27 août 2023
Cour d’appel de Douai RG n° 23/01482 COUR D’APPEL DE DOUAI Chambre des Libertés Individuelles N° RG 23/01482 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VCKI N° de Minute : 1488 Ordonnance du dimanche 27 août 2023 République Française Au nom du Peuple Français APPELANT M. [X] [I] né le 10 Janvier 2001 à [Localité 3] (ALBANIE) se disant né le 1er novembre 2001 à [Localité 3] de nationalité Albanaise Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2] dûment avisé, comparant en personne par visioconférence assisté de Me Dalila BEN DERRADJI, avocat au barreau de DOUAI, avocate commise d’office et de M. [P] [C] interprète assermenté en langue albanaise, tout au long de la procédure devant la cour, INTIMÉ MONSIEUR LE PREFET DU [Localité 5] représenté par Maître FAUGERAS, avocat au barreau du Val de Marne PARTIE JOINTE M. le procureur général près la cour d’appel de Douai : non comparant MAGISTRATE DELEGUEE : Sylvie KARAS, Présidente de Chambre à la cour d’appel de Douai désignée par ordonnance pour remplacer le premier président empêché assistée de Julie KALUZNY, Greffière DÉBATS : à l’audience publique du dimanche 27 août 2023 à 13 h 00 Les parties comparantes ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le dimanche 27 août 2023 à Le premier président ou son délégué, Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) et spécialement les articles L 743-21, L 743-23, R 743-10, R 743-11, R 743-18 et R 743-19 ; Vu l’aricle L 743-8 du CESEDA ; Vu la demande de l’autorité administrative proposant que l’audience se déroule avec l’utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle ; Vu l’accord du magistrat délégué ; Vu l’ordonnance rendue le 26 août 2023 par le Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER prolongeant la rétention administrative de M. [X] [I] ; Vu l’appel motivé interjeté par M. [X] [I] par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de ce siège le 26 août 2023 ; Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ; Vu l’audition des parties, les moyens de la déclaration d’appel et les débats de l’audience ; EXPOSE DU LITIGE Le 23 août 2023 à 18h15, les services de police prenaient en charge [Adresse 6] à [Localité 1] 79 migrants de plusieurs nationalités, secourus en mer par le remorqueur ABEILLE NORMANDIE alors que leur embarcation était en perdition en Manche tentant de rejoindre illégalement la Grande Bretagne. Treize personnes étaient présentées à un officier de police judiciaire. C’est dans ces conditions que M. [X] [I], de nationalité albanaise a fait l’objet d’un placement en rétention administrative ordonné par monsieur le Préfet du [Localité 5] le 24.08.2023 (15h20) pour l’exécution d’un éloignement vers le pays de nationalité au titre d’une mesure d’obligation de quitter le territoire français délivrée le même jour par la même autorité. Aucun recours en annulation de l’arrêté de placement en rétention administrative n’a été déposé au visa de l’article L 741-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. ‘ Vu l’article 455 du code de procédure civile ‘ Vu l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Boulogne-sur-Mer en date du 26.08.2023 (10h43) ,ordonnant la première prolongation du placement en rétention administrative de l’appelant pour une durée de 28 jours. ‘ Vu la déclaration d’appel du 26.08.2023 (14h20) sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative. Aucun moyen de nullité de la procédure n’a été soulevé devant le juge des libertés et de la détention . Au titre de sa déclaration d’appel l’appelant soulève les moyens suivants : Irrégularité du contrôle d’identité en ce que seules les personnes de nationalité albanaises ont été contrôlées caractérisant ainsi un contrôle systématique et discriminatoire. Violation de l’article 3 de la CEDH en ce qu’il est impossible d’acheter des vêtements de rechanges au Centre de Rétention Administrative de [Localité 2] vu la cessation de cette possibilité par l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration Lors de l’audience de ce jour, le conseil de l’étranger soulève une exception de nullité complémentaire non mentionnée dans la déclaration d’appel. MOTIFS DE LA DÉCISION De manière liminaire pour répondre à l’exception soulevée à l’audience, il sera considéré que cette exception est irrecevable, faute d’avoir été mentionnée dans la déclaration et d’avoir fait l’objet d’une déclaration d’appel complémentaire déposée dans le délai des 24 heures du délai d’appel. De manière surabondante et par excès de précaution, il sera rappelé qu’aucun fonctionnaire de police ne peut accéder au fichier des personnes recherchées s’il ne possède pas un identifiant personnel doublé d’un code secret spécifique, ce qui implicitement mais nécessairement sous-entend son habilitation. 1) Sur le moyen tiré du contrôle d’identité Ce moyen est irrecevable au visa de l’article 74 du code de procédure civile en ce qu’il a pour objet une irrégularité invoquée dans le cadre de l’interpellation, de la garde à vue ou de la retenue antérieure au placement en rétention administrative, devant de ce fait être qualifiée d’exception de procédure, n’a pas été soulevé avant toute défense au fond devant le premier juge et ne relève pas d’un principe protégé par le droit de l’Union européenne que le juge doit relever d’office en respect de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne du 8 novembre 2022 (n° C-704/20 et C-39/21) De manière superfétatoire il sera remarqué que les éléments du procès-verbal de saisine indiquent que l’ensemble des personnes secourues ayant fait l’objet d’un contrôle d’identité sont de plusieurs nationalités et non toutes albanaises comme l’affirme sans preuve la déclaration d’appel. Dés lors que le procès-verbal ne permet pas d’établir le caractère discriminatoire du contrôle et que les conditions d’apparition de l’élément d’extranéité résultent de la déclaration par l’intéressé de sa nationalité, le juge des libertés et de la détention peut en déduire souverainement que l’étranger n’apporte pas d’élément de fait traduisant une différence de traitement ou laissant présumer l’existence d’une discrimination. (1ère civ 21 novembre 2018 n° 18-11.421) Le moyen sera déclaré irrecevable et en tout état de cause mal-fondé. 2) Sur le moyen tiré de la violation de l’article 3 de la CEDH L’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme interdit aux États de pratiquer la torture, ou de soumettre une personne relevant de leur juridiction à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants. Il ressort de l’analyse de la jurisprudence de la cour européenne des droits de l’homme qu’un acte positif ou une absence de prise en charge ne peut relever de la qualification prévue par l’article 3 ci dessus énoncé que lorsqu’est atteint « le seuil de gravité élevé à partir duquel un traitement peut passer pour inhumain ou dégradant » Ainsi pour tomber sous le coup de l’article 3 de la Convention, un mauvais traitement doit atteindre un minimum de gravité. L’appréciation de ce minimum est relative par essence ; elle dépend de l’ensemble des données de la cause, notamment de la durée du traitement et de ses effets physiques et mentaux, ainsi que, parfois, du sexe, de l’âge et de l’état de santé de la victime. Dans cette perspective, il ne suffit pas que le traitement comporte des aspects désagréables (Guzzardi c. Italie, 6 novembre 1980, § 107, série A no 39, et Messina c. Italie (no 2) (déc.), no 25498/94, CEDH 1999-V). A titre d’exemple n’ont pas été considérés comme dépassant le seuil de gravité suffisant: – l’expulsion d’une personne atteinte d’une grave maladie : 27 mai 2008: N. contre Royaume-Uni (Req. no 26565/05) – une gifle donnée par un agent de police : 28 septembre 2015: Grande Chambre Bouyid c. Belgique (Requête N°23380/09). En l’espèce, si le fait, à supposer celui-ci avéré pour les besoins de l’analyse, que l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration ne soit plus en mesure de proposer aux étrangers retenus au Centre de Rétention Administrative de [Localité 2] l’achat de vêtements de rechange, ne peut qu’être considéré comme désagréable et regrettable, ce fait n’est cependant pas d’une gravité suffisante pour entraîner la main-levée du placement en rétention administrative au visa de l’article 3 de la CEDH précité dés lors qu’il n’est pas démontré que les étrangers retenus ne peuvent avoir accès à un service de lingerie-blanchisserie pour nettoyer leurs vêtements ou que les étrangers sans ressources ou sans change ne peuvent disposer d’un choix de vêtements décents et secs dans le vestiaire du Centre de Rétention Administrative à cet effet. 3) Pour le surplus, la cour considère, après examen de l’ensemble des pièces de la procédure que le placement en rétention administrative de l’appelant est régulier et que c’est par une analyse circonstanciée et des motifs pertinents qui seront intégralement adoptés au visa de l’article 955 du code de procédure civile, que le premier juge et a statué sur le fond en ordonnant la prolongation de la rétention. Sur la notification de la décision à M. [X] [I] En application de l’article R. 743-19 al 2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’ordonnance rendue par le premier président ou son délégué est communiquée au ministère public. Elle est notifiée sur place à l’étranger et à son conseil, s’il en a un, ainsi qu’à l’autorité qui a prononcé la rétention. Les parties présentes en accusent réception. Le greffier la notifie par tout moyen et dans les meilleurs délais aux autres parties qui en accusent réception. En l’absence de M. [X] [I] lors du prononcé de la décision, la présente ordonnance devra lui être notifiée par les soins du greffe du centre de rétention administrative et en tant que de besoin, par truchement d’un interprète. PAR CES MOTIFS DÉCLARE l’appel recevable ; CONSTATE l’irrecevabilité de l’exception de nullité soulevée à l’audience ; CONFIRME l’ordonnance entreprise ; DIT que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ; DIT que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [X] [I] par l’intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d’un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l’autorité administrative ; LAISSE les dépens à la charge de l’État. Julie KALUZNY, Greffière Sylvie KARAS, Présidente de Chambre A l’attention du centre de rétention, le dimanche 27 août 2023 Bien vouloir procéder à la notification de l’ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l’interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : M. [P] [C] Le greffier N° RG 23/01482 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VCKI REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE DU 27 Août 2023 ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l’intéressé au greffe de la cour d’appel de Douai par courriel – [Courriel 4]) : Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile Pour information : L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition. Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public. Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification. Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur. Reçu copie et pris connaissance le – M. [X] [I] – par truchement téléphonique d’un interprète en tant que de besoin – nom de l’interprète (à renseigner) : – décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [X] [I] le dimanche 27 août 2023 – décision transmise par courriel pour notification à MONSIEUR LE PREFET DU [Localité 5] et à Maître Dalila BEN DERRADJI le dimanche 27 août 2023 – décision communiquée au tribunal administratif de Lille – décision communiquée à M. le procureur général – copie au Juge des libertés et de la détention de BOULOGNE SUR MER Le greffier, le dimanche 27 août 2023 N° RG 23/01482 – N° Portalis DBVT-V-B7H-VCKI
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