Affaire Electra
Etre le premier distributeur français d’un produit étranger et avoir contribué à la connaissance sur le marché français du produit distribué par des investissements publicitaires pour asseoir la marque, n’empêche pas une condamnation pour contrefaçon de marque lorsque le distributeur continue à exploiter les produits à l’expiration de son contrat de distribution. En l’espèce, une société qui a développé et fait connaître en France, les vélos Electra (jusqu’alors inconnus) en se fournissant auprès de l’importateur européen néerlandais Blomson, a été condamnée pour contrefaçon.
Changement de stratégie du fabricant
En l’occurrence, la société Electra a été rachetée par un fonds d’investissements, ce qui a eu pour effet de modifier les modalités de distribution (augmentation des tarifs, paiement anticipé de commandes, fournitures auprès d’une nouvelle société). La rupture des relations commerciales par le fabricant a été légitimée et le distributeur a été condamné pour avoir continué à exploiter le nom de domaine electrabike.fr et la marque associée.
Risque de confusion
Les signes litigieux ne reproduisant pas la marque en tous ses composants, les juges ont apprécié la demande en contrefaçon au regard de l’article 713-3 b/ du code de la propriété intellectuelle (CPI) selon lequel « sont interdits, sauf autorisation du propriétaire, s’il peut en résulter un risque de confusion dans l’esprit du public, l’imitation d’une marque et l’usage d’une marque imitée, pour des produits ou services identiques ou similaires à ceux désignés dans l’enregistrement ». Au regard d’une appréciation des degrés de similitude entre les signes et entre les produits désignés, il existait bien un risque de confusion dans l’esprit du public concerné.
Les produits et/ou services commercialisés sous les signes litigieux (nom de domaine, site internet, enseigne, raison sociale) sont identiques aux produits et/ou services visés dans l’enregistrement de la marque « Electra Bicycle Company », à savoir les « Bicyclettes, pièces et éléments de bicyclettes ». L’ensemble des signes litigieux comportent tous le même terme « Electra », en position d’attaque, qui se prononce à l’identique dans tous les signes. D’un point de vue visuel, ils reproduisent tous le terme « Electra » et ce terme constitue l’élément distinctif et dominant du signe déposé.
Absence de tolérance par l’usage
La tolérance de l’usage de la marque du fabricant pendant la période de relations contractuelles n’est pas constitutive de droits. Dès lors que les relations d’affaires entre les parties étaient interrompues, le consentement tacite du fabricant a cessé quand bien même le distributeur était à l’origine de la réservation du nom de domaine.
Dépôt frauduleux de marque
Le distributeur a également été condamné pour dépôt frauduleux de marque. Selon l’article L712-6 du CPI, « Si un enregistrement a été demandé en fraude des droits d’un tiers, soit en violation d’une obligation légale ou conventionnelle, la personne qui estime avoir un droit sur la marque peut revendiquer sa propriété en justice. ». A ce titre, il est interdit de déposer une marque au mépris des droits d’un tiers, titulaire de droits antérieurs, à charge pour le demandeur en nullité d’établir la mauvaise foi du déposant lorsqu’il a procédé à l’enregistrement du signe en tant que marque. Le dépôt, dont le caractère frauduleux ne pouvait être ignoré par le distributeur, compte tenu des relations antérieures entre les parties, portait donc atteinte aux droits du fabricant. La société Electra était donc fondée à solliciter le transfert à son profit de la marque litigieuse, conformément aux dispositions de l’article L 7126 alinéa 1 du CPI.
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