Suite à la publication d’un article lui imputant des problèmes d’alcoolisme, Martine Aubry a poursuivi en diffamation le directeur de publication d’un Blog. Après avoir précisé que ces imputations n’ont aucun lien nécessaire avec le mandat public dont est chargée Martine Aubry (application du délit de diffamation contre un particulier et non celui contre une personne publique), les juges ont relaxé le prévenu.
Les passages imputant à Martine Aubry d’avoir des « problèmes d’alcoolisme » et en particulier d’avoir « effectué trois cures de désintoxication par sevrage dans un établissement psychiatrique spécialisé dans le traitement des addictions » sont certes précis, mais ne portent pas atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne. En effet, l’alcoolisme se définit comme un abus de boissons alcooliques, déterminant un ensemble de troubles. Cet état est considéré comme une maladie et est évoqué comme tel dans l’article, qui précise notamment les traitements médicaux qui auraient été suivis, sans aucunement décrire des attitudes ou comportements publics contraires à l’honneur ou à la considération. Les propos, qui sont ainsi relatifs à un état pathologique, ne sont pas diffamatoires et leur diffusion serait, le cas échéant, susceptible d’être attentatoire à la vie privée.
En revanche, l’atteinte à la vie privée de Martine Aubry a été jugée constituée, l’article en cause mettant en cause les orientations sexuelles de l’intéressée.
Conformément à l’article 9 du code civil et à l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, toute personne, quelle que soit sa notoriété, a droit au respect de sa vie privée et est fondée à en obtenir la protection en fixant elle-même ce qui peut être divulgué par voie de presse. Cependant, ce droit doit se concilier avec le droit à la liberté d’expression, consacré par l’article 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales et peut céder devant la liberté d’informer sur tout ce qui entre dans le champ de l’intérêt légitime du public.
En l’espèce, si la diffusion d’informations anodines ou déjà notoirement connues du public n’est pas constitutive d’atteinte au respect de la vie privée, l’article en cause mettait en cause une orientation sexuelle, information qui relève par nature de l’intimité de la vie privée.
S’il est exact que des rumeurs avaient déjà été diffusées à ce sujet, la prétendue information n’était nullement devenue notoire du fait de l’intéressée, puisqu’au contraire, Martine Aubry a publiquement évoqué ces diverses rumeurs, mais pour en dénoncer le caractère mensonger.
Même concernant une responsable politique, candidate aux primaires socialistes en vue de l’élection du président de la République, et dans la perspective d ‘ une éventuelle loi autorisant le mariage entre personnes homosexuelles, le propos ne relève pas d’une légitime information du public, d’autant que la véracité du fait avait été publiquement démentie (ce que le texte ne signale nullement) et qu’elle n’a été ni vérifiée ni établie, seule la révélation d’une information exacte étant susceptible d’être légitime.
Mots clés : Vie privee
Thème : Vie privee
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Tribunal de Grande instance de Paris | Date : 17 octobre 2011 | Pays : France