COUR D’APPEL DE CHAMBÉRY
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 28 SEPTEMBRE 2023
N° RG 21/02440 – N° Portalis DBVY-V-B7F-G34H
S.A.S.U. ECO HABITAT CONSTRUCTION ET PROMOTION avec pour mandataire judiciaire la SELARL MJ ALPES
C/ [G] [P] etc…
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ANNECY en date du 03 Décembre 2021, RG R 21/00039
APPELANTE :
S.A.S.U. ECO HABITAT CONSTRUCTION ET PROMOTION avec pour mandataire judiciaire la SELARL MJ ALPES
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentant : Me Lilian MARTIN GHERARDI de la SAS EPSILON, avocat au barreau d’ANNECY( non présent qui dépose)
INTIMEES :
Madame [G] [P]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Représentant : Me Frédérique MARQUOIS-BELLON, avocat au barreau d’ANNECY qui était présent et qui dépose
Association CGEA – AGS
[Adresse 5]
[Localité 4]
non représentée
S.E.L.A.R.L. MJ ALPES
[Adresse 2]
[Localité 6]
non représentée
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue en audience publique le 13 Juin 2023, devant Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller désigné(e) par ordonnance de Madame la Première Présidente, qui s’est chargé(e) du rapport, les parties ne s’y étant pas opposées, avec l’assistance de Mme Capucine QUIBLIER, Greffier, à l’appel des causes, dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré,
et lors du délibéré :
Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller faisant fonction de Président
Madame Isabelle CHUILON, Conseillère,
Madame Françoise SIMOND, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.
Exposé du litige
********
Exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties
Mme [G] [P] a été engagée par la Sasu Eco habitat construction et promotion en qualité d’assistante de travaux, catégorie cadre, position 2.1 , coefficient 130 en date du 8 janvier 2020 par contrat à durée indéterminée.
La Sasu Eco habitat construction et promotion est spécialisée dans la construction, la rénovation de maison, l’architecture et la maîtrise d’oeuvre.
La convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseil est applicable.
A compter du 30 mars 2020, Mme [G] [P] a fait l’objet d’un arrêt de travail jusqu’au 25 Avril 2021.
Par courrier du 26 avril 2021, la Sasu Eco habitat construction et promotion a notifiée à Mme [G] [P] la rupture de sa période d’essai.
Par requête du 9 septembre 2021, Mme [G] [P] a saisi en référé le conseil de prud’hommes d’Annecy aux fins de solliciter la communication de son attestation pôle emploi et le paiement de diverses sommes.
Par ordonnance en date du 3 décembre 2021, le conseil de prud’hommes d’Annecy :
– dit qu’il y avait lieu a référé,
– condamne la Sasu Eco habitat construction et promotion à payer à Mme [G] [P] les sommes suivantes:
* 4.719,40 € bruts au titre du non-paiement du salaire durant l’arrêt maladie ;
* 1.521,97 € bruts au titre des salaires et congés payés dus pour absences non rémunérées en avril et mai 2021 ;
* 2.270,70 € bruts au titre des salaires d’avril et mai 2021 non payés ;
* 1.647,09 € bruts a titre d’indemnité de congés payés ;
* 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– ordonne à la Sasu Eco habitat construction et promotion de remettre à Mme [G] [P] les fiches de paye d’avril et mai 2021 conformes, l’attestation Pôle emploi et l’affiliation auprès d’une mutuelle, dans un délai de 8 jours au-delà de la notification de l’ordonnance, sous astreinte de 100 € parjour de retard au-dela de ce délai ;
– se réserve le droit de liquider l’astreinte ;
– prononce l’exécution provisoire sur I’ensemble des décisions ;
– déboute Mme [G] [P] du surplus de ses demandes ;
– condamne la Sasu Eco habitat construction et promotion aux entiers dépens.
La Sasu Eco habitat construction et promotion a interjeté appel par déclaration d’appel du 17 décembre 2021 au réseau privé virtuel des avocats.
Par ordonnance du 5 janvier 2022, le président de la chambre sociale de la Cour d’appel de Chambéry a fixé cette affaire à bref délai.
Moyens
Motivation
Motifs de la décision
Aux termes des dispositions de l’article R 1455-5 du code du travail, dans tous les cas d’urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence des conseils de prud’hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
Aux termes des dispositions de l’article R 1455-6 du code du travail, la formation de référé peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Aux termes des dispositions de l’article R 1455-7 du code du travail, dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
En l’espèce, la salariée justifie de l’urgence à obtenir une décision de justice en saisissant le juge des référés. En effet, Pôle Emploi lui a demandé par courrier du 14 juin 2021, de transmettre, afin de traiter sa demande d’allocations, l’attestation employeur Pôle Emploi. Par courrier du 18 juin 2021, le conseil de la salariée a demandé, par courrier recommandé distribué le 21 juin 2021, à l’employeur de remettre à celle-ci le document officiel ‘attestation Pôle Emploi’, à la place du document ‘Attestation Assedic’ qui lui avait été remis.
L’employeur ne justifie pas avoir répondu à cette demande, qui revêtait un caractère d’urgence dans la mesure où ce doucment était nécessaire à la salariée pour pouvoir percevoir les allocations Pôle emploi.
C’est donc à bon droit que la salariée à saisi le conseil de prud’hommes en référé à ce titre le 9 septembre 2021.
Par ailleurs, il convient de déterminer si les autres demandes de la salariée sont de nature à faire l’objet d’une contestation sérieuse.
Il y a contestation sérieuse lorsque l’examen de la demande appelle nécessairement une appréciation sur l’existence des droits invoqués.
En l’espèce, l’employeur sollicite l’application des dispositions des articles L 1226-1 et D 1226-1 du code du travail ainsi que les dispositions de la convention colective pour soutenir que la salarié ne pouvait bénéficier d’allocations complémentaires aux indemnités journalières dans la mesure où elle ne présentait pas un an d’ancienneté dans l’entreprise à la date de son arrêt maladie. La salariée soutient pour sa part que les dispositions dérogatoires du décret n°2021-13 du 8 janvier 2021 pris dans le cadre de la pandémie de COVID19 s’appliquent à sa situation. Or il n’est produit aucun élément de nature à justifier que ce décret était de nature à s’appliquer à sa situation personnelle, de sorte qu’une contestation sérieuse s’oppose à cette demande.
S’agissant de la période du 26 au 30 avril et du 1er au 10 mai 2021, les fiches de paie remises à la salariée mentionnent des absences non rémunérées sur ces dates. La salariée indique seulement que son salaire lui est dû sur cette période car le contrat de travail se terminait le 10 mai, l’employeur soutien qu’elle se trouvait en absence injustifiée, Mme [G] [P] ne répondant pas sur ce point. Une contestation sérieuse s’oppose donc à cette demande.
La salariée sollicite par ailleurs le versement des sommes figurant sur les bulletins de paie des mois d’avril et de mai 2021. L’employeur s’oppose à cette demande, soutenant que ces sommes comprenaient un versement de la complémentaire santé qui n’était pas dû ainsi qu’une indemnité de congés payés qui ne lui était pas dû non plus au regard de son arrêt maladie après moins de trois mois de travail. La salariée ne répond pas sur ce dernier point. Il a déjà été retenu que la question du versement de la complémentaire santé faisait l’objet d’une contestation sérieuse. Il en est de même du droit à congés payés de la salariée.
Au regard de ces éléments, la décision du conseil de prud’hommes sera confirmée en ce qu’elle a:
– dit qu’il y avait lieu à référé,
– ordonné à la Sasu Eco habitat construction et promotion de remettre à Mme [G] [P] l’attestation Pôle emploi,
– débouté Mme [G] [P] du surplus de ses demandes.
Elle sera infirmée pour le surplus, et Mme [G] [P] sera déboutée de ses demandes, y compris de sa demande d’astreinte.
La décision du conseil de prud’hommes sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens sera confirmée.
Chacune des parties succombant partiellement à l’instance, il n’apparaît pas inéquitable de dire n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel. Chacune des parties conservera la charge de ses dépens d’appel.
Dispositif
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement et après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme l’ordonnance de référé du conseil de prud’hommes d’Annecy du 3 décembre 2021 en ce qu’elle a :
– dit qu’il y avait lieu à référé,
– ordonné à la Sasu Eco habitat construction et promotion de remettre à Mme [G] [P] l’attestation Pôle emploi,
– débouté Mme [G] [P] du surplus de ses demandes,
– condamné la Sasu Eco habitat construction et promotion à verser à Mme [G] [P] la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la Sasu Eco habitat construction et promotion aux dépens,
Infirme pour le surplus l’ordonnance déférée,
Statuant à nouveau,
Déboute Mme [G] [P] de ses demandes,
Y ajoutant,
Déboute les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne chacune des parties à assumer la charge de ses dépens d’appel.
Ainsi prononcé publiquement le 28 Septembre 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur Cyril GUYAT, Conseiller faisant fonction de Président , et Monsieur Bertrand Assailly, faisant fonction de Greffier pour le prononcé auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président