COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-7
ARRÊT AU FOND
DU 11 JANVIER 2024
N° 2024/ 18
Rôle N° RG 20/07527 – N° Portalis DBVB-V-B7E-BGEO4
[M], [F], [W] [E]
[J], [A], [H] [V] épouse [E]
C/
[U] [M] [S]
[L] [R] épouse [S]
Syndic. de copro. RESIDENCE [Adresse 8]
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Frédéric KIEFFER
Me Rachel SARAGA-BROSSAT
Me Françoise BOULAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de GRASSE en date du 09 Juin 2020 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/03224.
APPELANTS
Monsieur [M], [F], [W] [E]
né le 02 Décembre 1944 à [Localité 9], demeurant [Adresse 4] – [Localité 3]
Madame [J], [A], [H] [V] épouse [E]
née le 04 Juin 1946 à [Localité 6], demeurant [Adresse 4] – [Localité 3]
Tous deux représentés par Me Frédéric KIEFFER de la SELARL KIEFFER – MONASSE & ASSOCIES, avocat au barreau de GRASSE
assistés de Me Catherine POUILLE-GROULEZ, avocat au barreau de LILLE
INTIMES
Monsieur [U] [M] [S], demeurant [Adresse 8] – [Localité 1]
Madame [L] [R] épouse [S], demeurant [Adresse 8] – [Localité 1]
Tous deux représentés par Me Rachel SARAGA-BROSSAT de la SELARL SARAGA-BROSSAT RACHEL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,
assistée de Me Caroline LAFONT, avocat au barreau de GRASSE
Syndic. de copro. RESIDENCE [Adresse 8] pris en la personne de son syndic en exercice, le Cabinet JC DOR SARL, [Adresse 5] à [Localité 7], lui même pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège, demeurant [Adresse 5] – [Localité 2]
représentée par Me Françoise BOULAN de la SELARL BOULAN-CHERFILS-IMPERATORE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Marine CHARPENTIER, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE,
assisté de Me Lionel BUDIEU, avocat au barreau de NICE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 11 Octobre 2023 en audience publique devant la cour composée de :
Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre
Madame Carole MENDOZA, Conseillère
Madame Mireille CAURIER-LEHOT, Conseillère,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Natacha BARBE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 07 Décembre 2023 puis les parties ont été informées que le prononcé de la décision était prorogé au 11 janvier 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2024,
Signé par Madame Carole DAUX-HARAND, Présidente de chambre et Mme Natacha BARBE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
***
EXPOSÉ DU LITIGE :
Selon acte notarié du 26 janvier 2012, M. [M] [E] et Mme [J] [V], son épouse, ont acheté les lots n°16 (parking au sous sol), 33 (cave), 68 (appartement au 2è étage) et 110 (place de parking extérieure) de l’ensemble immobilier en copropriété [Adresse 8], [Adresse 8], [Localité 1].
Selon acte notarié du 22 mars 1989, M. [U]-[M] [S] et Mme [L] [R], son épouse, ont acquis les lots n°105, 106 et 109, qui sont des places de parking extérieures.
Se plaignant que leur emplacement de parking ne correspond ni à leur acte d’acquisition, ni à l’état descriptif de division, M et Mme [E] ont fait assigner, par acte du 30 mai 2016, le syndicat des copropriétaires RESIDENCE [Adresse 8].
Par acte du 25 juillet 2016, le syndicat des copropriétaires [Adresse 8] a fait citer M. [U]-[M] [S] et Mme [L] [R], son épouse, copropriétaires au sein du même ensemble immobilier.
Les deux instances ont été jointes par ordonnance du juge de la mise en état du 4 août 2017.
Par jugement contradictoire du 9 juin 2020, le tribunal judiciaire de Grasse a statué ainsi :
– REJETTE la fin de non-recevoir ;
– JUGE que les époux [E]-[V] sont propriétaires du lot 110, place de parking extérieur, tel qu’il est matérialisé à ce jour ;
– DEBOUTE les époux [E]-[V] de leur demande relative à la dimension du lot
110, place de parking extérieur ;
– CONDAMNE les époux [S]-[R] à verser aux époux [E]-[V] la somme de 2000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;
– CONDAMNE les époux [E]-[V] à verser au syndicat des copropriétaires LA
[Adresse 8] la somme de 2000 euros par application des dispositions de l’article 700 du
code de procédure civile ;
– CONDAMNE les époux [S]-[R] aux entiers dépens dont distraction au profit de
Maître KIEFFER et de Maître Marie Noëlle DELAGE ;
– ORDONNE l’exécution provisoire.
Le jugement déféré retient principalement que les requérants sont bien-fondés à agir à l’encontre de la copropriété ; que les époux [S] n’apportent pas la preuve d’une propriété non équivoque sur le lot n°110, l’accord d’un simple usage ne pouvant valoir volonté de transférer la propriété dudit bien ; que les plans cadastraux et l’état descriptif ne sont pas contractuels et donc sont non opposables à la copropriété.
Selon déclaration du 7 août 2020, les époux [E] ont fait appel de cette décision en ce qu’elle les a déboutés de leur demande relative à la dimension du lot n° 110, les a condamnés à verser au syndicat des copropriétaires de la résidence [Adresse 8] la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance du conseiller de la mise en état du 13 avril 2021, a été rejetée la demandes des appelants aux fins de communication par le syndicat des copropriétaires de la copie de tous les procès-verbaux des assemblées générales tenues depuis la création de la copropriété et ces derniers ont également été condamnés à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Selon leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 novembre 2020, auxquelles il sera référé plus amplement, M et Mme [E] demandent de voir :
– Réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, à l’exception de celle condamnant les
époux [S] à payer aux concluants la somme de 2000 € au titre de l’art 700 du code de procédure civile,
– Dire et juger les époux [E] recevables et bien fondés en leur appel du jugement rendu le 09.06.2020 par le Tribunal Judiciaire de Grasse.
– Y faisant droit et réformant,
– Condamner le syndicat des copropriétaires, pris par son syndic, à rétablir la configuration des parkings, de telle sorte que les concluants puissent exercer leur droit sans limite inopportune sur le parking numéroté 110, comme prévu à l’acte de vente des époux [E],
– Assortir cette obligation d’une astreinte de 1000 € par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir,
– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné le syndicat des copropriétaires à payer aux
concluants une somme de 2000 € à titre d’indemnité procédurale et par application de l’art 700 du
code de procédure civile,
– Condamner le même syndicat des copropriétaires pris par son syndic à payer aux concluants une
somme de 5000 € supplémentaires à titre d’indemnité procédurale et par application de l’art 700 du
code de procédure civile à raison des frais de procédure liés à l’instance d’appel,
– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné les époux [S] à payer aux concluants
une somme de 2000 € au titre des frais irrépétibles de la 1ère instance,
– Condamner les époux [S] à payer aux concluants une somme de 5000 € au titre des frais irrépétibles et par application de l’art 700 du code de procédure civile s’agissant des frais irrépétibles d’appel,
– Condamner in solidum le syndicat des copropriétaires et les époux [S] aux entiers dépens d’instance et d’appel en ce compris les éventuels règlements à faire auprès du fichier immobilier le cas échéant et le coût de l’incident de communication de pièces,
– Ordonner comme de droit la distraction des dépens au profit de Me Kieffer, avocat aux offres de droit.
Les époux [E] font essentiellement valoir que le lot n°110 est moins large que certains autres emplacements de parking et notamment les parkings 5,6,7 et 8, ce qui ne correspond pas à l’état descriptif de division en page 83 ; que son entrée est mal aisée ; que l’état descriptif de division est contractuel et publié à la conservation des hypothèques et estdonc opposable à tous ; que leur demande en revendication de propriété immobilière ne peut se voir appliquer l’usucapion abrégée par un délai de 10 ans, ni l’usucapion trentenaire ; que la possession par les époux [S] n’est pas paisible et est équivoque.
Selon leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 12 septembre 2023, auxquelles il sera référé plus amplement, les époux [S] demandent de voir :
– CONFIRMER le jugement de première instance en ce qu’il a dit que les Epoux [E] sont propriétaires du lot 110 tel qu’il est actuellement,
– INFIRMER le jugement de première instance en ce qu’il a condamné M. et Mme [S]
au paiement d’un article 700 du code de procédure civile envers les époux [E] d’un montant de 2000 €,
et Statuant à nouveau :
– REJETER la pièce 3 du syndicat de copropriété [Adresse 8] intitulée note du conseil syndical qui est non conforme à l’article 202 du code de procédure civile;
– CONDAMNER les EPOUX [E] à payer une amende civile pouvant aller jusqu’à
10000 euros pour procédure abusive.
– CONDAMNER les EPOUX [E] à payer aux EPOUX [S]-[R] la somme de 6000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,
– JUGER que les EPOUX [S]-[R] sont propriétaires des lots 106 et 105 tels
qu’ils sont actuellement matérialisés sur le constat d’huissier du 24/09/2020 pour les avoir
acquis depuis l’acte authentique de 1989,
– CONDAMNER M. et Mme [E] solidairement avec le syndicat des copropriétaires [Adresse 8] à payer à M. et Mme [S]-[R] la somme de 10000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile représentant les frais engagés par eux pour assurer la défense de leurs droits tant devant la juridiction de première instance que devant la juridiction d’appel et dont les époux [S]-[R] seront dispensés de leur quote-part,
– DEBOUTER le syndicat des copropriétaires [Adresse 8] de sa demande de condamnation des époux [S] à le relever et le garantir de toute condamnation dont il pourrait faire l’objet,
– DEBOUTER le syndicat des copropriétaires [Adresse 8] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile envers les époux [S]-[R],
– DEBOUTER M. et Mme [E]-[V] de leurs demandes au titre de l’article 700
du code de procédure civile ;
– CONDAMNER M. et Mme [E]-[V] et le syndicat des copropriétaires aux entiers dépens de première instance et d’appel,
– DEBOUTER M. et Mme [E]-[V] de leurs demandes,
– DEBOUTER le syndicat de copropriétaires [Adresse 8] de leurs demandes.
Les époux [S] font essentiellement valoir que la pièce n°3 qui est une note du conseil syndical ne respecte pas les exigences de l’article 202 du code de procédure civile, qu’il s’agit d’une note anonyme contenant des propos diffamatoires ; qu’elle doit donc être écartée des débats ; qu’ils invoquent plusieurs attestations dont celle émanant de M. [P], héritier de Mme [D], précédente propriétaire du lot 110 ; qu’ils ont fait établir un constat d’huissier le 24 septembre 2020 au soutien de leurs prétentions.
Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 septembre 2023, auxquelles il sera référé plus amplement, le syndicat des copropriétaires de la RESIDENCE [Adresse 8] demande de voir :
– CONFIRMER la décision de première instance en toutes ses dispositions,
– Dire et juger que Monsieur et Madame [E] n’indiquent pas sur quel fondement le Syndicat des copropriétaires serait responsable de leur grief,
– Dire et juger que le Syndicat des copropriétaires [Adresse 8] n’est pas à l’origine de la dépossession alléguée par les époux [E],
– Dire et juger que le débat porte sur un litige entre des copropriétaires, lequel ne concerne pas le Syndicat des copropriétaires,
– Dire et juger que Monsieur et Madame [E] ne démontrent pas qu’ils sont dépossédés de leur place de parking,
– Dire et juger que Monsieur et Madame [E] n’indiquent pas quelle est la « configuration des parkings de telle sorte qu’ils puissent exercer leur droit sans limite inopportune »,
– Dire et juger que seul un géomètre-expert ou un expert judiciaire serait susceptible de borner précisément les emplacements de stationnement correspondant à chaque lot,
Et par conséquent,
– Ordonner la mise hors de cause du Syndicat des copropriétaires [Adresse 8],
– Débouter Monsieur et Madame [E] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions à l’encontre du Syndicat des copropriétaires [Adresse 8],
– Débouter Monsieur et Madame [S] de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contre le Syndicat des copropriétaires [Adresse 8],
A TITRE SUBSIDIAIRE
– Si par impossible la Cour devait considérer que les époux [E] sont victimes d’une dépossession de leur lot et qu’il y a lieu d’entrer en condamnation contre le Syndicat des copropriétaires [Adresse 8],
– Condamner Monsieur et Madame [S] à relever et garantir le Syndicat des copropriétaires [Adresse 8] de toute condamnation dont il pourrait faire l’objet,
– EN TOUT ETAT DE CAUSE
– Condamner tout succombant à verser au Syndicat des copropriétaires [Adresse 8] la somme de 2500 € au visa de l’article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens distraits, ceux d’appel distraits au profit de la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, représentée par Maître Françoise BOULAN, avocat sous sa due affirmation de droit.
Le syndicat des copropriétaires de la Résidence [Adresse 8] font essentiellement valoir qu’il n’est à l’orgine d’aucune atteinte au droit de propriété des appelants ; que la demande des époux [E] est fondée sur l’atteinte aux dispositions du règlement de copropriété or la protection possessoire de l’article 2278 du code civil est exclue lorsque le trouble allégué constitue l’inexécution d’une convention, notamment d’un règlement de copropriété ; que le débat porte sur des parties privatives ; que le cadastre est un document fiscal qui ne peut servir de référentiel pour borner les limites de propriété ; que l’état descriptif n’a aucune valeur contractuelle ; que les époux [E] ne démontrent pas le prétendu décalage entre le tracé existant et la délimitation du lot 110 prévu par le règlement de copropriété ; que le syndicat n’est pas à l’origine de la modification des existants ; que les époux [S] ne justifient pas d’un préjudice.
La procédure a été clôturée le 27 septembre 2023.
Motivation
Dispositif
PAR CES MOTIFS :
La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en premier ressort :
DIT n’y avoir lieu à écarter des débats la pièce n° 3 du syndicat des copropriétaires de RESIDENCE [Adresse 8] ;
CONFIRME le jugement déféré rendu le 9 juin 2020 par le tribunal judiciaire de Grasse uniquement en ce qu’il a débouté les époux [E]-[V] de leur demande relative à la dimension du lot n°110, place de parking extérieur et a condamné les mêmes à verser au syndicat des copropriétaires de RESIDENCE [Adresse 8] la somme de 2000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
L’INFIRME pour le surplus ;
STATUANT A NOUVEAU ET Y AJOUTANT :
DÉBOUTE M. [M] [E] et Mme [J] [V], son épouse, de l’ensemble de leurs demandes ;
CONDAMNE M. [M] [E] et Mme [J] [V], son épouse, à payer au syndicat des copropriétaires de RESIDENCE [Adresse 8] la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel ;
CONDAMNE M. [M] [E] et Mme [J] [V], son épouse, à payer à M. [U]-[M] [S] et Mme [L] [R], son épouse, la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en première instance ;
CONDAMNE M. [M] [E] et Mme [J] [V], son épouse, à payer à M. [U]-[M] [S] et Mme [L] [R], son épouse, la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, en cause d’appel ;
DÉBOUTE les parties intimées de toutes leurs autres demandes ;
CONDAMNE M [M] [E] et Mme [J] [V], son épouse, en tous les dépens de première instance et d’appel, lesquels pouvant être recouvrés directement par la SELARL LEXAVOUE AIX EN PROVENCE, représentée par Maître Françoise BOULAN, avocat, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,