Le caractère professionnel d’une pathologie / maladie

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Le caractère professionnel d’une pathologie / maladie

L’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale pose une présomption d’origine professionnelle au bénéfice de toute maladie désignée dans un tableau de maladie professionnelle et contractée dans les conditions mentionnées dans ce tableau.

Fixés par décret, les tableaux précisent la nature des travaux susceptibles de provoquer la maladie, énumèrent les affections provoquées et le délai dans lequel la maladie doit être constatée après la cessation de l’exposition du salarié au risque identifié pour être prise en charge.

La maladie déclarée doit correspondre précisément à celle décrite au tableau, avec tous ses éléments constitutifs et doit être constatée conformément aux éléments de diagnostic éventuellement prévus (2e Civ., 17 mai 2004, pourvoi n° 03-11.968).

Il est de jurisprudence constante que la désignation des maladies figurant dans les tableaux présente un caractère limitatif, en sorte que ne peuvent relever de ce cadre de reconnaissance de maladie professionnelle les affections n’y figurant pas (Soc., 5 mars 1998, n° 96-15.326).

Lorsque la demande de la victime réunit ces conditions, la maladie est présumée d’origine professionnelle, sans que la victime ait à prouver le lien de causalité entre son affection et son travail.

Si une ou plusieurs de ces conditions ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle, lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Dans ce cas, la caisse reconnaît l’origine professionnelle de la maladie après avis motivé d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

9ème Ch Sécurité Sociale

ARRÊT N°

N° RG 21/03999 – N° Portalis DBVL-V-B7F-RZID

[O] [M]

C/

CPAM DU FINISTERE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Copie certifiée conforme délivrée

le:

à:

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 24 MAI 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ:

Président : Madame Elisabeth SERRIN, Présidente de chambre

Assesseur : Madame Véronique PUJES, Conseillère

Assesseur : Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, Conseillère

GREFFIER :

Monsieur Philippe LE BOUDEC lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 22 Mars 2023

devant Madame Anne-Emmanuelle PRUAL, magistrat chargé d’instruire l’affaire, tenant seule l’audience, sans opposition des représentants des parties et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 24 Mai 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

DÉCISION DÉFÉRÉE A LA COUR:

Date de la décision attaquée : 22 Février 2021

Décision attaquée : Jugement

Juridiction : Tribunal Judiciaire de QUIMPER – Pôle Social

Références : 19/00120

APPELANT :

Monsieur [O] [M]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représenté par Me Guillaume PLOUX, avocat au barreau de QUIMPER, dispensé de comparution

INTIMÉE :

LA CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DU FINISTERE

[Adresse 1]

[Localité 2]

représentée par Madame [C] [N] en vertu d’un pouvoir spécial

EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 6 mars 2018, M. [O] [M] a déclaré une maladie professionnelle en raison d’un ‘canal carpien droit’.

Le certificat médical initial établi le 19 février 2018 fait état d’un ‘canal carpien droit’ avec prescription d’un arrêt de travail jusqu’au 25 mars 2018.

Par décision du 19 novembre 2018, après instruction et suivant avis du 9novembre 2018 du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Bretagne (CRRMP), la caisse primaire d’assurance maladie du Finistère (la caisse) a refusé de prendre en charge la maladie ‘syndrome du canal carpien droit’ au titre du tableau n°57 des maladies professionnelles.

Contestant cette décision, M. [M] a saisi la commission de recours amiable le 3 janvier 2019, laquelle a confirmé le refus de prise en charge lors de sa séance du 28 février 2019.

Il a ensuite porté le litige devant le pôle social du tribunal de grande instance de Quimper, le 21 mars 2019.

Par ordonnance du 5 avril 2019, la présidente de la juridiction a ordonné la transmission du dossier au CRRMP de Midi-Pyrénées.

Compte tenu de l’incapacité de ce CRRMP à remplir la mission confiée, le dossier de M. [M] a été transmis, par ordonnance du 23 avril 2019, au CRRMP des Pays de la Loire, lequel a rendu un avis défavorable à la reconnaissance de la maladie au titre de la législation professionnelle le 24novembre 2020.

Par jugement du 22 février 2021, ce tribunal devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Quimper, a :

– déclaré recevable mais non fondé le recours de M. [M] ;

– débouté M. [M] de l’ensemble de ses demandes ;

– condamné M. [M] aux dépens.

Par déclaration adressée le 23 mars 2021, M. [M] a interjeté appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 23 février 2021.

Par ses écritures parvenues au greffe par le RPVA le 25 janvier 2022, M.[M], dont le conseil a été dispensé de comparaître à l’audience avec l’accord exprès de la partie adverse, demande à la cour :

– d’infirmer le jugement entrepris ;

Statuant à nouveau :

– de dire et juger qu’il est bien fondé à bénéficier du régime de la maladie professionnelle en ce qui concerne le syndrome du canal carpien droit au titre du tableau 57 ;

– de condamner la caisse à payer la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– de condamner la caisse aux entiers dépens.

Par ses écritures parvenues au greffe le 24 janvier 2022 auxquelles s’est référée sa représentante à l’audience, la caisse demande à la cour, au visa de l’article L.461-1 du code de la sécurité sociale, de :

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté M. [M] de ses demandes ;

– constater que, par avis du 24 novembre 2020, confirmant ainsi l’avis émis par le CRRMP de Bretagne le 9 novembre 2018, le CRRMP des Pays de la Loire a rejeté le lien direct entre la maladie présentée par l’assuré et son travail habituel ;

– juger, en conséquence, bien fondée la décision de la caisse de ne pas reconnaître le caractère professionnel de l’affection déclarée par M.[M] ;

– rejeter les prétentions de M. [M] au titre des frais irrépétibles ;

– déclarer M. [M] mal fondé dans ses prétentions pour le débouter de son appel ;

– le condamner aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions susvisées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1. Sur le caractère professionnel de la pathologie déclarée par M.[M]

L’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale pose une présomption d’origine professionnelle au bénéfice de toute maladie désignée dans un tableau de maladie professionnelle et contractée dans les conditions mentionnées dans ce tableau.

Fixés par décret, les tableaux précisent la nature des travaux susceptibles de provoquer la maladie, énumèrent les affections provoquées et le délai dans lequel la maladie doit être constatée après la cessation de l’exposition du salarié au risque identifié pour être prise en charge.

La maladie déclarée doit correspondre précisément à celle décrite au tableau, avec tous ses éléments constitutifs et doit être constatée conformément aux éléments de diagnostic éventuellement prévus (2e Civ., 17 mai 2004, pourvoi n° 03-11.968).

Il est de jurisprudence constante que la désignation des maladies figurant dans les tableaux présente un caractère limitatif, en sorte que ne peuvent relever de ce cadre de reconnaissance de maladie professionnelle les affections n’y figurant pas (Soc., 5 mars 1998, n° 96-15.326).

Lorsque la demande de la victime réunit ces conditions, la maladie est présumée d’origine professionnelle, sans que la victime ait à prouver le lien de causalité entre son affection et son travail.

Si une ou plusieurs de ces conditions ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle, lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime.

Dans ce cas, la caisse reconnaît l’origine professionnelle de la maladie après avis motivé d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

En l’espèce, M. [M] a exercé la profession de directeur technique de spectacle au sein de la mairie de [Localité 5] du 1er septembre 2014 au 30 septembre 2016.

Le 6 mars 2018, M. [M] a déclaré un syndrome du canal carpien droit, sur la base d’un certificat médical initial du 19 février 2018.

Le tableau n°57 C des maladies professionnelles prévoit pour cette pathologie un délai de prise en charge de 30 jours ainsi qu’une liste limitative de travaux susceptibles de provoquer cette maladie, ceux comportant de façon habituelle, soit des mouvements répétés ou prolongés d’extension du poignet ou de préhension de la main, soit un appui carpien, soit une pression prolongée ou répétée sur le talon de sa main.

Estimant que les conditions tenant au délai de prise en charge et à la liste limitative des travaux n’étaient pas remplies, la caisse a transmis son dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Bretagne, lequel par avis du 9 novembre 2018 a rejeté le lien direct entre la pathologie de M. [M] et son travail habituel.

Désigné par le tribunal, le CRRMP des Pays de la Loire a confirmé cet avis défavorable à la reconnaissance de la maladie au titre de la législation professionnelle compte tenu :

De la pathologie présentée par l’intéressé, syndrome du canal carpien droit,

De sa profession, directeur technique de spectacle,

De l’étude de son poste de travail sur la base des éléments apportés au CRRMP qui montrent l’absence de réalisation habituelle de gestes reconnus comme particulièrement pathogènes,

De l’important dépassement du délai de prise en charge,

et après avoir entendu le représentant de l’ingénieur conseil chef du service de prévention de la CARSAT.

M. [M] produit un récapitulatif détaillé des tâches qu’il effectuait, soulignant l’existence de mouvements répétés ou prolongés de l’extension du poignet, de préhension de la main et un appui carpien ou une pression prolongée ou répétée sur le talon de la main.

Cependant, il déclare avoir cessé son activité le 30 septembre 2016 et la date de première constatation médicale de sa pathologie a été fixée au 19 février 2018, le tableau prévoyant un délai de prise en charge de 30 jours.

S’il justifie que le poste qu’il occupait l’amenait à opérer des mouvements du membre supérieur droit (manutention de chaises et tables pliantes, de structures, assemblages/désassemblages, utilisation d’outillages, enroulage des câbles, conduite de camions, utilisation de l’informatique), il n’établit pas que ceux-ci présentaient un caractère suffisamment prolongé ou répétitif pour justifier du lien direct entre la pathologie déclarée et cette activité professionnelle, étant au surplus relevé le dépassement très significatif du délai de prise en charge.

La prise en charge du syndrome du canal carpien gauche au titre de la législation professionnelle ne constitue pas un argument suffisant pour justifier de la même reconnaissance s’agissant du canal carpien droit.

En conséquence, la pathologie de M. [M] ne peut être considérée d’origine professionnelle de sorte que le jugement entrepris sera confirmé dans toutes ses dispositions.

2.Sur les frais irrépétibles et les dépens

Les dépens de la présente procédure d’appel seront laissés à la charge de M.[M] qui succombe à l’instance et qui de ce fait ne peut prétendre à l’application des dispositions l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement dans toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

DÉBOUTE M. [O] [M] de sa demande d’indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [O] [M] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

Questions / Réponses juridiques

Quelles sont les dispositions spécifiques de la loi du 6 janvier 1978 concernant l’action de groupe ?

La loi n°78-17 du 6 janvier 1978, modifiée par la loi n°2018-493 du 20 juin 2018, a pour objectif principal de protéger les droits des personnes physiques en matière de données à caractère personnel. Elle établit des conditions précises pour que les organisations syndicales puissent intervenir dans le cadre d’une action de groupe.

Ces conditions stipulent que les syndicats ne peuvent agir que si plusieurs personnes dans une situation similaire subissent un dommage, et que des cas individuels doivent être clairement identifiés. Cela signifie que l’action de groupe ne peut être engagée que si ces critères sont respectés, ce qui prévalait sur les dispositions générales du code du travail concernant le droit d’agir des syndicats.

En conséquence, les syndicats doivent démontrer que leur action est fondée sur des intérêts collectifs et non individuels, et que les dommages subis sont d’une nature qui affecte l’ensemble de leurs membres.

Pourquoi l’action de la fédération Force ouvrière n’a-t-elle pas été jugée recevable ?

L’action de la fédération Force ouvrière n’a pas été jugée recevable car elle n’a pas respecté les procédures spécifiques requises pour une action de groupe. En effet, pour qu’un syndicat puisse agir, il doit présenter des cas individuels de personnes subissant un dommage ayant pour cause commune un manquement aux dispositions du Règlement (UE) 2016/679.

Dans cette affaire, le syndicat n’a pas engagé la procédure spécifique à l’action de groupe, comme le stipule l’article 849-1 du code de procédure civile. Ce dernier exige que les cas individuels soient exposés au soutien de l’action, ce qui n’a pas été fait.

Ainsi, la cour a conclu que les dispositions spécifiques de la loi de 1978, qui régissent l’intervention des syndicats dans les actions de groupe, prévalent sur les dispositions générales du code du travail, rendant l’action de la fédération non recevable.

Quels sont les droits des syndicats en matière d’action en justice selon le code du travail ?

Selon l’article L. 2132-3 du code du travail, les syndicats professionnels ont le droit d’agir en justice pour défendre les intérêts collectifs de la profession qu’ils représentent. Ils peuvent exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant des faits qui portent un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif.

Cependant, l’action civile d’un syndicat n’est recevable que si le litige soulève une question de principe dont la solution pourrait avoir des conséquences pour l’ensemble de ses adhérents. Cela signifie qu’un syndicat ne peut pas agir pour défendre un intérêt purement individuel, mais peut le faire si un intérêt individuel soulève une question de principe ou de portée générale.

Cette restriction vise à garantir que les actions des syndicats soient toujours orientées vers la protection des intérêts collectifs de leurs membres, plutôt que de se concentrer sur des cas individuels isolés.

Quelles sont les implications de la décision de la cour d’appel de Versailles ?

La décision de la cour d’appel de Versailles a des implications significatives pour la fédération Force ouvrière et pour la manière dont les syndicats peuvent engager des actions en justice. En confirmant le jugement du tribunal judiciaire de Nanterre, la cour a réaffirmé que les syndicats doivent suivre des procédures spécifiques pour que leurs actions soient recevables.

Cela signifie que les syndicats doivent être rigoureux dans la présentation de leurs cas, en s’assurant qu’ils respectent les exigences légales concernant l’identification des dommages subis par plusieurs personnes dans des situations similaires.

De plus, cette décision souligne l’importance de la conformité avec les règlements européens sur la protection des données, en précisant que les syndicats ne peuvent pas invoquer ces règlements pour justifier des actions qui ne respectent pas les conditions établies par la loi de 1978.

En conséquence, cette décision pourrait limiter la capacité des syndicats à agir dans des cas similaires à l’avenir, à moins qu’ils ne puissent démontrer clairement que les conditions requises pour une action de groupe sont remplies.


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