Discothèque transformée en restaurant : quid des redevances SACEM ?

Notez ce point juridique

Il relève de la responsabilité de l’exploitant de déclarer à la SACEM tout changement d’affectation de son établissement (notamment de boîte de nuit à restaurant).

Selon le contrat général de représentation, l’exploitant est tenu d’informer la SACEM dans les 15 jours de leur survenance, de toutes modifications des modalités d’exploitation et d’organisation, telles un changement du mode de diffusion des oeuvres musicales qui interviendraient dans son établissement par rapport aux conditions stipulées. Dans ce cas, les nouvelles conditions du contrat sont applicables à défaut de notification du refus de la SACEM dans les 15 jours de cette information.

En l’espèce, la société le Privé Club ne démontre pas avoir informé la SACEM des modifications survenues dans l’exploitation de son activité. La juridiction a exactement retenu que le contrat s’était poursuivi selon les modalités initiales fixées, faute de résiliation et de défaut d’information de la SACEM des modifications alléguées.

Pour rappel, au sens des règles générales d’autorisation et de tarification, un établissement de type discothèque répond aux éléments cumulatifs suivants : établissements où la clientèle peut danser, dans lesquels il est d’usage de consommer, à titre principal, des boissons, utilisant en majorité, c’est à dire pour plus de 50% de la durée de leur activité de diffusion musicale, de la musique enregistrée et/ou des programmes audiovisuels.

L’établissement est tenu de remettre à la SACEM l’état des recettes, toutes taxes et service inclus, réalisées au cours de l’exercice social écoulé et sa liasse fiscale pour l’exercice correspondant, s’engageait à lui régler en contrepartie de l’autorisation d’utiliser son répertoire une redevance mixte, correspondant à la situation d’un exploitant adhérent à un groupement professionnel signataire d’un protocole d’accord conclu avec la SACEM et qui s’engage à remettre les documents comptables de l’exercice, comprenant :

— une part proportionnelle calculée par application du taux de 4,39 % sur une assiette retenue à hauteur de 65 % de la totalité des recettes réalisées, hors TVA et hors recettes « vestiaire »,

— une part forfaitaire de 764 euros HT, calculée par référence à la capacité d’accueil, et au nombre de jours d’ouverture de l’établissement, dont le montant ne peut toutefois excéder un plafond égal à 1,1 % de la totalité des recettes réalisées, hors TVA et hors recettes « vestiaire », au titre de l’exercice considéré (article 1er de l’annexe au contrat),

— ces taux préférentiels étant accordés à raison de l’adhésion de la société à une Union Professionnelle de l’Industrie Hôtelière, signataire d’un protocole d’accord conclu avec la SACEM, et de son choix de remettre la liasse fiscale de chaque exercice.

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

1re chambre 1re section

ARRÊT DU 15 JUIN 2021

N° RG 19/08473

N° Portalis DBV3-V-B7D-TTOA

AFFAIRE :

SAS LE PRIVE CLUB

C/

SACEM SOCIETE DES AUTEURS COMPOSITEURS ET EDITEURS DE MUSIQUE

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 07 Novembre 2019 par le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 17/03108

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

— Me Christophe DEBRAY,

— la SELARL JRF & ASSOCIES

LE QUINZE JUIN DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant qui a été prorogé le 1er juin 2021, les parties en ayant été avisées dans l’affaire entre :

SAS LE PRIVE CLUB

prise en la personne de ses représentants légaux domicilés audit siège

N° SIRET : 523 83 1 0 48

[…]

[…]

représentée par Me Christophe DEBRAY, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 19520

Me Gersendre CENAC substituant Me Arnaud METAYER-MATHIEU, avocat plaidant – barreau de PARIS

APPELANTE

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Société civile SACEM SOCIETE DES AUTEURS COMPOSITEURS ET EDITEURS DE MUSIQUE

prise en la personne de ses représentants légaux domicilés audit siège

N° SIRET : 775 675 739

225 avenue Charles-de-Gaulle

[…]

représentée par Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & ASSOCIES, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617

Me Jean-marc MOJICA de la SELEURL MoRe AvocaTs, avocat plaidant – barreau de PARIS, vestiaire : E0457

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 29 Mars 2021 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne LELIEVRE, Conseiller chargée du rapport et Madame Nathalie LAUER, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anna MANES, Présidente,

Madame Anne LELIEVRE, Conseiller,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

Vu le jugement rendu le 7 novembre 2019 par le tribunal de grande instance de Nanterre qui a :

— rejeté l’intégralité des demandes de la SAS Le Privé Club,

— condamné la SAS Le Privé Club à payer à la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique la somme provisionnelle de 138 207,75 euros au titre des redevances de droit d’auteur et indemnités contractuelles exigibles pour la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017 en vertu du contrat général de représentation du 1er décembre 2010,

— enjoint à la SAS Le Privé Club de communiquer à la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique, sous astreinte de 500 euros par jour de retard courant pendant un délai de 6 mois débutant à l’expiration d’un délai de 15 jours courant à compter de la signification du jugement, les attestations établies par un expert-comptable certifiant les recettes journalières réalisées pour les exercices sociaux clos les 31 décembre 2011, 31 décembre 2012, 31 décembre 2013, 31 décembre 2014, 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016,

— condamné la SAS Le Privé Club à payer à la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique la somme de 171 972,94 euros en réparation du préjudice causé par ses actes de contrefaçon sur la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017,

— rejeté la demande de la SAS Le Privé Club au titre des frais irrépétibles,

— condamné la SAS Le Privé Club à payer à la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la SAS Le Privé Club à supporter les entiers dépens de l’instance ;

Vu l’appel de ce jugement interjeté le 6 décembre 2019 par la société par actions simplifiée (SAS) Le Privé Club ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 6 janvier 2021 par lesquelles la société par actions simplifiée (SAS) Le Privé Club demande à la cour de :

Vu les articles 1134 du code civil,

Vu les règles générales d’autorisation et de tarification de la SACEM en vigueur en 2009 et en 2015,

— réformer le jugement en ce qu’il a :

‘ rejeté l’intégralité des demandes de la SAS Le Privé Club,

‘ condamné la SAS Le Privé Club au paiement de la somme de 138 207,75 euros au titre des redevances de droit d’auteur pour la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017,

‘ enjoint à la SAS Le Privé Club de fournir sous astreinte de 500 euros par jour de retard les

attestations comptables,

‘ condamné la SAS Le Privé Club au paiement de la somme de 171 972,94 euros en réparation du préjudice causé par les actes de contrefaçon sur la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017,

‘ condamné la SAS Le Privé Club au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700,

— débouter la SACEM de son appel incident,

Ce faisant, statuant à nouveau :

— juger que la SAS Le Privé Club a une activité mixte de restauration et de discothèque et que le contrat conclu avec la SACEM ne doit s’appliquer qu’aux recettes tirées de l’activité de discothèque,

— juger que le montant des redevances dues par la SAS Le Privé Club s’élève en principal à :

‘ 5 642,49 euros toutes taxes comprises (TTC) pour 2010,

‘ 13 473,23 euros TTC pour 2011,

‘ 18 191,33 euros TTC pour 2012,

‘ 9 739,92 euros TTC pour 2013,

‘ 9 740,61 euros TTC pour 2014,

‘ 21 158,47 euros TTC pour 2015,

‘ 22 414,87 euros TTC pour 2016,

‘ 33 728 euros TTC pour 2017,

‘ 39 159 euros TTC pour 2018,

‘ 39 159 euros TTC pour 2019,

— réduire le montant de la clause pénale relative aux indemnités pour non-fourniture de documents à la somme de 1 euro,

— réduire le montant de la clause pénale relative au retard de paiement à la somme de 1 euro,

— octroyer à la SAS Le Privé Club un délai de deux ans pour s’acquitter des sommes mises à sa charge et qui n’auraient pas déjà été réglées,

— débouter la SACEM du surplus de ses demandes,

— dire n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions notifiées le 7 janvier 2021 par lesquelles la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique (SACEM) demande à la cour de :

Vu les articles L. 331-1 du code de la propriété intellectuelle, D. 211-6-1 du code de l’organisation judiciaire, et 835 du code de procédure civile,

— confirmer le jugement du 7 novembre 2019 en ce qu’il a débouté la SAS Le Privé Club de l’intégralité de sa demande,

— confirmer le jugement du 7 novembre 2019 en ce qu’il a déclaré recevable et bien fondée la SACEM en ses demandes,

— confirmer le jugement du 7 novembre 2019 en ce qu’il a :

‘ ordonné à la SAS Le Privé Club de remettre à la SACEM, sous astreinte de 500 euros par jour de retard les attestations établies par un expert-comptable certifiant les recettes journalières réalisées pour les exercices sociaux clos les 31 décembre 2011, 31 décembre 2012, 31 décembre 2013, 31 décembre 2014, 31 décembre 2015, et 31 décembre 2016,

‘ condamné la SAS Le Privé Club à payer à la SACEM la somme de 171 972,94 euros en réparation du préjudice causé par ses actes de contrefaçon sur la période expirant au 31 décembre 2017,

— rectifier l’erreur matérielle du jugement du 7 novembre 2019 et dire que l’allocation de la somme de 171 972,94 euros correspond à la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2017,

— en tant que de besoin, infirmer sur ce point le jugement du 7 novembre 2019,

Statuant à nouveau :

— condamner la SAS Le Privé Club à payer à la SACEM la somme de 171 972,94 euros en réparation du préjudice causé par ses actes de contrefaçon sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2017,

— infirmer le jugement du 7 novembre 2019 en ce qu’il a condamné la SAS Le Privé Club à payer à la SACEM la somme de 138 207,75 euros au titre des redevances de droit d’auteur et indemnités contractuelles exigibles pour la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017 en vertu du contrat général de représentation du 1er décembre 2010,

Statuant à nouveau :

— condamner la SAS Le Privé Club à payer par provision à la SACEM la somme de 145 180,76 euros TTC au titre des redevances de droit d’auteur et indemnités contractuelles exigibles pour la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017 en vertu du contrat général de représentation du 1er décembre 2010 avec annexes de même date et des 7 octobre 2011 et 14 février 2013,

— déclarer la SACEM recevable et bien fondée en ses demandes d’actualisation de sa créance à l’encontre de la SAS Le Privé Club,

En conséquence :

— condamner la SAS Le Privé Club à payer par provision à la SACEM la somme de 67 056,42 euros TTC au titre des redevances de droit d’auteur et indemnités contractuelles exigibles pour la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019 en vertu du contrat général de représentation du 1er décembre 2010 avec annexes de même date et des 7 octobre 2011 et 14 février 2013,

— condamner la SAS Le Privé Club à payer à la SACEM la somme de 85 384,84 euros TTC au titre des indemnités de droit d’auteur pour la période délictuelle du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019,

— condamner la SAS Le Privé Club à payer à la SACEM la somme de 10 000 euros au titre de

l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens ;

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 21 janvier 2021 par le magistrat chargé de la mise en état ;

FAITS ET PROCÉDURE

La Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique (ci-après « la SACEM ») est une société civile constituée par les auteurs, compositeurs et éditeurs de musique qui a pour principal objet social d’assurer la perception et la répartition des redevances dues au titre du droit d’auteur en raison de l’exécution publique et de la reproduction mécanique des ‘uvres que ses membres lui apportent par le seul fait de leur adhésion.

La SAS Le Privé Club exploite à Moulins-Lès-Metz un établissement dénommé « Le Privé Club » qui a ouvert ses portes le 16 juillet 2010 en tant que discothèque en vertu d’une autorisation municipale du 4 juin 2010.

Le 1er décembre 2010, la SAS Le Privé Club a conclu avec la SACEM, pour la période du 16 juillet au 31 décembre 2010, un contrat général de représentation, renouvelable par reconduction annuelle, s’appliquant aux diffusions musicales à caractère attractif pouvant être données dans cet établissement au moyen d’un enregistrement mécanique et/ou avec l’intervention d’un disc-jockey les vendredis et samedis de 23 heures à 5 heures du matin.

Ainsi, la SAS Le Privé Club, tenue de remettre à la SACEM l’état des recettes, toutes taxes et service inclus, réalisées au cours de l’exercice social écoulé (article 2 du contrat) et sa liasse fiscale pour l’exercice correspondant, s’engageait à lui régler en contrepartie de l’autorisation d’utiliser son répertoire une redevance mixte, correspondant à la situation d’un exploitant adhérent à un groupement professionnel signataire d’un protocole d’accord conclu avec la SACEM et qui s’engage à remettre les documents comptables de l’exercice, comprenant :

— une part proportionnelle calculée par application du taux de 4,39 % sur une assiette retenue à hauteur de 65 % de la totalité des recettes réalisées, hors TVA et hors recettes « vestiaire »,

— une part forfaitaire de 764 euros HT, calculée par référence à la capacité d’accueil, et au nombre de jours d’ouverture de l’établissement, dont le montant ne peut toutefois excéder un plafond égal à 1,1 % de la totalité des recettes réalisées, hors TVA et hors recettes « vestiaire », au titre de l’exercice considéré (article 1er de l’annexe au contrat),

— ces taux préférentiels étant accordés à raison de l’adhésion de la SAS Le Privé Club à l’Union Professionnelle de l’Industrie Hôtelière de la Moselle (ci-après « l’UPIHM »), signataire d’un protocole d’accord conclu avec la SACEM, et de son choix de remettre la liasse fiscale de chaque exercice.

La SAS Le Privé Club n’ayant ni résilié son contrat général de représentation ni communiqué à la SACEM le justificatif du renouvellement de son adhésion annuelle à l’UPIHM non plus que les états de ses recettes et les liasses fiscales nécessaires au calcul des redevances dues pour les années 2011 à 2013 en dépit de nombreuses relances, la SACEM a procédé à un calcul forfaitaire comprenant, à compter du 1er janvier 2011, une majoration des taux applicables calculée sur la base des chiffres d’affaires réalisés en 2010 et 2011 par la SAS Le Privé Club communiqués par l’administration fiscale en vertu de l’article L. 163 du livre des procédures fiscales.

La SAS Le Privé Club n’a ni régularisé sa situation, ni réglé les redevances notifiées par la SACEM malgré de nouvelles relances et la réunion le 11 décembre 2012 de la commission mixte paritaire nationale prévue par le protocole d’accord conclu entre la SACEM et l’UPIHM. Elle a également contesté la qualification de discothèque de son établissement en réponse à la sommation de payer qui lui avait été signifiée le 5 juin 2014 par la SACEM.

Par acte d’huissier du 30 décembre 2014, la SACEM a assigné la SAS Le Privé Club devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Nancy en sollicitant le paiement provisionnel des redevances dues pour la période du 16 juillet 2010 au 31 décembre 2013 et la communication sous astreinte des états de ses recettes correspondants certifiés par un expert-comptable.

Par ordonnance contradictoire du 24 mars 2015, le juge des référés du tribunal de grande instance de Nancy a débouté la SACEM de ses prétentions au motif qu’il existait une contestation sérieuse tirée de la nature de l’activité effective de la SAS Le Privé Club.

Par arrêt du 13 juin 2016, la cour d’appel de Nancy a infirmé cette ordonnance et condamné la SAS Le Privé Club à payer à la SACEM la somme provisionnelle de 155 643,38 euros au titre des redevances dues pour la période du 16 juillet 2010 au 31 décembre 2013, et à lui communiquer sous astreinte les états de ses recettes ainsi que des attestations de son expert-comptable certifiant leur montant pour les exercices 2010 à 2013.

Par acte d’huissier du 17 mars 2017, la SAS Le Privé Club a assigné la SACEM devant le tribunal de grande instance de Nanterre sur le fondement de l’article 1134 du code civil et des règles générales d’autorisation et de tarification de la SACEM.

C’est dans ces circonstances qu’a été rendu le jugement déféré ayant notamment rejeté l’intégralité des demandes de la SAS Le Privé Club, l’ayant condamnée à payer à la SACEM la somme provisionnelle de 138 207,75 euros au titre des redevances de droit d’auteur et indemnités contractuelles exigibles pour la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017 en vertu du contrat général de représentation du 1er décembre 2010, ainsi que la somme de 171 972,94 euros en réparation du préjudice causé par ses actes de contrefaçon sur la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017, et lui ayant enjoint de communiquer à la SACEM, sous astreinte de 500 euros par jour de retard courant pendant un délai de 6 mois, les attestations établies par un expert-comptable certifiant les recettes journalières réalisées pour les exercices sociaux clos les 31 décembre 2011, 31 décembre 2012, 31 décembre 2013, 31 décembre 2014, 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016.

SUR CE, LA COUR

Sur le principe de la créance contractuelle de la SACEM à l’encontre de la SAS Le Privé Club

Au soutien de son appel, la SAS Le Privé Club expose avoir exercé l’activité de discothèque entre le 16 juillet 2010 et le 1er janvier 2011, date de sa transformation en restaurant. Elle explique avoir procédé à cette fin à la transformation de son local, en supprimant la piste de danse, et à l’adaptation de son activité, en modifiant ses horaires d’ouverture. Elle précise être désormais classée dans la catégorie restaurants.

L’appelante indique que cette transformation influe sur la musique qu’elle diffuse dans son établissement. Elle souligne qu’une discothèque diffuse de la musique attractive, c’est-à-dire d’un niveau sonore élevé et destinée à faire danser la clientèle, alors qu’un restaurant utilise davantage de la musique d’ambiance, diffusée à un niveau sonore moindre. Elle prétend que son activité ne lui permet, la plupart du temps, de ne diffuser qu’une simple musique d’ambiance.

Or, elle rappelle que les règles relatives aux discothèques prévoient des redevances calculées sur une portion des recettes hors taxe de la discothèque. Elle ajoute que ces règles prévoient également que lorsqu’un établissement exerce simultanément les activités de discothèque et de restaurant, les recettes liées à l’activité de restauration sont exclues de l’assiette de calcul des redevances lorsque les deux activités sont totalement distinctes. La SAS Le Privé Club affirme d’une part que l’activité de restauration est totalement isolée de celle de discothèque et, d’autre part, que l’intimée ne conteste pas cette réalité. Elle en déduit que seules les périodes au cours desquelles une musique attractive est diffusée doivent faire l’objet de redevances.

Sur ce point, l’appelante soutient qu’entre 2011 et 2016, la diffusion de musique attractive n’avait lieu que les vendredis et samedis soir à partir de 22 heures. Elle reconnaît qu’à compter de 2017, la diffusion de cette musique s’est faite plus fréquente, soit les mercredis et jeudis soirs de 22heures à 1heure et les vendredis et samedis soir de 22 heures à 5 heures. Elle évalue donc la diffusion de musique attractive à 20 heures hebdomadaires à compter de 2017.

La SACEM réplique que le contrat général de représentation qu’elle a conclu avec la SAS Le Club Privé a été reconduit tacitement par périodes annuelles jusqu’au 31 décembre 2017. Elle ajoute que le cocontractant a la faculté d’utiliser l’ensemble du répertoire musical mis à sa disposition pour les besoins de son activité et que la redevance est due sans tenir compte du nombre d’œuvres diffusées. Elle estime donc que l’argumentaire consistant à distinguer entre musique attractive et musique d’ambiance est inopérant et sans incidence sur la redevance due.

Elle rappelle que le contrat n’autorisait la diffusion de musique attractive que les vendredis et samedis soirs de 22 heures à 5 heures. Elle prend acte de la reconnaissance, par l’appelante, de la diffusion de musique attractive les mercredis et jeudis soirs à partir de 22 heures à compter de l’année 2017.

Appréciation de la cour

Selon l’article 6 du contrat général de représentation conclu le 1er décembre 2010 par la société le Privé Club avec la SACEM, la première était tenue d’informer la seconde dans les 15 jours de leur survenance, de toutes modifications des modalités d’exploitation et d’organisation, telles un changement du mode de diffusion des oeuvres musicales qui interviendraient dans son établissement par rapport aux conditions stipulées à l’article 2 des conditions particulières visant l’organisation de séances dansantes les vendredis et samedis de 23 heures à 5 heures. Dans ce cas, les nouvelles conditions du contrat sont applicables à défaut de notification par la société le Privé Club de son refus dans les 15 jours de l’information par la SACEM portant sur la nature des révisions à opérer.

En l’espèce, la société le Privé Club ne démontre pas avoir informé la SACEM des modifications survenues dans l’exploitation de son activité.

Le tribunal a exactement retenu que le contrat s’était poursuivi selon les modalités initiales fixées, faute de résiliation et de défaut d’information de la SACEM des modifications alléguées.

Il est rappelé que la redevance mixte prévue au contrat était fixée en considération d’une activité de type discothèque, les vendredi et samedi de 23 heures à 5 heures, avec diffusion de musique attractive.

C’est par des motifs pertinents qui sont adoptés, que le tribunal a retenu que le caractère attractif de la musique diffusée par la société le Privé Club était suffisamment établi au moyen de nombreux procès-verbaux établis par des agents assermentés de la SACEM, dressés les 13 janvier 2914, 15 mai 2015, 18 mai 2015, 26 mai 2015 , 13 juin, 24 juillet et 21 août 2017. Il résulte en effet de ces procès-verbaux qui valent jusqu’à preuve contraire, laquelle n’est pas rapportée, que bien qu’une activité de restauration soit effective, la société le Privé Club diffusait régulièrement les vendredis et samedis de 23 heures à 5 heures du matin, une musique fréquemment diffusée par des disc-jockeys comprenant des oeuvres du répertoire de la SACEM à un niveau sonore élevé incitant ses clients à danser.

La qualification de l’établissement exploité par le la société le Privé Club retenue dans le contrat

général de représentation de « pratique de la danse par la clientèle » ou de l’organisation de « concerts ou spectacles de toute nature donnés sous forme de représentation, par des musiciens, des artistes ou des disc-jockeys assurant une prestation de mixage en direct (…) à l’intention d’un public venant dans le but d’y assister » n’est pas sérieusement remise en cause quand bien même l’activité de restauration s’est développée.

En effet, au sens des règles générales d’autorisation et de tarification, un établissement de type discothèque répond aux éléments cumulatifs suivants :

— établissements où la clientèle peut danser,

— dans lesquels il est d’usage de consommer, à titre principal, des boissons,

— utilisant en majorité, c’est à dire pour plus de 50% de la durée de leur activité de diffusion musicale, de la musique enregistrée et/ou des programmes audiovisuels.

Il résulte des procès-verbaux précédemment visés, qui ne sont pas valablement contestés, la cour faisant sienne la motivation du jugement en réponse aux moyens développés par l’appelante devant les premiers juges, sur le fait que l’agent assermenté n’a pas à se présenter lorsqu’il pénètre dans les lieux et que cette circonstance ne constitue pas une déloyauté de sa part mais est au contraire nécessaire à l’efficacité de sa mission de constatation. Il ne peut non plus être reproché aux agents assermentés de limiter leurs constatations aux éléments de preuve strictement nécessaires à la SACEM puisque leur mission, précisée par l’article L 331-2 du code de la propriété intellectuelle dispose que la preuve de la matérialité des actes de contrefaçon ou d’inexécution du contrat général de représentation peut résulter des constatations des agents assermentés de la SACEM, qui valent jusqu’à preuve contraire.

Il résulte desdits procès-verbaux que la clientèle danse dans l’établissement, que le bar situé à l’étage ne propose que des boissons et que la musique diffusée est majoritairement enregistrée.

Ainsi, la qualification de discothèque retenue au contrat général de représentation est justifiée, la coexistence d’une activité de restauration étant inopérante.

Au demeurant, à titre subsidiaire, la société le Privé Club ne critique pas le mode de calcul de la redevance contractuelle retenu par la SACEM pour les années 2011 à 2017 incluse et se borne à solliciter la modération des indemnités contractuelles prévues pour non fourniture des documents et non paiement dans les délais.

Les parties sont en désaccord sur le calcul de la redevance due pour l’année 2010.

Sur le montant de la créance contractuelle de la SACEM à l’encontre de la SAS Le Privé Club

+Sur le montant dû pour l’année 2010

Moyens des parties

La SAS Le Privé Club rappelle que l’assiette retenue pour le calcul des redevances dues doit porter sur 65 % du montant total de ses recettes hors taxe, à l’exclusion des recettes de vestiaires. Elle indique que pour l’année 2010, le montant total de ses recettes hors taxe s’élève à 160 656,96 euros.

S’agissant du taux retenu, elle prétend avoir droit au taux de 4,39 % dès lors qu’elle justifie de l’adhésion à un groupement professionnel et de la remise des documents comptables requis. Elle évalue donc la redevance due à 4 584,34 euros hors taxe.

S’agissant de la part forfaitaire, elle s’accorde sur le montant de 764 euros réclamé par la SACEM.

Elle chiffre donc la redevance due à la somme totale de 5 348,34 euros hors taxe (4 584,34 + 764), soit 5 642,49 euros toutes taxes comprises, après application de la TVA de 5,5 %.

La SACEM a réclamé pour la période concernée un montant de 7 134,03 euros au titre des redevances dues. Pour ce faire, elle considère que le taux applicable doit être de 5,55 % et que la part forfaitaire doit être majorée de 15 %, ainsi que le prévoient les conditions générales annexées au contrat du 1er décembre 2010, en cas de non-règlement des sommes dues. Elle reproche aux premiers juges d’avoir retenu un taux applicable de 4,39 % en considérant que l’appelante avait réglé les sommes dues à titre provisionnel.

L’appelante conteste la perte de l’abattement protocolaire sur le taux retenu et la majoration de la part forfaitaire en raison du non règlement des sommes dues. Elle relève que l’intimée reconnait elle-même qu’elle lui a versé, pour la période concernée, une somme provisionnelle de 5 900,30 euros hors taxe. Elle en déduit qu’elle est créancière envers la SACEM d’une somme de 257 euros.

La SACEM explique qu’elle a affirmé par erreur avoir perçu une somme provisionnelle de 5 900,30 euros de la part de la SAS Le Privé Club. Elle ajoute que cette dernière ne saurait justifier dudit paiement. Elle prétend donc que les sommes dues n’ont pas été réglées et que les dispositions des conditions générales doivent s’appliquer.

Appréciation de la cour

Pour la période litigieuse, la SACEM ne conteste pas que la société le Privé Club était adhérente de l’Union professionnelle de l’industrie hôtelière de la Moselle (UPIMH), signataire d’un protocole d’accord conclu avec la SACEM, ce qui permettait à cet établissement de bénéficier d’un taux préférentiel.

C’est par d’exacts motifs, adoptés par la cour, que le tribunal a, en considération, à la fois de l’adhésion de la société le Privé Club à l’UPIMH et du retard avec lequel elle a communiqué son état de recettes pour l’exercice 2010, non contesté, appliqué, en considération du contrat général de représentation et de l’article II2a des règles générales d’autorisation et de tarification, un taux de 4,83% à l’assiette contractuelle des recettes, puis une part forfaitaire de 840,40 euros HT.

Le montant de la redevance due a donc été exactement fixé à 6 297,82 euros TTC, dont il y a lieu de déduire, contrairement à ce que sollicite la SACEM, une somme de 5 900,30 euros dont elle a accusé réception du paiement par courrier du 7 décembre 2011, dont l’objet était le « solde droits Sacem 2010 », qu’elle est mal fondée à remettre aujourd’hui en cause.

C’est également par de justes motifs que le tribunal, constatant la mauvaise foi de la société le Privé Club caractérisée par la non remise des éléments comptables et l’absence de paiement dans les délais, a jugé n’y avoir lieu de minorer la clause pénale stipulée.

+ Sur le montant dû pour les années 2011 à 2017

Moyens des parties

L’appelante rappelle qu’elle a transformé la discothèque en restaurant et a supprimé la piste de danse d’origine. Elle prétend que son établissement n’est plus une discothèque « au sens commun du terme » et que coexistent dorénavant deux ambiances musicales. Elle observe que la SACEM ne conteste pas l’existence de l’activité de restauration qui est exercée durant la plus grande partie de l’ouverture de l’établissement et prétend qu’il n’est pas diffusé de musique attractive visant à faire danser la clientèle concomittante à cette activité.

Elle fait valoir qu’en matière de pluralités d’activités, les règles générales de 2009 relatives aux discothèques et applicables jusqu’en 2014, prévoient que les redevances sont calculées sur une assiette de 65% des recettes HT de la discothèque, avec un taux allant de 4,39% à 5,55%. Elle relève que les recettes liées à l’activité de restauration doivent être isolées pour être, soit soumises au régime propre des redevances dues par les établissements de restauration, si les activités sont exercées simultanément, soit totalement exonérées de redevance si les deux activités sont totalement distinctes.

Elle expose que pour la période 2011/2016, deux activités distinctes se succèdent au sein de son établissement, soit l’activité de restauration au cours de laquelle elle ne diffuse aucune musique attractive, puis une activité dansante en seconde partie de soirée, avec diffusion de musique attractive les vendredis et samedis soirs de 22 heures à 1 heure. Elle en conclut que seule la période correspondant à l’activité dansante doit faire l’objet de redevances.

Elle relève que pour calculer le montant des redevances dues au titre de l’activité de discothèque, la SACEM retient comme assiette le montant du chiffre d’affaires réalisé les vendredi et samedi soirs et applique à ce montant un pourcentage de 55%, puis de 64% à compter de 2012, correspondant à la part de musique attractive.

Elle indique acquiescer aux chiffres retenus par la SACEM au titre des redevances contractuelles dues pour les années 2011 à 2016 , telle que figurant en annexe 1 et précise avoir réglé les sommes réclamées.

La SACEM confirme que, l’appelante n’étant pas en mesure de fournir un état des recettes réalisées sur les tranches horaires susvisées, elle a estimé la part de recettes à retenir sur la tranche horaire concernée par application d’un strict prorata temporis sur les recettes totales. Elle a ainsi retenu 55 % des recettes totales réalisées en 2011 (correspondant à 6 heures sur 11 heures d’ouverture de l’établissement) et 64 % des recettes totales réalisées entre 2012 et 2016 (correspondant à 7 heures sur 11 heures d’ouverture de l’établissement).

Elle ajoute que la SAS Le Privé Club est redevable d’une indemnité contractuelle de 10% pour n’avoir pas payé dans les délais, ainsi que d’une indemnité forfaitaire mensuelle égale à 10 % du montant des sommes dues au titre des mois correspondants, conformément aux dispositions des conditions générales du contrat, pour ne lui avoir pas remis les documents nécessaires au calcul et à la répartition des redevances d’auteur.

Appréciation de la cour

En définitive, le montant de la redevance sur les années 2011 à 2016 n’est pas sérieusement contesté, dès lors que la société le Privé Club ne remet pas en cause le mode de calcul de la redevance contractuelle . Si les chiffres repris dans le dispositif des conclusions de la société le Privé Club diffèrent de ceux de la SACEM, le différentiel, correspond aux demandes d’indemnités contractuelles auxquelles il a été fait droit par le tribunal. La société le Privé Club sollicite la réduction de la clause pénale relative aux indemnités pour non fourniture de documents, à un euro, de même qu’en ce qui concerne la clause pénale relative au retard de paiement.

La société le Privé Club ne démontre toutefois pas en quoi les clauses pénales contractuelles fixées à 10% pour non paiement dans les délais et pour non fourniture des documents nécessaires au calcul des redevances seraient excessives.

Contrairement à ce qu’elle soutient, la SACEM n’applique pas deux pénalités ayant le même objet. Cette pénalité prend simplement deux formes, une majoration du coefficient des redevances d’une part, ainsi qu’une pénalité supplémentaire de 10% du montant de la redevance TTC d’autre part. Il apparaît justifié eu égard à l’absence de paiement des redevances dans les délais sur toute la période concernée et à l’absence de remise de la liasse fiscale, d’appliquer les indemnités contractuelles telles que calculées par la SACEM au terme de son annexe 1.

La décision entreprise sera par conséquent confirmée en ce qu’elle a condamné la société le Privé Club à payer à la SACEM la somme provisionnelle de 138 207,75 euros au titre des droits d’auteur et indemnités contractuelles pour la période allant du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017 en application du contrat général de représentation.

Elle le sera également en ce qu’elle a, en application de l’article 9 du contrat général de représentation, fait injonction à la société le Privé Club de communiquer à la SACEM, sous astreinte de 500 euros par jour de retard courant pendant un délai de 6 mois, débutant à l’expiration d’un délai de 15 jours courant à compter de la signification du jugement, les attestations établies par un expert-comptable certifiant les recettes journalières réalisées pour les exercices sociaux clos les 31 décembre 2011, 31 décembre 2012, 31 décembre 2013, 31 décembre 2014, 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016, étant observé que la société le Privé Club a produit aux débats les attestations de son comptable certifiant les chiffres d’affaires des exercices 2013,2014 et 2015.

+ Sur la créance contractuelle due pour la période allant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019

La SACEM réclame au titre de ces deux exercices, une somme globale de 67 056,42 euros correspondant à 57 124,90 euros au titre des redevances d’auteur et à 9 965,76 euros au titre des indemnités contractuelles pour non fourniture des documents nécessaires au calcul des redevances et pour non paiement dans les délais.

Elle expose que si la société le Privé Club lui a adressé le 11 juillet 2019, après courrier de relance du 5 avril 2019, le montant de son chiffre d’affaires au titre de l’année 2018, elle n’a fait aucune ventilation en fonction de la nature de ses activités et des séances concernées selon les jours couverts par le contrat général de représentation.

S’agissant de l’année 2019, elle souligne que sa cocontractante ne lui a pas communiqué le chiffre d’affaires réalisé, de sorte qu’elle a retenu le chiffre d’affaires de l’année 2018.

Elle précise qu’elle entend corriger dans le cadre de la procédure d’appel sa demande et appliquer une ventilation selon un pourcentage de 40% à titre provisionnel.

Elle sollicite donc le versement d’une somme provisionnelle correspondant aux redevances dues, assorties d’indemnités pour non-paiement dans les délais et non fourniture des documents requis.

L’appelante admet que pour cette période, la diffusion de musique attractive a été étendue à tous les jours d’ouverture, du mercredi au samedi. Elle considère que la part de musique attractive est de 20 heures sur 36 heures hebdomadaires. Elle précise que depuis avril 2019 elle dispose d’une caisse en mesure de ventiler les recettes réalisées en fonction des heures d’ouverture.

Elle évalue les redevances à des sommes de 39 159 euros TTC en 2018 et en 2019, mais en retenant la totalité de son activité et sollicite la modération des indemnités contractuelles.

Appréciation de la cour

Les calculs faits par la SACEM correspondent aux redevances contractuelles après application d’une ventilation de 40% au chiffre d’affaires communiqué par la société le Privé Club pour l’année 2018.

Cette ventilation apparaît correspondre à la réalité de l’activité de la société le Privé Club qui refuse de considérer qu’une partie de son activité, celle se déroulant les mercredis et jeudis, de 18 heures à 1 heure, a lieu hors le contrat général de représentation.

Faute pour elle de ventiler elle-même ses recettes, l’assiette de 40 % proposée par la SACEM doit être retenue.

En outre, le calcul proposé est fondé sur une part forfaitaire et une part proportionnelle, telles que prévues au RGAT 2015, ce qui n’est pas critiqué par la société le Privé Club.

Il sera donc fait droit au montant réclamé au titre de la redevance due en vertu du contrat général de représentation pour lesdites années, compte tenu du chiffre d’affaires déclaré global de 2 105 808,04 € HT pour l’année 2018, repris pour le calcul de la redevance au titre de l’année 2019, soit à la somme de 2 x28 562,45 euros TTC, soit 57 124,90 euros TTC, ce à titre provisionnel.

Toutefois, en application des articles 1152 et 1226 anciens du code civil il convient de modérer les indemnités contractuelles appliquées de deux fois 10% pour les réduire à 1%, compte tenu de ce que la société le Privé Club a communiqué son chiffre d’affaires 2018 et que vu l’instance en cours, le montant de la créance n’était pas fixé. En outre, en ce qui concerne le retard de paiement, les règles générales d’autorisation et de tarification de la SACEM, prévoit un taux d’intérêt égal au triple du taux légal.

La société le Privé Club sera donc condamnée à payer à la SACEM la somme de 58 118,05 euros (57 124,90 euros + 993,15 euros), à titre provisionnel, au titre des redevances contractuelles et indemnités de droits d’auteur exigibles pour la période 2018 et 2019.

Sur la demande reconventionnelle en contrefaçon

· Sur le principe de la créance,

La SACEM forme une demande reconventionnelle sur le fondement de la contrefaçon. Elle prétend que la diffusion de musique attractive était pratiquée les mercredis et jeudis soirs depuis 2011, de manière illicite dès lors que la société Le Privé Club ne bénéficiait d’aucune autorisation pour ces jours, qui n’étaient pas compris dans le contrat général de représentation. Elle soutient que l’appelante organisait des séances de karaoké ou avec un disc-jockey en dehors des jours couverts par le contrat. Elle indique également que l’établissement de la société le Privé Club était classé en catégorie « P » relative aux discothèques et bars dansant. Elle en déduit que les animations musicales à titre attractif constituent l’offre principale de la SAS Le Privé Club depuis 2011.

La SACEM prétend donc avoir subi un préjudice et disposer d’une créance de réparation. Elle sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné la société le Privé Club à lui payer la somme de 171 972,94 euros en réparation du préjudice causé par ses actes de contrefaçon sur la période allant du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2017 et réactualise sa créance en sollictant la condamnation de la société le Privé Club à lui payer la somme complémentaire de 85 384,84 euros TTC pour la période allant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2019.

La SAS Le Privé Club réplique qu’elle exerce en semaine, et depuis 2011, une activité de restauration qui est incompatible avec une activité d’offre d’animations musicales attractives. Elle soutient que la SACEM présume une diffusion illicite de musique attractive, sans néanmoins le démontrer. Elle rappelle que la bonne foi est présumée dans l’exécution du contrat. Elle ajoute que les constats produits par l’intimée ont été réalisés lors de périodes couvertes par le contrat et ne justifient donc que d’une diffusion licite de musique attractive.

Appréciation de la cour

En vertu de l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle, toute représentation

ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.

Et, en application de l’article L 321-2 du code de la propriété intellectuelle, les organismes de gestion collective régulièrement constitués ont qualité pour ester en justice pour la défense des droits dont ils ont statutairement la charge et pour défendre les intérêts matériels et moraux de leurs membres, notamment dans le cadre des accords professionnels les concernant.

Enfin, conformément à l’article L 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement :

1° Les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;

2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;

3° Et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l’atteinte aux droits.

Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.

Il appartient à la SACEM de prouver qu’entre 2011 et 2016, la société le Privé Club a diffusé de la musique attractive les mercredi et jeudi soirs, ainsi que les vendredi et samedi entre 18 heures et 22 heures.

La contrefaçon est un fait juridique pouvant être prouvé par tous moyens, y compris par des présomptions de fait.

La diffusion d’une musique attractive comprenant les oeuvres du répertoire de la SACEM, constatée et reconnue par l’appelante à partir de l’année 2017, est contestée pour les années précédentes.

Pour établir ses allégations, la SACEM produit notamment, en ce qui concerne les années litigieuses de 2011 à 2016, quatre procès-verbaux de constat établis par ses agents assermentés les 13 janvier 2014 et les 15, 18 mai et 26 mai 2015, ainsi que deux procès-verbaux de constat dressés par Me Robert, huissier de justice associé à Paris.

Les quatre constats effectués par des agents assermentés de la SACEM porte sur les nuits du 14 au 15 décembre 2013, du 9 au 10 mai 2015, du 16 au 17 mai 2014 et du 23 au 24 mai 2015, qui étaient des nuits du samedi au dimanche.

Ces pièces sont donc non probantes en ce qui concerne l’activité illicite de diffusion de musique attractive non autorisée, relative aux soirées et nuits en semaine.

En revanche, le constat d’huissier du 10 décembre 2014 (pièce n°60) mentionne qu’une video publiée le 29 avril 2011 annonçait « restaurant ouvert 7J/7- club ouvert jeudi vendredi et samedi … start 22 h ».

Par ailleurs, la SACEM verse au débat un procès-verbal d’huissier de justice du 10 décembre 2014 (pièce 60) qui mentionne sous la vidéo publiée le 29 avril 2011 déjà décrite, l’annonce suivante : « restaurant ouvert 7J/7 – Club ouvert jeudi vendredi et samedi’. Start 22h ».

Le procès-verbal de constat d’huissier de justice du 10 février 2015 (pièce 61) retranscrit trois annonces promotionnelles publiées sur la plateforme YouTube évoquant le 9 mai 2012 un « apéro géant en terrasse » le mercredi à 18 heures puis le 8 mai 2014, l’«ouverture de la terrasse Mercredi 30 avril avec Y Z, Mr X, A B » et enfin une soirée « NRJ EXTRAVADANCE @ le privé 26 août », qui est un mercredi titrant une vidéo dans laquelle est émise la promesse suivante : « pendant toute une nuit, bouger sur le son de NRJ Extravadance, full mix et full cadeau ».

La SACEM produit un article édité en 2015 et tiré des archives d’un journal local évoquant les nuisances sonores causées par l’établissement exploité par la société le Privé Club dénoncées par des riverains qui évoquent des « soirées festives tous les mercredis et jeudis jusqu’à 1h du matin et les vendredis et samedis jusqu’à 5h », un témoin ajoutant : « ça fait des années que cela dure ».

Il en résulte que comme l’ont retenu les premiers juges, la diffusion d’une musique attractive comprenant les oeuvres du répertoire de la SACEM, constatée et reconnue en 2017, est établie dès 2011 par les promotions réalisées par l’appelante sur son site, qui évoque déjà l’ouverture du « Club » le jeudi soir dès 22 heures, puis en 2012 et en 2014 les mercredis et jeudis soir avec une répétition qui induit une régularité que confirme pour l’année 2015 l’article de presse produit.

C’est ainsi par des motifs pertinents, que la cour adopte que le tribunal a retenu qu’en l’absence d’éléments contraires produits par l’appelante, les éléments concordants susvisés suffisent à présumer au sens de l’article 1353 devenu 1382 du code civil que la société le Privé Club diffuse de la musique attractive, y compris pendant les heures de son activité de restauration, depuis son ouverture également les jeudis soir et, à compter de 2012, les mercredis et jeudis soir.

Pour ces séances, la société le Privé Club ne bénéficie pas d’un contrat général de représentation de sorte que les diffusions d’oeuvres musicales revêtent un caractère illicite.

Le principe d’une créance en réparation du préjudice causé à la SACEM est ainsi acquis.

Sur le montant de la créance

Quand bien même la société le Privé Club n’a pas ventilé ses recettes entre son activité de restauration et l’activité de discothèque, il apparaît que les calculs faits par la SACEM en application des règles générales d’autorisation et de tarification du 1er janvier 2009 et du 1er janvier 2015, ne peuvent être retenus dans la mesure où il convient de tenir compte de l’activité de restauration effective de la société le Privé Club et de la moindre activité de discothèque en semaine, sur un créneau horaire beaucoup moins large.

Il convient en conséquence de considérer que la SACEM ne peut prétendre asseoir l’indemnité due sur une assiette de 60% du chiffre d’affaires déclaré mais seulement sur 30%, compte tenu de l’existence de l’activité de restauration parallèle à celle de discothèque.

La SACEM devra donc procéder au nouveau calcul de l’indemnité due sur cette base pour les années 2011 à 2019. La société le Privé Club est condamnée en tant que de besoin au paiement de l’indemnité qui sera recalculée par la SACEM.

Sur les délais de paiement

La SAS Le Privé Club sollicite des délais de paiement. Elle fait valoir qu’elle a subi une forte perte de chiffre d’affaires du fait de la crise sanitaire, ayant été contrainte de fermer son établissement par décision réglementaire. Elle indique avoir déjà versé une somme de 183 339,29 euros, et sollicite un délai de deux ans pour s’acquitter de toute autre somme mise à sa charge.

Elle rappelle à ce titre que, de jurisprudence constante, les demandes de délais de grâce peuvent être présentées en tout état de cause, de sorte qu’elles sont recevables même lorsqu’elles sont présentées pour la première fois en cause d’appel.

La SACEM réplique que la demande est irrecevable en vertu de l’article 910-4 du code de procédure civile, comme étant non comprise dans les premières conclusions d’appel.

En outre, elle estime que la SAS Le Privé Club est de mauvaise foi et qu’elle ne peut donc bénéficier des délais de paiement et ce, d’autant qu’elle a bénéficié de larges délais qu’elle s’était octroyés unilatéralement en ne réglant pas les sommes dues dans les délais convenus. Elle souligne que le versement de la somme de 183 339,29 euros n’a pas été réalisé spontanément mais résulte d’une mesure d’exécution forcée.

Enfin, elle affirme qu’aucun délai ne peut être accordé pour le paiement d’une créance d’aliments. Elle expose qu’un caractère alimentaire est attaché aux créances de droits d’auteur.

Appréciation de la cour

Selon l’article 910-4 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées, en l’espèce à l’article 908, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures.

La demande de délais présentée par l’appelante n’a pas été formalisée dans ses premières conclusions d’appelante notifiées le 18 février 2020. Une telle demande n’étant pas prévue dans les exceptions au principe de l’alinéa 1er ci-dessus énoncé, par l’alinéa 2 du même texte, celle-ci sera déclarée irrecevable.

Sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile

Le tribunal a exactement statué sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile ; en conséquence le jugement entrepris sera confirmé sur ces points.

La société le Privé Club qui succombe sur l’essentiel de ses prétentions sera condamnée aux dépens d’appel.

En cause d’appel, l’équité commande d’allouer à la SACEM la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société le Privé Club, tenue aux dépens, sera déboutée de sa demande au même titre.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

CONFIRME le jugement en ce qu’il a :

— condamné la société Le Privé Club à payer à la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique la somme provisionnelle de 138 207,75 euros au titre des redevances de droit d’auteur et indemnités contractuelles exigibles pour la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2017 en vertu du contrat général de représentation du 1er décembre 2010,

— enjoint à la société Le Privé Club de communiquer à la Société des Auteurs, Compositeurs et Editeurs de Musique, sous astreinte de 500 euros par jour de retard courant pendant un délai de 6 mois débutant à l’expiration d’un délai de 15 jours courant à compter de la signification du jugement, les attestations établies par un expert-comptable certifiant les recettes journalières réalisées pour les exercices sociaux clos les 31 décembre 2011, 31 décembre 2012, 31 décembre 2013, 31 décembre 2014, 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016,

— statué sur les dépens et sur l’article 700 du code de procédure civile,

L’ INFIRME en ses autres dispositions,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société le Privé Club à payer à la SACEM la somme de 58 118,05 euros à titre provisionnel, au titre des redevances et indemnités contractuelles de droits d’auteur pour les années 2018 et 2019, en vertu du contrat général de représentation du 1er décembre 2010,

DIT que la société le Privé Club est redevable d’une indemnité en réparation de ses actes de contrefaçon, sur la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2019, pour les jours de semaine non prévus par le contrat général de représentation,

DIT que la SACEM devra établir un calcul de l’indemnité susvisée en prenant pour assiette le pourcentage de 30% du chiffre d’affaires déclaré,

CONDAMNE en tant que de besoin la société le Privé Club au paiement de l’indemnité qui sera calculée sur la base susvisée,

DÉCLARE irrecevable la demande de délais de paiement,

CONDAMNE la société le Privé Club à payer à la SACEM la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

REJETTE toutes autres demandes plus amples ou contraires des parties,

CONDAMNE la société le Privé Club aux dépens d’appel.

— prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Madame Anne LELIEVRE, conseiller pour le président empêché et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Conseiller

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