Droit de la Presse : Propriété des photographies du journaliste-reporter

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L’ancien régime applicable : la cession sous convention expresse

Il résultait de la combinaison des anciens dispositions du code de la propriété intellectuelle et du code du travail (1)  que le droit de faire paraître dans plus d’un journal ou périodique les oeuvres d’un reporter photographe était subordonné à l’existence d’une convention expresse. Cette clause de cession insérée au contrat de travail pouvait être formulée de la façon suivante : « En contrepartie (des appointements bruts mensuels), vous cédez expressément à notre Société le droit d’exploiter les oeuvres de toute nature dont vous serez l’auteur dans l’exercice de vos fonctions et spécialement tous droits de représentation et de reproduction, d’édition ou de réédition en langue française ou étrangère, et cela en France ou à l’Etranger, pour une durée de 50 années à compter de la première publication par les soins de la société et par ceux d’un tiers auquel elle aurait les droits ainsi cédés ». Des accords d’entreprise sur la cession des droits d’auteur des journalistes pouvaient ainsi être conclus au sein de l’entreprise aux fins notamment d’adaptation aux nouvelles technologies (2).

Nouveau régime juridique : la cession exclusive

A compter de l’entrée en vigueur de la loi n°2009-669 du 12 juin 2009, la collaboration entre les journalistes et l’entreprise de presse qui les emploie a été régie par les dispositions de l’article L 7111-5-1 du code du travail et par des dispositions nouvelles du code de la propriété intellectuelle. L’article L 7111-5-1 du code du travail dispose désormais que « La collaboration entre une entreprise de presse et un journaliste professionnel porte sur l’ensemble des supports du titre de presse tel que défini au premier alinéa de l’article L 132-5 du code de la propriété intellectuelle, sauf stipulation contraire dans le contrat de travail ou dans toute autre convention de collaboration ponctuelle ».

L’article L 132-5 du code de la propriété intellectuelle pose également qu’on entend par titre de presse, l’organe de presse à l’élaboration duquel le journaliste professionnel a contribué, ainsi que l’ensemble des déclinaisons du titre, quels qu’en soient le support, les modes de diffusion et de consultation (sauf les services de communication audiovisuelle).   Est assimilée à la publication dans le titre de presse la diffusion de tout ou partie de son contenu par un service de communication au public en ligne ou par tout autre service, édité par un tiers, dès lors que cette diffusion est faite sous le contrôle éditorial du directeur de la publication dont le contenu diffusé est issu ou dès lors qu’elle figure dans un espace dédié au titre de presse dont le contenu diffusé est extrait. Est également assimilée à la publication dans le titre de presse la diffusion de tout ou partie de son contenu par un service de communication au public en ligne édité par l’entreprise de presse ou par le groupe auquel elle appartient ou édité sous leur responsabilité, la mention dudit titre de presse devant impérativement figurer.

Par dérogation et sous réserve des dispositions de l’article L 121-8 du CPI, la convention liant un journaliste professionnel ou assimilé, qui contribue, de manière permanente ou occasionnelle, à l’élaboration d’un titre de presse, et l’employeur emporte, sauf stipulation contraire, cession à titre exclusif à l’employeur des droits d’exploitation des oeuvres du journaliste réalisées dans le cadre de ce titre, qu’elles soient ou non publiées.  L’exploitation de l’oeuvre au-delà de la période prévue donne droit à une rémunération complémentaire (éventuellement définie par  un accord d’entreprise).

Il résulte toutefois de l’article L 132-40 du code de la propriété intellectuelle que toute cession de l’œuvre en vue de son exploitation hors du titre de presse initial ou d’une famille cohérente de presse est soumise à l’accord exprès et préalable de son auteur exprimé à titre individuel ou dans un accord collectif, sans préjudice, dans ce deuxième cas, de l’exercice de son droit moral par le journaliste. Ces exploitations donnent lieu à rémunération sous forme de droits d’auteur, dans des conditions déterminées par l’accord individuel ou collectif.

A compter de l’entrée en vigueur de la loi du 12 juin 2009, et par application combinée des articles L 132-5 et L 132-6 du code de la propriété intellectuelle, la collaboration des journalistes reporters  avec un titre de presse entraîne, sauf stipulation contraire de son contrat de travail, cession des droits d’exploitation des photos y compris sur un support numérique. De sorte que l’employeur peut procéder à cette publication sans l’autorisation préalable du salarié.

(1) L’article L 761-9 du code du travail disposait « Le droit de faire paraître dans plus d’un journal ou périodique les articles ou autres oeuvres littéraires ou artistiques dont les personnes mentionnées à l’article L. 761-2 (dont le reporter-photographe), sont auteurs est obligatoirement subordonné à une convention expresse précisant les conditions dans lesquelles la reproduction est autorisée. » ; l’article L 121-8 du code de la propriété intellectuelle disposait : « L’auteur seul a le droit de réunir ses articles et ses discours en recueil et de les publier ou d’en autoriser la publication sous cette forme. Pour toutes les oeuvres publiées ainsi dans un journal ou recueil périodique, l’auteur conserve, sauf stipulation contraire, le droit de les faire reproduire et de les exploiter, sous quelque forme que ce soit, pourvu que cette reproduction ou cette exploitation ne soit pas de nature à faire concurrence à ce journal ou à ce recueil périodique. »

(2) Parmi les accords collectifs conclus : i) l’accord-cadre du 8 novembre 1999 relatif aux droits d’auteur dans la presse quotidienne régionale qui dispose que la cession individuelle par l’entreprise de presse à une entreprise tierce implique la conclusion d’une convention expresse entre l’entreprise de presse et le journaliste, ii) l’accord du 11 juillet 2000 relatif à la banque d’échanges photos pour la presse quotidienne régionale qui prévoit une convention expresse annuelle et renouvelable par tacite reconduction signée entre les parties, précisant les modalités dans lesquelles l’entreprise commercialise les photographies et images, dans le cadre du GIE banque d’échanges photographiques.

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