Publication des actes de procédure
L’affaire François-Marie Banier et la question de la publication des actes de procédure pénale dans les magazines ont de nouveau rebondi devant la Cour de cassation. Les juges suprêmes ont considéré que la reproduction par l’hebdomadaire Le Point, d’actes de procédure (en 2009 et 2010) ont constitué une violation de l’article 38 de la loi du 29 juillet 1881 et ont porté une atteinte grave aux droits de la défense de François-Marie Banier et au droit de bénéficier d’un procès équitable tel que garanti par l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme. Le magazine Le Point et son directeur de la publication, Franz-Olivier Giesbert, ont été condamnés in solidum à verser à François-Marie Banier la somme de 1 euro à titre de réparation du préjudice moral.
Article 38 de la loi du 29 juillet 1881
L’article 38 de la loi du 29 juillet 1881 prohibe la publication des actes d’accusation et tous autres actes de procédure criminelle ou correctionnelle avant qu’ils aient été lus en audience publique, et ce sous peine d’une amende de 3 750 euros. Cet article tend à préserver l’indépendance et la sérénité de la justice.
Nature des actes de procédures publiés
Le Point avait publié des extraits de procès-verbaux d’audition dressés par la police judiciaire à l’occasion d’une enquête préliminaire. L’article de presse en cause s’appuyait sur une analyse des extraits de divers procès-verbaux de police judiciaire pour présenter François-Marie Banier comme ayant abusé de la faiblesse de Liliane Bettencourt, à la veille de sa comparution devant le tribunal correctionnel appelé à se prononcer sur la pertinence et le bien-fondé des accusations portées contre lui par la fille de celle-ci. Un autre article fondé sur la reproduction partielle de dépositions recueillies par la police judiciaire, tendait à présenter François-Marie Banier comme accusé par des tiers en des termes probants à l’effet d’amener le lecteur à estimer avérés les faits reprochés à celui-ci, deux mois avant une audience constituant « l’épilogue de l’affaire ».
Publication des actes de procédure : qui peut agir ?
Selon une jurisprudence constante, en matière de publication illégale d’actes de procédure, si l’action publique est l’exclusive du ministère public, une personne privée, s’estimant lésée, dispose de la faculté légale de s’adresser au juge civil pour obtenir réparation suite à l’inobservation de l’article 38 de la loi sur la presse.
L’article 38 de la loi du 29 juillet 1881 s’apprécie selon l’article 10 de la Convention européenne et le principe de proportionnalité. En l’état du droit positif, l’ingérence que constituerait une condamnation civile de l’organe de presse ayant publié des actes de procédure doit i) être prévue par la loi, ii) être inspirée par un ou des buts légitimes, iii) être nécessaire dans une société démocratique pour atteindre ce ou ces buts. La vérification que l’ingérence est nécessaire pour protéger la réputation et les droits d’autrui et garantir l’autorité et l’impartialité du pouvoir judiciaire doit être effectuée par le juge judiciaire.
Mots clés : Secret de l’instruction – Presse
Thème : Secret de l’instruction – Presse
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Cour de cassation, ch. civ. | Date : 29 mai 2013 | Pays : France