MR/SL
COUR D’APPEL de CHAMBÉRY
Chambre civile – Première section
Arrêt du Mardi 02 Mai 2023
N° RG 21/00330 – N° Portalis DBVY-V-B7F-GT63
Décision attaquée : Jugement du Tribunal de Commerce de CHAMBERY en date du 09 Décembre 2020
Appelante
Mme [Y] [X], demeurant [Adresse 2]
Représentée par la SELARL EUROPA AVOCATS, avocats postulants au barreau de CHAMBERY
Représentée par Me Paul JOLY, avocat plaidant au barreau de GRASSE
Intimée
S.A.R.L. ADIDAS FRANCE, dont le siège social est situé [Adresse 1]
Représentée par la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocats postulants au barreau de CHAMBERY
Représentée par l’ASSOCIATION CARRERAS, BARSIKIAN, ROBERTSON & ASSOCIES, avocats plaidants au barreau de PARIS
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Date de l’ordonnance de clôture : 16 Janvier 2023
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 février 2023
Date de mise à disposition : 02 mai 2023
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Composition de la cour :
– Mme Hélène PIRAT, Présidente,
– Mme Inès REAL DEL SARTE, Conseillère,
– Mme Myriam REAIDY, Conseillère,
avec l’assistance lors des débats de Mme Sylvie LAVAL, Greffier,
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Faits et procédure
Mme [Y] [X] est inscrite au répertoire spécial des agents commerciaux du greffe du tribunal de commerce de Chambéry. Elle est spécialisée dans le commerce d’articles de sport et vêtements de sport.
La société Adidas France (SARL), filiale du groupe Adidas, est spécialisée dans la distribution d’articles de sport, de mode et de loisirs.
En 2015, un premier contrat d’agent commercial a été conclu entre la société Adidas France et Mme [Y] [X] ayant, ainsi que le détaille son CV, « une expérience passée dans la vente d’articles de sport et plus particulièrement de produits outdoor’», pour une durée déterminée de deux années du 1er juillet 2015 au 30 juin 2017.
Puis un second contrat d’agent commercial a été conclu entre la société Adidas France et Mme'[Y] [X], pour une durée d’une année, du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2018.
Le 9 juillet 2018, par courrier recommandé avec accusé de réception, la société Adidas France informait Mme [Y] [X] de sa «’décision de ne pas renouveler le contrat d’agent commercial, (…) En conséquence, conformément à l’article 10 du contrat, la fin du présent contrat sera effective au 31 décembre 2018.’»
Le 24 octobre 2018, par courrier recommandé avec accusé de réception, Mme [Y] [X] demandait à la société Adidas France de lui verser une indemnité de rupture d’un montant de 29’877’euros ainsi qu’une indemnité complémentaire pour rupture anticipée d’un montant de 8 712’euros et précisait «’À défaut de réponse sous huit jours, je vous informe que je n’aurai d’autre choix que de saisir la juridiction compétente pour arbitrer notre litige.’»
Par acte du 27 décembre 2018, Mme [Y] [X] assignait la société Adidas France devant le tribunal de commerce de Chambéry aux fins de la voir condamner à lui régler les sommes de 29’877’euros au titre de l’indemnité légale de cessation de mandat, et de 8 712’euros au titre d’une indemnité complémentaire pour rupture anticipée.
Par jugement rendu le 9 décembre 2020, le tribunal de commerce de Chambéry a :
– dit que la demande d’indemnité de cessation de mandat de Mme [Y] [X] est recevable et partiellement fondée ;
– rejeté la demande d’indemnité pour rupture anticipée de Mme [Y] [X] ;
– condamné la société Adidas France à payer, en deniers ou quittances valables, à Mme'[Y] [X] :
– la somme de 22’677’euros, montant principal de la cause sus-énoncée ;
– les intérêts au taux légal de cette somme à compter du 27 décembre 2018 ;
– les dépens ;
– liquidé les frais de greffe à la somme de 73,22’euros TTC avec TVA à 20%, comprenant les frais de mise au rôle et de la présente décision ;
– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision ;
– rejeté toute autre demande.
Le tribunal a retenu que :
‘ la société Adidas France ne démontre pas que Mme [Y] [X] a violé de manière grave son obligation de loyauté à l’égard de la société Adidas France ;
‘ il n’est pas démontré que la société Adidas France a volontairement ou sciemment privé Mme'[Y] [X] de la collection Printemps/été 2019 ou volontairement omis de l’inviter au «’meeting de printemps’» ;
‘ la société Adidas France s’est acquittée des commissions dues à Mme [Y] [X] pour les deux semestres 2018 soit une somme totale de 5 970’euros ;
‘ la société Adidas France n’ayant pas démontré que les agissements de Mme [Y] [X] étaient constitutifs de la privation d’une indemnité de cessation de contrat, l’indemnité de cessation de contrat est due ;
‘ Mme [Y] [X] n’a pas démontré que les agissements de la société Adidas France étaient à l’origine de la baisse de son chiffre d’affaires en 2018, la baisse de ce chiffre d’affaires pouvant également résulter d’un désintérêt pour la commercialisation des produits Adidas ainsi que le soutient la société Adidas France.
Par déclaration au Greffe en date du 15 février 2021, Mme [Y] [X] interjetait appel de cette décision en ce qu’elle l’a débouté de sa demande d’indemnité complémentaire et limité la condamnation de la société Adidas France à la somme de 22’677’euros au titre de l’indemnité de cessation de mandat.
Prétentions des parties
Par dernières écritures en date du 5 janvier 2023, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, Mme [Y] [X] sollicitait l’infirmation du jugement déféré et demandait à la cour de :
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a estimé qu’aucune faute grave privative d’indemnité au sens de l’article L134-13 1° du code de commerce n’était démontrée à l’encontre de Mme [X] ;
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a considéré que Mme [X] était en droit de percevoir l’indemnité légale de cessation de mandat prévue par l’article L134-12 du code de commerce ;
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a réduit de 29’877’euros à 22’677’euros l’indemnité de cessation de mandat ;
– en conséquence, condamner la société Adidas France à régler à Mme [X] une indemnité légale de 29’877’euros, outre intérêts de droit à compter de l’assignation ;
– vu l’article 1212 du code civil et réformant le jugement entrepris, condamner la société Adidas France à régler à Mme [X] la somme de 8 712’euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice subi du fait de la période contractuelle non-travaillée du 1er juin au 31 décembre 2018, outre intérêts de droit à compter de l’assignation ;
– réformer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [X] de sa demande en paiement de la somme de 5 000’euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et en conséquence condamner la société Adidas France à lui régler cette somme au titre des frais irrépétibles de première instance ;
– vu l’article 700 du code de procédure civile, condamner la société Adidas France à régler à Mme'[Y] [X] la somme supplémentaire de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel’;
– condamner la société Adidas France aux entiers dépens.
La société Adidas France a formé un appel incident en ce que la décision déférée l’a condamnée à payer à Mme [Y] [X] la somme de 22’677’euros au titre d’une indemnité de cessation de mandat.
Par dernières écritures en date du 6 janvier 2023, régulièrement notifiées par voie de communication électronique, la société Adidas France sollicitait de la cour de :
– confirmer le jugement du tribunal de commerce de Chambéry en date du 9 décembre 2020 en ce qu’il a débouté Mme [Y] [X] de sa demande d’indemnité pour rupture anticipée du contrat d’agence commerciale ;
A titre subsidiaire et si par extraordinaire, la cour devait infirmer le jugement et juger qu’il y a eu rupture anticipée du contrat et que cette rupture est imputable à Adidas France, (i) la cour prendra en compte l’ensemble des commissions touchées par Mme [X] pendant l’exécution de son mandat (y compris le premier semestre 2018) et (ii) déduira le montant déjà versé à Mme'[X] par Adidas France au titre du second semestre 2018 afin de calculer son indemnité de rupture anticipée qui s’élèvera donc à 4 879,80’euros;
– réformer le jugement du tribunal de commerce de Chambéry en date du 9 décembre 2020 en ce qu’il a :
– condamné Adidas France à payer à Mme [X] une indemnité de cessation de mandat d’agent commercial à hauteur de 22 677’euros ;
Statuant à nouveau,
A titre principal,
– dire et juger que le placement par Mme [X] de produits de la société G-Tech, en situation de concurrence avec les produits de la marque adidas distribués par Adidas France, caractérise donc une violation de l’article 9 du contrat et de son obligation légale de loyauté, ce qui constitue une faute grave privative de toute indemnité de cessation de mandat ;
– dire et juger que le placement par Mme [X] de produits de la société PL Diffusion en situation de concurrence avec les produits adidas distribués par Adidas France postérieurement à la signature du contrat caractérise donc une violation de l’article 9 du contrat et de son obligation légale de loyauté, ce qui constitue une faute grave privative de toute indemnité de cessation de mandat (article L 134-13 1° du code de commerce)’;
– dire et juger que les griefs de Mme [X], manifestement formulés pour seuls besoins de la cause à l’encontre d’Adidas France afin d’excuser le grief de représentation concurrente et déloyale (i) ne sont pas établis, (ii) ont en tout état de cause été tolérés par l’agent et (iii) n’ont jamais fait l’objet d’une mise en demeure ou d’une simple réclamation auprès du mandant ;
– dire et juger que le comportement d’Adidas France ne peut donc permettre de justifier le comportement déloyal de Mme [X] au cours du mandat ;
En conséquence,
– débouter Mme [X] de sa demande d’indemnité légale de cessation de mandat ;
A titre subsidiaire,
– dire et juger qu’Adidas France s’est acquittée de ses obligations au titre du contrat au cours du second semestre de l’année 2018, permettant ainsi à Mme [X] (i) d’effectuer les prestations qu’elle souhaitait réaliser pendant cette période et (ii) de percevoir des commissions y afférentes’;
– dire et juger que les griefs de Mme [X] à savoir la prétendue non communication des collections, l’absence d’invitation au meeting de printemps et tout autre grief manifestement formulé pour seuls besoins de la cause ; (i) ne sont pas établis, (ii) ont en tout état de cause été tolérés par l’agent et (iii) n’ont jamais fait l’objet d’une mise en demeure ou d’une simple réclamation auprès du mandant de sorte qu’aucune circonstance suffisamment grave et imputable à Adidas France n’a empêché raisonnablement Mme'[X] de poursuivre son mandat, notamment via des actions de réassort ;
– dire et juger que Mme [X], en sollicitant par courrier le 24 octobre 2018 le paiement anticipé (i) d’une indemnité légale de cessation des relations et (ii) d’une indemnité pour rupture anticipée du contrat, sans avoir au préalable mis en demeure ou a minima demandé des explications à Adidas France sur les prétendus manquements reprochés, a de facto pris l’initiative de rompre son contrat d’agent commercial avant son terme (qui était fixé au 31 décembre 2018), sans pouvoir justifier de circonstances imputables à Adidas France empêchant raisonnablement la poursuite de son activité ;
– dire et juger que dans ces conditions et conformément à l’article L134-13 2° du code de commerce, Mme [X], qui a pris l’initiative de la rupture de son contrat d’agente commerciale alors que les manquements reprochés à Adidas France n’étaient pas caractérisés et n’avaient pas fait au préalable l’objet d’une demande d’explications ou d’une mise en demeure, n’est pas fondée à réclamer une indemnité légale de cessation de mandat ;
En conséquence,
– débouter Mme [X] de sa demande d’indemnité légale de cessation de mandat ;
A titre très subsidiaire, si par extraordinaire la cour jugeait que Mme [X] avait droit à une indemnité de cessation de mandat,
– dire et juger que le contrat s’est bien poursuivi jusqu’au 31 décembre 2018 et que les commissions à prendre en compte pour le calcul de l’indemnité de cessation des relations sont les commissions perçues en 2017 et 2018 par Mme [X], cette indemnité s’élevant donc à 22’677’euros ;
A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour jugeait que Mme [X] avait droit à une indemnité de cessation de mandat et que le contrat avait pris fin en juin 2018,
– dire et juger que les commissions à prendre en compte pour le calcul de l’indemnité de cessation de mandat de Mme [X] seront être celles perçues de juin 2018 à juin 2016, cette indemnité s’élevant donc à 27 354’euros ;
En tout état de cause,
– débouter Mme [X] de toutes ses demandes fins et conclusions ;
– condamner Mme [X] à verser à Adidas France la somme de 10’000’euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d’appel;
– condamner Mme [X] aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des prétentions des parties, la cour se réfère à leurs conclusions visées par le greffe et développées lors de l’audience ainsi qu’à la décision entreprise.
Exposé du litige
Une ordonnance en date du 16 janvier 2023 clôture l’instruction de la procédure.
Motivation
Dispositif
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Rejette les demandes de la société Adidas France et de Mme [Y] [X] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
Dit que chaque partie supportera la charge de ses dépens de l’instance d’appel.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
et signé par Hélène PIRAT, Présidente et Sylvie LAVAL, Greffier.
Le Greffier, La Présidente,
Copie délivrée le 02 mai 2023
à
la SELARL EUROPA AVOCATS
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY
Copie exécutoire délivrée le 02 mai 2023
à
la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY