L’Essentiel : La Cour d’appel de Paris a statué en faveur des studios de développement de « Grand Theft Auto IV », rejetant la demande de Ferrari pour contrefaçon. La société italienne contestait l’utilisation d’un véhicule nommé « Turismo », jugé similaire à ses modèles F40 et 360 Modena. Les juges ont souligné que, bien que la 360 Modena soit originale, le modèle Turismo présente des différences notables, notamment dans les proportions et la forme des éléments. Ces distinctions, loin d’être insignifiantes, confèrent au Turismo une identité visuelle propre, conforme aux critères de protection des dessins et modèles selon le code de la propriété intellectuelle.
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La société Ferrari n’a pas obtenu la condamnation pour contrefaçon, de plusieurs studios de développement et distributeurs du jeu vidéo « Grand Theft Auto IV ». La firme italienne reprochait aux concepteurs d’avoir repris dans le jeu vidéo, un véhicule dénommé « Turismo » reprenant les caractéristiques de ses modèles de Ferrari F40 et 360 Modena. Originalité de la Ferrari 360 Modena Les juges ont précisé que le modèle 360 Modena est original et protégeable en ce qu’il révèle la personnalité de son auteur, notamment en raison du choix particulier de lignes et l’agencement singulier des pièces qui composent ce modèle (éléments qui ne sont nullement dictés par des contraintes techniques mais ressortent de la liberté créatrice de l’auteur). Absence de contrefaçon Les caractéristiques essentielles du modèle Modena ne sont pas reprises dans le modèle Turismo du jeu « Grand Theft Auto IV ». Les deux modèles de voitures présentent de notables différences qui portent en particulier, de profil, sur les proportions des entrées d’air, sur la forme du rehaussement au niveau de la roue, des vitres et des bâtons des jantes, sur la bouche d’aération derrière la portière (elles concernent, à l’arrière, la forme et le positionnement de la lunette arrière, des feux ainsi que du pot d’échappement ou encore, s’agissant de l’habitacle, sur les sièges baquet). Ces différences ne sont pas que de détail, le modèle de véhicule Turismo est doté d’une physionomie qui lui est propre et produit sur l’observateur averti, ainsi qu’en dispose l’article L 513-5 du code de la propriété intellectuelle (CPI), une impression visuelle d’ensemble différente de celle produite par les modèles Ferrari. A noter que dans cette affaire, les juges ont pris en compte les spécificités du secteur automobile qui est marqué par de nombreux impératifs fonctionnels et techniques, les modèles de véhicules se différenciant par des éléments précis, parfois limités et définis avec soin. Rappel sur la protection d’un modèle En application de l’article L511-1 du CPI, peut être protégée à titre de dessin ou modèle l’apparence d’un produit, ou d’une partie de produit, caractérisée en particulier par ses lignes, ses contours, ses couleurs, sa forme, sa texture ou ses matériaux. Ces caractéristiques peuvent être celles du produit lui-même ou de son ornementation. Est regardé comme un produit tout objet industriel ou artisanal, notamment les pièces conçues pour être assemblées en un produit complexe, les emballages, les présentations, les symboles graphiques et les caractères typographiques (à l’exclusion toutefois des programmes d’ordinateur). Seul peut être protégé le dessin ou modèle qui est nouveau et présente un caractère propre. Un dessin ou modèle est regardé comme nouveau si, à la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou à la date de la priorité revendiquée, aucun dessin ou modèle identique n’a été divulgué. Des dessins ou modèles sont considérés comme identiques lorsque leurs caractéristiques ne diffèrent que par des détails insignifiants. Par ailleurs, un dessin ou modèle a un caractère propre lorsque l’impression visuelle d’ensemble qu’il suscite chez l’observateur averti diffère de celle produite par tout dessin ou modèle divulgué avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement ou avant la date de priorité revendiquée. Pour l’appréciation du caractère propre, il est tenu compte de la liberté laissée au créateur dans la réalisation du dessin ou modèle. Mots clés : Jeux video – Marque Thème : Jeux video – Marque A propos de cette jurisprudence : juridiction : Cour d’appel de Paris | Date : 21 septembre 2012 | Pays : France |
Q/R juridiques soulevées :
Qu’est-ce qui a motivé l’action en justice de Ferrari ?R : Ferrari a intenté une action en justice en raison de l’utilisation d’un véhicule dans « Grand Theft Auto IV » qui, selon eux, reprenait les caractéristiques de leurs modèles F40 et 360 Modena. Cette action a été motivée par la volonté de protéger l’image de marque et l’intégrité de ses designs emblématiques. Ferrari, en tant que constructeur automobile de luxe, attache une grande importance à la perception de ses véhicules dans la culture populaire. L’utilisation de modèles inspirés de leurs créations dans des jeux vidéo peut, selon eux, nuire à leur réputation et à leur exclusivité. Cela soulève des questions sur la manière dont les droits de propriété intellectuelle sont appliqués dans le secteur des jeux vidéo, où la représentation des véhicules peut être à la fois un hommage et une source de conflit. Pourquoi les juges ont-ils décidé qu’il n’y avait pas de contrefaçon ?R : Les juges ont constaté que les caractéristiques essentielles du modèle 360 Modena n’étaient pas reproduites dans le modèle Turismo, et que les différences étaient suffisamment significatives pour créer une impression visuelle distincte. Les juges ont examiné les éléments de design, tels que les proportions des entrées d’air et la forme des éléments, qui différaient notablement entre les deux modèles. Cette analyse a permis de conclure que le modèle Turismo avait une physionomie propre, ce qui a été déterminant dans leur décision. En d’autres termes, même si le Turismo pouvait évoquer la Ferrari, il ne la reproduisait pas de manière suffisamment proche pour constituer une contrefaçon. Quelles sont les conditions pour qu’un modèle soit protégé par le droit d’auteur ?R : Un modèle doit être nouveau et présenter un caractère propre, ce qui signifie qu’il doit susciter une impression visuelle différente de celle d’autres modèles divulgués avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement. Selon l’article L511-1 du Code de la propriété intellectuelle (CPI), la protection d’un modèle repose sur son apparence, qui peut inclure des éléments tels que les lignes, les contours, les couleurs, la forme, la texture ou les matériaux. Pour qu’un modèle soit considéré comme original et donc protégeable, il doit refléter la créativité de son auteur et ne pas être simplement le résultat de contraintes techniques. Cela souligne l’importance de l’innovation dans le design. Comment le secteur automobile influence-t-il la protection des designs ?R : Le secteur automobile est soumis à des impératifs fonctionnels et techniques, ce qui rend la différenciation des modèles plus complexe et nécessite une évaluation minutieuse des droits de propriété intellectuelle. Les véhicules doivent répondre à des normes de sécurité, d’efficacité et de performance, ce qui peut limiter la liberté de création des designers. De plus, les modèles de véhicules se distinguent souvent par des éléments précis, ce qui complique la protection des designs. Les juges ont donc dû prendre en compte ces spécificités lors de leur décision, soulignant la nécessité d’une approche nuancée dans l’évaluation des droits de propriété intellectuelle dans ce domaine. |
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