Le défaut d’information directe et écrite du salarié de l’existence d’un système de géolocalisation constitue une exécution déloyale du contrat de travail par l’employeur. Dans cette affaire, la juridiction a jugé que la Société n’avait pas exécuté de manière loyale de contrat de travail du salarié et a été condamnée à lui verser à ce titre une somme de 4 200 euros à titre de dommages et intérêts. Selon l’article L. 1121-1 du code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché. L’article L. 1224-4 du même code précise qu’aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance. L’employeur peut néanmoins mettre en place un système de géolocalisation pour la surveillance des salariés en vue d’assurer leur protection, analyser ou sécuriser des trajets, optimiser une activité ou diminuer des coûts. Il a été jugé que l’employeur aurait dû anticiper, avant l’entrée en vigueur du règlement européen pour la protection des données et i) effectuer une déclaration auprès de la CNIL ; ii) informer préalablement à l’installation du système de géolocalisation, ses représentants du personnel ou le comité économique et social. En l’espèce, la Société ne rapportait pas la preuve de ce qu’elle a porté à la connaissance spécifique d’un salarié, l’information sur le système de géolocalisation. Les attestations qu’elle versait aux débats qui émanaient de salariés indiquant avoir été oralement informés de la mise en place de ce système ne démontraient pas que cette information a été préalable à la mise en place du système. Lors de cette mise en place, qui peut être située entre 2009 et 2011, il n’existait pas dans l’entreprise de délégués du personnel, la société employeur n’ayant pas organisé de nouvelles élections à l’issue du mandat du salarié. L’employeur ne produisait pas non plus de preuve de déclaration préalable du système de géolocalisation à la CNIL. La juridiction a jugé que la Société n’avait pas exécuté de manière loyale de contrat de travail du salarié et a été condamnée à lui verser à ce titre une somme de 4 200 euros à titre de dommages et intérêts. _____________________________________________________________ REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS COUR D’APPEL DE TOULOUSE 4eme Chambre Section 1 ARRÊT DU 4 FEVRIER 2022 N° RG 20/00612 – N° Portalis DBVI-V-B7E-NO4F *** APPELANT Monsieur A Z […] […] Représenté par la SCP CABINET DENJEAN ET ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE INTIMÉE S.A.R.L. Y X […] […] Représentée par la SCP CAMILLE & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULOUSE COMPOSITION DE LA COUR En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 16 Novembre 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : S. BLUME, présidente C. KHAZNADAR, conseillère N. BERGOUNIOU, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, Greffier, lors des débats : C. DELVER ARRET : – CONTRADICTOIRE – prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties – signé par S. BLUME, présidente, et par C. DELVER, greffière de chambre. FAITS – PROCEDURE – PRETENTIONS DES PARTIES Monsieur A Z a été embauché à compter du 31 juillet 2000, en qualité de plaquiste par contrat à durée indéterminée à temps partiel, conclu avec M. F-G X (20 heures par semaine) d’une part, et à compter du 1er août 2000, en qualité d’ouvrier par contrat à durée indéterminée à temps partiel, conclu M. José E Y (19, 50 heures par semaine) d’autre part. Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective des ouvriers du bâtiment. Messieurs X et Y s’étant ensuite rapprochés pour fonder la Sarl Y et X, le contrat de travail de M. Z a été transféré auprès de cette entreprise pour devenir un contrat de travail à temps complet. Dans le dernier état de la relation salariale, M. Z percevait un salaire mensuel brut de 2 118,83 euros. Le 5 novembre 2010, M. A Z a été élu délégué du personnel. A l’issue de son mandat, l’employeur n’a pas organisé de nouvelles élections. Le 4 mai 2017, le salarié a été placé en arrêt maladie, prolongé jusqu’au 11 août 2017. La MDPH de la Haute-Garonne l’a reconnu travailleur handicapé à compter du 1er juillet 2017, et ce pour une durée de 5 ans. Suite à la visite de reprise du 28 août 2017, le médecin du travail a déclaré M. Z inapte définitif à son poste, précisant que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi. Par courrier recommandé du 1er septembre 2017, M. Z a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 11 septembre 2017. Son licenciement lui a été notifié par lettre recommandée du 13 septembre 2017 pour inaptitude. M. Z a saisi le conseil de prud’hommes de Saint-Gaudens, section industrie, par requête en date du 23 juillet 2018 aux fins de voir son licenciement requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et en paiement de diverses sommes au titre des heures supplémentaires et de l’exécution fautive par l’employeur du contrat de travail. Par jugement du 13 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Saint-Gaudens, statuant en formation de départage, a : -condamné la Sarl Y X à verser à M. A Z la somme de 1.030,98 euros bruts au titre des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision, – condamné la Sarl Y X à verser à M. A Z la somme de 4200 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail. -condamné la Sarl Y X à remettre à M. Z, dans un délai de 30 jours à compter de la notification de la décision et sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé ce délai, des bulletins de salaire, un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle Emploi conformes, – débouté M. A Z de sa demande de condamnation de la Sarl Y X à lui verser la somme de 15 059,51 euros bruts, outre la somme de 1 505,95 euros bruts au titre des congés payés afférents s’agissant de la rémunération du temps de trajet entreprise/lieu de travail, – débouté M. A Z de sa demande de condamnation de la Sarl Y X à lui verser la somme de 12 884,81 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé, – constaté que le licenciement de M. A Z repose sur une cause réelle et sérieuse, – débouté M. A Z de sa demande de condamnation de la Sarl Y X à lui verser la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, – condamné la Sarl Y X aux dépens, – condamné la Sarl Y X à verser à M. A Z une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Par déclaration du 18 février 2020, M. A Z a interjeté appel de ce jugement qui lui a été notifié le 22 janvier 2020, dans des conditions de forme et de délai qui ne sont pas contestées. *** Aux termes de ses dernières conclusions, envoyées par voie électronique le 10 novembre 2020, M. A Z demande à la cour de : -confirmer la décision déférée en ce qu’elle a condamné la Sarl Y X à lui verser les sommes suivantes : *1.030,98 euros bruts au titre des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées, *4.200 euros titre de dommages et intérêts pour exécution fautive du contrat de travail, *2.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. -confirmer la décision déférée en ce qu’elle a condamné la Sarl Y X à remettre à M. Z, dans un délai de 30 jours à compter de la notification de la présente décision et sous astreinte de 20 € par jour de retard passé ce délai, un certificat de travail, des bulletins de salaire ainsi qu’une attestation Pôle Emploi conformes. -infirmer la décision déférée en ce qu’elle a fait porter intérêts au taux légal à compter du jugement. -infirmer la décision déférée en ce qu’elle a débouté M. Z : * de sa demande de condamnation de la Sarl Y X à lui verser la somme de 15 059,95 euros bruts, outre la somme de 1 505.95 euros bruts au titre des congés payés y afférents s’agissant de la rémunération du temps de trajet entreprise / lieu de travail. *de sa demande de condamnation de la Sarl Y X à lui verser la somme de 12 884,81 euros au titre des dommages et intérêts pour travail dissimulé. * de sa demande de condamnation de la Sarl Y X à lui verser la somme de 40.000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Statuant à nouveau, -condamner la Sarl Y X à payer à M. Z la somme de 15.059,51 euros bruts à titre de rappel de salaire sur les heures supplémentaires, outre celle de 1.505,95 euros bruts au titre des congés payés y afférents, avec intérêts de droit à compter du jour de la demande. * condamner la Sarl Y X à payer à M. Z la somme de 12.884,81 euros à titre de dommages et intérêts pour travail dissimulé ; * condamner la Sarl Y X à lui payer la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. * condamner la Sarl Y X à remettre à M. A Z un certificat de travail, des bulletins de salaire ainsi qu’une attestation Pôle Emploi conformes, sous astreinte de 40 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision à intervenir. – juger que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes de Toulouse. -condamner la Sarl Y X à verser à M. A Z la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. -la condamner aux entiers dépens. M. A Z fait valoir, pour l’essentiel, que le temps de déplacement entre deux lieux de travail (entreprise ‘ chantier / chantier ‘ chantier / chantier ‘ entreprise) doit être assimilé à du temps de travail effectif ; que ces heures de travail effectuées hors chantier et constituant du temps de travail n’ont jamais été rémunérées ; qu’il devait obligatoirement chaque jour se rendre à l’entreprise avant d’aller sur les chantiers et le soir y revenir avant de rentrer chez lui, un camion étant affecté pour se rendre de l’entreprise aux différents chantiers, et contenant tout le matériel et l’outillage nécessaire pour exercer ses fonctions ; que la note de service indiquant que les ouvriers pouvaient se rendre directement sur les chantiers et n’étaient pas obligés de passer par le dépôt a été affichée seulement après sa réclamation au titre des heures supplémentaires et l’alerte faite par le comptable de l’entreprise ; que le délit de travail dissimulé est caractérisé. Le salarié soutient en outre que son inaptitude est en lien avec la dégradation de ses conditions de travail, rendant ainsi son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le législateur a rendu la consultation des délégués du personnel obligatoire peu important l’origine professionnelle ou non de l’inaptitude du salarié ; qu’en l’espèce, la société Y X est dépourvue de représentants du personnel et ne produit pas de procès-verbal de carence ;que l’employeur ne justifie pas avoir été dans l’incapacité d’aménager son poste de travail pour qu’il soit approprié à ses capacités, et ne justifie pas non plus avoir respecté son obligation de recherche de reclassement. Il affirme que les conditions d’exécution du contrat de travail par l’employeur sont fautives, ce dernier sanctionnant les salariés par un retrait sur salaire dès qu’ils arrivaient en retard sur les chantiers; que le temps de trajet était contrôlé par système de géolocalisation illégalement installé dans les camions, sans information préalable des salariés; que lorsqu’il était délégué du personnel, il n’a jamais pu exercer son mandat et qu’à l’issue de son mandat aucune élection n’a été organisée. *** Aux termes de ses dernières conclusions, envoyées par voie électronique le 29 octobre 2021, la Sarl Y X demande à la cour de : -Confirmer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu’il a : *débouté M. Z de sa demande de condamnation de la Sarl Y X à lui verser la somme de 15 059.95euros bruts, outre la somme de 1 505.95 euros au titre des congés payés y afférents s’agissant de la rémunération du temps de trajet entreprise / lieu de travail ; *débouté M. Z de sa demande de condamnation de la Sarl Y X à lui verser la somme de 12 884.81 euros au titre des dommages et intérêts pour travail dissimulé ; * constaté que le licenciement de M. Z reposait sur une cause réelle et sérieuse ; * débouté M. Z de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; -Réformer le jugement du 13 janvier 2020 en ce qu’il a : * condamné la Sarl Y X à verser à M. A Z la somme de 1038.98 euros bruts au titre des heures supplémentaires effectuées et non rémunérées avec intérêts au taux légal ; * condamné la Sarl Y X à verser à M. A Z la somme de 4 200 euros en réparation de l’exécution fautive du contrat de travail ; * condamné la Sarl Y X à remettre à M. Z dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement et sous astreinte de 20 euros par jour de retard passé ce délai, des bulletins de salaire, un certificat de travail et une attestation destinée à pôle emploi conformes ; * condamné la Sarl Y X à verser à M. Z la somme de 2000 euros titre de l’article 700 du code de procédure civile. En conséquence, -donner acte à la Sarl Y X de ce qu’elle reconnaît devoir 409.90 euros bruts à titre de rappel de salaire ; – juger que M. Z a été rémunéré pour la totalité des heures effectuées et pour les trajets par lui faits ; -débouter M. Z de la totalité des demandes formées au titre du paiement d’heures supplémentaires et heures de trajet ; -juger que la Sarl Y X n’est pas coupable de travail dissimulé ; -débouter M. Z de toute demande formée à ce titre ; -juger que la Sarl Y X a exécuté de manière loyale le contrat de travail de M. Z ; – le débouter de toute demande à ce titre ; – juger que le licenciement de M. Z repose sur une cause réelle et sérieuse ; -débouter M. Z de toute demande effectuée à ce titre ; -condamner M. Z au paiement d’une somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens. La Sarl Y X soutient que l’horaire hebdomadaire de M. Z est de 40h et non de 35h, puisque justement la journée de RTT vient compenser une partie de l’écart mensuel entre les 40h hebdomadaires effectuées et les 35h payées normalement, le différentiel de 13h étant rémunéré normalement en heures supplémentaires majorées de 25%. Elle admet que le calcul du temps de travail effectué est erroné : le salarié a été rémunéré sur une base de 172,67h mensuelles (151.67h + 13h supplémentaires + 8h RTT) et non pas 173,33h mensuelles (40h x 52 semaines / 12 mois), de sorte qu’elle reconnaît devoir 0,66h mensuelles à M. Z, soit 0.66 x 12 mois x 3 années = 23.76h, au taux horaire majoré de 25% de 17,252euros, soit 409.90euros. Elle estime que M. Z confond le temps de travail et le temps de trajet qui ne constitue aucunement un temps de travail et ne donne pas lieu à rémunération en heures supplémentaires. Elle allègue en outre qu’en application de l’article L 3121-4 du code du travail, « le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas un temps de travail effectif. Toutefois, s’il dépasse le temps normal de trajet entre le domicile du lieu habituel de travail, il fait l’objet d’une contrepartie financière sous forme de repos » ; que la convention collective du Bâtiment prévoit dès lors que les salariés sont en déplacement, 3 types d’indemnité dont l’indemnité de trajet. Cette indemnité est journalière, forfaitaire et fixée en valeur absolue en fonction d’un système de zone concentrique entre le lieu du siège social de l’entreprise et le lieu du chantier. A chaque zone concentrique, une valeur de l’indemnité de frais de transport correspond à une indemnité de trajet. La société affirme que M. Z a bénéficié des « indemnités de trajet (zones 1,2,3,4,5) » en fonction des différents mois et des lieux de chantier; que le temps de trajet n’est considéré que comme du temps de travail que lorsque l’employeur oblige l’ouvrier à passer à l’entreprise ou avant de se rendre sur les chantiers, ce qui n’est pas le cas en l’espèce. Elle soutient que la réalité des heures supplémentaires n’est pas établie et que l’élément intentionnel, nécessaire à toute reconnaissance de travail dissimulé et à toute condamnation, fait défaut;que la mise en place du système de géolocalisation est conforme aux prescriptions légales; que ce système n’a pas été mis en oeuvre à des fins de vérification des retards, mais bien comme indiqué aux salariés pour pouvoir assurer une meilleure gestion du parc de véhicules de la société, et garantir la sécurisation des véhicules; que les salariés sont informés lors de leur embauche de l’existence d’un système de géolocalisation, mais également par le biais des notes de services; que lors de la mise en place de la géolocalisation, il n’y avait pas de délégués du personnel et l’information quant à la géolocalisation ne pouvait donc être réalisée à leur égard. Elle indique enfin que le licenciement notifié à M. Z en raison de son inaptitude et de son impossibilité de reclassement est parfaitement valable au regard des dispositions de l’article L.1126-12 du code du travail disposant que l’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans l’emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi; que cette mention est un motif autonome rendant possible la rupture du contrat sans que soit nécessaire de précision ou de justification quant à l’impossibilité de reclassement, l’employeur étant exonéré de son obligation de reclassement; que la consultation des délégués du personnel ne pouvait être effectuée puisque le mandat de M. Z avait pris fin et que la société n’avait pas organisé de nouvelles élections. *** La clôture de l’instruction a été prononcée par ordonnance du 5 novembre 2021. MOTIFS DE LA DECISION : – Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat de travail : * les heures supplémentaires et le travail dissimulé : Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant. En l’espèce, il est constant que l’entreprise applique un horaire de travail de 40 heures par semaine et ne rémunère ses salariés que sur la base de 35 heures, de sorte que M. Z effectuait chaque mois 21,66 heures supplémentaires dont 13 heures payées et majorées de 23%, le solde soit 8,66 heures étant compensés sous forme de RTT. M. Z ne conteste pas la régularité de ce repos compensateur de remplacement, qui ne peut toutefois excéder une durée de 7 heures, de sorte que l’employeur reste lui devoir un solde de 1,66 heures par mois sur la période non prescrite, soit une somme de 1 030,98 euros brut. Le salarié sollicite également le paiement d’heures supplémentaires relatives à son temps de trajet entre l’entreprise et les chantiers sur lesquels il travaillait, dès lors qu’il indique qu’il devait obligatoirement passer par l’entreprise avant de se rendre sur les chantiers. Or, il résulte de l’article L. 3121-4 du code du travail que le temps de déplacement professionnel pour se rendre sur le lieu d’exécution du contrat de travail n’est pas considéré comme du temps de travail effectif dès lors que le salarié n’a pas l’obligation de passer par le siège de l’entreprise avant de se rendre sur le chantier. La Sarl Y X verse aux débats plusieurs attestations de salariés (pièces 40, 46, 48, 51, 53,54,55, 56, 58) qui indiquent de façon concordante que le passage par le dépôt n’était pas obligatoire, les chantiers étant directement livrés par les fournisseurs; qu’il existait entre les ouvriers travaillant sur un même chantier et demeurant dans le même secteur un système de covoiturage, les ouvriers étant récupérés à leur domicile par l’un d’entre eux. Il existait toutefois dans l’entreprise un véhicule utilitaire qui transportait gratuitement les salariés qui le désiraient du siège social de l’entreprise au chantier le matin à aller et le soir au retour, ce transport ne constituant qu’une faculté pour les salariés qui pouvaient choisir de se rendre sur les chantiers par leurs propres moyens (pièce 15 de l’employeur). Par ailleurs, l’examen des bulletins de salaire de M. Z laisse apparaître qu’il percevait les indemnités de petits déplacements prévues aux articles 8.11 à 8.18 de la convention collective, lesquelles ont précisément pour objet d’indemniser, de manière forfaitaire, la sujétion que représente pour l’ouvrier la nécessité de se rendre quotidiennement sur le trajet et d’en revenir. C’est donc par une exacte appréciation des faits de l’espèce que le premier juge a, par des motifs pertinents que la cour adopte, débouté M. Z de sa demande de paiement d’heures supplémentaires au titre des temps de trajet réalisés entre le siège de l’entreprise et les chantiers ainsi que la demande de règlement des congés payés y afférents. En application de l’article L. 8221-5 du code du travail, est réputé dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de salaire un nombre de travail inférieur à celui réellement accompli. Toutefois, la dissimulation d’emploi salarié prévue par ces textes n’est caractérisée que s’il est établi que l’employeur a agi de manière intentionnelle. La cour estime que le caractère intentionnel de la dissimulation d’emploi ne peut se déduire du seul accomplissement de 1,66 heure supplémentaire mensuelle non rémunérée par M. Z, de sorte que le salarié, sera, par confirmation sur ce point du jugement déféré, déboutée de sa demande en ce sens. * le système de géolocalisation : Selon l’article L. 1121-1 du code du travail, nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives des restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionées au but recherché. L’article L. 1224-4 du même code précise qu’aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance. L’employeur peut néanmoins mettre en place un système de géolocalisation pour la surveillance des salariés en vue d’assurer leur protection, analyser ou sécuriser des trajets, optimiser une activité ou diminuer des coûts. Il fallait cependant, avant l’entrée en vigueur du règlement européen pour la protection des données, comme tel est le cas en l’espèce, effectuer une déclaration auprès de la CNIL et informer préalablement à l’installation du système, ses représentants du personnel ou le comité économique et social. En l’espèce, la Sarl Y X ne rapporte pas la preuve de ce qu’elle a porté à la connaissance spécifique de M. Z l’information sur le système de géolocalisation. Les attestations qu’elle verse aux débats qui émanent de salariés indiquant avoir été oralement informés de la mise en place de ce système (pièces 39 à 45, 48 à 57 de l’intimée) ne démontrent pas que cette information a été préalable à la mise en place du système. Lors de cette mise en place, qui peut être située entre 2009 et 2011, il n’existait pas dans l’entreprise de délégués du personnel, la société employeur n’ayant pas organisé de nouvelles élections à l’issue du mandat de M. Z. Cette dernière ne produit pas non plus de preuve de déclaration préalable du système de géolocalisation à la CNIL. Il convient dès lors, par confirmation sur ce point du jugement déféré, de juger que la Sarl Y X n’a pas exécuté de manière loyale de contrat de travail du salarié et de la condamner à lui verser à ce titre une somme de 4 200 euros à titre de dommages et intérêts. – Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail : * le licenciement : 1. L’origine professionnelle de l’inaptitude : M. Z a été licencié en raison d’une inaptitude non professionnelle. Il n’établit pas que la dégradation de son état de santé soit la conséquence d’une dégradation de ses conditions de travail, laquelle n’est pas établie. La seule production d’un certificat émanant d’un médecin psychiatre daté du 21 juillet 2017 (pièce 20 de M. Z) indiquant que M. Z présente depuis environ 2 ans un syndrome dépressif majeur réactionnel à des difficultés professionnelles ne fait que relater les propres dires de M. Z, le médecin traitant du salarié ayant par ailleurs, dans un certificat délivré le 11 août 2017, attesté que l’état de son patient lui permettait de reprendre son travail à partir du 12 août 2017. 2. L’absence de consultation du CSE sur les possibilités de reclassement : Selon l’article L. 1226-2-1 du code du travail, dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2017, ‘lorsqu’il est impossible à l’employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent à son reclassement. L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi. L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail. S’il prononce le licenciement, l’employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III du présent livre.’ En l’espèce, le médecin du travail a mentionné dans l’avis d’inaptitude que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé, exonérant ainsi l’employeur de son obligation de recherche de reclassement. Cette exonération permet d’écarter la consultation du comité économique et social qui s’impose habituellement dans le cadre de la procédure de reclassement, quelle que soit l’origine de l’inaptitude. Cet avis est en effet inutile dès lors que le reclassement est impossible et que ce comité n’a pas compétence pour remettre en cause l’appréciation du médecin du travail, son éventuel avis ne pouvant se borner qu’à ce constat. Dès lors, le fait que l’employeur n’ait pas organisé de nouvelles élections de délégués du personnel à l’issue du mandat de M. Z est sans incidence sur la validité de l’engagement de la procédure de licenciement de M. Z. Le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a jugé que son licenciement pour inaptitude reposait sur une cause réelle et sérieuse. M. Z sera en conséquence débouté de l’ensemble de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail. – Sur les demandes annexes : M. Z, qui succombe, sera condamné aux dépens de l’appel et débouté de sa demande formée au titre des frais irrépétibles. Aucune considération particulière d’équité ne command e en l’espèce qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la Sarl Y X, qui sera également déboutée de sa demande à ce titre. PAR CES MOTIFS : La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort, Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Saint-Gaudens le 13 janvier 2020. Y ajoutant. Condamne M. A Z aux dépens de l’appel. Dit n’y avoir lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque. Le présent arrêt a été signé par S.BLUMÉ, présidente et par C.DELVER, greffière. LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE |
S’abonner
Connexion
0 Commentaires
Le plus ancien