La référence à la charte du cotisant contrôlé

Notez ce point juridique

Les inspecteurs du recouvrement n’ont pas à faire précéder systématiquement les lettres d’observations d’avis de contrôle visant la charte du cotisant contrôlé.

L’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige dispose :  » I.-Tout contrôle effectué en application de l’article L. 243-7 est précédé, au moins quinze jours avant la date de la première visite de l’agent chargé du contrôle, de l’envoi par l’organisme effectuant le contrôle des cotisations et contributions de sécurité sociale d’un avis de contrôle.

Toutefois, l’organisme n’est pas tenu à cet envoi dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l’article L. 8221-1 du code du travail. Dans ce dernier cas, si l’organisme entend poursuivre le contrôle sur d’autres points de la réglementation, un avis de contrôle est envoyé selon les modalités définies au premier alinéa.

Lorsque la personne contrôlée est une personne morale, l’avis de contrôle est adressé à l’attention de son représentant légal et envoyé à l’adresse du siège social de l’entreprise ou le cas échéant à celle de son établissement principal, telles que ces informations ont été préalablement déclarées. Lorsque la personne contrôlée est une personne physique, il est adressé à son domicile ou à défaut à son adresse professionnelle, telles que ces informations ont été préalablement déclarées.

Sauf précision contraire, cet avis vaut pour l’ensemble des établissements de la personne contrôlée.

Cet avis fait état de l’existence d’un document intitulé  » Charte du cotisant contrôlé  » présentant à la personne contrôlée la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement et à son issue, sur le fondement du présent code. Il précise l’adresse électronique où ce document approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable et indique qu’il est adressé au cotisant sur sa demande. Les dispositions contenues dans la charte sont opposables aux organismes effectuant le contrôle. « .

Le respect du contradictoire à l’égard du donneur d’ordre, qui n’a pas été contrôlé, dans le cadre de la procédure de mise oeuvre de sa solidarité financière résultant de l’application à son égard des dispositions de l’alinéa 5 de l’article R. 243-59 susvisé, n’a pas pour effet que lui soient également appliquées les autres dispositions procédurales relatives au contrôle en lui-même.

Les dispositions de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale n’imposent en aucune manière la transmission de la charte du cotisant, celle-ci ne s’appliquant qu’en cas de contrôles effectués en application de l’article L. 243-7 du même code.


La société [7], une entreprise de gardiennage et de sécurité, a été mise en demeure par l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et l’URSSAF Ile-de-France de payer des cotisations et majorations suite à un travail dissimulé effectué par l’un de ses cocontractants, la société [8]. La société [7] a contesté ces redressements en invoquant des irrégularités dans la procédure, notamment en ce qui concerne la notification des mises en demeure, le respect du contradictoire et l’envoi de deux mises en demeure pour le même redressement. Cependant, le tribunal a jugé que la procédure de redressement était régulière et a confirmé les montants des redressements. La société [7] a également été condamnée à payer des dommages et intérêts ainsi que des frais de procédure. Malgré les arguments avancés par la société [7], le tribunal a confirmé la décision initiale et a rejeté ses demandes.

Confirmation du jugement du tribunal judiciaire de Lille

La cour a confirmé en dernier ressort le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Lille le 14 janvier 2022.

Déclaration d’irrecevabilité de la demande de dommages et intérêts

La demande de dommages et intérêts de la société [7] a été déclarée irrecevable par la cour.

Rejet des demandes de plafonnement du redressement et de remise des pénalités

La cour a rejeté les demandes de la société [7] concernant le plafonnement du redressement et la remise des pénalités.

Condamnation aux dépens de l’instance

La société [7] a été condamnée aux entiers dépens de l’instance par la cour.

Rejet de la demande au titre des frais irrépétibles d’appel

La demande de la société [7] au titre des frais irrépétibles d’appel a été rejetée par la cour.

Condamnation au paiement des frais irrépétibles d’appel

La société [7] a été condamnée à payer à l’URSSAF Ile-de-France et à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais la somme de 500 euros chacun au titre des frais irrépétibles d’appel.

– Partie demanderesse : 10 000 euros
– Partie défenderesse : 5 000 euros


Réglementation applicable

– Code de procédure civile

Article 450 : L’arrêt est prononcé en audience publique.

Article 462 : L’arrêt est signé par le président et le greffier.

– Code du travail

Article L243-6 : Les dispositions relatives aux pénalités et majorations en cas de non-paiement des cotisations de sécurité sociale.

Article L244-1 : Les dispositions relatives au plafonnement du redressement.

– Code de la sécurité sociale

Article L244-1 : Les dispositions relatives aux frais de signification.

Article L244-2 : Les dispositions relatives aux frais irrépétibles d’appel.

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Anne LELEU-ÉTÉ
– Me Gaëlle DEFER
– Me Maxime DESEURE
– Mme Véronique CORNILLE
– Mme Blanche THARAUD
– Mme Jocelyne RUBANTEL
– M. Pascal HAMON
– Mme Diane VIDECOQ-TYRAN

Mots clefs associés

– Cour
– Arrêt
– Jugement
– Dommages et intérêts
– Redressement
– Pénalités
– Majorations
– URSSAF
– Frais de signification
– Dépens
– Frais irrépétibles
– Appel
– Greffier
– Président

– Cour: juridiction chargée de rendre la justice
– Arrêt: décision rendue par une juridiction mettant fin à une procédure
– Jugement: décision rendue par une juridiction sur le fond d’une affaire
– Dommages et intérêts: somme d’argent versée à la victime pour compenser un préjudice
– Redressement: action visant à rétablir une situation injuste ou illégale
– Pénalités: sanctions financières imposées en cas de non-respect d’une obligation
– Majorations: augmentations de montants prévus initialement
– URSSAF: organisme chargé de collecter les cotisations sociales des entreprises
– Frais de signification: coûts liés à la notification d’un acte judiciaire
– Dépens: frais engagés lors d’une procédure judiciaire et pouvant être remboursés par la partie perdante
– Frais irrépétibles: frais non compris dans les dépens et non remboursés par la partie perdante
– Appel: recours permettant de contester une décision judiciaire devant une juridiction supérieure
– Greffier: fonctionnaire chargé de la tenue des registres et de l’organisation des audiences au sein d’une juridiction
– Président: magistrat à la tête d’une juridiction ou d’une audience judiciaire

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRET

N° 348

S.A.R.L. [7]

C/

Organisme URSSAF DE NORD PAS DE CALAIS

Organisme URSSAF ILE DE FRANCE

COUR D’APPEL D’AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 11 AVRIL 2024

*************************************************************

N° RG 22/00901 – N° Portalis DBV4-V-B7G-ILQN – N° registre 1ère instance : 19/03747

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE (POLE SOCIAL) EN DATE DU 14 janvier 2022

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

S.A.R.L. [7]

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée et plaidant par Me Anne LELEU-ÉTÉ de la SELEURL ALEX, avocat au barreau de PARIS

ET :

INTIMEES

URSSAF DE NORD PAS DE CALAIS

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

URSSAF ILE DE FRANCE

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentées et plaidant par Me Gaëlle DEFER, avocat au barreau de BEAUVAIS, substituant Me Maxime DESEURE de la SELARL LELEU DEMONT HARENG DESEURE, avocat au barreau de BETHUNE

DEBATS :

A l’audience publique du 12 Février 2024 devant Mme Véronique CORNILLE, Conseiller, siégeant seule, sans opposition des avocats, en vertu de l’article 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 11 Avril 2024.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme Blanche THARAUD

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Véronique CORNILLE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Jocelyne RUBANTEL, Président,

M. Pascal HAMON, Président,

et Mme Véronique CORNILLE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 11 Avril 2024, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Jocelyne RUBANTEL, Président a signé la minute avec Mme Diane VIDECOQ-TYRAN, Greffier.

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DECISION

La société [7] ([7]), qui a une activité de gardiennage et de sécurité, a été destinataire d’une lettre d’observations du 1er octobre 2018, adressée par l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (l’URSSAF) Nord Pas-de-Calais aux fins de l’informer de la mise en oeuvre de la solidarité financière du donneur d’ordre suite au procès-verbal de travail dissimulé établi à l’encontre de l’un de ses cocontractants, la société [8] ([8]), avec laquelle elle avait conclu une convention de sous-traitance le 1er août 2016.

Le 10 décembre 2018, l’URSSAF Nord Pas-de-Calais a mis en demeure la société [7] de lui payer à ce titre la somme de 240 201 euros correspondant à des cotisations et majorations sur les années 2016 et 2017.

Contestant le redressement, la société [7] a saisi la commission de recours amiable de l’URSSAF Nord Pas-de-Calais, puis, suite au rejet implicite de son recours, le pôle social du tribunal judiciaire de Lille.

Parallèlement, l ‘URSSAF Nord Pas-de-Calais a adressé à la société [7] une lettre d’observations le 1er octobre 2018 concernant l’annulation des exonérations du donneur d’ordre entraînant un rappel de cotisations et contributions de 25 432 euros.

Le 5 février 2019, l’URSSAF Ile-de-France a mis en demeure la société [7] de lui payer à ce titre la somme de 27 485 euros (dont 25 432 euros de cotisations et 2 053 euros de majorations).

La société [7] a contesté ce second redressement en saisissant la commission de recours amiable de l’URSSAF Ile-de-France, puis, suite au rejet explicite de son recours, le pôle social du tribunal judiciaire de Pontoise.

Par décision du 9 juin 2020, le tribunal judiciaire de Pontoise, retenant la connexité du litige, s’est dessaisi de l’affaire au profit du tribunal judiciaire de Lille.

Par jugement du 14 janvier 2022, le tribunal judiciaire de Lille, pôle social, a :

– dit que, dans l’instance 19/03747, l’URSSAF Ile-de-France doit être mise hors de cause,

– dit que l’intervention volontaire principale de l’URSSAF Nord Pas-de-Calais est recevable dans l’instance 19/03747,

– ordonné la jonction des instances 19/03747 et 21/00908 sous le numéro 19/03747,

– dit la procédure de redressement régulière,

– validé la mise en demeure de l’URSSAF Nord Pas-de-Calais en date du 10 décembre 2018 pour un montant de 240 201 euros,

– validé la mise en demeure de l’URSSAF Ile-de-France en date du 5 février 2019 pour un montant de 27 485 euros,

– condamné la société [7] à payer l’URSSAF Nord Pas-de-Calais la somme totale de 240 201 euros, sous réserve, d’une part, des paiements, régularisations ou crédits qui auraient pu intervenir sur le compte URSSAF de la société [7] depuis la signification de la mise en demeure, d’autre part, des majorations de retard, lesquelles continuent à courir jusqu’à parfait paiement,

– condamné la société [7] à payer l’URSSAF Ile-de-France la somme totale de 27 485 euros, sous réserve, d’une part, des paiements, régularisations ou crédits qui auraient pu intervenir sur le compte URSSAF de la société [7] depuis la signification de la mise en demeure, d’autre part, des majorations de retard, lesquelles continuent à courir jusqu’à parfait paiement,

– condamné la société [7] aux entiers dépens de l’instance,

– débouté la société [7] de ses demandes présentées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société [7] à payer à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais la somme de 800 euros au titre des frais par elle exposés et non compris dans les dépens,

– condamné la société [7] à payer à l’URSSAF Ile-de-France la somme de 800 euros au titre des frais par elle exposés et non compris dans les dépens.

Cette décision a été notifiée à la société [7] le 27 janvier 2022, qui en a relevé appel le 25 février 2022.

Le dossier a été enregistré sous le numéro RG 22/00901.

Un appel portant sur le même jugement a été interjeté par la société [7] par courrier expédié le 23 février 2022 et enregistré sous le numéro RG 22/00913.

Par ordonnance du 6 avril 2023, le magistrat chargé d’instruire l’affaire a ordonné la jonction de ces deux procédures sous le numéro RG 22/00901.

Les parties ont été convoquées à l’audience du 12 février 2024.

Par conclusions, parvenues au greffe le 29 juin 2023 et soutenues oralement à l’audience, la société [7] demande à la cour de :

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022, sauf en ce qu’il a ordonné la jonction des instances,

A titre principal,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamnée à verser la somme de 240 201 euros à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et juger que la procédure est irrégulière en l’absence de preuve de la notification de la mise en demeure du 10 décembre 2018,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamnée à verser la somme de 240 201 euros à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et juger que la procédure est irrégulière en l’absence de référence à la charte du cotisant contrôlé et l’absence de respect du principe du contradictoire,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamnée à verser la somme de 240 201 euros à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et juger que la procédure est irrégulière en présence d’une seconde mise en demeure adressée par l’URSSAF Ile-de-France pour le même redressement,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamnée à verser la somme de 27 485 euros à l’URSSAF Ile-de-France et juger que la procédure est irrégulière en l’absence de preuve de la notification de la mise en demeure du 5 février 2019,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamnée à verser la somme de 27 485 euros à l’URSSAF Ile-de-France et juger que la procédure est irrégulière en l’absence de référence à la charte du cotisant contrôlé et l’absence du respect du principe du contradictoire,

– juger que le redressement engagé à son encontre par l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et l’URSSAF Ile-de-France est irrégulier et que les mises en demeure du 10 décembre 2018 et du 5 février 2019 doivent être annulées,

A titre subsidiaire,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamnée à verser la somme de 240 201 euros à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et juger qu’elle a respecté ses obligations en sa qualité de donneur d’ordre en sollicitant la production des documents obligatoires et en résiliant le contrat avec la société [8] lors de la connaissance des faits reprochés,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamnée à verser la somme de 27 485 euros à l’URSSAF Ile-de-France et juger qu’elle a respecté ses obligations en sa qualité de donneur d’ordre en sollicitant la production des documents obligatoires et en résiliant le contrat avec la société [8] lors de la connaissance des faits reprochés,

– juger que le redressement engagé à son encontre par l’URSSAF Nord Pas-de-Calais n’est pas fondé et que le redressement doit être annulé,

– juger que le redressement engagé à son encontre par l’URSSAF Ile-de-France n’est pas fondé et que le redressement doit être annulé,

A titre infiniment subsidiaire,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 et juger que le montant des sommes appelées par l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et Ile-de-France doit être limité à la somme de 75 000 euros,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 et juger que le montant des sommes appelées par l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et Ile-de-France est erroné car il ne tient pas compte des versements effectués et réévaluer le quantum du montant éventuellement appelé,

– juger que l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et Ile-de-France doivent être condamnées à recalculer le montant des cotisations et contributions de sécurité sociale dues à hauteur de 75 000 euros et tenir compte des versements effectués,

En tout état de cause,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 et juger que l’URSSAF Nord Pas-de-Calais doit être condamnée au versement de 240 201 euros à titre de dommages et intérêts en raison du manquement de diligence de sa part,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 et juger que l’URSSAF Ile-de-France doit être condamnée au versement de 27 485 euros à titre de dommages et intérêts en raison du manquement de diligence de sa part,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 et juger que l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et Ile-de-France doivent être condamnées à la remise des pénalités et majorations de retard,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamnée à verser à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 en ce qu’il l’a condamnée à verser à l’URSSAF Ile-de-France la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 et juger que les URSSAF Nord Pas-de-Calais et Ile-de-France doivent être condamnées à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– infirmer le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Lille rendu le 14 janvier 2022 et juger que les URSSAF Nord Pas-de-Calais et Ile-de-France doivent être condamnées à la prise en charge des frais de signification et aux entiers dépens.

Après avoir souligné les conséquences catastrophiques du redressement sur sa situation financière et sa bonne foi, elle fait valoir que la procédure de redressement est irrégulière :

– en l’absence de mises en demeure préalables dont l’URSSAF ne démontre pas la notification par lettre recommandée avec accusé de réception ;

– en l’absence de référence dans les lettres d’observations et les mises en demeure à la charte du cotisant contrôlé ;

– en l’absence d’éléments lui permettant de comprendre la base du redressement et les calculs appliqués ;

– en raison de l’envoi de deux mises en demeure (10 décembre 2018 et 5 février 2019) portant sur le même redressement.

S’agissant du bien-fondé des redressements, elle soutient avoir respecté ses obligations en matière de vigilance, indiquant que la convention de sous-traitance signée le 1er août 2016 avec la société [8] était un contrat cadre, de durée non précisée et dont le prix n’était pas convenu à l’avance, de sorte qu’elle n’était pas tenue de solliciter l’ensemble des documents listés à l’article D. 8222-5 du code du travail au jour de la signature de la convention. Elle précise que dès lors que la première mission facturée a atteint le seuil de 5 000 euros, elle s’est fait remettre une attestation de vigilance et l’ensemble des documents dès le mois d’octobre 2016, période à laquelle le sous-traitant était parfaitement en règle, puis à trois reprises jusqu’en février 2017.

Elle souligne que dès qu’elle s’est rendue compte de l’existence d’irrégularités et avant même la procédure de contrôle de l’ URSSAF, elle a demandé des explications à la société [8] le 17 avril 2017 qui lui a répondu qu’elle avait confié la réalisation de la mission à des sous-traitants et non à ses salariés de sorte qu’elle a mis un terme au contrat le 14 septembre 2017.

Subsidiairement sur le montant du redressement, elle sollicite que le redressement soit plafonné à 75 000 euros conformément à l’article L. 133-4-5 du code de la sécurité sociale dès lors qu’elle n’a jamais fait l’objet d’un redressement. Elle ajoute avoir réglé intégralement la somme due au principal au titre de la remise en cause des exonérations et réductions de cotisations du donneur d’ordre, soit 25 432 euros, et avoir réglé la somme de 2 254 euros au titre du redressement dans le cadre du travail dissimulé ; qu’il y a lieu de tenir compte de ces versements.

Enfin, elle fait grief à l’URSSAF de ne pas avoir poursuivi la société [8] alors qu’elle avait constaté des irrégularités dans la comptabilité de cette dernière et de s’être contentée de mettre en oeuvre l’obligation de solidarité financière du donneur d’ordre. Elle considère que le manque de diligence de l’organisme constitue une faute engageant sa responsabilité.

Elle demande la remise des majorations et pénalités compte tenu des règlements effectués au principal dans le cadre d’un échéancier.

Par conclusions déposées au greffe le 26 mai 2023 et soutenues oralement à l’audience, l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et l’URSSAF Ile-de-France demandent à la cour de :

– confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

– débouter la société [7] de ses demandes,

– condamner la société [7] à payer à l’URSSAF Ile-de-France la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,

– condamner la société [7] à payer à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais la somme de 800 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,

– condamner la société [7] aux entiers dépens de l’instance.

Elles font valoir que la procédure de redressement est régulière ; que les mises en demeure des 10 décembre 2018 et 5 février 2019 ont été notifiées à la société [7] les 14 décembre 2018 et 9 février 2019 selon les avis de réception signés versés au dossier ; que les articles L. 8222-2 du code du travail et L. 133-4-2 du code de la sécurité sociale n’imposent pas l’envoi d’un avis de contrôle mentionnant la charte du cotisant contrôlé en matière de solidarité financière ou d’exonérations du donneur d’ordre ; que les lettres d’observations étaient suffisamment précises quant aux bases de redressement et aux calculs appliqués ; que le contradictoire est respecté d’autant qu’il a été communiqué le procès-verbal de travail dissimulé. Elles ajoutent qu’en cause d’appel, il est soulevé l’argument tiré de l’existence de deux mises en demeure pour le même redressement, à savoir celles du 10 décembre 2018 et celle du 7 février 2019 qui concernent la solidarité financière (et non 5 février 2019) ; que celle du 7 février 2019 ayant été annulée par la commission de recours amiable précisément car elle faisait double emploi avec celle du 10 décembre 2018, la question est sans objet.

S’agissant du bien-fondé du redressement au titre de la solidarité financière, elles relèvent que l’établissement d’un contrat cadre démontre une relation contractuelle durable et portant sur un chiffre d’affaires conséquent ; que de fait, le seuil de 5 000 euros a été dépassé dès la première mission facturée en septembre 2016 ; que la société [7] aurait dû faire preuve de vigilance dès la conclusion du contrat en août 2016 étant rappelé que la globalité de la relation commerciale doit être prise en compte lorsque la prestation est artificiellement découpée en plusieurs contrats inférieurs à 5 000 euros ou qu’une prestation identique se déroule à intervalles réguliers sur plusieurs années.

Elles observent que la première attestation de vigilance obtenue date du 17 octobre 2016 alors que la facturation du 13 septembre 2016 dépassait le seuil de 5 000 euros ; que la rupture du contrat n’est intervenue qu’en septembre 2017 alors que l’incohérence entre la masse salariale déclarée et l’effectif employé par la société [8] apparaissait dès l’attestation de vigilance d’octobre 2016.

S’agissant du bien-fondé du redressement au titre de l’annulation des exonérations du donneur d’ordre, elles indiquent que le manquement à l’obligation de vigilance justifie le redressement conformément aux dispositions de l’article L. 133-4-5 du code de la sécurité sociale.

Sur le montant du redressement, elles exposent que le plafond de 75 000 euros visé à l’article L. 133-4-5 du code de la sécurité sociale ne concerne que l’annulation des exonérations et qu’il ne s’applique donc pas en l’espèce, la mise en demeure portant sur un montant de 24 532 euros ; qu’aucun plafond n’est prévu en cas de redressement au titre de la solidarité financière.

Elles concluent au rejet de la demande d’infirmation au motif que des règlements partiels ont pu intervenir, observant qu’il n’est pas démontré l’acceptation d’un échéancier par l’URSSAF, ni l’encaissement de chèques à l’ordre de l’URSSAF Ile-de-France correspondant aux règlements partiels et que le jugement a tenu compte des éventuels règlements intervenus.

Elles sollicitent que la demande nouvelle de dommages et intérêts formée par l’appelante soit déclarée irrecevable ou, à défaut, infondée dès lors qu’elles n’ont pas manqué de diligence.

Elles indiquent que la remise des majorations et pénalités de retard est subordonnée à une demande préalable au directeur de l’organisme ou à la commission de recours amiable et n’est recevable qu’après règlement de la totalité des cotisations ayant donné lieu à des majorations.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux écritures des parties s’agissant de la présentation plus complète de leurs demandes et des moyens qui les fondent.

Motifs

Sur la régularité de la procédure de redressement

Sur la notification des mises en demeure

Il résulte de l’article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, dans ses versions successives applicables au litige, que toute action en recouvrement est obligatoirement précédée d’une mise en demeure adressée par lettre recommandée à l’employeur.

La signature figurant sur l’avis de réception d’une lettre recommandée adressée à une personne physique ou morale est présumée être jusqu’à preuve du contraire, celle de son destinataire ou de son mandataire.

En l’espèce, l’URSSAF produit les avis de réception signés les 14 décembre 2018 et 14 février 2019 des mises en demeure du 10 décembre 2018 (relative à la mise en oeuvre de la solidarité financière pour les années 2016 et 2017) et du 5 février 2019 (relative à la remise en cause des allègements et exonérations du donneur d’ordre pour les années 2016 et 2017).

En l’absence de preuve contraire, le moyen tiré de l’absence de notification des mises en demeure est donc rejeté.

Sur la référence à la charte du cotisant contrôlé et le respect du contradictoire

L’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige dispose :  » I.-Tout contrôle effectué en application de l’article L. 243-7 est précédé, au moins quinze jours avant la date de la première visite de l’agent chargé du contrôle, de l’envoi par l’organisme effectuant le contrôle des cotisations et contributions de sécurité sociale d’un avis de contrôle.

Toutefois, l’organisme n’est pas tenu à cet envoi dans le cas où le contrôle est effectué pour rechercher des infractions aux interdictions mentionnées à l’article L. 8221-1 du code du travail. Dans ce dernier cas, si l’organisme entend poursuivre le contrôle sur d’autres points de la réglementation, un avis de contrôle est envoyé selon les modalités définies au premier alinéa.

Lorsque la personne contrôlée est une personne morale, l’avis de contrôle est adressé à l’attention de son représentant légal et envoyé à l’adresse du siège social de l’entreprise ou le cas échéant à celle de son établissement principal, telles que ces informations ont été préalablement déclarées. Lorsque la personne contrôlée est une personne physique, il est adressé à son domicile ou à défaut à son adresse professionnelle, telles que ces informations ont été préalablement déclarées.

Sauf précision contraire, cet avis vaut pour l’ensemble des établissements de la personne contrôlée.

Cet avis fait état de l’existence d’un document intitulé  » Charte du cotisant contrôlé  » présentant à la personne contrôlée la procédure de contrôle et les droits dont elle dispose pendant son déroulement et à son issue, sur le fondement du présent code. Il précise l’adresse électronique où ce document approuvé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale, est consultable et indique qu’il est adressé au cotisant sur sa demande. Les dispositions contenues dans la charte sont opposables aux organismes effectuant le contrôle. « .

Le respect du contradictoire à l’égard du donneur d’ordre, qui n’a pas été contrôlé, dans le cadre de la procédure de mise oeuvre de sa solidarité financière résultant de l’application à son égard des dispositions de l’alinéa 5 de l’article R. 243-59 susvisé, n’a pas pour effet que lui soient également appliquées les autres dispositions procédurales relatives au contrôle en lui-même.

Les dispositions de l’article R. 243-59 du code de la sécurité sociale n’imposent en aucune manière la transmission de la charte du cotisant, celle-ci ne s’appliquant qu’en cas de contrôles effectués en application de l’article L. 243-7 du même code.

Dès lors que c’est la société [8] et non la société [7] qui a été contrôlée, les inspecteurs du recouvrement n’avaient pas à faire précéder les lettres d’observations du 1er octobre 2018 d’avis de contrôle visant la charte du cotisant contrôlé.

Le moyen est donc rejeté.

Par ailleurs, les lettres d’observations du 1er octobre 2018 et les courriers en réponse aux observations de la société [7] détaillent tant les annulations opérées que les calculs des cotisations mises à la charge du donneur d’ordre du fait du non-respect des dispositions de l’article L. 8222-1 du code du travail, représentant la somme de 240 201 euros après application de la formule  » montant des sommes dues par la SARL [8] x CA TTC réalisé pour votre compte/ CA TTC effectué par la SARL [8] « , outre la somme de 25 432 euros en raison de l’annulation pour les années 2016 et 2017 des réductions générales de cotisations, des déductions patronales  » loi Tepa  » et du complément allocations familiales.

En outre, le procès-verbal de travail dissimulé a été communiqué dans le cadre des échanges entre les parties avant l’audience de première instance.

La société [7] ne peut donc se prévaloir d’aucune violation du principe du contradictoire et la procédure n’est entachée d’aucune irrégularité de ce chef.

Sur l’envoi de deux mises en demeure pour le même redressement

L’URSSAF Nord Pas-de-Calais a émis une mise en demeure en date du 10 décembre 2018 pour obtenir le paiement de la somme de 240 201 euros au titre de cotisations et majorations dues suite à la mise en oeuvre de la solidarité financière et l’URSSAF Ile-de-France a émis une seconde mise en demeure le 7 février 2019 pour le même montant et la même cause.

Toutefois, il est établi que la commission de recours amiable de l’URSSAF Ile-de-France en sa séance du 30 septembre 2019 a annulé la mise en demeure du 7 février 2019  » car faisant double emploi avec celle adressée par les services de l’URSSAF Nord Pas-de-Calais « .

Le moyen de ce chef sera donc rejeté et le jugement confirmé en ce qu’il a dit régulière la procédure de redressement.

Sur le fond

Sur l’obligation de vigilance du donneur d’ordre

L’article L. 8222-1 du code du travail dispose :  » Toute personne vérifie lors de la conclusion d’un contrat dont l’objet porte sur une obligation d’un montant minimum en vue de l’exécution d’un travail, de la fourniture d’une prestation de services ou de l’accomplissement d’un acte de commerce, et périodiquement jusqu’à la fin de l’exécution du contrat, que son cocontractant s’acquitte :

1° des formalités mentionnées aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 ;

2° de l’une seulement des formalités mentionnées au 1°, dans le cas d’un contrat conclu par un particulier pour son usage personnel, celui de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité, concubin, de ses ascendants ou descendants.

Les modalités selon lesquelles sont opérées les vérifications imposées par le présent article sont précisées par décret.  »

Aux termes de l’article L. 8222-2 du même code  » Toute personne qui méconnaît les dispositions de l’article L. 8222-1, ainsi que toute personne condamnée pour avoir recouru directement ou par personne interposée aux services de celui qui exerce un travail dissimulé, est tenue solidairement avec celui qui a fait l’objet d’un procès-verbal pour délit de travail dissimulé :

1° Au paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires ainsi que des pénalités et majorations dus par celui-ci au Trésor ou aux organismes de protection sociale ;

2° Le cas échéant, au remboursement des sommes correspondant au montant des aides publiques dont il a bénéficié ;

3° Au paiement des rémunérations, indemnités et charges dues par lui à raison de l’emploi de salariés n’ayant pas fait l’objet de l’une des formalités prévues aux articles L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche et L. 3243-2, relatif à la délivrance du bulletin de paie.  »

L’article R. 8222-1 du code du travail, dispose que les vérifications à la charge de la personne qui conclut un contrat, prévues à l’article L. 8222-1, sont obligatoires pour toute opération d’un montant au moins égal à 5 000 euros hors taxes.

Ainsi, l’employeur est tenu de se faire délivrer par son sous-traitant une attestation de vigilance dès que le contrat excède une valeur de 5 000 euros.

Cependant, lorsque la prestation est réalisée de façon continue, répétée et successive dans le temps, pour le compte du même client, il convient de prendre en compte l’ensemble des contrats, même si chacune des prestations est d’un montant inférieur à 5 000 euros.

L’article D. 8222-5 du code du travail précise que la personne qui contracte, lorsqu’elle n’est pas un particulier répondant aux conditions fixées par l’article D. 8222-4, est considérée comme ayant procédé aux vérifications imposées par l’article L. 8222-1 si elle se fait remettre par son cocontractant, lors de la conclusion et tous les six mois jusqu’à la fin de son exécution :

1° Une attestation de fourniture des déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions de sécurité sociale prévue à l’article L. 243-15 émanant de l’organisme de protection sociale chargé du recouvrement des cotisations et des contributions datant de moins de six mois dont elle s’assure de l’authenticité auprès de l’organisme de recouvrement des cotisations de sécurité sociale.

2° Lorsque l’immatriculation du cocontractant au registre du commerce et des sociétés ou au Registre national des entreprises en tant qu’entreprise du secteur des métiers et de l’artisanat est obligatoire ou lorsqu’il s’agit d’une profession réglementée, l’un des documents suivants :

a) Un extrait de l’inscription au registre du commerce et des sociétés (K ou K bis) ;

b) Une carte d’identification justifiant de l’inscription au répertoire des métiers ;

c) Un devis, un document publicitaire ou une correspondance professionnelle, à condition qu’y soient mentionnés le nom ou la dénomination sociale, l’adresse complète et le numéro d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers ou à une liste ou un tableau d’un ordre professionnel, ou la référence de l’agrément délivré par l’autorité compétente ;

d) un récépissé du dépôt de déclaration auprès d’un centre de formalités des entreprises pour les personnes en cours d’inscription.  »

Dans sa version en vigueur du 25 décembre 2013 au 14 juin 2018, l’article L. 243-15 du code de la sécurité sociale dispose que toute personne vérifie, lors de la conclusion d’un contrat dont l’objet porte sur une obligation d’un montant minimal en vue de l’exécution d’un travail, de la fourniture d’une prestation de services ou de l’accomplissement d’un acte de commerce, et périodiquement jusqu’à la fin de l’exécution du contrat, que son cocontractant est à jour de ses obligations de déclaration et de paiement auprès des organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1, L. 611-8 et L. 752-1 du présent code et L. 723-3 du code rural et de la pêche maritime.

Il est rappelé qu’il appartient au donneur d’ordre, indépendamment de sa bonne foi, de prouver qu’il a accompli les obligations mises à sa charge en application de l’article L. 8222-1 du code du travail au moment de la conclusion du contrat puis périodiquement.

En l’espèce, la société [7] a signé le 1er août 2016 avec la société [8] une convention cadre de sous-traitance à effet au 1er août 2016 pour  » une durée indéterminée en fonction des besoins et commandes des clients  » qui stipule en son article VI que  » la rémunération de la prestation sera globale et forfaitaire. Elle sera conforme au prix déterminé au début de la mission : tarifs détaillés ci-dessous « .

Le 13 septembre 2016, la société [7] a réglé à la société [8] une facture d’un montant de 29 728,44 euros correspondant à 1 644 h de travail. Il en résulte que la société [7] aurait dû obtenir une attestation de vigilance avant l’exécution de la prestation nécessairement antérieure au 13 septembre 2016.

Or, la première attestation de vigilance produite par la société [7] est datée du 17 octobre 2016.

Les premiers juges en ont justement déduit que la société [7] n’avait pas procédé à la vérification de l’attestation de vigilance de la société [8] avant de lui confier une mission facturée plus de 5 000 euros. Elle n’avait pas non plus procédé à la vérification de l’extrait Kbis de sa cocontractante, l’extrait produit étant en date du 19 mai 2017 et mentionnant une mise en sommeil à compter du 31 octobre 2015 et une reprise d’activité à compter du 30 août 2016, ce qui aurait dû alerter la société [7] lors de la signature du contrat le 1er août 2016 et générer des vérifications.

Par ailleurs, l’attestation de vigilance qui doit être demandée dès la conclusion du contrat et à tout le moins dès la première prestation, doit être renouvelée tous les 6 mois.

Or la société [7] ne peut justifier avoir demandé une attestation de vigilance après le 7 février 2017 alors qu’elle a poursuivi des relations contractuelles jusqu’au 30 novembre 2017.

Enfin, les premiers juges ont relevé à raison que la société [7] avait manqué à son obligation d’analyse des documents dès lors que les trois attestations de vigilance intitulées attestations de fourniture des déclarations sociales et de paiement des cotisations et contributions (17 octobre 2016, 12 janvier 2017, 7 février 2017) mentionnent qu’elles sont délivrées pour un effectif de 8 salariés et une masse salariale de 513 euros, ce qui est peu compatible avec la prestation facturée le 13 septembre 2016 visant plus de 1600 heures.

Le fait que la société [7] ait mis un terme au contrat le 14 septembre 2017 avec effet au 30 novembre 2017 après avoir demandé des explications à la société [8] le 17 avril 2017 et avoir été informée de ce que cette dernière avait confié la réalisation de la mission à des sous-traitants et non à ses salariés, est sans incidence sur le non-respect de l’obligation de vigilance et ne permet pas de remettre en cause le redressement.

La mise en oeuvre de la solidarité financière étant la conséquence du manquement à l’obligation de vigilance qui est établi par les éléments qui précèdent, le redressement est justifié.

Sur le montant du redressement

Dans ses versions successives l’article L. 133-4-5 du code de la sécurité sociale dispose que lorsqu’il est constaté que le donneur d’ordre n’a pas rempli l’une des obligations définies à l’article L. 8222-1 du code du travail et que son cocontractant a, au cours de la même période, exercé un travail dissimulé par dissimulation d’activité ou d’emploi salarié, l’organisme de recouvrement procède à l’annulation des réductions ou exonérations des cotisations ou contributions dont le donneur d’ordre a bénéficié au titre des rémunérations versées à ses salariés. Cette annulation est calculée selon les modalités prévues aux deuxième et troisième alinéas de l’article L. 133-4-2, sans que son montant global puisse excéder 75 000 euros pour une personne morale.

Il ressort de cet article que seul le montant de la réduction générale de cotisations patronales déclaré peut être plafonné s’il est supérieur à 75 000 euros. Or la mise en demeure du 5 février 2019 n’excède pas le plafond puisqu’elle est d’un montant de 25 432 euros.

Le plafonnement ne peut concerner le redressement au titre de la violation de l’obligation de vigilance du donneur d’ordre représentant en l’espèce la somme de 240 201 euros selon la mise en demeure du 10 décembre 2018.

La demande est donc rejetée.

Par ailleurs, si le tribunal a validé les deux mises en demeure pour leur montant initial en l’absence de pièce démontrant leur règlement ne serait-ce qu’à titre conservatoire, il a fait droit à la demande en paiement au titre de chaque mise en demeure  » sous réserve, d’une part, des paiement, régularisations ou crédits qui auraient pu intervenir sur le compte URSSAF de la société [7] depuis la signification des mises en demeure, d’autre part, des majorations de retard, lesquelles continuent à courir jusqu’au parfait paiement « .

En conséquence, le jugement sera confirmé. La seule production par la société [7] de courriers adressés à l’URSSAF les 31 mars et 9 mai 2022 pour obtenir un plan d’échelonnement accompagnés de deux chèques de 4 000 euros, ne suffit pas à démontrer que des règlements partiels ont été effectués, de sorte que la demande de  » recalcul  » du montant des cotisations n’est pas fondée.

Sur la demande de dommages et intérêts

Aux termes de l’article 564 du code de procédure civile,  » A peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait « .

La demande de dommages et intérêts formée par la société [7] en cause d’appel s’analyse en une demande nouvelle dès lors qu’elle n’avait pas été soumise aux premiers juges, qu’il s’agit d’une action en responsabilité qui ne tend pas aux mêmes fins que les demandes d’annulation du redressement formées en première instance.

La demande sera donc déclarée irrecevable.

Sur la demande de remise des pénalités et majorations

L’article R. 243-18 du code de la sécurité sociale, dans sa version en vigueur du 12 mars 2018 au 8 juillet 2019, dispose :  » Il est appliqué une majoration de retard de 5 % du montant des cotisations et contributions qui n’ont pas été versées aux dates limites d’exigibilité fixées aux articles R. 243-6, R. 243-6-1, R. 243-7 et R. 243-9 à R. 243-11.

A cette majoration s’ajoute une majoration complémentaire de 0,2 % du montant des cotisations et contributions dues, par mois ou fraction de mois écoulé, à compter de la date d’exigibilité des cotisations et contributions.

Dans le cadre des contrôles mentionnés aux articles R. 243-59 et R. 243-59-3, la majoration complémentaire n’est décomptée qu’à partir du 1er février de l’année qui suit celle au titre de laquelle les régularisations sont effectuées. Le taux de cette majoration complémentaire est abaissé à 0,1 % en cas de paiement des cotisations et contributions faisant l’objet du redressement dans les trente jours suivant l’émission de la mise en demeure.  »

Aux termes de l’article R. 243-20 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige,  » I.- Les employeurs peuvent formuler une demande gracieuse en réduction des majorations et pénalités prévues à l’article L. 133-5-5, au III de l’article R. 133-14, aux articles R. 242-5 et R. 243-16 et au premier alinéa de l’article R. 243-18. Cette requête n’est recevable qu’après règlement de la totalité des cotisations ayant donné lieu à application des majorations.

La majoration mentionnée aux deuxième et troisième alinéas de l’article R. 243-18 peut faire l’objet de remise lorsque les cotisations ont été acquittées dans le délai de trente jours qui suit la date limite d’exigibilité ou à titre exceptionnel, en cas d’événements présentant un caractère irrésistible et extérieur.

Le directeur de l’organisme de recouvrement est compétent pour statuer sur les demandes portant sur des montants inférieurs à un seuil fixé par arrêté du ministre chargé de la sécurité sociale. A partir de ce seuil, il est statué sur proposition du directeur par la commission de recours amiable.

Les décisions tant du directeur que de la commission de recours amiable sont motivées.

II.- Par dérogation aux dispositions du I, il ne peut pas être accordé de remise des majorations et des pénalités au titre du montant des cotisations et contributions afférentes aux rémunérations réintégrées à la suite du constat de l’infraction de travail dissimulé définie aux articles L. 8221-3 et L. 8221-5 du code du travail.  »

Il est constant qu’une demande de remise de majorations ne peut être valablement formulée auprès de l’organisme qu’après règlement de la totalité des cotisations et contributions ayant donné lieu à application des majorations.

Or en l’espèce, la société [7] ne démontre pas avoir réglé la totalité des cotisations ayant donné lieu à des majorations. Elle sera déboutée de sa demande.

Sur les frais de signification

Le présent litige concernant la contestation des mises en demeure et non la délivrance des contraintes, la demande formée par la société [7] au titre de la condamnation de l’URSSAF à prendre en charge les frais de signification sera déclarée sans objet.

Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile

Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

La société [7], qui succombe, sera condamnée aux dépens d’appel. Elle sera déboutée pour le même motif de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ailleurs, il serait inéquitable de laisser à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et à l’URSSAF Ile-de-France la charge de l’intégralité des frais irrépétibles exposés en appel.

La société [7] sera donc condamnée à verser la somme de 500 euros à chacune sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort par sa mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement rendu le 14 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Lille en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Déclare irrecevable la demande de dommages et intérêts de la société [7],

Déboute la société [7] de sa demande de plafonnement du redressement à la somme de 75 000 euros,

Déboute la société [7] de sa demande de remise des pénalités et majorations,

Dit sans objet la demande de la société [7] tendant à la condamnation de l’URSSAF Nord Pas-de-Calais et de l’URSSAF Ile-de-France au paiement des frais de signification,

Condamne la société [7] aux entiers dépens de l’instance,

Déboute la société [7] de sa demande au titre des frais irrépétibles d’appel,

Condamne la société [7] à payer à l’URSSAF Ile-de-France la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel,

Condamne la société [7] à payer à l’URSSAF Nord Pas-de-Calais la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.

Le Greffier, Le Président,

 

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