Signalisation publicitaire : la sortie d’une convention d’occupation du domaine public

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Signalisation publicitaire : la sortie d’une convention d’occupation du domaine public

Maintenir son matériel de signalisation publicitaire aux abords des voies de circulation alors que la convention d’occupation du domaine public l’autorisant a expiré expose le contrevenant à une condamnation.

Selon l’article L. 116-1 du code de la voirie routière, la répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier est poursuivie devant la juridiction judiciaire sous réserve des questions préjudicielles relevant de la compétence de la juridiction administrative.

L’article L.111-1 de ce code énonce que le domaine public routier comprend l’ensemble des biens du domaine public de l’Etat, des départements et des communes affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l’exception des voies ferrées.

Par ailleurs, l’article L. 2111-14 du code général de la propriété des personnes publiques définit le domaine public routier comme l’ensemble des biens appartenant à une personne publique mentionnée à l’article L. 1 (Etat, collectivités territoriales et leurs groupements et établissements publics) et affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l’exception des voies ferrées.

L’occupation sans droit ni titre d’un bien appartenant au domaine public routier constitue un trouble manifestement illicite, justifiant l’intervention du juge judiciaire pour ordonner l’expulsion de l’occupant. Cette règle est fondée sur les dispositions des articles L. 116-1 et L. 2111-14 du code de la voirie routière, qui définissent le domaine public routier et les conditions de sa conservation.

L’article L. 116-1 stipule que la répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier est poursuivie devant la juridiction judiciaire, tandis que l’article L. 2111-14 précise que le domaine public routier comprend les biens affectés aux besoins de la circulation terrestre.

Compétence du juge judiciaire

La compétence du juge judiciaire pour statuer sur les litiges relatifs à l’occupation du domaine public routier est affirmée par l’article L. 2132-1 du code général de la propriété des personnes publiques, qui établit que la répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier relève de cette juridiction.

En l’espèce, la société Info-Industries a maintenu son matériel de signalisation sur des voies d’accès affectées à la circulation terrestre, ce qui constitue une occupation sans droit ni titre, justifiant ainsi l’intervention du juge judiciaire.

Intérêt à agir de la communauté d’agglomération

La communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart a qualité et intérêt à agir en vertu des articles 7 et 8 de ses statuts, qui lui confèrent des compétences en matière de développement économique et d’entretien des voiries d’intérêt communautaire.

Ces articles précisent que la communauté exerce de plein droit les compétences des communes membres, y compris la gestion des zones d’activité et l’entretien des voiries, ce qui inclut les zones où le matériel de signalisation de la société Info-Industries a été installé.

Conditions de l’expulsion

L’expulsion d’un occupant sans droit ni titre est justifiée par l’article 835 du code de procédure civile, qui permet au président du tribunal judiciaire de prescrire des mesures conservatoires pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Dans ce cas, la société Info-Industries n’a pas démonté son matériel après la dénonciation des conventions, ce qui constitue une violation des obligations contractuelles et un trouble manifestement illicite, justifiant l’ordonnance d’expulsion.

L’Essentiel : L’occupation sans droit ni titre d’un bien du domaine public routier constitue un trouble manifestement illicite, justifiant l’intervention du juge judiciaire pour ordonner l’expulsion de l’occupant. La société Info-Industries a maintenu son matériel de signalisation sur des voies d’accès affectées à la circulation terrestre, ce qui constitue une occupation sans droit ni titre. La communauté d’agglomération Grand Paris Sud a qualité et intérêt à agir en raison de ses compétences en matière d’entretien des voiries d’intérêt communautaire.
Résumé de l’affaire : La société Info-Industries, spécialisée dans la publicité extérieure, a signé des conventions avec un établissement public d’aménagement pour la signalisation sur le domaine public de deux communes, [Localité 7] et [Localité 23]. Ces conventions, d’une durée initiale de dix ans, étaient renouvelables par tacite reconduction. En février 2021, la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart, successeur de l’établissement public, a dénoncé ces conventions, demandant la dépose des portiques de signalisation et la réfection des espaces publics.

Malgré plusieurs mises en demeure, la société Info-Industries n’a pas procédé à la dépose de son matériel. En janvier 2024, la communauté d’agglomération a assigné la société devant le tribunal judiciaire d’Évry pour obtenir son expulsion du domaine public, arguant d’une occupation sans droit ni titre. Le tribunal a ordonné l’expulsion de la société, confirmant la compétence du juge judiciaire sur ce litige, malgré les contestations de la société sur la qualité et l’intérêt à agir de la communauté d’agglomération.

La société Info-Industries a interjeté appel, contestant la décision et soutenant que les conventions étaient de nature administrative, relevant du juge administratif. Cependant, le tribunal a confirmé que le litige concernait une occupation illicite du domaine public routier, ce qui relevait de la compétence judiciaire. La communauté d’agglomération a été reconnue comme ayant qualité pour agir, étant la successeur des signataires des conventions.

En conclusion, le tribunal a confirmé l’ordonnance d’expulsion, considérant que le maintien du matériel de signalisation constituait un trouble manifestement illicite. La société Info-Industries a été condamnée aux dépens et à verser une somme à la communauté d’agglomération pour les frais irrépétibles.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement de l’exception d’incompétence soulevée par la société Info-Industries ?

La société Info-Industries soutient que le juge judiciaire n’est pas compétent pour connaître de ce litige, arguant que les conventions signées relèvent du domaine public communal et non du domaine public routier.

Elle se réfère à l’article L.2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques, qui stipule que les conventions de ce type sont de nature administrative et doivent être jugées par le juge administratif.

Cependant, l’article L. 116-1 du code de la voirie routière précise que la répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier est poursuivie devant la juridiction judiciaire.

Ainsi, le litige concerne l’occupation sans droit ni titre du domaine public routier, ce qui confère compétence au juge judiciaire.

Quel est l’intérêt à agir de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart ?

La communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart, venant aux droits de l’établissement public d’aménagement de la ville nouvelle d'[Localité 9], a qualité et intérêt à agir contre la société Info-Industries.

Selon l’article 31 du code de procédure civile, l’action est ouverte à ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention.

Les statuts de la communauté d’agglomération, notamment les articles 7 et 8, lui confèrent des compétences en matière de développement économique et d’entretien des voiries d’intérêt communautaire, ce qui inclut les zones d’activités où le matériel de signalisation a été installé.

Quel est le caractère du trouble manifestement illicite invoqué par la communauté d’agglomération ?

Le trouble manifestement illicite est défini par l’article 835, alinéa 1, du code de procédure civile, qui permet au président du tribunal judiciaire de prescrire des mesures conservatoires pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L’occupation d’un bien sans droit ni titre constitue un trouble manifestement illicite.

Dans ce cas, la société Info-Industries a maintenu son matériel de signalisation après l’expiration des conventions, ce qui caractérise une occupation sans droit ni titre du domaine public routier, justifiant ainsi l’ordonnance d’expulsion.

Quelles sont les conséquences de la dénonciation des conventions par la communauté d’agglomération ?

Les conventions signées par la société Info-Industries ont été dénoncées conformément aux stipulations contractuelles, permettant à la communauté d’agglomération de demander le démontage du matériel.

L’article 7 des conventions stipule que le matériel doit être démonté à l’expiration de celles-ci.

La communauté d’agglomération a respecté les délais de préavis requis pour la dénonciation, et la société Info-Industries n’a pas procédé au démontage, ce qui constitue une occupation illicite.

Quel est le sort des dépens et des frais irrépétibles dans cette affaire ?

La société Info-Industries, ayant succombé en ses prétentions, est condamnée aux dépens d’appel.

L’article 700 du code de procédure civile permet à la partie gagnante de demander le remboursement des frais irrépétibles.

Le premier juge a correctement appliqué ces dispositions en condamnant la société Info-Industries à verser 4.000 euros à la communauté d’agglomération pour couvrir ses frais de défense.

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 1 – Chambre 8

ARRÊT DU 04 AVRIL 2025

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 24/13180 – N° Portalis 35L7-V-B7I-CJZH3

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 11 Juin 2024 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP d'[Localité 9] – RG n° 24/00012

APPELANTE

S.A.S. INFO INDUSTRIES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Eric ALLERIT de la SELEURL TBA, avocat au barreau de PARIS, toque : P0241

Ayant pour avocat plaidant Me Pierre BONFILS, avocat au barreau de BEZIERS

INTIMÉE

COMMUNAUTÉ D’AGGLOMÉRATION GRAND PARIS SUD SEINE ESSONNE SÉNART, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Eric SAGALOVITSCH de la SCP LONQUEUE – SAGALOVITSCH – EGLIE-RICHTERS & Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : P0482

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 mars 2025, en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Florence LAGEMI, Président de chambre, chargée du rapport, et Marie-Catherine GAFFINEL, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Florence LAGEMI, Président,

Marie-Catherine GAFFINEL, Conseiller,

Patrick BIROLLEAU, Magistrat honoraire

Greffier, lors des débats : Jeanne BELCOUR

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Florence LAGEMI, Présidente de chambre et par Jeanne BELCOUR, Greffière, présent lors de la mise à disposition.

La société Info-Industries est une entreprise de publicité extérieure spécialisée dans le fléchage et la signalétique commerciale de longue durée sur le domaine public, auprès d’entreprises régionales, exerçant leurs activités sur différents parcs d’activités économiques, notamment dans l’Essonne, à [Localité 7] et [Localité 23].

En ce qui concerne la commune de [Localité 7], une convention de signalisation sur le domaine public a été signée, le 16 septembre 1987, entre l’établissement public d’aménagement de la ville d'[Localité 9] et la société Info-Industries.

Cette convention a pour objet l’amélioration sur le domaine public communal de la signalisation interne des parcs d’activités ‘La Marinière’ et ‘Les Bordes’, pour les entreprises qui le demandent, et l’amélioration de l’image de ces parcs et des entreprises qui y sont installées. Cette convention a été conclue pour une durée de dix ans, renouvelable par période de trois années entières et consécutives par tacite reconduction, sauf dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception au moins six mois à l’avance.

Le 9 février 2021, la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart, venant aux droits l’établissement public d’aménagement de la ville d'[Localité 9], a dénoncé cette convention dont l’échéance a été fixée au 16 septembre 2021.

La communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart a donc demandé à la société Info-Industries la dépose intégrale des portiques de signalisation d’entreprises ainsi que la réfection des trottoirs et espaces verts et ce, à deux reprises, avant de la mettre en demeure d’y procéder, par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 14 septembre 2023, réitérée le 31 octobre suivant, puis le 1er décembre de la même année.

En ce qui concerne la commune de [Localité 23], une convention de signalisation sur le domaine public communal a été signée, le 12 décembre 1994, entre l’établissement public d’aménagement de la ville d'[Localité 9] et la société Info-Industries, destinée à l’amélioration, sur le domaine public communal, de la signalisation interne des parcs d’activités ‘Le Clos aux Pois’, ‘[Adresse 1]’ et ‘le Centre commercial A6’. Elle a été conclue pour une durée de dix ans, renouvelable par période de quatre années entières et consécutives par tacite reconduction, sauf dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception au moins six mois à l’avance.

Le 1er octobre 2010, un avenant a été signé entre la commune de [Localité 23] et la société Info-Industries, sans la communauté d’agglomération [Localité 9] centre Essonne, créée le 31 décembre 2000 et ayant succédé à l’établissement public d’aménagement de la ville d'[Localité 9], pour quatre implantations supplémentaires de portiques de signalisation d’entreprises.

Le 10 janvier 2020, la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart, venant aux droits de la communauté d’agglomération [Localité 9] centre Essonne, a dénoncé cette convention dont l’échéance a été fixée au 11 décembre 2020.

La communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart a demandé à la société Info-Industries la dépose intégrale des portiques de signalisation d’entreprises ainsi que la réfection des trottoirs et espaces verts dans les règles de l’art, demande réitérée le 19 juin 2023 et, par lettre recommandée avec avis de réception du 14 septembre 2023, contenant mise en demeure, elle-même réitérée le 31 octobre et le 1er décembre 2023.

Une plainte, ultérieurement classée sans suite, a été déposée par la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart à l’encontre la société Info-Industries auprès des gendarmeries de [Localité 12] et de [Localité 7].

C’est dans ces circonstances que la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essonne-Sénart a, par acte du 6 janvier 2024, assigné, devant le juge des référés du tribunal judiciaire d’Evry, la société Info-Industries afin, notamment, d’obtenir son expulsion, sous astreinte, du fait de son occupation sans droit ni titre des voies d’intérêt communautaire des parcs et zones d’activité susvisées situés à Villabé et Bondoufle.

Par ordonnance contradictoire du 11 juin 2024, le premier juge a :

rejeté la note en délibéré non autorisée transmise par la société Info-Industries ;

rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la société Info-Industries ;

rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité et d’intérêt à agir soulevée par la société Info-Industries ;

ordonné l’expulsion de la société Info-Industries, ainsi que de tous occupants de son chef avec leurs biens mobiliers incluant le matériel de signalisation, du domaine public routier sur les voies et zones d’activités suivantes :

– [Localité 23] – Parc d’activité ‘[Adresse 1]’ : [Adresse 1],

– [Localité 23] – Parc d’activité ‘centre commercial A6’ : [Adresse 14] angle [Adresse 1], [Adresse 6] – station essence, [Adresse 6], angle [Adresse 14], rond-point [Adresse 6],

– [Localité 23] – Zone d’activité ‘[Adresse 8]’ : [Adresse 17] angle RD 26,

– [Localité 7] – Zone d’activité ‘[Adresse 10]’ : [Adresse 15] angle [Adresse 19], [Adresse 18] angle [Adresse 19], [Adresse 20] angle [Adresse 15], bretelle RD31- angle [Adresse 20],

– [Localité 7] – Zone d’activité ‘[Adresse 11]’ : [Adresse 21] angle [Adresse 22], [Adresse 16] angle [Adresse 21], [Adresse 22] angle [Adresse 13] ;

et ce dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la décision, avec le concours de la force publique en tant que de besoin ;

dit que le sort des meubles et objets mobiliers (en ce compris les panneaux de signalisation) garnissant les lieux sera régi par les dispositions des articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;

dit n’y avoir lieu à référé sur la demande d’astreinte formulée par la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart ;

condamné la société Info-Industries à payer la somme de 500 euros à la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

condamné la société Info-Industries aux dépens.

Par déclaration du 16 juillet 2024, la société Info-Industries a relevé appel de cette décision en critiquant l’ensemble de ses chefs de dispositif.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 5 mars 2025, avant le prononcé de l’ordonnance de clôture, la société Info-Industries demande à la cour de :

la recevoir en son appel et la déclarer bien fondée ;

Y faisant droit,

réformer l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions dont elle a relevé appel ;

Statuant à nouveau,

constater que le juge judiciaire a été saisi à tort des demandes de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart ;

rejeter les demandes d’expulsion et de concours de la force publique comme étant présentées devant une juridiction incompétente ;

rejeter les demandes d’astreinte et de frais irrépétibles ;

débouter la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart de l’intégralité de ses demandes ;

la condamner à lui payer une somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

la condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel avec faculté de recouvrement direct au profit de Maître Eric Allerit, membre de la société Taze-Bernard Allerit, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières écritures remises et notifiées le 3 mars 2025 (mémoire n°2), la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart demande à la cour de :

rejeter les conclusions en appel de la société Info-Industries ;

condamner la société Info-Industries à lui verser, les entiers dépens ainsi que sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, une somme de 4.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

La clôture de la procédure a été prononcée le 5 mars 2025.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée ainsi qu’aux conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur l’exception d’incompétence

La société Info-Industries soulève l’incompétence du juge judiciaire pour connaître de ce litige, qui, selon elle, est relatif à une occupation du domaine public communal de [Localité 7] et de [Localité 23] et ne concerne pas le domaine public routier comme le soutient à tort l’intimée et l’a retenu le premier juge.

Pour en justifier, elle se fonde sur les termes des conventions signées, qui lui imposaient d’obtenir l’accord des municipalités préalablement à l’installation du matériel de signalisation, laquelle a été validée et approuvée par les maires de [Localité 7] et de [Localité 23]. Elle considère donc que cette implantation s’est effectuée sur le domaine public communal, que les conventions sont de nature administrative, régies par le droit administratif et relèvent du juge administratif en application de l’article L.2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques de sorte qu’il est seul compétent pour statuer sur une demande tendant à l’expulsion du domaine public communal.

Elle invoque encore l’avenant du 1er octobre 2010 établi entre elle et la commune de [Localité 23], qui mentionne clairement qu’il s’agit du domaine public communal et soutient que le matériel de signalisation implanté pour les entreprises, dans les zones d’activités, n’est pas affecté à la signalisation routière le long de ces zones, de sorte que les dispositions de l’article L.116-1 du code de la voirie routière, invoquées par l’intimée, qui ne démontre pas que les implantations litigieuses se sont effectuées sur le domaine public routier ou même sur le domaine communautaire ou d’intérêt communautaire, n’ont pas vocation à s’appliquer.

Mais, ainsi que le fait justement observer l’intimée, les conventions ont été signées avec l’établissement public d’aménagement de la ville nouvelle d'[Localité 9] et l’implantation du matériel litigieux a été autorisée par cet établissement et non par les maires concernés. L’avenant signé par la commune de [Localité 23], le 1er octobre 2010, ne remet pas en cause la convention initiale.

En outre et surtout, le litige ne porte pas sur une convention comportant occupation du domaine public, étant en effet relevé que les conventions signées avec la société Info-Industries ont pris fin faute d’avoir été reconduites, mais est circonscrit à la seule occupation, sans droit ni titre, de la société Info-Industries, qui a maintenu son matériel de signalisation aux abords des voies de circulation, en dépit de l’expiration des conventions le 11 décembre 2020, pour les zones d’activités de [Localité 23] et, le 16 septembre 2021, pour les zones d’activités de [Localité 7].

Selon l’article L. 116-1 du code de la voirie routière, la répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier est poursuivie devant la juridiction judiciaire sous réserve des questions préjudicielles relevant de la compétence de la juridiction administrative.

L’article L.111-1 de ce code énonce que le domaine public routier comprend l’ensemble des biens du domaine public de l’Etat, des départements et des communes affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l’exception des voies ferrées.

Par ailleurs, l’article L. 2111-14 du code général de la propriété des personnes publiques définit le domaine public routier comme l’ensemble des biens appartenant à une personne publique mentionnée à l’article L. 1 (Etat, collectivités territoriales et leurs groupements et établissements publics) et affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l’exception des voies ferrées.

Selon l’article L. 2111-2 du même code, font également partie du domaine public les biens des personnes publiques mentionnées à l’article L.1 qui, concourant à l’utilisation d’un bien appartenant au domaine public, en constituent un accessoire indissociable.

L’article L.2132-1 dudit code dispose que la répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier est poursuivie dans les conditions fixées au chapitre VI du titre Ier du livre Ier du code de la voirie routière.

Ainsi, font partie du domaine public routier communal les routes affectées aux besoins de la circulation terrestre et leurs dépendances, soit les éléments autres que la chaussée nécessaires à son fonctionnement comme les trottoirs, les fossés, les talus et accotements, les plantations en bordure de ces voies, les murs de soutènement de ces voies, les ponts, les tunnels, les galeries et passages.

En application des articles L. 2132-1 du code général de la propriété des personnes publiques et L. 116-1 du code de la voirie routière, le respect de l’intégrité matérielle des voies et dépendances faisant partie du domaine public routier communal et, notamment, l’occupation illicite de ce domaine relèvent de la compétence du juge judiciaire.

Il résulte des pièces produites et, notamment, des conventions et photographies annexées et des fiches techniques de signalisation que le matériel de la société Info-Industries a été implanté en bordure des routes et ronds-points permettant l’accès aux secteurs commerciaux des zones d’activités concernées. Ces voies d’accès affectées aux besoins de la circulation terrestre appartiennent au domaine public routier en application de l’article L.2111-14 susvisé. Les accotements herbeux ou bitumés bordant les chaussées, sur lesquels a été installé le matériel litigieux en constituent donc un accessoire indispensable en application de l’article L.2111-2 et relèvent à l’évidence du domaine public routier.

Il en résulte que le juge judiciaire est compétent pour statuer sur la demande d’expulsion formée par l’intimée à l’encontre de la société Info-Industries en raison de son occupation sans droit ni titre alléguée d’une dépendance du domaine public routier.

L’exception d’incompétence sera donc rejetée et l’ordonnance entreprise sera confirmée de ce chef.

Sur la demande d’expulsion

En premier lieu, la société appelante conteste la qualité et l’intérêt à agir de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart en soutenant que l’action de cette dernière ne s’inscrit pas dans les articles 7 et 8 de ses statuts, le premier traitant de la gestion des zones d’activité industrielle, commerciale, tertiaire et artisanale, le second traitant de la création, l’aménagement et l’entretien des voiries d’intérêt communautaire et sont donc sans lien avec la signalisation des entreprises présentes dans les zones d’activités.

Elle fait encore valoir que la zone ‘[Adresse 8]’, sur la commune de [Localité 23], n’est pas comprise dans celles qui ont été transférées à l’intimée et indique que les photographies non datées et quasiment illisibles produites devant le premier juge ne pouvaient suffire à établir la présence et le maintien des portiques de signalisation d’entreprises sur les parcs d’activités de [Localité 7] et de [Localité 23].

Selon les articles 31 et 32 du code de procédure civile, l’action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d’une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d’agir aux seules personnes qu’elle qualifie pour élever ou combattre une prétention ou pour défendre un intérêt déterminé ; toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d’agir est irrecevable.

La communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart, créée par un arrêté interpréfectoral du 15 décembre 2015, vient aux droits de l’établissement public d’aménagement de la ville nouvelle d'[Localité 9], signataires des conventions conclues avec la société Info-Industries, le 16 septembre 1987, pour les zones d’activités de la commune de [Localité 7] et, le 12 décembre 1994, pour les zones d’activités de la commune de [Localité 23].

Selon la délibération n° 2017/525 du 19 décembre 2017, portant sur la définition de l’intérêt communautaire de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart, celui-ci comprend, notamment, les voiries dont celles internes des zones d’activités économiques.

En outre, il résulte de l’article 7 des statuts de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart que celle-ci exerce de plein droit au lieu et place des communes membres (dont font partie les communes de [Localité 7] et de [Localité 23]), en matière de développement économique, (les) actions de développements économiques dans les conditions prévues à l’article L.4251-17 ; création, aménagement, entretien et gestion de zones d’activité industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique (…).

Par ailleurs, en application de l’article 8 de ces statuts, la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart exerce de plein droit au lieu et place des communes membres les compétences suivantes : 1/ Création ou aménagement et entretien de voirie d’intérêt communautaire (…).

Il est annexé aux statuts une liste des voiries d’intérêt communautaire de la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart parmi lesquelles figurent celles desservant les zones d’activités des communes de [Localité 7] et [Localité 23] sur lesquelles le matériel de signalisation de la société Info-Industries a été installé.

Il apparaît ainsi que la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart a qualité et intérêt à agir à l’encontre de la société Info-Industries.

En second lieu, la société appelante conteste le trouble manifestement illicite invoqué en reprenant les moyens précédemment soutenus quant à l’incompétence du juge judiciaire et à l’irrecevabilité de la demande de l’intimée fondée sur l’article 835 du code de procédure civile, invoqué, selon elle, à tort devant une juridiction incompétente.

Si elle ne conteste pas que la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart vient aux droits de l’établissement public d’aménagement de la ville nouvelle d'[Localité 9], elle considère toutefois que les conventions auraient dû être dénoncées par les communes concernées.

Or, ces moyens, déjà examinés, ne permettent pas de remettre en cause l’existence ou non du trouble manifestement illicite invoqué par la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart.

Selon l’article 835, alinéa 1, du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le trouble manifestement illicite désigne toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit. Le caractère illicite de l’acte peut résulter de sa contrariété à la loi, aux stipulations d’un contrat ou aux usages.

L’occupation d’un bien sans droit ni titre constitue un trouble manifestement illicite.

Au cas présent, il est constant que les conventions signées par la société Info-Industries, les 16 septembre 1987 et 12 décembre 1994, ont été conclues pour une durée initiale de dix ans, renouvelable, par tacite reconduction, par période de trois années, pour la première, et de quatre années, pour la seconde, sauf dénonciation par lettre recommandée avec accusé de réception au moins six mois à l’avance par l’une ou l’autre des parties.

Il a été convenu qu’à l’expiration de chacune des conventions, le matériel devait être démonté aux frais de la société Info-Industries qui en demeurera propriétaire (article 7 de chacune des conventions).

Il est également constant que ces conventions ont été dénoncées par la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart suivant lettres recommandées avec avis de réception du 10 janvier 2021, pour la première avec effet au 11 décembre 2020, et du 9 février 2021, pour la seconde avec effet au 16 septembre 2021.

Cette dénonciation s’est effectuée, avec toute l’évidence requise en référé, dans les conditions contractuelles et par une personne ayant qualité et pouvoir pour le faire, la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart venant aux droits de l’établissement public d’aménagement de la ville nouvelle d'[Localité 9], signataire originaire des conventions, et étant en charge des voiries d’intérêt communautaire concernées par l’implantation du matériel signalétique de la société appelante.

La société Info-Industries ne démontre pas avoir procédé au démontage de son matériel en dépit des nombreuses demandes et mises en demeure qui lui ont été adressées en ce sens.

Ainsi, le maintien injustifié de son matériel de signalisation caractérise une occupation sans droit ni titre du domaine public routier et, par suite, l’existence d’un trouble manifestement illicite.

Il convient dans ces conditions de confirmer l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a ordonné l’expulsion de la société appelante, seule mesure permettant de faire cesser ce trouble.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le sort des dépens de première instance et l’application de l’article 700 du code de procédure civile ont été exactement appréciés par le premier juge.

Succombant en ses prétentions, la société Info-Industries supportera les dépens d’appel et sera condamnée à payer à l’intimée, contrainte d’exposer des frais irrépétibles pour assurer sa défense, la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Condamne la société Info-Industries aux dépens d’appel et à payer à la communauté d’agglomération Grand Paris Sud Seine-Essone-Sénart la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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