Capital c/ Entreprendre
En matière de protection des couvertures de magazines, la concurrence déloyale peut se révéler plus efficace que la contrefaçon de droits d’auteur. La société éditrice des magazines Capital a ainsi obtenu la condamnation de l’éditeur du magazine Entreprendre.
Originalité insuffisante
L’originalité des couvertures des magazines Capital et Femme Actuelle n’a pas été retenue. La maquette ne caractérisait pas l’existence de traits propres qui témoigneraient d’un effort créatif et d’une expression particulière de son auteur ou des préposés. Hors le liseré autour du bloc central, il est commun dans le domaine de la presse économique, de reproduire le titre du magazine sur un bandeau en haut de la page, en lettres minuscules, la première lettre en majuscule, d’une couleur vive, avec une mention à droite du titre, un bloc central contenant une illustration et l’intitulé des rubriques traités (magazines Entreprendre, Création d’entreprise, Stop Arnaques, Franchise Business, Argent et Patrimoine, Spécial Argent… pièce 8 défenderesse).
L’originalité des noms des rubriques qui sont des expressions du langage courant sur des thèmes récurrents comme la nutrition, le bien-être et les recettes culinaires n’était pas non plus démontrée.
Pour rappel, en tout domaine, l’article L111-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit que « L’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. ». Ce droit est conféré à l’auteur de toute œuvre de l’esprit, quels qu’en soit le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination. Lorsque cette protection est contestée en défense, l’originalité d’une œuvre doit être explicitée par celui qui s’en prétend auteur, seul ce dernier étant à même d’identifier les éléments traduisant sa personnalité.
Faute délictuelle retenue
En matière de concurrence, le principe est celui de la liberté du commerce et ne sont sanctionnés au titre de la concurrence déloyale, sur le fondement de l’article 1382 du code civil, que des comportements fautifs tels que ceux visant à créer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle sur l’origine du produit, ou ceux, parasitaires, qui tirent profit sans bourse délier d’une valeur économique d’autrui lui procurant un avantage concurrentiel injustifié, fruit d’un savoir-faire, d’un travail intellectuel et d’investissements.
En premier lieu, les sociétés en cause publient des revues qui s’adressent au public de la même tranche, sur des thématiques communes, et sont en situation de concurrence.
En second lieu, il ressortait de la comparaison des revues que les magazines Entreprendre ont repris les thématiques, les titres, les codes et les couleurs des revues en cause. Si les thèmes abordés sont courants dans le domaine de la presse économique, leur formulation était quasiment reprise mot à mot avec leur présentation sur la page de couverture.
La fait que la publication des revues incriminées soit intervenue chronologiquement à la suite de la parution du Magazine Capital Dossier spécial a mis en évidence le comportement fautif de la société Entreprendre.
La proximité des titres même s’ils traitaient de sujets classiques, associée à la reprise des éléments graphiques pour un magazine vendu à un prix comparable, engendrait bien un risque de confusion entre les deux revues pour le lecteur intéressé par la ligne éditoriale de Capital.
Ces éléments établissaient suffisamment l’intention délibérée de la société Entreprendre de se mettre dans le sillage de la société Prisma Media (Capital) pour profiter de ses investissements et de la notoriété de sa revue, afin de lancer un magazine à moindre frais.
Couvertures d’anciens numéros
A noter que le fait que les revues n’aient pas été éditées la même année n’ôte pas le caractère fautif des agissements qui a profité en 2015 des accroches et de la présentation de la couverture de la revue Femme Actuelle de 2014.
En faisant le choix des maquettes de couvertures en cause, la société Entreprendre a cherché ostensiblement à créer une similitude susceptible d’une assimilation erronée des deux revues dans l’esprit des lectrices de Femme Actuelle, sans effort ni bourse délier et a dès lors commis une faute constitutive de concurrence parasitaire et déloyale dont elle doit répondre par application de l’article 1382 du code civil. Le trouble commercial subi a été indemnisé par l’allocation de la somme de 50 000 euros.
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