La circonstance que l’écriture d’un scénario ait fait l’objet d’ateliers collectifs avec des séances participatives ne permet pas de déterminer précisément les élèves qui auraient finalement participé à l’élaboration d’une version finale et la nature de leur contribution particulière. La notion d’oeuvre collective doit donc être écartée en l’espèce. Seul compte le nom de la personne (étudiant) sous laquelle est divulguée l’oeuvre (présomption de titularisé des droits).
Par ailleurs, un scénario de film peut être original même s’il constitue un agencement créatif d’une histoire qui comporte des choix pour l’adaptation d’une oeuvre littéraire. Les modifications induites par une adaptation de roman qu’il s’agisse de sa sphère temporelle, géographique ou des personnages caractérisent parfaitement l’originalité d’une oeuvre et ne peuvent être écartés comme non probant de l’empreinte de la personnalité. Ces modifications constituent au contraire des choix, une composition et un mode narratif qui sont autant de manifestations de la personnalité. La seule affirmation du caractère banal des modifications induites par une adaptation n’est nullement probante d’une absence d’originalité, sauf à dénier par principe à toute adaptation d’une oeuvre la possibilité de constituer une nouvelle oeuvre, ce qui est contraire aux dispositions de l’article L 112-3 du Code de la propriété intellectuelle. S’agissant d’un scénario destiné à la création d’une oeuvre audiovisuelle, la question de la titularité du droit d’auteur doit également être appréhendé au regard des dispositions spécifiques aux oeuvres audiovisuelles et notamment l’article L 113-7 du code de la propriété intellectuelle qui dispose que “Ont la qualité d’auteur d’une oeuvre audiovisuelle la ou les personnes physiques qui réalisent la création intellectuelle de cette oeuvre. Sont présumés, sauf preuve contraire, coauteurs d’une oeuvre audiovisuelle réalisée en collaboration: 1°) l’auteur du scénario 2°) l’auteur de l’adaptation 3°) l’auteur du texte parlé 4°) l’auteur des compositions musicales avec ou sans paroles spécialement réalisées pour l’oeuvre 5°) le réalisateur. Lorsque l’oeuvre audiovisuelle est tirée d’une oeuvre ou d’un scénario préexistants encore protégés, les auteurs de l’oeuvre orgininaire sont assimilés aux auteurs de l’oeuvre nouvelle.” Toute oeuvre de l’esprit quels qu’en soit le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination comme rappelé par l’article L 112-1 du même code, dès lors qu’elle est formalisée et présente une certaine originalité bénéficie de la protection des droits d’auteur prévue par le code de la propriété intellectuelle. La question de l’originalité d’un scénario de film qui adapte une oeuvre littéraire et qui est destiné à la création d’une oeuvre audiovisuelle doit également être appréhendée à la lumière des dispositions de l’article L 112-3 du code de la propriété intellectuelle aux termes duquel “ les auteurs de traductions, d’adaptations, transformations ou arrangements des oeuvres de l’esprit jouissent de la protection instituée par le présent code sans préjudice des droits de l’auteur de l’oeuvre originale. …” Lorsque la protection par le droit d’auteur d’une oeuvre est comme en l’espèce contestée en défense, il incombe à celui qui s’en prévaut de définir et d’expliciter les contours de l’originalité qu’il allègue. En effet, seul l’auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d’identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole. Le principe de la contradiction posé par l’article 16 du code de procédure civile commande que le défendeur puisse connaître précisément les caractéristiques qui fondent l’atteinte qui lui est imputée et apporter la preuve qui lui incombe de l’absence d’originalité. L’originalité s’entend comme le reflet de la personnalité du créateur, et démontre un parti pris esthétique portant l’empreinte de la personnalité de son auteur, de ses choix libres et créatifs et non de simples déclinaisons ou des transpositions, conférant ainsi à l’objet un caractère d’originalité. |
→ Résumé de l’affaireLe litige oppose Mme [Y] [S] [J] à la société CINEMAGIS concernant les droits d’auteur du scénario de film intitulé « L’ombre qui grandit ». Mme [J] revendique les droits d’auteur sur ce scénario et accuse CINEMAGIS d’avoir réalisé un film sans autorisation basé sur ce scénario, demandant des dommages et intérêts ainsi que la destruction des éléments de tournage du film. De son côté, CINEMAGIS conteste les accusations de contrefaçon et demande des dommages et intérêts pour le préjudice subi en raison de l’interdiction de poursuivre le film. L’affaire est en attente de jugement après l’ordonnance de clôture rendue le 11 avril 2024.
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