Arrêt n° du 14/02/2024 N° RG 22/01730 FM/FJ Formule exécutoire le : à : COUR D’APPEL DE REIMS CHAMBRE SOCIALE Arrêt du 14 février 2024 APPELANT : d’un jugement rendu le 31 août 2022 par le Conseil de Prud’hommes de REIMS, section Encadrement (n° F 21/00215) Monsieur [H] [I] [Adresse 2] [Localité 4] Représenté par la SELAS DEVARENNE ASSOCIES GRAND EST, avocats au barreau de CHALONS-EN-CHAMPAGNE INTIMÉE : L’ASSOCIATION SEVE EVEIL venant aux droits de L’ASSOCIATION L’EVEIL [Adresse 1] [Localité 3] Représentée par la SELARL RAFFIN ASSOCIES, avocats au barreau de REIMS DÉBATS : En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 décembre 2023, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur François MÉLIN, président de chambre, et Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargés du rapport, qui en ont rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 14 février 2024. COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré : Monsieur François MÉLIN, président Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller Madame Isabelle FALEUR, conseiller GREFFIER lors des débats : Monsieur Francis JOLLY, greffier ARRÊT : Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François MÉLIN, président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. * * * * * M. [H] [I] a été embauché par l’association L’Eveil, aux droits de laquelle vient la société Seve Eveil, le 19 juin 2017 en qualité de directeur adjoint, par un contrat à durée indéterminée. Il a été licencié pour insuffisance professionnelle, par un courrier du 30 décembre 2020. M. [H] [I] a alors saisi le conseil de prud’hommes de Reims. Par un jugement du 31 août 2022, le conseil a : dit et jugé infondée la demande en contestation du pouvoir de signataire de la lettre de licenciement et débouté ; dit et jugé le licenciement de M. [H] [I] fondé au titre d’une insuffisance professionnelle ; dit et jugé que l’association L’Eveil a contrevenu à l’article L 1232-2 du code du travail ; condamné l’association L’Eveil à verser à M. [H] [I] la somme de 4 440, 30 euros à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement ; condamné l’association L’Eveil à verser à M. [H] [I] la somme de 1 529, 81 euros à titre de rappel de salaire ; débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ; condamné M. [H] [I] aux entiers dépens de l’instance. M. [H] [I] a formé appel. Par des conclusions remises au greffe le 16 décembre 2022, M. [H] [I] demande à la cour de : – infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit et jugé infondée la demande en contestation du pouvoir de signataire de la lettre de licenciement et l’a débouté de sa demande ; dit et jugé le licenciement fondé au titre d’une insuffisance professionnelle ; débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ; condamné M. [H] [I] aux entiers dépens de l’instance ; Et statuant à nouveau, constater que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse ; condamner l’association à payer à M. [H] [I] les sommes suivantes : 26 060,40 € au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et subsidiairement la somme de 22001,50 € en application des dispositions de l’article L1235-3 du Code du travail 26 060,40 € au titre de l’indemnité spécifique pour licenciement vexatoire 4.440, 30 € en raison de l’irrégularité du licenciement 1 529,81 € au titre du rappel de salaires 4 000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile – condamner l’association aux entiers dépens. Par des conclusions remises au greffe le 16 mars 2023, l’association Seve Eveil demande à la cour de : la juger recevable et bien fondée en son appel incident. confirmer le jugement en ce qu’il a : dit et jugé in fondée la demande en contestation du pouvoir du signataire de la lettre de licenciement et l’en déboute ; dit et jugé le licenciement de M. [H] [I] fondé au titre d’une insuffisance professionnelle ; débouté M. [H] [I] de ses demande plus amples ou contraires ; infirmer le jugement en ce qu’il a : dit et jugé que l’association L’Eveil a contrevenu à l’article L. 1232-2 du code du travail ; condamné l’association L’Eveil à verser la somme de 4.440,30 € à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement ; condamné l’association L’Eveil à verser la somme de 1529,81 € au titre de rappel de salaire ; et débouté l’association L’Eveil de ses demandes plus amples ou contraires. Statuant à nouveau, juger M. [H] [I] recevable, mais mal fondé en son appel ; juger la procédure de licenciement parfaitement régulière ; juger les griefs figurant à la lettre de licenciement fondés ; débouter M. [H] [I] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; condamner M. [H] [I] à payer la somme de 3.000 €, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Motifs : Sur la régularité de la lettre de licenciement En première instance, M. [H] [I] a soutenu que le signataire du courrier de licenciement n’avait pas reçu un pouvoir spécial. Devant la cour, il demande dans le dispositif de ses conclusions à la cour de juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse mais admet dans leurs motifs que le signataire avait bien reçu une délégation de pouvoir du directeur de l’association L’Eveil. Le jugement est donc confirmé en ce qu’il a débouté M. [H] [I] de sa demande. Sur le bien-fondé du licenciement L’employeur soutient que le licenciement pour insuffisance professionnelle est fondé, ce que conteste M. [H] [I], étant précisé qu’il résulte de l’article L 1235-1 du code du travail que « le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles ». L’employeur fait valoir que l’insuffisance professionnelle de M. [H] [I], qui était directeur adjoint, résulte de trois éléments. Il rappelle que sa fiche de poste indique que : « Le Directeur Adjoint de l’Association L’EVEIL, en charge de l’ESAT, est responsable de l’établissement qui déploie des actions sociales, psycho-éducatives, médicales, pédagogiques et techniques en faveur des adultes en situation de handicap qui sont accompagnés. Le Directeur Adjoint peut suppléer le Directeur de l’Association en cas d’absence, si ce dernier le sollicite. » Ses principales missions étaient les suivants : « 1. Définition et mise en oeuvre du projet d’établissement, 2. Participer à l’élaboration de la politique de prise en charge et d’accompagnement des usagers, 3. Gestion administrative, budgétaire et du fonctionnement de l’établissement, 4. Gestion et animation des Ressources Humaines, 5. Management d’équipe, 6. Animation des relations avec les partenaires extérieurs, 7. Participation aux instances institutionnelles ». a) Le courrier de licenciement fait état d’une première série d’insuffisances. Il est rédigé, en ce qui concerne la première insuffisance alléguée, dans les termes suivants : « Ainsi, nous avons observé que vous arrivez très régulièrement de manière tardive sur le site de l’association L’Eveil et à des heures où l’activité des ateliers de l’ESAT a commencé bien en amont. A l’inverse, vous repartez régulièrement tôt de l’association L’Eveil, à des horaires imprévisibles, sans que la direction, les travailleurs ou les salariés, ne soient avertis des motifs de votre départ. Si vos fonctions vont de pair avec une certaine autonomie dans la gestion de vos horaires de travail, cette habitude génère à la fois de l’étonnement et de l’inquiétude de la part des personnes que vous avez la charge d’encadrer. Les travailleurs, qui sont des personnes fragiles et ont besoin de repères, ont ainsi été perturbés à plusieurs reprises par vos absences régulières et s’en sont ouverts auprès des salariés de l’association L’Eveil ou de nous-même. A titre d’exemples, vos absences inexpliquées à l’inauguration de l’accueil de jour, le 9 novembre 2020, alors que vous étiez présent au sein de l’association L’Eveil à la date de cet évènement et lors de la remise de diplômes à des Travailleurs Handicapés de votre équipe, le 10 novembre 2020, témoignent d’une appréhension très insuffisante de la présence auprès des travailleurs et salariés, que supposent vos fonctions. » Toutefois, sous réserve des absences des 9 et 10 novembre 2020, l’employeur se borne à procéder par des affirmations générales, sans fournir aucune précision sur les jours concernés par des horaires prétendument imprévisibles ni sur ces horaires mêmes. Concernant les absences des 9 et 10 novembre 2020 aux événements cités dans le courrier de licenciement, M. [H] [I] ne les conteste pas. Toutefois, il avait averti son employeur, qui l’admet, de son absence au second événement car il devait s’occuper de sa fille nécessitant des soins importants et de la mise en place de l’intervention de trois infirmières se relayant. Ainsi, seule l’absence le 9 novembre 2020 peut être utilement invoquée par l’employeur. Cependant, comme l’indique M. [H] [I], une telle absence ne constitue pas un motif d’insuffisance professionnelle mais aurait pu, le cas échéant, constitue un grief disciplinaire. b) L’employeur fait état d’une deuxième série d’insuffisances, en invoquant une difficulté de M. [H] [I] à communiquer avec ses subordonnées. Le courrier de licenciement est rédigé dans les termes suivants : « Nous ne pouvons que mettre en relation ces horaires irréguliers, avec les mails que vous avez pris le parti de rédiger sur des sujets nécessitant de toute évidence des échanges verbaux avec les salariés concernés, en particulier dans notre secteur d’activité, qui est, comme vous le savez, centré sur les relations humaines. Cette pratique a pour effet, elle aussi de générer de l’inquiétude et de la frustration chez certains des salariés que vous avez la charge d’encadrer. Le ton défensif que vous avez cru devoir employer au sein de plusieurs correspondances, la volonté de sanctionner que vous avez manifestée pour un cas et les justifications que vous avez adressées à certaines de ces personnes, qui sont vos subordonnées, témoignent eux aussi d’une perception insuffisante de ce qu’induit votre poste en matière de management et d’un manque de remise en question de votre part. Lorsque nous vous avons manifesté notre étonnement ou que nous vous avons invité à adopter une attitude plus modérée sur ces sujets, notamment par mails en date du 8 septembre 2020 et du 23 novembre 2020, vous avez adopté une attitude fermée et là encore, défensive. Notre objectif était pourtant de parvenir, pour chacun des cas, à un apaisement des situations et au dialogue, ce qui correspond au mode de fonctionnement que nous nous efforçons de privilégier au sein de l’EVEIL, compte tenu notamment du public accueilli. » Au soutien de ses allégations, l’employeur se réfère aux éléments suivants : un courrier électronique du 7 septembre 2020 du responsable du pôle Espaces verts de l’association L’Eveil qui indique à M. [H] [I] qu’il trouve dommage de devoir communiquer par mail avec lui ; un courrier électronique du 4 septembre 2020 de M. [H] [I] à ce responsable, dans lequel il lui indique être ouvert à une rencontre et que cette rencontre lui permettra de se justifier sur, notamment, l’organisation des plannings et la nécessité de prestations extérieures ; un courrier électronique du 8 septembre 2020 du directeur qui indique à M. [H] [I] qu’il n’accueille pas favorablement sa demande d’avertissement à l’égard d’un salarié ; un courrier électronique du 23 novembre 2020 adressé à une commerciale de l’association Seve Eveil, dans lequel il indique qu’il ne l’a pas exclue de certains échanges mais qu’il n’est pas nécessaire de tout savoir et qu’il aurait été plus simple d’échanger de vive voix, plutôt que par mail. M. [H] [I] produit quant à lui sa réponse au courrier électronique du 7 septembre 2020 du responsable du pôle Espaces verts, auquel il indique qu’il n’avait pas besoin d’une réponse par mail puisqu’un rendez-vous lui avait été proposé et qu’ils échangeront le lendemain de vive voix. Au regard de ces éléments, la cour relève que l’employeur ne se prévaut que de trois messages et qu’ils ne corroborent pas ses allégations. Ces messages contredisent en effet la position de l’employeur. Celui-ci reproche à M. [H] [I] de privilégier les échanges par mails, alors que les mails des 7 septembre 2020 et 23 novembre 2020 font état d’une volonté du salarié d’échanger de vive voix. Ensuite, il ne résulte pas de ces pièces que M. [H] [I] ait adopté un ton défensif ou fermé ni qu’il ne pouvait pas demander au directeur de prendre un avertissement à l’égard d’un salarié. Enfin, il ne résulte pas non plus de ces pièces que l’attitude de M. [H] [I] aurait généré une inquiétude et de la frustration dans la structure. Au regard de ces éléments, la cour retient que l’employeur ne justifie pas de ses allégations. c) L’employeur fait état d’une troisième série d’insuffisances, à savoir d’un manque de communication, d’organisation et d’anticipation de M. [H] [I] dans les relations avec les partenaires extérieurs. Le courrier de licenciement est rédigé dans les termes suivants : « S’ajoute à ces éléments, le mécontentement de plusieurs partenaires importants ou prospects de I’ESA T, qui assurent par leurs demandes, le fonctionnement de ce dernier. Malgré plusieurs relances auprès de vous, un certain nombre d’entre eux se plaignent de ne pas recevoir de votre part, dans des délais raisonnables : – les documents témoignant de la traçabilité du lavage des vêtements et EPI confiés aux soins de l’ESA T, indispensables à leur activité et correspondant à un engagement de notre part, – des devis demandés à plusieurs reprises. L’assistante commerciale est à ce titre contrainte de vous relancer régulièrement, étant elle-même sollicitée par les clients et prospects en question, de façon répétée. N’obtenant pas toujours de réponse votre part, elle se trouve dans des situations de blocage, qui nuisent à l’efficacité de son travail. Ce mode de traitement des sollicitations commerciales révèle un manque d’organisation et d’anticipation de votre part, susceptible de générer à terme, un déficit d’image de l’association Seve Eveil et la perte de contrats. Nous en avons encore eu plusieurs illustrations récentes, dès lors que nous avons été amenés à constater qu’en dépit d’une modification profonde des demandes d’un partenaire important, dans le traitement des sacs de « drive » usagés, vous n’avez prévu aucune évolution de la facturation, ni émis aucune alerte à ce sujet, de manière anticipée. Il a également été porté à notre connaissance que la livraison des EPI chez un autre de nos partenaires importants, qui est une tâche affectée aux travailleurs de I’ESAT, n’était pas réalisée correctement, alors-même que sa bonne exécution relève de vos responsabilités. » Devant la cour, l’employeur fait état de différents éléments. En premier lieu, l’employeur se prévaut d’un courrier électronique du 25 novembre 2020 d’une entreprise souhaitant faire appel aux salariés de l’association, ainsi que d’un courrier électronique de l’assistante commerciale de cette dernière, qui indique qu’il s’agit d’une relance suite à une première demande vers le 20 octobre 2020. Toutefois, la cour relève qu’aucun élément du dossier ne permet de retenir que cette première demande avait été transmise à M. [H] [I]. La réalité de l’insuffisance n’est donc pas retenue. En deuxième lieu, l’employeur produit des courriers électroniques de la SNCF des 9 juin 2020, 9 septembre 2020 et 22 septembre 2020 concernant la même demande, qui est restée sans réponse de la part de M. [H] [I]. Ce dernier répond qu’une nouvelle procédure interne venait d’être mise en place, ce qui explique selon lui le retard. La cour retient qu’au regard des allégations opposées des parties, il existe un doute, qui profite au salarié. En troisième lieu, l’employeur, produit un échange de mails du 1er octobre 2020 entre M. [H] [I] et une assistante commerciale, à propos de la transmission par celui-ci d’un devis demandé par un client trois semaines auparavant. M. [H] [I] répond toutefois qu’il n’a pas eu connaissance de la demande lorsqu’elle a été formulée initialement. La cour retient donc qu’il existe un doute, qui profite au salarié. En quatrième lieu, l’employeur produit un échange de mails entre M. [H] [I] et la société Commercique, à propos d’un logiciel. Il résulte toutefois des termes de cet échange que M. [H] [I] a relancé cette société à deux reprises et que le dossier était en outre été suivi par deux salariés de l’association. L’insuffisance alléguée n’est donc pas établie. En cinquième lieu, l’employeur produit des échanges de mails relatifs à la transmission d’indicateurs ANAP intervenue selon lui tardivement en raison d’un retard imputable à M. [H] [I]. Toutefois, il résulte de la lecture de ces échanges que si M. [H] [I] devait effectuer une partie de la transmission, une autre partie relevait d’un collègue ([R]). En conséquence, s’il est constant qu’un retard s’est produit, l’employeur n’établit pas qu’il est imputable à M. [H] [I], de sorte que l’insuffisance alléguée n’est pas établie. Au regard de ce qui précède, la cour retient que l’employeur n’établit aucune des insuffisances qu’il impute à M. [H] [I]. Le licenciement est donc sans cause réelle été sérieuse, de sorte que le jugement est infirmé en ce qu’il a jugé le licenciement fondé au titre d’une insuffisance professionnelle. En application des dispositions de l’article L 1235-3, l’employeur est condamné à payer à M. [H] [I] la somme 17 370 euros à titre d’indemnité, compte tenu du salaire brut moyen de 4 343, 40 euros, de son ancienneté et de sa situation, celui-ci justifiant de la perception de l’allocation de retour à l’emploi et d’un emploi de salarié agricole. Sur la demande de dommages et intérêts pour irrégularité du licenciement Le jugement a retenu que l’association a contrevenu à l’article L 1232-2 du code du travail, qui dispose que « L’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l’objet de la convocation. L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation ». Il a en conséquence condamné l’association à verser à M. [H] [I] la somme de 4 440, 30 euros à titre de dommages et intérêts pour irrégularité de la procédure de licenciement. M. [H] [I] demande à la cour de confirmer le jugement de ce chef, en indiquant que le pouvoir spécial donné au signataire du courrier de licenciement le 16 novembre 2020 est rédigé dans les termes suivants : « [V] [K], agissant en qualité de président de l’Association L’EVEIL, donne un pouvoir spécial à [M] [W], agissant en qualité de directeur de l’Association L’Eveil, pour engager le licenciement de [H] [I], directeur adjoint en charge de l’ESAT. Ce pouvoir donne à [M] [W] toute latitude pour mener du mieux possible cette action ». M. [H] [I] soutient qu’il résulte de ces termes que la décision de le licencier était déjà prise le 16 novembre 2020, alors qu’il n’a pourtant été convoqué à un entretien préalable que le 3 décembre 2020. L’intimée le conteste, indiquant que M. [W] avait toute latitude pour mener ou non à son terme la procédure de licenciement. Dans ce cadre, la cour retient qu’il résulte des termes mêmes du pouvoir spécial que M. [W] a reçu pouvoir « pour engager le licenciement », formule dont il résulte que la décision de licencier M. [H] [I] avait déjà été prise à la date du 16 novembre 2020, alors que l’entretien préalable n’avait pas encore eu lieu. Le jugement est toutefois infirmé en ce qu’il a alloué à M. [H] [I] une somme de 4 440, 30 euros. En effet, sa demande formée pour licenciement sans cause réelle et sérieuse tend à faire réparer aussi bien le préjudice subi du fait d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse que celui résultant de l’irrégularité de la procédure (Cass. Soc. 7 juillet 1988 n° 85-44.818). Sa demande au titre de l’irrégularité du licenciement est donc rejetée. Sur la demande d’indemnité pour licenciement vexatoire M. [H] [I] demande la condamnation de l’employeur à lui payer une indemnité pour licenciement vexatoire, aux motifs, notamment, que le licenciement lui a été notifié durant ses congés de Noël le 30 décembre 2020, que son poste de travail informatique et sa messagerie étaient verrouillés dès le 4 janvier 2021, que son employeur lui a ensuite notifié une dispense de préavis avec effet immédiat sans qu’il puisse saluer ses collègues, et qu’il a dû ensuite prendre un traitement anxiolytique compte tenu des circonstances. L’employeur répond que M. [H] [I] avait été dispensé de préavis et qu’il n’établit pas le préjudice qu’il allègue. Dans ce cadre, la cour relève que le courrier de licenciement indique expressément que le préavis de quatre mois débutera à la date de présentation de ce courrier. Ainsi, en ne permettant plus au salarié un accès à ses outils informatiques et donc de travailler, l’employeur a eu une attitude vexatoire et fautive, qui engage sa responsabilité et qui justifie sa condamnation à payer une somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts. Sur la demande de rappel de salaire M. [H] [I] demande la condamnation de l’employeur à lui payer un rappel de salaire de 1 529, 91 euros au motif que l’indemnité d’astreinte ne lui a plus été versée à compter du mois de janvier 2021, alors pourtant qu’il s’agissait d’un élément du salaire. L’employeur répond que le contrat de travail ne prévoit pas d’astreinte. Dans ce cadre, la cour relève qu’alors que le principe même de l’astreinte est contestée, M. [H] [I] ne justifie pas du fondement au titre duquel il formule sa demande et ne fournit en outre aucun élément de calcul de la somme qu’il demande, se bornant à faire état d’une somme de 1 529, 91 euros, sans autre précision. Sa demande est donc rejetée. Le jugement, qui a accueilli cette demande, est dès lors infirmé. Sur les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile Le jugement est infirmé en ce qu’il a débouté M. [H] [I] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’association est condamnée à payer la somme de 4 000 euros au titre de cet article. Sur les dépens Le jugement est infirmé en ce qu’il a condamné M. [H] [I] aux dépens. L’employeur, qui succombe, est condamné aux dépens de première instance et d’appel. Par ces motifs : La cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi, Infirme le jugement, sauf en ce qu’il a jugé infondée la demande de M. [H] [I] en contestation du pouvoir du signataire de la lettre de licenciement et l’en a débouté ; Statuant à nouveau de ces chefs, Juge le licenciement sans cause réelle et sérieuse ; Condamne l’association Seve Eveil, venant aux droits de l’association L’Eveil, à payer à M. [H] [I] la somme de : 17 370 euros à titre d’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse ; 5 000 euros de dommages et intérêts pour les conditions vexatoires du licenciement ; 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Rejette le surplus des demandes formées par les parties ; Condamne l’association Seve Eveil, venant aux droits de l’association L’Eveil, aux dépens de première instance et d’appel. LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
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