Décision du 4 octobre 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 23/00224

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COUR D’APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE – SECTION A

————————–

ARRÊT DU : 4 OCTOBRE 2023

N° RG 23/00224 – N° Portalis DBVJ-V-B7H-NJQ5

Madame [W] [T], [J], [R] veuve [H]

Madame [V] [D], [N], [H]

es qualités d’ayants droit de [U] [H] décédé le [Date décès 4] 2012

c/

SASU LOOMIS FRANCE

Nature de la décision : AU FOND

SUR RENVOI DE CASSATION

Grosse délivrée le :

à

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 17 avril 2018 (R.G. N°F16/01272) par le conseil de prud’hommes de Toulouse, après arrêt de la Cour de cassation rendu le 14 décembre 2022, cassant partiellement l’arrêt de la cour d’appel de Toulouse du 27 novembre 2020, suivant déclaration de saisine du 12 janvier 2023 de la cour d’appel de Bordeaux, désignée cour de renvoi,

DEMANDERESSES SUR RENVOI DE CASSATION :

Madame [W] [T], [J], [R] veuve [H]

née le [Date naissance 2] 1953 à [Localité 8]de nationalité Française

Profession : Retraité(e), demeurant [Adresse 1]

Madame [V] [D], [N], [H] née le [Date naissance 5] 1994 à [Localité 7] de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

ayants droit de [U] [H] décédé le [Date décès 4] 2012

représentées par Me Laurence DUPUY-JAVERT, avocat au barreau de TOULOUSE

DEFENDERESSE SUR RENVOI DE CASSATION :

SASU LOOMIS FRANCE immatriculée au RCS de BOBIGNY sous le N° 479 048 597, prise en la personne de son Président en exercice, domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 3]

assistée de Me Arnaud de SAINT LEGER, avocat au barreau de LYON, représentée par Me Lucie VIOLET, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 12 juin 2023 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

Exposé du litige

***

EXPOSÉ DU LITIGE

[U] [H], né en 1960, avait été engagé en qualité de convoyeur de fonds par la société Sécuripost, reprise par la société Sécuritas devenue la SAS Loomis France, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 15 décembre 1987.

Il avait acquis la qualification de moniteur de tir en 1992 et exerçait, au dernier état de la relation contractuelle, les fonctions de régulateur.

Après avoir été convoqué par lettre datée du 10 septembre 2012 à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 19 septembre 2012, auquel il ne s’est pas rendu, [U] [H] a été licencié pour ‘négligences professionnelles graves’ par courrier daté du 26 septembre 2012.

[U] [H] s’est suicidé le [Date décès 4] 2012, après réception de la lettre de licenciement.

A la date du licenciement, [U] [H] avait une ancienneté de 24 ans et 9 mois et la société occupait à titre habituel plus de 10 salariés.

Contestant la légitimité de ce licenciement et réclamant diverses indemnités outre la communication avant-dire droit d’un rapport d’expertise sur les risques psycho-sociaux au sein de l’entreprise [rendu dans le cadre d’une enquête du CHSCT à la suite de suicides de plusieurs salariés], Mme [W] [R] et Mme [V] [H], veuve et fille de [U] [H], ont saisi le 17 avril 2013 le conseil de prud’hommes de Toulouse. L’affaire radiée le 23 mars 2016 a été réinscrite le 3 mai 2016.

Le 12 juillet 2013, Mme [R] veuve [H] a adressé une déclaration d’accident du travail à la caisse primaire d’assurance maladie de la Haute Garonne (ci-après CPAM), qui l’a informée le 13 novembre 2013 que le suicide de [U] [H] serait pris en charge au titre de la législation relative aux risques professionnels.

Le 17 décembre 2013, la société Loomis France a demandé à la commission de recours amiable que la décision de la caisse lui soit déclarée inopposable. Cette demande a fait l’objet d’une décision implicite de rejet, que la société a contestée.

Le 14 avril 2014, les ayants droit de [U] [H] ont demandé la reconnaissance d’une faute inexcusable de la société Loomis France commise à l’endroit de leur auteur.

Le 30 décembre 2015, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Haute Garonne a, par deux décisions d’une part, déclaré, inopposable à la société Loomis France la prise en charge du suicide de [U] [H] au titre de la législation relative aux risques professionnels et, d’autre part, débouté ses ayants droit de leur demande de voir reconnaître la faute inexcusable de l’employeur.

Ces derniers ont interjeté appel de ces décisions.

Par arrêt en date du 12 octobre 2018, la cour d’appel de Toulouse a infirmé les décisions du TASS et dit que le décès de [U] [H] a un caractère professionnel ayant pour cause la faute inexcusable de l’employeur. La cour a fixé les indemnisations des préjudices moraux de ses ayants droit ainsi que la majoration de rente qui leur est due.

La société Loomis France a formé un pourvoi en cassation qui a été rejeté par arrêt du 28 novembre 2019.

Par jugement rendu en formation de départage le 17 avril 2018, le conseil de prud’hommes de Toulouse a :

– déclaré irrecevable les demandes relatives à la communication du rapport d’expertise du Cabinet Secafi Alpha présenté à la direction Loomis et au CHSCT le 26 mai 2014,

– dit que le licenciement notifié par la société Loomis France à [U] [H] le 26 septembre 2012 repose sur une cause réelle et sérieuse,

– débouté Mme [R] veuve [H] et Mme [H] de leurs demandes de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté toute autre demande plus ample ou contraire,

– dit n’y avoir lieu à exécution provisoire de la présente décision,

– condamné Mme [R] veuve [H] et Mme [H] aux dépens

Par déclaration du 22 mai 2018, les ayants droit de [U] [H] ont relevé appel de cette décision.

Par arrêt en date du 27 novembre 2020, la cour d’appel de Toulouse a :

– confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en celles ayant déclaré irrecevable la demande de communication de pièces,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

– déclaré recevable la demande de communication de pièces mais dit n’y avoir lieu à ordonner la communication par la société Loomis du rapport d’expertise Secafi Alpha,

– dit n’y avoir lieu à prononcer la nullité du licenciement pour harcèlement moral,

– débouté Mme [R] veuve [H] et Mme [H] de leur demande de dommages et intérêts,

– condamné Mme [R] veuve [H] et Mme [H] aux dépens d’appel,

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Suite au pourvoi formé par les ayants droit de [U] [H], par arrêt en date du 14 décembre 2022, la Cour de cassation a :

Moyens

Motivation

MOTIFS DE LA DÉCISION

La nouvelle déclaration de saisine de la cour par la société Loomis en date du 9 juin 2023 a été enregistrée par le greffe le 12 juin 2023 sous le n° 23/2773. Cette affaire n’était pas appelée à l’audience qui se tenait le même jour sur la précédente déclaration de saisine des ayants droits, de sorte que, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, la demande de jonction et de renvoi à une prochaine audience a été rejetée.

Sur l’irrecevabilité des conclusions de la société Loomis France

Aux termes des dispositions de l’article 1037-1 du code de procédure civile, la déclaration de saisine est signifiée par son auteur aux autres parties à l’instance ayant donné lieu à la cassation dans les dix jours de la notification par le greffe de l’avis de fixation. Ce délai est prescrit à peine de caducité de la déclaration, relevée d’office par le président de la chambre ou le magistrat désigné par le premier président.

Les conclusions de l’auteur de la déclaration sont remises au greffe et notifiées dans un délai de deux mois suivant cette déclaration.

Les parties adverses remettent et notifient leurs conclusions dans un délai de deux mois à compter de la notification des conclusions de l’auteur de la déclaration.

La notification des conclusions entre parties est faite dans les conditions prévues par l’article 911 et les délais sont augmentés conformément à l’article 911-2.

Les parties qui ne respectent pas ces délais sont réputées s’en tenir aux moyens et prétentions qu’elles avaient soumis à la cour d’appel dont l’arrêt a été cassé.

En l’espèce, les ayants droits de [U] [H] ont fait signifier la déclaration de saisine à la société Loomis le 25 janvier 2023, soit dans les 10 jours de la notification par le greffe de l’avis de fixation.

La société intimée a constitué avocat le 31 janvier 2023.

Les appelants ont adressé leurs conclusions à la cour et à l’avocat de la société le 28 février 2023.

La société avait 2 mois pour déposer ses conclusions à compter de cette date, soit au plus tard le 29 avril 2023 (le 28 étant un dimanche) mais ne les a transmises par le réseau privé virtuel des avocats que le 31 mai 2023.

Les délais prévus aux articles ci-dessus mentionnés n’ayant pas été respectés, il convient d’écarter les conclusions de la société et de s’en tenir aux moyens et prétentions soumis par la société à la cour d’appel de Toulouse, dont l’arrêt a été cassé par la Cour de cassation le 14 décembre 2022.

Sur l’exécution du contrat de travail

Sur le harcèlement moral

L’employeur, tenu d’une obligation de sécurité, doit assurer la protection de la santé des travailleurs dans l’entreprise et notamment prévenir les faits de harcèlement moral.

Dès lors que de tels faits sont avérés, la responsabilité de l’employeur est engagée, ce dernier devant répondre des agissements des personnes qui exercent de fait ou de droit une autorité sur les salariés.

Selon les dispositions de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L’article L. 1154-1 prévoit, qu’en cas de litige, si le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement, au vu de ces éléments, il incombe à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Au soutien de leurs prétentions, les appelantes invoquent les éléments suivants :

– en août 2011, M. [Y] a été nommé au poste de responsable d’agence alors que [U] [H] était en arrêt de travail suite à un accident survenu en février 2011.

– Lorsqu’il a pu réintégrer son emploi courant en janvier 2012, [U] [H] a découvert que sa hiérarchie tentait de l’évincer et a ainsi reçu entre le 14 mars et le 2 avril 2012, plusieurs courriers lui reprochant :

* le 14/03 : de ne pas avoir été joignable pendant une astreinte,

* le 29/03 : une absence le 20/03,

* le 02/04 :de ne pas avoir été joignable pendant une astreinte,

* le 10/04 : d’avoir été absent le 02/04, avec mise en demeure d’en justifier les motifs.

Les appelantes versent aux débats les courriers correspondant, intitulés ‘note de service interne – astreinte sécuritaire’ (lettres des 14 mars et 2 avril 2012) ou ‘sensibilisation absence’ (lettre du 29 mars 2012).

– [U] [H] a ensuite fait l’objet d’une surveillance ‘excessive’ de M. [Y] : sont produits deux courriels que le salarié adressait à M. [O], délégué syndical FO :

* le 12 août 2012, lui faisant part de son sentiment de ‘ne pas être dans les papiers de M. [Y]. Lorsque je suis sur le centre, la caméra du B5 est souvent allumée dans son bureau (…) M. [Y] et ses sbires ont l’art de te faire culpabiliser’,

* le 5 septembre 2012, suite à un reproche de l’employeur pour ne pas avoir été joignable à 9h45 alors qu’il était sur la route et que son service commençait à 10h, dans lequel [U] [H] faisait part de son ressenti de ne pas être ‘dans les petits papiers’ de M. [Y], contrairement à d’autres qui peuvent arriver en retard sans remarques, sans toutefois citer de nom ;

Les appelantes produisent également un courriel du 6 août 2012 dans lequel [U] [H], s’adressant à M. [Y], lui fait part de son sentiment d’être ‘anormalement surveillé’ et d’être ‘la 8ème roue du carrosse’.

– [U] [H] a également fait l’objet de discrimination (notamment pour un stage) et a été mis à l’écart, alors qu’il aurait trouvé judicieux de lui faire suivre une formation de validation de ses connaissances acquises sur le MP9, après 11 mois d’absence.

Les appelantes produisent à ce sujet des échanges de courriels entre [U] [H] et M. [Y], [U] [H] faisant part de son étonnement face à ce que : ‘certains de ses collègues qui ne montent jamais sur des fourgons puissent aller à la formation B9 alors qu’étant souvent chauffeur, il ne peut en bénéficier’.

M. [A], délégué syndical, témoigne que [U] [H] a plusieurs fois dénoncé le comportement du chef d’agence qui lui avait fait des remontrances immédiates alors que pour les mêmes faits, les autres convoyeurs n’étaient pas inquiétés ; M. [A] indique avoir lui-même évoqué la situation de [U] [H] avec M. [Y] portant l’attention de celui-ci sur les effets secondaires des médicaments que prenait le salarié et qui pouvaient le rendre parfois somnolent ; Il déclare ne pas avoir compris la décision de M. [Y] de le planifier seul en régulation un samedi matin.

– Un tract sur la violence et le harcèlement moral qui aurait été trouvé par [U] [H] dans sa case courrier, fait rapporté par M. [O].

Toutefois ce tract, qui n’est pas produit ne lui était pas spécialement destiné puisqu’il avait été distribué à tous les salariés.

– [U] [H] avait indiqué à son épouse faire l’objet d’une rétrogradation par l’affectation à des tournées en véhicules légers plutôt qu’en fourgon.

Mme [H] a attesté devant la CPAM le 1er octobre 2013 de ce que son époux lui avait fait part de la volonté de M. [Y] de l’éloigner de la régulation et de lui faire faire un contrôle d’un équipage en fourgon afin de savoir s’il respectait la réglementation ou de faire des tournées en véhicule léger, seul et non armé.

– La lettre d’adieu de [U] [H] qui dénonce des faits de harcèlement en nommant M. [Y] comme étant son harceleur : ‘Je ne prétends rien sauf que j’avais un harceleur malin et courtois son nom JP [Y] qui a toujours cherché à confondre les gens et cela jusqu’à vous faire croire que vous n’étiez rien, sans réponse ni même fatalité, son art étant exécuté en vous faire croire que vous étiez un moins que rien… et vous le prouver. Voilà M. [Y] vous avez gagné. Ma famille a perdu’ ;

Mme veuve [H] rapproche cette lettre et l’autolyse de son époux avec la concomitance de 4 suicides au sein de la société Loomis, dont 3 en 2012.

– La procédure de licenciement a été menée de manière brutale et pernicieuse par l’employeur avec :

* l’envoi de la lettre de convocation à l’entretien préalable alors que [U] [H] était en congé et parti en Egypte, ce que toute l’agence savait,

* l’absence de réaction de l’employeur à son retour de vacances et de sa reprise de poste alors qu’il ne s’était pas présenté à l’entretien préalable et que la société n’avait pas reçu d’accusé de réception du courrier d’entretien puisque ce courrier ne sera retiré qu’après la notification du licenciement,

* l’envoi de la lettre de licenciement alors que la société connaissait la fragilité du salarié, aurait dû adapter la sanction disciplinaire d’autant que [U] [H] n’avait pas pu s’expliquer lors de l’entretien préalable qui n’a pas eu lieu,

* le refus de la DRH de revoir sa décision.

– La dégradation des conditions de travail de [U] [H], attestées par M. [A] et M [O], qui confirment avoir appelé l’attention du responsable d’agence sur le climat social et les pressions tant de sa part que de certains salariés à l’encontre de [U] [H], qui avait une santé fragile.

Les appelantes font aussi état de la dégradation de l’état de santé de celui-ci, l’employeur étant parfaitement au courant de l’état psychologique fragile du salarié puisqu’il écrivait régulièrement au médecin du travail afin qu’il le déclare inapte.

Elles produisent les lettres de M. [Y] en date du 22 décembre 2011 et du 1er juillet 2012 adressées au médecin du travail.

Elles versent également aux débats le dossier médical de [U] [H], le médecin du travail ayant noté le 4 juin 2012 : ‘appréhension vis-à-vis de l’entreprise. A l’impression que l’on fait la chasse aux vieux. A conflit avec un autre moniteur de tir.

Conflit permanent. Dès qu’il peut il lui casse du sucre sur le dos. Lui en veut par jalousie.’

– Le suicide de [U]. [H] a été reconnu comme accident du travail pris en charge au titre de la législation professionnelle, alors qu’il s’est déroulé en dehors du temps et du lieu de travail ; il a donc été estimé qu’il était nécessairement consécutif à un harcèlement moral.

Les appelantes versent aux débats les décisions du TASS et de la cour d’appel de Toulouse.

***

En dehors du dépôt du tract sur la violence et le harcèlement et de la surveillance par une caméra au sein de l’agence, qui ne peuvent être retenus, Mme [R] Veuve [H] et Madame [H] présentent ainsi des faits précis et concordants laissant présumer une situation de harcèlement moral.

La société conteste l’existence d’une telle situation et fait valoir que les courriers de sensibilisation et la note interne adressés à [U] [H] avaient été rédigés en termes très neutres afin d’éviter toute sémantique disciplinaire et que les absences de [U] [H] n’étaient en aucun cas justifiées alors que la mise en demeure de valider une absence était intervenue 8 jours plus tôt ; ces écrits, s’ils ont pu faire l’objet de commentaires auprès de ses collègues délégués syndicaux FO, n’ont pas fait l’objet de contestation de la part du salarié.

La cour relève toutefois que [U] [H] avait repris le travail après 11 mois d’absence suite à un accident de la circulation, en février 2012 et que M. [Y], nouveau responsable d’agence, qui avait pris son poste en août 2011, n’avait pas encore travaillé avec ce salarié.

En 3 mois, de mars à juin 2012, M. [Y] a adressé à [U] [H] 4 courriers pour lui signaler ses absences ; le 1er intitulé ‘note de service’ en date du 14 mars 2012, portant en objet ‘astreinte sécuritaire’, lui rappelait ses obligations d’être joignable et se terminait ainsi : ‘depuis maintenant plus d’un an que je gère cette agence, je n’ai jamais eu à traiter ce dossier. Si vous n’êtes pas à même de satisfaire ces différents points, nous nous verrons dans l’obligation de vous suspendre de cette mission qui est pour moi capitale pour un bon fonctionnement de l’agence et qui est également un gage de qualité autant commerciale que d’exploitation’.

Ce courrier remis en main propre porte la mention manuscrite de [U] [H] ‘remis sans aucune possibilité d’explication’, alors qu’il soutenait avoir été appelé à 9h45 quand il était sur la route et que son service commençait à 10h. Il a rappelé cette difficulté à M. [O], délégué syndical, par courriel du 5 septembre 2012 ayant senti de la part de M. [Y], son souhait de l’écarter ou de lui reprocher tout écart.

Or, la société ne produit aucun justificatif permettant de vérifier que [U] [H] aurait dû être joignable à 9h45 ce jour là.

Par courrier du 29 mars 2012, portant pour objet ‘sensibilisation absences’, M. [Y] a reproché à [U] [H] son absence du 20 mars sans que la société en justifie dans le cadre de la procédure, aucune indication ne pouvant être donnée par les ayants droits du salarié sur la réponse que celui-ci aurait faite à son employeur.

Par ‘note interne’ du 2 avril 2012, M. [Y] a adressé un courrier rédigé à l’identique à celui du 14 mars. La société ne précise pas à quelle date [U] [H] n’aurait pas été joignable ni de quelle façon ce courrier lui a été remis.

C’est à la lecture du courrier du 10 avril 2012 valant mise en demeure de justifier de son absence du 2 avril qu’il est mentionné que [U] [H] aurait informé par téléphone ce même jour de son absence à 19h53 en précisant devoir être hospitalisé.

[U] [H] a en effet été placé en arrêt de travail pour maladie du 3 avril 2012 au 3 juin 2012, d’après le relevé des absences produit.

Suite à une absence de prise de poste à 7h du matin le 3 août 2012, [U] [H] expliquera dans un courriel adressé à M. [Y] le 6 août qu’il avait eu une rage de dent dans la nuit, qu’il avait tenté d’appeler la régulation ainsi que l’astreinte où il avait laissé un message puis le PC de [Localité 6] et ayant pris des médicaments pour dormir, expliquait ne pas avoir pu se réveiller.

Dans ce même courriel, il fait part à son employeur de ce qu’il lui ‘semble être anormalement surveillé. Or, si pendant un an d’accident, personne ne prend de mes nouvelles, il semble que lorsque tout va mal pour moi on y prête guère attention et le reste du temps j’ai une surveillance rapprochée (…) Je ne suis pas parano, mais avec les harcèlements auprès de la médecine du travail, je préfère m’expliquer (…)’.

La société ne verse pas de listing des appels permettant d’établir ou non que [U] [H] avait bien tenté de prévenir de son absence. Elle produit le courriel de M. [Y] du 9 août qui rappelle à [U] [H] son obligation de respecter les horaires sans que cela traduise une surveillance rapprochée et indique l’avoir personnellement contacté pendant son arrêt de travail suite à son accident de la circulation.

M. [A] atteste que lors d’une absence constatée de [U] [H] à l’ouverture de l’agence de [Localité 10], et sans que le personnel présent n’ait été informé des raisons de cette absence, M. [Y] s’est ‘mis en colère, n’a pas cherché à contacter [U] qu’il a publiquement dénigré et a déclaré qu’il ne pouvait plus compter sur lui à cause de ses absences répétées’.

Si les absences ne sont pas contestées, la société ne verse aucune pièce permettant d’invalider les faits invoqués comme en étant à l’origine.

Les courriers rappelant à [U] [H] son obligation de présence ne sont pas des sanctions disciplinaires, ce qui ne leur ôte pas nécessairement leur caractère ‘harcelant’, et n’ont jamais été accompagnés d’entretiens, qui auraient permis au salarié de s’expliquer tant sur ses absences que sur son ressenti d’être surveillé par sa direction.

Par ailleurs les fréquentes absences ou retards ne justifient pas la réaction virulente de M. [Y] décrite par M. [A].

La société justifie le refus de formation B9 qui ne concernait que les chauffeurs et qui consistait à apprendre à dégager un fourgon blindé pris dans une situation d’attaque, ce qui ne concernait pas [U] [H], qui était régulateur et chauffeur à titre occasionnel. Elle ajoute que [U]. [H] n’avait pas sollicité de formation particulière au retour de son arrêt de travail.

La société n’avait pas l’obligation d’inscrire [U] [H] sur les formations mais celui-ci ayant été absent 11 mois et exerçant les fonctions de moniteur de tir, sa demande de suivre la formation de validation de ses connaissances acquises sur le MP9 le 14 mars 2012 était fondée. La société reconnaissait en outre dans un échange de courriel du 5 septembre 2012 que le tir était ce qui motivait le plus [U] [H].

C’est d’ailleurs parce qu’elle craignait tout risque de reprise de poste en sa qualité de moniteur de tir qu’elle demandait au médecin du travail le 22 décembre 2011 de bien vouloir examiner la capacité du salarié à reprendre ses fonctions. L’avis d’aptitude délivré par le médecin du travail à partir du 2 janvier 2012 et de façon régulière tous les 2 mois ne dispensait pas la société de s’assurer par une formation de la validation des connaissances du salarié ; un conflit avec un autre moniteur de tir portant notamment sur ses compétences sera relevé et porté à la connaissance du médecin du travail en juin 2012.

De même, la société a refusé de l’inscrire au ‘stage Satory’ le 6 septembre 2012 au motif qu’elle ne concernait que les chauffeurs et était destinée à leur apprendre à dégager un fourgon blindé pris dans une situation d’attaque.

Toutefois, la société ne justifie pas du programme de cette formation, qui aurait pu servir à [U] [H] de moyen de réassurance après l’agression dont il avait été victime le 2 août 2012 alors qu’il conduisait seul un véhicule léger, sans arme et transportait plus de 30.000 euros.

Si l’employeur lui a reproché son comportement inadapté lors de cette agression, il n’est pas fait état de ce qu’un entretien ait eu lieu avec sa hiérarchie, [U] [H] ayant confié à M. [O] dans un courriel du 12 août avoir été sous le coup de l’émotion et de la peur et ne pas avoir voulu rester assis sans se défendre dans le véhicule, libérant sa ceinture de sécurité pour sortir de la voiture contrairement aux règles de sécurité apprises.

La société reconnaît que [U] [H] pouvait être affecté sur des véhicules légers, seul et sans arme, notamment l’été pour pallier les absences dues aux congés, ce qui était le cas lors de l’agression dont il a été victime le 2 août 2012.

La société ne peut donc pas valablement soutenir que [U] [H], affecté essentiellement à la régulation, ne prenait pas de risque nécessitant une formation ou une validation de ses compétences en tant que chauffeur, fonction qu’il exerçait également.

Suite à cette agression dans le véhicule qu’il conduisait pour la société, la société ne précise pas non plus avoir mis en place un suivi psychologique en faveur du salarié dont elle connaissait la fragilité.

Si elle conteste le grief d’une rétrogradation soulevé par les ayants droits de [U] [H], elle ne produit pas les plannings de celui-ci permettant de démontrer de manière objective qu’il était toujours maintenu sur des fonctions de régulation sans être relégué à des tournées en véhicule léger de manière régulière.

D’après le planning du [Date décès 4] 2012, dernier jour travaillé, il était en tournée dans un véhicule léger avec un collègue.

Si [U] [H] se sentait surveillé et estimait qu’il était la ‘8ème roue du carrosse’, l’employeur justifie avoir rappelé au salarié qu’il l’avait contacté à deux reprises pendant son accident de moto pour prendre des nouvelles.

S’il ne s’agit que de ressentis de [U] [H] dont il avait fait part à son collègue et sa direction, ces propos ont néanmoins été relayés par les délégués syndicaux auprès du responsable d’agence, comme en témoignent M. [A] et M. [O].

Les deux délégués syndicaux auxquels [U] [H] a écrit à plusieurs reprises reconnaissent que le comportement de M. [Y] était particulièrement inadapté vis à vis du salarié.

Ainsi, M. [A] témoigne avoir rencontré M. [Y] pour ‘l’alerter sur un comportement asocial (..) vis à vis de [U].’, ce délégué syndical précisant avoir déjà eu affaire à M. [Y] sur le site de [Localité 9] pour dénoncer son comportement identique vis à vis d’une caissière qui reprenait le travail après une opération (cancer du sein). Sur les témoignages recueillis suite au suicide de [U] [H], M. [A] a confirmé que celui-ci avait dénoncé des remontrances qui lui étaient faites alors que pour les mêmes faits, les autres convoyeurs n’étaient pas inquiétés et notamment sur les retards.

M. [O] a également indiqué dans un tract syndical établi après le décès de [U] [H], avoir remonté l’alerte faite par le salarié auprès du directeur des ressources humaines.

La société n’a toutefois jamais organisé d’enquête permettant de vérifier la situation de harcèlement que [U] [H] dénonçait pour la 1ère fois dans son courriel du 6 août 2012 ni informé le CHSCT.

De même, les délégués syndicaux ont alerté M. [Y] de la santé fragile de [U] [H] depuis sa reprise de poste en février 2012. M. [A] atteste ainsi avoir indiqué à M. [Y] que ‘les soins que [U] continuaient à suivre le rendaient parfois somnolent à son poste de travail. JP [Y] m’a seulement répondu qu’il avait envoyé [U] en visite à la médecine du travail qui l’avait déclaré apte. Fort de cette attestation, il n’avait pas à avoir une attitude différente par rapport à ses autres collègues. Cela ne l’a donc pas gêné de le planifier seul en régulation un samedi matin !’.

La société soutient ne pas avoir manqué à son obligation de sécurité, ayant appelé l’attention du médecin du travail en décembre 2011 et juin 2012 sur les effets secondaires des médicaments que prenait [U] [H] au regard de l’agressivité constatée sur ses collègues, ses absences fréquentes et alors qu’il était en charge d’assurer la régulation des convoyeurs de fonds et détenait une arme de service. Or, le médecin du travail a toujours déclaré [U] [H] apte au travail.

M [Y] s’est entretenu avec le médecin du travail le 14 avril, puis lui a envoyé un courrier le 1er juin 2012 lui demandant de porter une attention particulière quant à la capacité de [U] [H] ‘de manipuler des armes au quotidien, à enseigner en tant que moiteur de tir à l’ensemble du personnel de l’agence auprès duquel sa crédibilité est fortement remise en cause’ et notamment lors de la visite à venir du 4 juin.

Toutefois, la société qui met en cause les avis d’aptitude rendus par le médecin du travail n’a jamais formé de recours contre ces avis.

La société connaissait la situation médicale de [U] [H], celui-ci ayant des visites tous les deux mois depuis sa reprise de poste en février 2012 et ayant déjà laissé paraître une fragilité psychologique personnelle et des problèmes familiaux en septembre et novembre 2010, puis en mars 2012 après le décès d’un de ses neveux.

Le dossier médical de [U] [H] confirme l’existence d’un conflit avec un autre moniteur de tir qui lui en voudrait ‘par jalousie’ mais mentionne que la situation avait été réglée. Il était toutefois noté ‘une appréhension vis-à-vis de l’entreprise. A l’impression que l’on fait la chasse aux sorcières’. Il était déclaré apte et le médecin du travail avait de nouveau un entretien avec M. [Y] au cours duquel il était confirmé que le conflit avec l’autre collègue avait été réglé.

Lors de la visite du 25 juillet 2012, [U] [H] indiquait au médecin du travail que ‘cela se passait bien’ mais que son ’employeur M. [Y] trouvait qu’il n’était pas d’humeur égale’.

Il est ainsi établi que les conditions de travail de [U] [H] continuaient à se dégrader, nécessitant toujours un suivi de la médecine du travail de manière très régulière.

[U] [H] avait été hospitalisé pour un épisode dépressif en avril 2012. Son épouse indiquait aux services de gendarmerie qu’il avait suivi une cure de désintoxication à cette même époque et ne buvait plus. Si une odeur d’alcool a été détectée lors de l’autopsie et l’état d’ébriété mentionné par M. [G] qu’il avait appelé quelques minutes avant son suicide, rien ne permet d’établir que [U] [H] avait repris de manière habituelle une consommation d’alcool qui aurait fait échec aux résultats de sa dernière cure.

Conformément à la règle d’indépendance entre le droit de la sécurité sociale et le droit du travail, la faute inexcusable de l’employeur n’a pas d’incidence sur la procédure de licenciement, la société soutenant que la déclaration d’accident du travail a été instrumentalisée à des fins prud’homales.

L’indemnisation des dommages résultant d’un accident du travail, qu’il soit ou non la conséquence d’un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, relève de la compétence exclusive du tribunal des affaires de sécurité sociale et ouvre droit au paiement d’une indemnisation spécifique en réparation de son préjudice professionnel, à la suite de l’accident du travail dont il a été victime et qui a été déclaré imputable à la faute inexcusable de l’employeur.

Cependant, la juridiction prud’homale est seule compétente pour statuer sur le bien-fondé de la rupture du contrat de travail et pour allouer, le cas échéant, une indemnisation au titre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en réparation du préjudice distinct qui n’a pas été déjà pris en charge au titre de la législation sur les accidents du travail.

Alors que le suicide de [U] [H] s’est produit avec son arme de service, en dehors des heures de travail et à son domicile, la cour d’appel de Toulouse statuant en matière de sécurité sociale, confirmée par la Cour de cassation le 28 novembre 2019, a reconnu que l’employeur qui avait connaissance de la fragilité de [U] [H] n’avait pas pris les moyens nécessaires pour le préserver des risques psychologiques, notamment par l’annonce du licenciement.

La société soutient que la procédure de licenciement a bien été respectée et que [U] [H] avait été convoqué à un entretien préalable.

Toutefois, elle a adressé la lettre de convocation à l’entretien préalable au licenciement à [U] [H] le 10 septembre 2012, soit pendant ses congés, dont elle connaissait les dates pour les avoir autorisés, et a fixé la date de son entretien préalable au 19 septembre, jour de son retour de congés, soit au cours d’une période qui pouvait le rendre indisponible les jours précédents, sans s’assurer qu’il aurait le temps de prendre connaissance du courrier recommandé ni d’organiser sa défense et de se faire assister sur un laps de temps court. A ce titre l’employeur n’a pas même vérifié que le courrier recommandé avait bien été remis à [U] [H] au moins 5 jours avant l’entretien.

Si l’absence de [U] [H] à l’entretien préalable pouvait n’avoir aucune incidence sur le déroulement de la procédure, encore eût-il fallu que l’employeur qui avait délégué sa directrice des ressources humaines sur l’agence de [Localité 10] pour y procéder, interroge le salarié sur les raisons de son absence à cet entretien, puisqu’il avait pris son poste dans les conditions habituelles à son retour de congés et était donc présent dans l’établissement.

L’exercice par l’employeur de son pouvoir disciplinaire n’est pas constitutif de harcèlement moral lorsque la sanction est proportionnée. En l’espèce, aucun avertissement préalable n’avait été donné à [U] [H] pour ses absences, ce qui aurait permis d’instaurer un dialogue et au salarié de s’expliquer. La société n’a pas cherché à s’entretenir avec [U] [H] avant de lui notifier son licenciement par courrier du [Date décès 4] 2012.

[U] [H] a pris la peine d’appeler la directrice des ressources humaines le jour même de la prise de connaissance de la lettre de licenciement pour lui demander de revoir sa décision exposant qu’il n’avait pas pu se rendre à l’entretien préalable, n’en ayant pas eu connaissance, ce qui a été refusé sans aucune possibilité d’explication même téléphonique.

La société soutient qu’il n’est pas démontré que la lettre de licenciement a été la cause principale du suicide de [U] [H] au regard du temps écoulé entre la connaissance qui lui a été donnée par son épouse par téléphone de son licenciement alors qu’il était sur son lieu de travail et son retour au domicile où l’heure du décès a été estimée à 19h10. Pendant ce laps de temps, de multiples éléments ont pu être déterminants dans la décision de mettre fin à ses jours, la société relevant que [U] [H] n’avait trouvé aucune personne disponible d’après les appels téléphoniques passés.

Toutefois, la dernière lettre écrite par [U] [H] avant de se donner la mort nomme expressément M. [Y] comme étant son ‘harceleur’ et impute son geste à ses conditions de travail. Il convient par ailleurs de replacer cette autolyse dans un contexte général où la société Loomis a connu quatre suicides dont trois en 2012, un en 2014 et trois sur l’agence de [Localité 10], M. [Y] ayant pris ses fonctions en août 2011 au sein de celle-ci.

***

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que [U] [H] a fait l’objet d’une attention particulière sinon malveillante de M. [Y] qui a relevé immédiatement ses absences, a évité toute sanction disciplinaire qui aurait permis au salarié de s’expliquer dans une situation encadrée et contenante et lui a refusé systématiquement les formations qu’il demandait sur ses fonctions de moniteur de tir alors que dans le même temps la société s’inquiétait de ses facultés en ce domaine auprès du médecin du travail mais aussi sur ses fonctions de conducteur de fourgon en soutenant qu’il était au service de régulation mais en l’affectant de manière plus fréquente en qualité de chauffeur sur des véhicules légers.

Enfin, c’est parce que la société connaissait la fragilité psychologique antérieure de [U] [H], qu’elle a d’autant plus manqué de loyauté en procédant à son licenciement de manière brutale et encore une fois sans lui permettre de s’expliquer.

En conséquence, la société échoue à démontrer que les faits invoqués par les ayants-droits de [U] [H], pris dans leur ensemble, sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement moral.

Le jugement déféré sera infirmé de ce chef.

Sur le licenciement de [U] [H]

En application de l’article L. 1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des articles L. 1152-1 et L. 1152-2 est nulle.

Le licenciement de [U] [H], qui s’est déroulé suivant une procédure particulièrement déloyale constitue le dernier fait caractéristique du harcèlement subi. Son suicide le jour de la réception de la lettre de licenciement et la lettre d’adieu mentionnant le nom du responsable d’agence comme événement déclencheur alors qu’il dénonçait depuis février 2012 un comportement harcelant de sa part permettent d’établir le lien entre le harcèlement subi et le licenciement.

Le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a débouté les ayants droits de [U] [H] de leur demande en nullité du licenciement.

Sur les demandes financières

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne du salarié s’élevait à la somme de 2.719,25 euros et [U] [H] avait une ancienneté dans l’entreprise de 24 ans et 9 mois.

Sans tenir compte de la rente que perçoit Mme [R] Veuve [H] au titre de la faute inexcusable de l’employeur suite à l’accident de travail reconnu par la cour d’appel de Toulouse le 12 octobre 2018, et compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à [U] [H], de son âge au moment de la rupture du contrat (52 ans), il sera alloué aux appelantes la somme de 70.000 euros de nature à assurer la réparation du préjudice subi suite au licenciement de [U] [H].

Sur les dépens et les frais irrépétibles

La société, partie perdante à l’instance, sera condamnée aux dépens ainsi qu’au paiement à Mme [R] Veuve [H] et à Mme [H] la somme de 4.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Dit nul le licenciement de [U] [H] en date du [Date décès 4] 2012,

Condamne la société Loomis France à verser à Mme [R] Veuve [H] et à Mme [H] en leur qualité d’ayants droit de [U] [H] la somme de 70.000 euros en réparation du préjudice subi pour licenciement nul et 4.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés,

Condamne la société Loomis France aux dépens.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire

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