffisance professionnelle
Définitions juridiques
– Nullité : caractère de ce qui est nul, invalide ou non conforme à la loi
– Licenciement : rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur
– Harcèlement moral : ensemble de comportements hostiles et répétés visant à dégrader les conditions de travail d’une personne
– Insuffisance professionnelle : manque de compétences ou de résultats dans l’exercice d’une activité professionnelle
Les Avocats de référence dans cette affaire
Bravo à Me Michael SKAARUP et Me Matthieu BOCCON GIBOD pour leur plaidoirie dans cette affaire.
Les Parties impliquées dans cette affaire
Sociétés représentées par leurs avocats :
1. APPELANTE
– Madame [N] [O]
– Représentée par Me Michael SKAARUP, avocat au barreau de PARIS, toque : R012
2. INTIMÉE
– SAS ACTION LOGEMENT SERVICES venant aux droits de L’ASSOCIATION GROUPE AMALLIA
– Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
29 mars 2023
Cour d’appel de Paris
RG n° 19/03574
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 9
ARRÊT DU 29 MARS 2023
(n° , 15 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/03574 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7RL4
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Février 2019 – Conseil de Prud’hommes – Formation de départage de PARIS – Section Encadrement chambre 3 – RG n° F15/10044
APPELANTE
Madame [N] [O]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Michael SKAARUP, avocat au barreau de PARIS, toque : R012
INTIMÉE
SAS ACTION LOGEMENT SERVICES venant aux droits de L’ASSOCIATION GROUPE AMALLIA
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 04 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Philippe MICHEL, Président de chambre
M. Fabrice MORILLO, Conseiller
Madame Nelly CHRETIENNOT, Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Philippe MICHEL, président de chambre dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Pauline BOULIN
ARRÊT :
– contradictoire
– mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, prorogé à ce jour.
– signé par Monsieur Philippe MICHEL, président et par Madame Pauline BOULIN, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Selon un contrat de travail à durée indéterminée du 3 juillet 2000, Mme [O] a été engagée par le Comité Paritaire du Logement des Organismes Sociaux (CPLOS) en qualité de responsable du service clients, puis :
– par avenant du 27 décembre 2006, a été promue au poste de responsable du service locatif et investissement,
– par avenant du 1er juillet 2010, dans le cadre de la fusion de CPLOS avec Alliade (devenue Amallia), a été promue au poste de responsable développement locatif,
– à compter du 31 octobre 2012, a occupé le poste de responsable développement – partenariats – réseau au sein du GIE Amallia Organisation,
– selon accord de transfert du 1er janvier 2014, dans le cadre de la réorganisation de la gouvernance du Groupe Amallia, a été transférée au sein de l’association Amallia.
La convention collective applicable est celle du personnel des sociétés anonymes et fondations d’HLM du 27 avril 2000.
L’association Amallia employait habituellement au moins 11 salariés.
Après avoir été convoquée, par courrier du 3 juin 2015, à un entretien préalable à licenciement fixé au 12 juin 2015, Mme [O] a été licenciée pour insuffisance professionnelle préjudiciable aux intérêts de l’association, par lettre recommandée avec accusé de réception du 6 juillet 2015.
Contestant la régularité, la validité et le bien-fondé de son licenciement et invoquant des faits de harcèlement moral, Mme [O] a saisi le conseil de prud’hommes de Paris le 7 août 2015 afin de l’entendre, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– Ordonner sa réintégration,
– Condamner la société Action Logement Services, venant aux droits de l’association Amallia à lui verser les sommes suivantes :
° 154 023,09 euros brut au titre du rappel de salaires suite à la réintégration outre 15 402,31 euros bruts au titre des congés payés afférents,
° 95 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
° 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
° 6 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
La société Action Logement Services a conclu au débouté de Mme [O] et à la condamnation de cette dernière à lui verser la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.
Par jugement du 15 février 2019, le Conseil de prud’hommes de Paris, en sa formation de départage, a débouté Mme [O] de l’ensemble de ses demandes, dit qu’il n’y avait pas lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile, et a laissé les dépens à la charge de Mme [O].
Mme [O] a interjeté appel de ce jugement le 13 mars 2019.
Par un arrêt du 12 janvier 2022, la cour, statuant en déféré, a infirmé l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 21 janvier 2021 et a déclaré l’appel de Mme [O] non caduc.
MOTIFS
Sur la nullité du licenciement
Sur la nullité pour harcèlement moral
Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Selon, l’article L.1152-2 du même code, aucun salarié, aucune personne en formation ou en stage ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir témoigné de tels agissements ou les avoir relatés.
L’article L.1152-3 prévoit que toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.
En application de l’article L.1154-1, lorsque survient un litige relatif à l’application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant présumer l’existence d’un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Mme [O] invoque, au titre du harcèlement :
– son absence sur l’organigramme de l’association,
– l’absence de carte de visite et le non-renouvellement de sa carte SNCF,
– son exclusion des réunions,
– des directives incertaines et contradictoires,
– des réunions en tête à tête sans compte rendu avec son supérieur hiérarchique,
– plusieurs arrêts maladie en 2014,
– la saisine de sa part des services RH,
– la saisine de la psychologue de la médecine du travail,
– des échanges d’emails pour le moins atypiques,
– l’existence d’au moins un précédent avec une autre salariée,
– l’absence de réaction claire et nette de l’employeur aux alertes de harcèlement moral remontées dès l’automne 2014, préférant réaffecter discrètement son supérieur hiérarchique à d’autres fonctions en un autre lieu.
Cela étant, les griefs de directives incertaines et contradictoires, d’échanges d’emails pour le moins atypiques et de l’existence d’au moins un précédent avec une autre salariée sont vagues et imprécis car ne se rapportant à aucun fait matériellement vérifiable. Les réunions en tête à tête sans compte rendu avec son supérieur hiérarchique ne constituent pas des faits laissant présumer du harcèlement, en l’absence d’autres circonstances qui caractériseraient un comportement étranger au pouvoir de contrôle et de direction d’un supérieur à l’égard de sa subordonnée. Le grief tiré de l’exclusion des réunions est contredit par les pièces de la salariée. Si des échanges de mails entre Mme [O] et la responsable des ressources humaines attestent d’un rendez-vous entre ces deux personnes le 10 décembre 2014, les contenus mêmes des messages ne permettent pas de déterminer l’objet de l’entretien et donc que celui-ci portait sur les conditions de travail de Mme [O] et les relations entre cette dernière et son supérieur hiérarchique.
Les éléments ci-dessus ne constituent pas une présentation de faits laissant supposer l’existence d’un harcèlement.
Il en est différemment en ce qui concerne l’absence de Mme [O] sur certains organigrammes de l’association, l’absence de fourniture de carte de visite et le non-renouvellement de sa carte fréquence SNCF.
Il appartient donc à la société Action Logement Services de rapporter la preuve que ces trois derniers faits ne sont pas constitutifs d’un harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
La société Action Logement Services relève que Mme [O] produit, sur la période 2013, les organigrammes de l’Association Amallia alors qu’à cette période, son contrat de travail avait été transféré, avec son accord, à l’association Amallia Organisation avant d’être de nouveau transféré au sein de l’association Amallia le 1er janvier 2014. Elle produit les organigrammes de l’Association Amallia Organisation de juillet et août 2013, mentionnant Mme [O] sous la responsabilité hiérarchique de M. [A] puis sous celle de M. [F].
Elle justifie par la production des agendas de Mme [O] une baisse de fréquence des rendez-vous de celle-ci conduisant l’employeur à ne pas renouveler la carte fréquence SNCF par souci d’économie sans que cette décision n’ait privé la salariée de ses déplacements professionnels en train.
Les échanges de mails au sujet de la commande de cartes de visites de Mme [O] établissent que cette dernière a fait une demande en mars 2015, demeurée sans réponse en juin 2015, mais que cette demande avait bien été transmise au service des moyens généraux par le supérieur hiérarchique de Mme [O] (25/03/2015 : ‘ [G] vient de repasser. J’imprime le document et lui fais signer et je l’adresse aux services généraux’), que face à cette situation, le supérieur hiérarchique de Mme [O] a proposé de doubler la demande de celle-ci (mail du 8 juin 2015 : ‘J’ai signé et fait suivre la demande aux Moyens Généraux par le courrier interne. S’ils ne la retrouvent pas, il faudrait que [N] fasse une nouvelle demande, que je doublerai par mail comme pour les notes de frais’), et que concomitamment, les moyens généraux ont adressé un mail le 1er juin 2015 pour alerter les autres services de leurs difficultés (‘ Bonjour à toutes et à tous, suite aux différents événements concernant les moyens Généraux (démission, accident, congés,’) l’équipe est très fortement modifiée pour les semaines à venir. [suit une présentation de nouveaux collaborateurs et une précision sur une salarié en congé jusqu’au 23 juin et une autre en arrêt maladie jusqu’au 13 octobre 2015] (…) Compte tenu de leur récente arrivée dans le service, nous vous remercions de votre indulgence pour le traitement de vos demandes. Toutefois, nous mettrons tout en ‘uvre pour satisfaire vos demandes dans les meilleurs délais rappel : toutes les demandes peuvent être transmises à [suit adresse mail du service]’.
Ainsi, la société Action Logement Services démontre que les agissements dénoncés par Mme [O] ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Sur la nullité pour défaut de qualité de la signataire de la lettre de licenciement
Mme [O] relève que la lettre de licenciement est signée par la responsable des ressources humaines alors qu’une association loi 1901 est en principe représentée par son président lequel est seul habilité à rompre un contrat de travail à moins qu’une disposition particulière des statuts ou une décision du conseil d’administration ait transféré ces pouvoirs à d’autres dirigeants.
Elle note également que les statuts produits ne mentionnent aucun des pouvoirs attribués au président de l’association, ni son nom, ni l’éventuelle faculté de les déléguer, pouvoirs qui devraient découler d’une délibération spécifique du conseil d’administration dont le procès-verbal n’est même pas produit. Elle ajoute que la société Action Logement Services se prévaut d’une cascade de délégations de pouvoirs qui ne sont que des copier-coller dépourvus de date certaine et qui privent le poste de la DRH de toute substance puisque celle-ci délègue l’intégralité de ses pouvoirs à la RRH.
Mais, outre le fait que le défaut de pouvoir du signataire de la lettre de licenciement ne rend pas le licenciement nul mais prive celui-ci de cause réelle et sérieuse sauf à ce que l’employeur ratifie la décision, la société Action Logement Services produit la délégation de pouvoir datée du 17 mars 2014 du président de l’association – qui en cette qualité est habilité à rompre le contrat de travail – au directeur général de l’association avec faculté de sub-délégation, la délégation de pouvoirs de la même date du directeur général à la directrice des ressources humaines avec faculté de sub délégation et la délégation de pouvoirs fonctionnels de la directrice des ressources humaines à la responsable des ressources humaines, toujours du 17 mars 2014.
La fraude ne se présumant pas, les seuls doutes émis par Mme [O] sur l’authenticité et la date de ces documents ne peuvent conduire à les écarter.
Une telle succession de délégation de pouvoir est justifiée au regard de la taille de l’association et n’a pas pour effet de priver les délégants de leurs pouvoirs propres.
La signataire de la lettre de licenciement avait donc qualité et pouvoir pour rompre le contrat de travail de Mme [O].
Sur la nullité du licenciement pour atteinte au droit à l’emploi
Mme [O] plaide la violation de son droit constitutionnel à l’emploi affirmé par le préambule de la constitution de 1946 et l’article 23 de la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 en ce que l’association a fait un usage abusif de son droit de résilier son contrat de travail en l’absence de tout motif et dans un contexte non seulement de réorganisation du groupe mais surtout de toute la branche d’activité de l’association alors même que la direction avait pris en mai 2015 un engagement de maintien dans l’emploi et des mesures de reclassement dans le cadre d’une cellule de mobilité dont elle avait souhaité bénéficier.
Mais, comme justement soulevé par la société Action Logement Services, hors les cas d’atteinte à une liberté fondamentale, l’usage abusif par l’employeur de son droit de licencier un salarié n’entraîne pas la nullité du licenciement, mais prive celui-ci de cause réelle et sérieuse.
Au vu de l’ensemble des éléments, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [O] de sa demande de nullité du licenciement avec réintégration dans l’emploi et rappel de salaires afférents.
Sur la contestation du bien fondé du licenciement
Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.
Ainsi, l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
L’insuffisance professionnelle se définit comme l’incapacité non fautive, objective et durable d’un salarié à exécuter de façon normalement et correctement un emploi correspondant à sa qualification.
S’il appartient au salarié de fournir une prestation correspondant à sa qualification, l’employeur ne peut licencier celui-ci pour insuffisance professionnelle de façon soudaine et précipitée mais doit au préalable l’alerter de son incompétence ou insuffisance et lui accorder un délai d’adaptation raisonnable pour qu’il puisse remédier au problème.
La lettre de licenciement est ainsi rédigée :
« (‘) Vous avez été convoquée à un entretien préalable le 12 juin 2015 par lettre remise en mains propres contre décharge le 3 juin 2015. Lors de cette entrevue, vous étiez assistée de Madame [V] [J], déléguée syndicale. Votre responsable, Madame [E] [Z] et moi-même vous avons exposé les motifs pour lesquels nous envisagions de prendre à votre encontre une mesure pouvant aller jusqu’au licenciement.
En effet, nous vous rappelons que vous êtes entrée au service de l’association CPLOS le 3 juillet 2000 en qualité de Responsable du service Clients puis avez été promue au poste de Responsable du service Locatif et investissements le 1er décembre 2006.
Suite à la fusion du CPLOS avec les six CIL Rhône-Alpins en 2010, il a été décidé de créer en 2012 un pôle du Développement des Partenariats et Réseaux, pour lequel nous vous avons confié, à compter du 1er novembre 2012, le poste de Responsable que vous occupez actuellement, étant précisé qu’il s’agissait alors d’un souhait de votre part.
A ce titre, vous ne pouvez ignorer que les missions rattachées à ces nouvelles fonctions demeurent relativement similaires et apparentées à celles du poste de travail que vous occupiez auparavant.
En effet, outre le développement de l’offre de logements locatifs sociaux, vous êtes depuis lors en charge de favoriser la collecte d’AMALLIA auprès des entreprises de l’Economie Sociale et Solidaire (ESS) en identifiant des contacts qualifiés à transmettre aux Charges de Relations Entreprises Adhérents (CREA) et promouvoir ainsi la place d’AMALLIA parmi les acteurs reconnus de l’ESS.
D’une manière générale, il vous incombe donc de renforcer la connaissance et le développement des produits et des services du groupe à l’extérieur, afin d’identifier les entités externes susceptibles d’accepter un partenariat et de nous aider ainsi à améliorer notre offre globale.
Pour ce faire, et soucieux de vous accompagner au mieux dans l’élargissement de vos responsabilités, Monsieur [A], Directeur du développement à l’époque, a pris le soin de vous former et de vous guider pendant plus d’un an.
Sur la base des compétences que vous aviez acquises jusqu’alors, il vous a permis de participer activement aux différents rendez-vous importants et de vous impliquer dans tous les travaux ou projets liés à votre activité, sans oublier de vous présenter à tout son réseau professionnel ainsi qu’aux contacts utiles pour mener à bien votre mission de Responsable du Développement.
Il convient d’ores et déjà de souligner que vous n’avez jamais remis en cause les conseils et la formation tant technique que pratique que vous avez ainsi reçus de la part de votre supérieur hiérarchique, aucun autre type de formation, sinon celle de la pratique et du terrain, ne pouvant, en tout état de cause, vous être dispensée.
En janvier 2014, nous vous rappelons qu’en vertu des missions inhérentes à votre contrat de travail, vous êtes censée faire preuve d’initiative et de pro activité, en effectuant toutes les démarches utiles auprès des structures, quelles que soient leur forme juridique (entreprises, associations, coopératives, mutuelles, banques, etc’) et leur implantation géographique sur le territoire national, pourvu qu’elles représentent une source potentielle de croissance et de développement pour le groupe AMALLIA sur le plan de la collecte, de l’investissement locatif ou du secteur de l’ESS, notamment.
Dans cette perspective, Monsieur [F] vous a d’ailleurs, dès son arrivée, remis un plan d’actions accompagné d’objectifs précis et détaillés pour l’année 2014, ainsi qu’un registre de multiples bailleurs sociaux à prospecter.
Pendant tout le premier semestre de l’année 2014, vous n’avez mentionné aucune difficulté dans l’accomplissement de vos tâches de travail ni aucune lacune dans les moyens mis à votre disposition pour y parvenir, alors que des réunions bimensuelles se sont tenues avec votre supérieur hiérarchique, précisément avec pour objectif de faire, si besoin, le point en la matière.
Bien au contraire, vous n’avez cessé de le rassurer en lui affirmant que tout se déroulait pour le mieux de votre côté et le rassurant sur votre maîtrise de votre activité.
Dans ces conditions, et afin de faire un premier bilan de votre activité avant votre départ en congés d’été, Monsieur [F] vous a notamment demandé de communiquer aux CREA un tableau récapitulatif complet des structures déjà contactées, des référents rencontrés et des débouchés ou perspectives envisagées.
Or, lorsque les CREA ont pris connaissance de votre document de travail, ils ont malheureusement dû constater qu’il était purement et simplement inexploitable, dans la mesure où il présentait en réalité une majorité de contacts non qualifiés.
Vous vous êtes, en effet, contentée de dresser un inventaire des Responsables des Ressources Humaines ou Directeurs Généraux d’entreprises choisies de manière parcellaire, voire en dépit de toute pertinence puisque certaines ne répondent même pas aux critères d’attribution du 1% logement (étant rappelé qu’il s’agit pourtant de la cible de prédilection).
Dans ce contexte, les CREA n’ont pas manqué d’exprimer alors leur mécontentement et leurs inquiétudes auprès de Monsieur [F], lequel vous a donc immédiatement fait part de l’insuffisance de votre travail lors d’une mise au point qui s’est tenue le 15 septembre 2014.
Et pour cause, outre les reproches formulés ci-dessus, votre supérieur hiérarchique s’est également étonné de ce que votre liste de contacts puisse tenir sur une page seulement alors que le secteur de l’économie sociale représente plusieurs milliers d’organismes partout en France, d’une part, et que le démarchage et la recherche de nouveaux partenariats constituent normalement le c’ur de votre métier, d’autre part.
Il semble que vos relations personnelles aient donc commencé à se dégrader à compter de cette date : c’est pourquoi, vous nous en avez informé à l’occasion d’un entretien qui a eu lieu avec moi-même, à votre initiative, le 10 décembre 2014.
Prenant très au sérieux les problèmes que vous évoquiez avec Monsieur [F], et le mal-être dont vous faisiez état, j’ai donc immédiatement proposé qu’un nouvel entretien ait lieu en début d’année afin de trouver une solution à cette situation et de régler les difficultés rencontrées de part et d’autre.
D’un commun accord, je vous ai donc invitée à un nouvel entretien avec Monsieur [F] le 12 janvier 2015.
Il ressort des différents échanges qui ont eu lieu ce jour là que si les reproches qu’il vous avait adressés étaient inappropriés sur la forme, forme dont il s’est d’ailleurs excusé, ils demeuraient néanmoins parfaitement justifiés sur le fond, ce que nous ne pouvons qu’acquiescer. Vous reconnaissez d’ailleurs l’agacement que ce dernier a pu avoir.
En effet, la lecture de votre propre rapport d’activité est édifiante et nous interpelle particulièrement sur la réalisation concrète des tâches de travail qui vous sont demandées.
Contre toute attente, les objectifs qui vous avaient été fixés en début d’année 2014 sont loin d’être atteints, et ce, quel que soit le secteur d’intervention concerné :
Collecte et locatif : en plus d’un fichier inexploitable transmis aux CREA, il apparaît que sur les 80 bailleurs que Monsieur [F] vous avait présélectionnés en janvier 2014, vous n’en avez contacté que 7, obtenant uniquement 5 rendez-vous, dont 2 chez le même bailleur, entre janvier et septembre 2014, soit sur une période de travail effectif de 9 mois !
ESS : sur toute une année, vous n’avez participé qu’à 3 ou 4 réunions, aucune piste de contact n’est créée, aucun projet ni action n’est proposé, aucun nouveau partenariat n’est identifié (l’UNA étant un partenaire ancien, la seule valeur ajoutée constatée est un article dans l’intranet du Groupe ce qui relève davantage du symbolique que du significatif).
6 solutions : Néant.
Or, une fois encore, nous déplorons que vous n’ayez jamais soulevé de quelconque difficulté à ce sujet avant que Monsieur [F] ne s’aperçoive de l’insuffisance caractérisée de votre activité, et ne vous demande de lui en rendre compte.
De toute évidence, si nous pouvons entendre qu’un plan d’actions défini en début d’année ne puisse pas toujours être achevé à 100% en fin d’année, compte tenu de certains aléas et autres considérations, en revanche, il est inconcevable que vous n’ayez même pas rempli un de ces objectifs ne serait-ce que partiellement.
Face à ce constat, après avoir confronté les attentes de votre hiérarchique avec le bilan de vos résultats, il vous a formellement été demandé de fournir des efforts significatifs tant en terme de quantité que de qualité de votre activité, ce que vous n’avez pas contesté.
A l’issue de cette réunion, il a donc été convenu de faire un nouveau point de la situation après une période de 3 mois, soit en avril 2015.
Dans l’intervalle, je vous rappelle que Monsieur [F] a été remplacé début avril 2015 par Madame [Z] en raison d’une réorganisation générale des services, cette dernière devenant donc votre nouvelle supérieure hiérarchique.
A l’occasion de ce changement de direction, force a été de constater, d’une part, que les éventuelles difficultés qui auraient pu perdurer avec Monsieur [F] n’ont, en tout état de cause, plus lieu d’être dans la mesure où vous n’êtes plus amenée à travailler sous la direction de ce dernier.
D’autre part, il est intéressant de souligner que, comme convenu, un nouveau point a été réalisé avec votre nouvelle responsable, Madame [E] [Z], à l’occasion d’un rendez-vous que vous avez sollicité et qui s’est tenu le 22 avril 2015.
A notre plus grande surprise, en dépit des conseils et des recommandations que nous vous avions prodigués pour vous améliorer, nous ne pouvons que déplorer l’absence totale de progrès ou de signe quelconque de changement positif de votre part.
Plus encore, non seulement votre travail est loin de la contribution que l’on attend de vous (aucune avancée notoire sur le locatif et aucune réalisation sur le plan de la collecte), mais en outre, vous avez eu l’audace, pour vous en défendre, de vous approprier et de revendiquer la réalisation de travaux qui ne relevaient pas de votre initiative, et pour lesquels votre participation a été très relative. Pour exemple, vous indiquez notamment avoir contribué au partenariat avec la BRED alors même que ce partenariat a été initié par Madame [R] et qu’elle était présente à tous les rendez-vous. De la même façon, vous indiquez une prise de contact avec le Crédit Agricole Immobilier (ex Monné Decroix), or vous aviez déjà rencontré ce partenaire 3 ans auparavant avec Madame [P], pilote de la solution Location au sein du Groupe, qui n’avait pas souhaité donner suite’
Devant ce manque patent de bonne volonté, de professionnalisme, voire de discernement, nous vous avons donc demandé si, dans ces conditions, votre souhait était de rompre votre contrat de travail, auquel cas nous étions disposés à envisager une rupture conventionnelle.
Après vous avoir laissé un délai de réflexion suffisant, vous nous avez fait part de votre refus d’accepter la proposition chiffrée que nous vous avions formulée. Dont acte : nous ne saurions en effet vous reprocher, ou remettre en cause votre décision, puisque cette liberté de choix vous appartient.
Pour autant, vous comprendrez que nous en pouvons laisser la situation actuelle perdurer plus longtemps, ce que confirme d’ailleurs le rapport d’activité 2014 et 2015 que vous nous avez présenté lors de notre entretien en date du 12 juin 2015.
Votre bilan n’est pas admissible et laisse perplexe puisque depuis le mois de janvier 2015, vous n’avez « prospecté » que 25 bailleurs, dont 14 se résument à de simples emails envoyés et restés à ce jour sans réponse’ en parallèle, vous n’avez obtenu que 6 rendez-vous au cours de ces 6 derniers mois et votre agenda du mois de juin est tout simplement vide.
De la même manière, le colloque de l’ADDES ou les autres actions que vous mentionnez (FNSCHLM, CNCRES,’) se résument juste à une information sur l’intranet, encore une fois, aucune piste de contact n’est créée, aucun projet ni action n’est proposé, aucun nouveau partenariat n’est identifié et aucun des rendez-vous ou ni projet revendiqués sur le plan du « 6 solutions » n’a abouti. Plus inquiétant encore, c’est votre façon de procéder, votre méthodologie qui est problématique.
Pour exemple, votre action auprès de SOLIHA reflète parfaitement cela. En effet, vous proposez un rendez-vous avez le directeur de cette structure à votre responsable, Madame [E] [Z] sans avoir préalablement, d’une part indiqué les objectifs de cette rencontre, d’autre part, avoir pris connaissance des pratiques ou accords locaux qui pouvaient exister au sein des territoires.
Le poste que vous occupez au sein d’AMALLIA nécessite d’être à la fois rigoureux, force de proposition, d’avoir le sens de l’initiative et de porter des projets de partenariat pour l’avenir.
A ce jour, vous n’avez pas su nous convaincre de votre capacité à incarner ce leadership, pourtant indispensable à la compétitivité et au développement nécessaire de notre groupe.
Enfin, nous insistons sur le fait que cette défaillance ne résulte aucunement d’un quelconque défaut de formation ou de qualification, mais au contraire d’un manque évident de dynamisme, de méthodologie et de conscience professionnelle, lesquelles deviennent particulièrement préjudiciables à l’entreprise.
Dès lors, et pour toutes les raisons évoquées, nous nous trouvons ainsi contraints de procéder à votre licenciement pour insuffisance professionnelle préjudiciable aux intérêts de l’entreprise. (‘).’
À l’appui de son appel, Mme [O] conteste point par point les éléments mentionnés dans la lettre de rupture au titre de l’insuffisance professionnelle.
Elle fait valoir que les missions qui lui étaient confiées n’étaient pas clairement définies, que l’employeur a uniquement versé aux débats 12 pièces relatives à son insuffisance professionnelle supposée à comparer avec plus de 100 pièces qu’elle produit pour justifier de son activité et de ses démarches, qu’elle n’a eu aucun entretien annuel d’évaluation conforme sur les années 2014 et 2015, qu’elle n’a bénéficié d’aucune formation au cours des dernières années d’emploi, qu’elle a perçu plusieurs primes venant ainsi contredire toute insatisfaction de l’employeur, qu’elle a accompli de nombreuses autres tâches au-delà de la feuille de route du 1er janvier 2014 dont il n’est fait état nulle part, qu’elle n’avait pas de moyens pour accomplir ses tâches, que son poste a été définitivement supprimé sans remplacement, ce qui confirme que son licenciement avait en réalité une cause économique, et que l’association Amallia / la société Action Logement Services n’a pas de préjudice.
En réplique, la société Action Logement Services rappelle qu’en sa qualité de Responsable du Développement des Partenariats et Réseaux relevant de la classification G5 de l’accord collectif applicable – soit dans la moitié supérieure des Cadres et dans la même catégorie que les Responsables Ressources Humaines – Mme [O] avait différentes responsabilités et, en particulier, la promotion du groupe Amallia auprès des bailleurs sociaux afin de leur proposer un financement dans leurs projets de construction de logements sociaux et l’identification des entreprises appartenant au secteur de l’Economie Sociale et Solidaire afin de collecter des fonds permettant le financement de programmes immobiliers à vocation sociale, que Mme [O] n’ignorait rien de cet emploi et des missions qu’il recouvrait dès lors qu’avant la fusion entre Alliade et CPLOS, elle avait été embauchée en qualité de Responsable du Service Clients et avait été promue le 1er décembre 2006 au poste de Responsable du Service Locatif et Investissement, étant ainsi chargée de proposer des financements auprès des bailleurs sociaux pour des programmes immobiliers à vocation sociale et qu’avec la fusion du CPLOS et d’Alliade puis la structuration du groupe Amallia, les fonctions confiées à Mme [O] étaient, dans leur grande majorité, restées les mêmes, seule la qualité des interlocuteurs de la salariée ayant évolué.
Elle fait alors valoir qu’en janvier 2014, M. [F], directeur territorial et supérieur hiérarchique de Mme [O], a confié à cette dernière un plan d’actions pour l’année 2014 détaillé en 4 axes (la collecte au profit d’Amallia auprès des entreprises de l’économie solidaire et sociale, le locatif, le renforcement de la place d’Amallia parmi les acteurs reconnus de l’économie solidaire et sociale, le programme ‘6 solutions’ du Groupe Amallia qui se propose d’apporter une réponse à chaque projet de logement pour les salariés de ses adhérents), qu’afin de faciliter le travail de prospection sur le secteur locatif, il lui a également remis un fichier de 252 bailleurs sociaux répartis sur le territoire avec une sélection des 77 les plus intéressants, qu’à la fin du mois de juillet 2014, Mme [O] a transmis aux Chargés de Relations Entreprises Adhérents (CREA) un fichier Excel intitulé ‘Fichier contacts pour collecte 2014″ au contenu totalement inexploitable et qui, mis en perspective avec le plan d’actions de janvier 2014, démontre que la salariée n’a pratiquement commencé aucune des actions attendues d’elle sur chacun des 4 axes, que M. [F] a informé le service des ressources humaines de cette situation par mail du 19 décembre 2014 accompagné du plan d’action 2014, de la liste des bailleurs présélectionnés, du fichier réalisé par Mme [O] en août 2014 ainsi que de son compte-rendu de la réunion de septembre 2014 et conclu comme suit : ‘(‘) Je vous remercie de bien vouloir prendre connaissance de tous ces documents et me donner votre avis, en toute objectivité, sur le volume, la qualité, la pertinence et l’efficacité de l’action de C [O]. Selon votre analyse, vous voudrez bien me préciser la suite qu’il conviendrait de donner, ou pas. (‘)’, qu’un entretien a alors été organisé par le service des ressources humaines avec Mme [O] en présence de M. [F] le 12 janvier 2015 au cours duquel une mise au point a été faite sur les attentes de M. [F], qui s’est par ailleurs excusé de la véhémence de ses propos en septembre 2014, que des discussions puis des échanges de mails ont été remontés en avril 2015 au service des ressources humaines, qu’un nouvel entretien s’est tenu avec Mme [O] le 22 avril 2015 à la suite duquel en l’absence de toute évolution de la situation, une éventuelle rupture conventionnelle a été évoquée, sans toutefois que l’appelante n’y adhère, que, dans le même temps, l’association n’a pu que constater, à l’examen du planning de Mme [O], que cette dernière avait manifestement renoncé à exécuter son contrat de travail, que Mme [O] a alors été convoquée à un entretien préalable qui s’est tenu le 12 juin 2015 au cours duquel la salariée a remis un rapport d’activité reprenant l’intégralité de ses actions de janvier 2014 à mai 2015 dont la lecture, associée à celle du compte-rendu de l’entretien comportant les réponses évasives de Mme [O], démontre la réalité de l’insuffisance professionnelle reprochée.
Cela étant, comme rappelé plus haut, l’employeur a une obligation d’adaptation des salariés à leur poste de travail ce qui implique qu’en cas de difficultés d’un salarié dans l’exécution sa prestation de travail, l’employeur doit en avertir celui-ci afin de lui permettre d’y remédier non seulement en lui laissant le temps nécessaire pour cela mais également, si besoin est, en mettant en ‘uvre des actions d’accompagnement, voire de formation.
En l’espèce, il résulte des pièces du dossier que, comme justement relevé par Mme [O], la société Action Logement Services ne verse aucune fiche de poste précisant les missions dévolues à la salariée dans ses différentes fonctions occupées durant la relation contractuelle mais se contente de se référer à l’ancienneté et à l’expérience de la salariée pour affirmer que celle-ci ne pouvait ignorer la nature et l’étendue de ses missions, que les difficultés ont été signalées à la salariée pour la première fois en septembre 2014 soit 14 ans après son embauche et sans qu’il apparaisse que la relation contractuelle de travail ait été émaillée de reproches avant cette date, que la société Action Logement Services ne justifie pas avoir organisé d’entretien d’évaluation en 2014 et 2015 qui aurait permis de faire le bilan de l’activité de la salariée, d’attirer son attention sur des points d’amélioration et de lui assigner des objectifs qualitatifs comme quantitatifs, ni mis en place des actions de formation et d’adaptation au poste de travail au profit de sa salariée depuis plusieurs années.
Si, à la suite des difficultés relevées par le supérieur hiérarchique en septembre 2014 des entretiens ont bien eu lieu avec un représentant des ressources humaines, le supérieur hiérarchique et Mme [O] les 10 décembre 2014, 12 janvier 2015 et 22 avril 2015, la société Action Logement Services n’est toutefois pas en mesure de produire le moindre compte rendu de ceux-ci privant ainsi la juridiction prud’homale de la possibilité d’apprécier le contenu des discussions entre les intéressés et de vérifier qu’au-delà de la simple critique ou remise en cause, ‘des conseils et des recommandations’ tels que visés dans la lettre de licenciement ont bien été donnés à la salariée pour qu’elle s’améliore.
La cour relève, par ailleurs, d’une part, que l’employeur a reconnu, tant dans la lettre de licenciement que dans ses conclusions, la véhémence des reproches adressés à Mme [O] par son supérieur hiérarchique et le caractère inapproprié de l’expression du mécontentement de ce dernier et, d’autre part, que l’entretien du 22 avril 2015 a abouti à une proposition de rupture conventionnelle. De telles circonstances ne favorisent ni la mise en confiance de la salariée ni la motivation de celle-ci à s’améliorer mais conduisent plutôt à la fragiliser en faisant naître chez elle des doutes légitimes, dès les premiers reproches, sur une relation de confiance et une collaboration constructive avec son supérieur puis sur la pérennité de son contrat de travail.
La cour relève également que l’entretien du 22 avril 2015 à la suite duquel a été proposée une rupture conventionnelle à la salariée s’est tenu juste après le changement de supérieur hiérarchique de Mme [O] sans qu’il soit laissé le temps à l’un et à l’autre de s’adapter.
Le manquement de l’employeur à son obligation d’adaptation de la salariée à son poste de travail est établi et prive, dès lors, le licenciement de Mme [O] pour insuffisance professionnelle de cause réelle et sérieuse.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a débouté Mme [O] de sa contestation de la cause réelle et sérieuse de son licenciement.
En application de l’article L.1235-3 du code du travail dans sa version applicable au présent litige, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et qu’il n’y a pas réintégration du salarié dans l’entreprise, il est octroyé à celui-ci, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.
Compte tenu de l’ancienneté (15 ans), de l’âge (51 ans) et de la rémunération (3 883,87 euros) de la salariée à la date de la rupture et compte-tenu également du fait que Mme [O] justifie de nombreuses recherches d’emploi qui n’ont abouti qu’en septembre 2016, il convient d’allouer à l’intéressée, par infirmation du jugement entrepris, la somme de 48 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par ailleurs, en application de l’article L. 1235-4 du même code, la société Action Logement Services sera condamnée à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Mme [O] depuis la date de licenciement jusqu’au présent arrêt, dans une limite de trois mois d’indemnités.
Sur le préjudice moral
Mme [O] fait valoir qu’Amallia l’a abandonnée dans un contexte difficile, qu’elle en a été affectée personnellement tant au niveau de sa santé que moralement puisqu’étant victime de harcèlement et d’une réorganisation, elle a été éconduite dans des circonstances tout à fait incompréhensibles, voire choquantes et que la dégradation de ses conditions de travail a eu des répercussions sur sa santé comme l’atteste clairement son médecin, ce qui l’a handicapée dans sa recherche d’emploi.
Mais, le harcèlement invoqué par Mme [O] a été écarté.
Par ailleurs, au-delà de simples affirmations, Mme [O] ne rapporte pas la preuve d’avoir subi un préjudice autre que celui causé par la rupture injustifiée de son contrat de travail et indemnisé par l’octroi de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [O] de cette demande.
Sur les frais non compris dans les dépens
Conformément aux dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, la société Action Logement Services, qui succombe en appel, sera condamnée à verser à Mme [O] la somme de 2 500 euros au titre des frais exposés par l’appelante qui ne sont pas compris dans les dépens.