CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 juin 2023
Cassation partielle
Mme DUVAL-ARNOULD, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 424 F-D
Pourvoi n° R 22-15.696
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 14 JUIN 2023
M. [Y] [P], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 22-15.696 contre l’arrêt rendu le 15 mars 2022 par la cour d’appel de Bordeaux (1re chambre civile), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société Corep, société par actions simplifiée,
2°/ à la société Marketset, société par actions simplifiée,
ayant toutes deux leur siège [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. [P], de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat des sociétés Corep et Marketset, après débats en l’audience publique du 10 mai 2023 où étaient présents Mme Duval-Arnould, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, M. Jessel, conseiller, et Mme Tinchon, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Exposé du litige
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Bordeaux, 15 mars 2022), M. [P] a créé, en 1994, la société Marketset ayant pour objet la création et l’importation de luminaires décoratifs et qui diffusait ses créations.
2. La société Corep System, maison mère de la société Corep, spécialisée dans la fabrication d’abat-jours et de lampes décoratives, a conclu, le 6 octobre 2003, avec M. [P] un accord portant sur une prise de participation progressive de la société Corep System, devenue Corep Lighting, dans le capital de la société Marketset accompagné d’une cession de titres intervenue le 2 septembre 2004.
3. Le 31 mars 2015, les sociétés Marketset et Corep ont conclu un contrat de location-gérance du fonds de commerce appartenant à la première.
4. M. [P] est demeuré associé minoritaire de la société Marketset devenue une société par actions simplifiées et en a occupé les fonctions de président jusqu’au 11 mai 2016, date à laquelle il a été mis fin à son mandat par une assemblée générale ordinaire des associés.
5. Le 2 février 2017, après avoir été autorisé à faire pratiquer une saisie-contrefaçon descriptive de modèles de luminaires au siège de la société Corep, M. [P] l’a assignée en contrefaçon de ses droits d’auteur au titre de modèles originaux de luminaires, et en contrefaçon de dessins et modèles au titre de modèles originaux déposés. La société Marketset est intervenue volontairement à l’instance, au soutien de la société Corep.
Moyens
Motivation
Réponse de la Cour
7. La cour d’appel a relevé, dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation de la valeur et de la portée des éléments de fait et de preuve soumis et notamment de l’accord conclu le 6 octobre 2003, que cet accord avait prévu une durée d’exploitation à titre gracieux des droits sur les créations antérieures limitée au 31 décembre 2006, qu’il résultait de l’économie de cette convention qu’à son terme le 1er janvier 2011, la société Marketset devait se trouver titulaire de tous les modèles déposés, et qu’à partir du 1er janvier 2011, la société Marketset a continué d’exploiter les modèles créés par M. [P] sans que celui-ci n’exige de contrepartie financière et sans qu’aucune convention écrite ne régisse plus les droits d’auteur attachés à ces modèles, déposés ou non.
8. Elle a ajouté que, nonobstant la caducité de l’accord du 6 octobre 2003, M. [P] avait procédé au dépôt de plusieurs modèles au nom de la société Marketset et que son nom n’apparaissait pas en qualité de designer dans les catalogues, à l’exception de la première édition contestée du catalogue n° 8 de mai 2015.
9. Elle a retenu, enfin, que l’existence d’une mise à disposition gratuite et temporaire, invoquée par M. [P], se trouvait contredite tant par les termes de l’accord du 6 octobre 2003 que par les dépôts des modèles ultérieurs et par l’absence de mention du nom de M. [P] dans les catalogues édités de 2011 à 2016.
10. En l’absence de dénaturation des conclusions de M. [P] et de l’accord du 6 octobre 2003, elle pu en déduire que M. [P] avait cédé ses droits d’exploitation sur les modèles de luminaires à la société Marketset et que, n’étant ainsi pas titulaire des droits d’exploitation qu’il revendiquait, ses demandes à ce titre étaient irrecevables, justifiant ainsi légalement sa décision.
11. Le moyen n’est donc pas fondé.
Moyens
Mais sur le moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
12. M. [P] fait grief à l’arrêt de déclarer irrecevable sa demande en paiement de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral, alors « que l’auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre ; que ce droit attaché à sa personne est perpétuel, inaliénable et imprescriptible ; qu’en l’espèce M. [P] sollicitait la condamnation de la société Corep à lui verser des dommages et intérêts non seulement pour atteinte à ses droits patrimoniaux d’auteur mais également à son droit moral sur ses créations ; que la cour d’appel l’a déclaré irrecevable en ses demandes en contrefaçon des dessins et modèles dont il revendiquait la paternité en retenant qu’il résultait « des éléments du dossier, la preuve de la cession des droits d’exploitation litigieux à la société Marketset » et « que [Y] [P] n’est donc pas titulaire des droits d’auteur qu’il revendique » ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle. »