Droit du logiciel : 25 avril 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/00740

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Droit du logiciel : 25 avril 2023 Cour d’appel de Lyon RG n° 21/00740

AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 21/00740 – N° Portalis DBVX-V-B7F-NL77

S.A.S. [4]

C/

CPAM DU RHONE

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Pole social du TJ de LYON

du 11 Janvier 2021

RG : 15/00151

AU NOM DU PEUPLE FRAN’AIS

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE D

PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU 25 AVRIL 2023

APPELANTE :

S.A.S. [4]

Service AT

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Aurélie MANIER, avocat au barreau de LYON

Assurée [M] [S]

INTIMEE :

CPAM DU RHONE

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par M. [B] [U], muni d’un pouvoir

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 03 Janvier 2023

Présidée par Thierry GAUTHIER, Conseiller, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

– Nathalie PALLE, présidente

– Thierry GAUTHIER, conseiller

– Vincent CASTELLI, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 25 Avril 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nathalie PALLE, Présidente, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Salarié de l’entreprise de travail temporaire [4] (l’employeur), M. [S] (le salarié) a été mis à la disposition de la société [5], entreprise utilisatrice, en qualité de couvreur et a été victime d’un accident, le 28 novembre 2011, pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie du Rhône (la caisse), qui a considéré que son état de santé était guéri le 27 octobre 2012.

L’employeur a contesté cette décision de prise en charge devant la commission de recours amiable de la caisse qui a rejeté sa contestation par décision du 17 juin 2015.

Le 26 janvier 2016, l’employeur a saisi d’un recours le tribunal des affaires de sécurité sociale de Lyon contre la décision de rejet implicite.

Par jugement du 11 janvier 2021, le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon a :

– déclaré opposable à l’employeur la décision de prise en charge des arrêts de travail et soins du 28 novembre 2011 au 13 septembre 2012, consécutifs à l’accident du travail du 28 novembre 2011 de M. [S] ;

– déclaré inopposable à l’employeur la décision de prise en charge des arrêts de travail et soins du 27 septembre 2012 au 27 octobre 2012, date de guérison ;

– débouté l’employeur de sa demande d’expertise médicale judiciaire ;

– condamné l’employeur aux dépens.

Par lettre recommandée envoyée le 28 janvier 2021, l’employeur a relevé appel de cette décision.

Dans ses conclusions déposées le 11 avril 2022, l’employeur demande à la cour de :

– infirmer le jugement en ce qu’il lui a déclaré opposable la décision de prise en charge des arrêts de travail et soins du 28 novembre 2011 au 13 septembre 2012 consécutifs à l’accident du travail du 28 novembre 2011 de M. [S] ;

– lui déclarer inopposables ces arrêts de travail ;

– ordonner une mesure d’expertise médicale à cette fin ;

– ordonner au service médical de la caisse de communiquer dans le cadre de l’expertise l’ensemble des documents médicaux constituant le dossier du salarié à l’expert désigné ;

– condamner la caisse aux dépens.

L’employeur fait valoir que :

– le salarié a bénéficié de 307 jours d’arrêts de travail alors que les circonstances de l’accident, ayant entraîné un blocage dorsal et lombaires, sont bénignes ;

– son médecin conseil a mis en exergue l’existence d’un état antérieur, temporairement dolorisé par l’accident mais qui a ensuite évolué pour son propre compte ;

– les certificats médicaux révèlent une discontinuité de symptômes et évoquent des lésions consécutives à des faits sans lien avec l’accident du travail, ce qui laisse supposer un événement accidentel ultérieur, non professionnel, constituant une cause totalement étrangère à l’accident du travail du 28 novembre 2011 ;

– la présomption d’imputabilité ne s’applique pas, faute de continuité des soins et symptômes ;

– les certificats médicaux postérieurs au 3 janvier 2012 ne sont pas imputables à l’accident du travail et doivent être déclarés inopposables.

Dans ses conclusions déposées le 9 novembre 2022, la caisse demande à la cour de :

– confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions ;

– rejeter la demande de l’employeur comme non-fondée.

Elle fait valoir que :

– l’accident du travail a été pris en charge d’emblée et l’intéressé a bénéficié de prescriptions d’arrêt de travail et de soins jusqu’au 13 septembre 2012, date de guérison de ses lésions ;

– les certificats médicaux, initial – lequel indique un blocage dorsal et lombaire – et de prolongation, visent tous le même siège de lésion  ;

– aucun avis défavorable a été émis par le médecin de la caisse quant à la prise en charge de ces arrêts ;

– la note du médecin conseil de l’employeur soutient qu’il existait un état antérieur alors qu’elle a été établie neuf ans après l’accident et sans examen de l’assuré, le médecin relevant en outre que l’accident a causé une inflammation aigue ;

– le fait accidentel a causé un bombement discal qui a été causé par l’accident et a engendré des douleurs rachidiennes, étant précisé que les douleurs sous l’omoplate sont cohérentes avec le fait accidentel, au cours duquel le salarié s’est trouvé à porter un arbalétrier, soit une pièce de 100 kilos, ce qui lui a occasionné des souffrances dans tout le haut du corps ;

– l’employeur n’a pas usé, durant les arrêts, de la faculté qui lui est ouverte de faire pratiquer des contrôles, en application de l’article L. 315-1 du code de la sécurité sociale ;

– la durée des arrêts, même important, ne détruit pas la présomption d’imputabilité ;

– l’employeur ne justifie pas de l’utilité d’une mesure d’expertise, étant rappelé qu’une relation causale partielle suffit pour que l’arrêt soit pris en charge au titre de l’accident du travail et qu’un état antérieur qui n’empêchait pas le salarié de travailler doit être pris en charge au titre de l’accident qui révèle, aggrave ou provoque une décompensation de cet état ;

– toute demande de fixation d’une nouvelle date de guérison est exclue dans le cadre de ce litige.

Conformément aux dispositions de l’article 446-1 du code de procédure civile, les parties ont oralement soutenu à l’audience les écritures qu’elles ont déposées au greffe ou fait viser par le greffier lors de l’audience de plaidoirie et qu’elles indiquent maintenir, sans rien y ajouter ou retrancher.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux écritures ci-dessus visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il sera noté que la caisse ne critique pas, à titre incident, le jugement en ce qu’il a déclaré inopposable à l’employeur la prise en charge des arrêts de travail prescrits pour la période du 27 septembre au 27 octobre 2012.

Par ailleurs, l’employeur ne conteste pas le caractère professionnel de l’accident et le litige porte ainsi sur les arrêts et soins prescrits du 28 novembre 2011 au 13 septembre 2012.

La cour rappelle que, selon les dispositions de l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée, ou travaillant à quelque titre que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.

Il découle de ce texte que la présomption d’imputabilité au travail s’attachant aux lésions survenues au temps et sur le lieu du travail , dès lors qu’un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d’accident du travail est assorti d’un arrêt de travail, s’étend pendant toute la durée d’incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l’état de la victime, et il appartient à l’employeur qui conteste cette présomption d’apporter la preuve contraire.

Elle ne fait pas obstacle à ce que l’employeur conteste l’imputabilité à l’accident du travail initialement reconnu de tout ou partie des soins et arrêts de travail pris en charge ultérieurement par la caisse primaire d’assurance maladie, mais lui impose alors de rapporter, par tous moyens, la preuve de l’absence de lien de causalité, c’est-à-dire d’établir que les arrêts de travail et les soins prescrits en conséquence de l’accident résultent d’une cause totalement étrangère au travail.

Il doit être en outre rappelé que le lien de causalité qui résulte de la présomption subsiste quand bien même l’accident aurait seulement précipité l’évolution ou l’aggravation d’un état pathologique antérieur qui n’entraînait jusqu’alors aucune incapacité.

Une mesure d’expertise n’a donc lieu d’être ordonnée que si l’employeur apporte des éléments de nature à laisser présumer l’existence d’une cause étrangère qui serait à l’origine exclusive des arrêts de travail contestés et, en tout état de cause, elle n’a pas vocation à pallier la carence d’une partie dans l’administration de la preuve.

Enfin, la référence au caractère disproportionné entre la longueur des arrêts de travail en considération de la lésion constatée ou encore le caractère initialement bénin de celle-ci ne sont pas de nature à établir de manière suffisante l’existence d’un litige d’ordre médical, eu égard aux considérations qui précèdent.

En l’espèce, il ressort de la déclaration d’accident du travail établie le 30 novembre 2011 que, le 28 novembre 2011, le salarié transportait « avec deux autres collègues un arbalétrier lorsque ces deux autres collègues ont déposé l’objet, il n’a pas lâché au bon moment et il aurait ressenti une douleur au dos ».

Le certificat médical initial établi le 29 novembre 2011, prescrivant un arrêt de travail, indique un « blocage dorsal et lombaire ».

Il sera noté que la caisse produit les certificats médicaux ayant suivi ce certificat médical initial et ayant prolongé les arrêts de travail de manière continue jusqu’au terme de la période litigieuse, soit le 13 septembre 2012.

Elle justifie en outre d’une attestation de paiement des indemnités journalières pour la période du 1er janvier 2012 au 13 septembre 2012 ainsi que d’une capture d’écran de son logiciel de gestion, mentionnant l’identité du salarié, et indiquant une indemnisation du 29 novembre 2011 au 13 septembre 2012.

Dès lors, il y a lieu de retenir que la présomption s’applique aux arrêts prescrits depuis la survenance de l’accident de travail jusqu’au 13 septembre 2012.

Il sera rappelé qu’en application des textes susvisés, la longueur des arrêts prescrits au salarié n’est pas de nature à renverser cette présomption ni ne justifie, à elle seule, le prononcé d’une expertise médicale.

En ce qui concerne l’état antérieur invoqué par l’employeur, il convient de relever que son médecin conseil affirme qu’un lumbago, qui est une contracture musculaire, doit évoluer cliniquement en 45 jours et que si celle-ci est défavorable, c’est en rapport avec un état antérieur lombaire.

Cependant, il ne ressort pas de l’analyse de ce médecin conseil, qui a eu accès au rapport d’évaluation des séquelles et analysé les certificats médicaux, qu’un tel état antérieur, à l’admettre comme il le soutient, ait été la cause d’une invalidité antérieure du salarié.

Par ailleurs, l’hypothèse développée par le médecin conseil de l’employeur selon laquelle la longueur des arrêts de travail pourrait s’expliquer également par la survenance de nouvelles lésions, postérieures à l’accident, est purement spéculative et est démentie par les certificats produits par la caisse, qui rattachent tous les lésions constatées à l’accident du travail.

Dès lors, les séquelles constatées à la suite de l’accident doivent être considérées comme ayant résulté exclusivement de celui-ci ou d’un état antérieur ayant aggravé ou révélé par l’accident, ce qui ne saurait en toute hypothèse conduire à écarter la présomption d’imputabilité.

En conséquence de ce qui précède, étant relevé que l’employeur n’apporte aucun élément permettant d’envisager que les lésions constatées à la suite de l’accident du travail aient une cause totalement étrangère à la relation de travail, ce qui écarte toute pertinence au prononcé d’une mesure d’expertise, la prise en charge des arrêts et soins prescrits litigieux doit, comme l’ont retenu les premiers juges, être déclarée opposable à l’employeur.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

L’employeur, qui perd en son appel, en supportera les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Met les dépens d’appel à la charge de la société [4].

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

 


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