REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 1
ARRET DU 13 MARS 2024
(n° 039/2024, 14 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 22/02207 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CFEJI
Décision déférée à la Cour : Jugement du 21 Décembre 2021 -Tribunal de Commerce de PARIS RG n° 2018053341
APPELANTE
S.A.R.L. ALIX exerçant sous l’enseigne MG DECO
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PERIGUEUX sous le numéro 519 317 408
Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me François TEYTAUD de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125
Assistée de Me Diane REYNAUD substituant Me Stéphane ASENCIO, tous deux de la SELARL ABR Associés, avocats au barreau de BORDEAUX
INTIMEE
S.A.S.U. REFLECTIV
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de CRETEIL sous le numéro 490 648 409
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Nadia BOUZIDI-FABRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0515
Assistée de Me Florence ANDREANI, avocat au barreau de PARIS, toque : C0393
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre et Mme Déborah BOHÉE, conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport.
Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre,
Mme Françoise BARUTEL, conseillère,
Mme Déborah BOHÉE, conseillère.
Greffier, lors des débats : Mme Karine ABELKALON
ARRÊT :
Contradictoire
par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Exposé du litige
***
EXPOSE DU LITIGE
La société Reflectiv, créée le 18 octobre 1981, est une entreprise spécialisée dans la conception et la fabrication de films adhésifs de haute technologie s’appliquant sur le verre à des fins décoratives ou techniques pour en modifier certaines caractéristiques (films anti-chaleur, anti-UV, sécurité) revendiquant être le distributeur leader de films polyester en Europe en grandes surfaces, réalisant en France un chiffre d’affaires annuel moyen de l’ordre de 6 millions d’euros.
La société Alix, ayant pour nom commercial MG DECO, créée en 2010 par M. [N] [B], ancien salarié de la société Reflectiv de 2002 à 2009, a pour activité notamment la vente de produits verriers et de films adhésifs et sérigraphiés.
Estimant que la société Alix reproduisait sur son catalogue et sur son site internet de façon quasi servile les designs de plusieurs de ses films adhésifs, la société Reflectiv a fait procéder le 8 mars 2018 à un procès-verbal de constat sur internet, puis l’a fait assigner le 31 juillet 2018 devant le tribunal de commerce de Paris sur le fondement de la concurrence déloyale par risque de confusion et parasitisme.
Par jugement rendu le 21 décembre 2021 dont appel, le tribunal de commerce de Paris a:
– dit que la SARL ALIX s’est rendue coupable d’acte de concurrence déloyale par risque de confusion entre les produits et les entreprises, et par parasitisme,
– condamné la SARL ALIX à payer à la SAS REFLECTIV la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et parasitisme, et préjudice moral, débouté pour le surplus,
– fait interdiction à la SARL ALIX de vendre ou d’offrir à la vente ses films BRUME, VENlD35-5, MIELA, TRON, DISCO, MISTRAL et CHIMERE, PABLO, ARBRE ainsi que tout film adhésif qui reproduirait des motifs similaires dans un délai d’un moins à compter de la signification du jugement, sans astreinte,
– débouté la SAS REFLECTIV de sa demande que soit ordonnée la destruction en présence d’un huissier des stocks des films BRUME, VENlD35-5, MIELA, TRON, DISCO, MISTRAL et CHIMERE, PABLO, ARBRE, et de sa demande de publication du jugement à intervenir dans cinq journaux ou revues et sur la page d’accueil du site Internet d’ALIX,
– condamné la SARL ALIX à payer à la SAS REFLECTIV la somme de 7 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, débouté pour le surplus,
– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,
– condamné la SARL ALIX aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 139,14 € dont 22,76 € de TVA.
La société Alix a interjeté appel de ce jugement le 27 janvier 2022.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives numérotées 5, notifiées le 8 janvier 2024, la société Alix, appelante, demande à la cour de:
Vu l’article 1240 du Code civil
– infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de paris en date du 21 décembre 2021 en ce qu’il a :
dit que la SARL Alix s’est rendue coupable d’acte de concurrence déloyale par risque de confusion entre les produits et les entreprises, et par parasitisme,
condamné la SARL Alix à payer à la SAS Reflectiv la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et parasitisme, et préjudice moral,
fait interdiction à la SARL Alix de vendre ou d’offrir à la vente ses films BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, DISCO, MISTRAL ET CHIMERE, PABLO, ARBRE ainsi que tout film adhésif qui reproduirait des motifs similaires dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement, sans astreinte,
débouté la SARL Alix en sa demande de condamnation de la société Reflectiv à la somme de 10.000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral,
condamné la SARL Alix à payer à la SAS Reflectiv la somme de 7 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
condamné la SARL Alix aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 139,14 € dont 22,76 € de tva,
Et statuant à nouveau
– rejeter la société Reflectiv en toutes ses demandes dont incidentes et en tout état de cause celle relative au modèle savane de la SARL Alix;
– condamner la société Reflectiv à la somme de 10.000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral.
En conséquence
– condamner la société Reflectiv à restituer à la société Alix les sommes versées sur les suites du jugement critiqué,
– condamner la société Reflectiv aux dépens dont distraction au profit de maître François Teytaud dans les conditions de l’ article 699 du CPC et à la somme de 10000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions récapitulatives numérotées 4, notifiées le 24 janvier 2024, la société Reflectiv, intimée et appelante incidente, demande à la cour de:
Vu l’article 909 du Code de Procédure Civile
Vu les articles 1240 et 1241 du Code Civil
– déclarer la société ALIX SARL tant irrecevable que mal fondée en son appel
– recevoir la société REFLECTIV en son appel incident.
Y faisant droit :
– infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
limité la fixation de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et parasitisme et préjudice moral à la somme de 20 000 € à titre de dommages et intérêts,
débouté pour le surplus.
n’a pas fixé d’astreinte sur la mesure d’interdiction à la SARL Alix de vendre ou d’offrir à la vente ses films BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, DISCO, MISTRAL ET CHIMERE, PABLO, ARBRE ainsi que tout film adhésif qui reproduirait des motifs similaires dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement
débouté la SAS Reflectiv de sa demande que soit ordonnée la destruction en présence d’un huissier des stocks des films BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, DISCO, MISTRAL ET CHIMERE, PABLO, ARBRE
débouté la SAS Reflectiv de sa demande de publication du jugement à intervenir dans cinq journaux ou revues et sur la page d’accueil du site internet d’Alix ;
Et statuant à nouveau :
– prononcer la nullité du procès-verbal de constat en date du 13 octobre 2022 diligenté à l’étude maître [F] [G] commissaire de justice associé de la SAS Bocchio et associes demeurant [Adresse 1] et écarter des débats les pièces et documents obtenus à cette occasion,
– dire qu’en fabricant, faisant fabriquer, en important, en détenant, en offrant à la vente, et en commercialisant des films adhésifs sous les références BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, MISTRAL ET CHIMERE, PABLO, ARBRE ET DISCO, qui reproduisent les designs et motifs commercialisés par la société Reflectiv sous les références INT 115, INT 230, INT 290, INT 300, INT 468, INT 510, INT 520, INT 530, la société SARL Alix s’est rendue coupable, à son égard, d’actes de concurrence déloyale au sens des articles 1240 et 1241 du code civil.
– dire qu’en fabricant, faisant fabriquer, en important, en détenant, en offrant à la vente, et en commercialisant des films adhésifs sous les références BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, MISTRAL ET CHIMERE, PABLO, ARBRE ET DISCO, qui reproduisent les designs et motifs commercialisés par la société Reflectiv sous les références INT 115, INT 230, INT 290, INT 300, INT 468, INT 510, INT 520, INT 530, la société SARL Alix s’est rendue coupable, à son égard, d’actes de parasitisme au sens des articles 1240 et 1241 du code civil.
En conséquence,
– faire injonction à la société SARL Alix de communiquer de façon complète et exhaustive, tous les éléments comptables afférents à l’importation, la fabrication, la distribution et la commercialisation des films référencés BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, MISTRAL et CHIMERE, PABLO, ARBRE et DISCO, les chiffres d’affaires et les marges correspondants et tous les éléments utiles sur les fournisseurs de la société Alix, sous astreinte de 500 € par jour de retard et ce à compter du huitième jour suivant la signification de l’arrêt à intervenir et ce afin d’évaluer son entier préjudice causé sur le territoire français en boutique et sur internet, si cela n’a pas pu être obtenu en cours de procédure.
– condamner la société SARL Alix à payer à la société Reflectiv les sommes se décomposant comme suit :
de 209 280 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu’elle a subi du fait des actes de concurrence déloyale commis à son encontre ;
de 45 526 € à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices qu’elle a subi du fait des actes de parasitisme commis à son encontre.
– faire interdiction à la société SARL Alix de fabriquer, faire fabriquer, d’importer, d’offrir à la vente, commercialiser directement ou indirectement, les films référencés BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, MISTRAL et CHIMERE, PABLO, ARBRE et DISCO ainsi que tout adhésif qui reproduirait des motifs similaires aux films adhésifs diffusés par la société Reflectiv et ce sous astreinte de 1 000 € par infraction constatée à compter de la signification de l’arrêt à intervenir.
– ordonner la cessation immédiate de l’importation, la fabrication, de l’offre en vente et de la commercialisation des films référencés BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, MISTRAL et CHIMERE, PABLO, ARBRE et DISCO ainsi que ainsi que tout adhésif qui reproduirait des motifs similaires aux films adhésifs diffusés par la société Reflectiv et le retrait du marché auprès des distributeurs de l’ensemble des marchandises litigieuses et ce sous astreinte de 1 000 € par infraction constatée à compter de la signification de l’arrêt à intervenir.
– ordonner la destruction en présence d’un Huissier de Justice et aux frais de la société SARL Alix, des films référencés BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, MISTRAL et CHIMERE, PABLO, ARBRE et DISCO ainsi que ainsi que tout adhésif qui reproduirait des motifs similaires aux films adhésifs diffusés par la société Reflectiv, détenus par la société SARL Alix et ce sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ainsi que tous prospectus, catalogues, documents professionnels concernant les films référencés BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, MISTRAL et CHIMERE, PABLO, ARBRE et DISCO.
– ordonner au besoin à titre de complément de dommages et intérêts, la publication de l’arrêt à intervenir, par extrait ou dans son intégralité :
dans cinq journaux ou revues au choix de la société Reflectiv et aux frais de la société SARL Alix, à raison de 5 000 € H.T. par insertion,
ainsi que sur la page d’accueil du site internet www.mgdeco.fr et ce pendant une durée de 2 mois à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à s’exécuter et/ou par infraction constatée.
Pour le surplus :
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :
« dit que la SARL Alix s’est rendue coupable d’acte de concurrence déloyale par risque de confusion entre les produits et les entreprises et par parasitisme,
condamné la SARL Alix à payer à la SAS Reflectiv de dommages et intérêts pour concurrence déloyale et parasitisme et préjudice moral, déboute pour le surplus.
fait interdiction à la SARL Alix de vendre ou d’offrir à la vente ses films BRUME, VENID35-5, MIELA, TRON, DISCO, MISTRAL et CHIMERE, PABLO, ARBRE ainsi que tout film adhésif qui reproduirait des motifs similaires dans un délai d’un mois à compter de la signification du jugement
condamné la SARL Alix à payer à la SAS Reflectiv la somme de 7 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboute pour le surplus.
ordonné l’exécution provisoire de la présente décision.
condamné la SARL Alix aux dépens de l’instance, dont ceux recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 139,14 € dont 22,76 € de TVA. »
En tout état de cause :
– condamner la société SARL Alix à payer à la société Reflectiv la somme de 25 000 €, sauf à parfaire, en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
– condamner la société SARL Alix en tous les dépens de l’instance conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile, qui seront recouvrés par maître Nadia Bouzidi-Fabre, Avocat au barreau de Paris.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 janvier 2024.
Motivation
Dispositif
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Confirme le jugement déféré en ce qu’il a :
– dit que la SARL ALIX s’est rendue coupable d’actes de parasitisme,
– fait interdiction à la SARL ALIX de vendre ou d’offrir à la vente ses films MIELA, TRON, DISCO et PABLO ainsi que tout film adhésif qui reproduirait des motifs similaires dans un délai d’un moins à compter de la signification du jugement, sans astreinte,
– débouté la SAS REFLECTIV de sa demande que soit ordonnée la destruction en présence d’un huissier des stocks des films BRUME, VENlD35-5, MIELA, TRON, DISCO, MISTRAL et CHIMERE, PABLO, ARBRE, et de sa demande de publication du jugement à intervenir dans cinq journaux ou revues et sur la page d’accueil du site internet d’ALIX,
– condamné la SARL ALIX à payer à la SAS REFLECTIV la somme de 7 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, débouté pour le surplus,
– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision,
– condamné la SARL ALIX aux dépens de l’instance, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 139,14 € dont 22,76 € de TVA,
L’infirme pour le surplus,
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute la société Reflectiv de sa demande de nullité du procès-verbal de constat du 13 octobre 2022 ,
Déboute la société Reflectiv de ses demandes au titre de la concurrence déloyale,
Déboute la société Reflectiv de sa demande de communication de pièces,
Condamne la société Alix à verser à la société Reflectiv une somme de 8.000€ en réparation du préjudice subi pour les actes de concurrence parasitaire,
Déboute la société Alix de sa demande reconventionnelle en dommages et intérêts,
Condamne la société Alix aux dépens d’appel, qui pourront être recouvrés par Maître Nadia BOUZIDI-FABRE, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
Dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE