Décision de justice sur la Confidentialité

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 20/03094 – N° Portalis DBVH-V-B7E-H3ST

YRD/JL

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE D’ORANGE SECT.ACTIVITÉS DIV.

05 novembre 2020 RG :F19/00052

SAS SEDNA FRANCE

C/

[C]

Grosse délivrée le 21 février 2023 à :

– Me Georges POMIES RICHAUD

– Me Emile-henri BISCARRAT

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

5ème chambre sociale PH

ARRÊT DU 21 FEVRIER 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ORANGE SECT.ACTIVITÉS DIV. en date du 05 Novembre 2020, N°F19/00052

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries, en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président,

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère,

Madame Leïla REMILI, Conseillère.

GREFFIER :

Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier à la 5ème chambre sociale, lors des débats et du prononcé de la décision.

DÉBATS :

A l’audience publique du 18 Janvier 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 21 Février 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

SAS SEDNA FRANCE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es-qualité au siège social sis

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représentée par Me Georges POMIES RICHAUD,, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Amal BOUABDELLI-VASSEUR,, avocat au barreau de GRASSE

INTIMÉE :

Madame [W] [C]

née le 20 Juillet 1959 à [Localité 4]

[Adresse 3]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Représentée par Me Emile-henri BISCARRAT de la SELARL EMILE-HENRI BISCARRAT, avocat au barreau de CARPENTRAS

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 21 Février 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS

Mme [W] [C] a été engagée par la société Sedna France initialement selon contrat de travail à durée déterminée le 11 avril 1989, puis à compter du 11 juillet 1989 suivant contrat de travail à durée déterminée à temps plein, en qualité d’agent administratif.

Après avoir été convoquée à un entretien préalable le 13 décembre 2018, Mme [C] était licenciée pour faute grave par lettre du 18 janvier 2019 aux motifs suivants :

« Le 10 décembre 2018, vous avez envoyé à une famille, qui cherchait une place en maison de retraite pour leur père, notre fichier prospect ainsi que la copie d’une carte mutuelle d’une de nos résidentes, par courrier.

Dans ce fichier prospect, il apparait 106 contacts avec des noms, des prénoms, des adresses, des numéros de téléphone ainsi que nos avis favorables ou défavorables sur les dossiers administratifs et médicaux pour les futures entrées dans notre résidence.

La création et le traitement des données personnelles sont soumis à des obligations destinées à protéger la vie privée et les libertés individuelles. De ce fait, l’envoi de ce courriel constitue une entrave à la protection des données personnelles ainsi qu’au secret professionnel, les données contenues au sein de ce fichier étant particulièrement sensibles.

Cet acte est particulièrement grave au regard du manquement vis-à-vis des personnes dont les données personnelles et confidentielles ont été transmises, et des répercussions pouvant être causées au sein de notre résidence, et plus généralement au sein de SEDNA.

Après un tel manquement, le rapport de confiance nécessaire à notre collaboration est rompu. L’ensemble de ces faits rend manifestement impossible la poursuite de notre collaboration. ».

Contestant la légitimité de la mesure prise à son encontre, le 26 mars 2019, Mme [C] saisissait le conseil de prud’hommes d’Orange en paiement d’indemnités de rupture et de diverses sommes lequel, par jugement contradictoire du 05 novembre 2020, a :

– condamné la SAS Sedna France, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à payer à Mme [W] [C], les sommes suivantes :

* 4 400 euros au titre du préavis et 440 euros au titre des congés payés afférents ;

* 19 983 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;

* 3 000 euros au titre du licenciement vexatoire ;

* 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– ordonné à la SAS Sedna France de délivrer à Mme [W] [C], les documents sociaux rectifiés et un bulletin de paie récapitulatif dans les meilleurs délais ;

– débouté Mme [W] [C] du surplus de ses demandes ;

– condamné la SAS Sedna France aux entiers dépens de l’instance.

Par acte du 30 novembre 2020, la société Sedna France a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 15 juin 2021, la SAS Sedna France demande à la cour de :

Sur son appel :

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Orange en ce qu’il a débouté Mme [C] de sa demande au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse et de ses conséquences indemnitaires,

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Orange en ce qu’il l’a condamnée à verser à Mme [C] les sommes suivantes :

* 4 400 euros au titre du préavis,

* 440 euros au titre des congés payés afférents

* 19 983 euros au titre de l’indemnité de licenciement

* 3 000 euros au titre du licenciement vexatoire,

* 1 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

– fixer le salaire mensuel brut de Mme [C] à 1830,075 euros,

– dire et juger qu’elle justifie de la faute grave du licenciement de Mme [C]

En conséquence,

– dire et juger que le licenciement pour faute grave de Mme [C] est justifié et régulier

Sur l’appel incident de Mme [C]

– dire et juger que Mme [C] ne produit pas d’éléments permettant de supposer l’existence d’une discrimination,

– dire et juger qu’elle démontre avoir toujours été attentive aux souhaits de Mme [C],

– débouter Mme [C] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions au titre de sa demande de nullité du licenciement,

En tout état de cause,

– débouter Mme [C] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

– condamner Mme [C] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner Mme [C] à payer les entiers dépens.

Elle soutient que :

– la communication à un tiers de données confidentielles constitue une faute grave,

– la société s’est toujours préoccupée du sort de la salariée,

– aucune discrimination ne peut être invoquée,

– les prétentions de l’intimée sont démesurées.

En l’état de ses dernières écritures en date du 04 janvier 2022, contenant appel incident, Mme [W] [C] demande à la cour de :

– confirmer le jugement du 5 novembre 2020 du conseil de prud’hommes d’Orange en ce qu’il :

* condamne la SAS Sedna France, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à lui payer, les sommes suivantes :

° 19 983 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;

° 1 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

* ordonne à la SAS Sedna France de lui délivrer, les documents sociaux rectifiés et un bulletin de paie récapitulatif dans les meilleurs délais ;

* condamne SAS Sedna France aux entiers dépens de l’instance

– réformer le jugement du 5 novembre 2020 du conseil de prud’hommes d’Orange sur le montant qui lui a été alloué

– condamner la SAS Sedna France à lui verser la somme de 6 600 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et 660 euros bruts d’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

– infirmer le jugement du 5 novembre 2020 du conseil de prud’hommes d’Orange sur le surplus et statuant à nouveau sur les chefs de dispositions infirmés et y ajoutant ;

A titre principal,

– prononcer la nullité du licenciement prononcé à son encontre;

En conséquence,

– condamner la SAS Sedna France au paiement de dommages et intérêts pour nullité du licenciement : 52 800 euros

A titre subsidiaire,

– prononcer l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement prononcé à son encontre ;

En conséquence,

– condamner la SA Sedna France au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse : 44 000 euros

En tout état de cause,

– condamner la SAS Sedna France au paiement de dommages et intérêts au titre des circonstances vexatoires entourant le licenciement : 6000 euros

– ordonner la modification du reçu pour solde de tout compte et du bulletin de paie du mois de janvier 2019, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du jugement à intervenir

– condamner la SAS Sedna France au paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens de l’instance,

– ordonner l’exécution provisoire.

Elle fait valoir que :

– le licenciement prononcé en raison de son état de santé dû à une surcharge de travail dont elle s’était plainte est discriminatoire et doit être annulé,

– il n’est pas établi qu’elle soit à l’origine de la diffusion litigieuse,

– les conséquences de son licenciement ont été particulièrement difficiles à vivre.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer à leurs dernières écritures.

Par ordonnance en date du 13 octobre 2022, le conseiller de la mise en état a prononcé la clôture de la procédure à effet au 03 janvier 2023. L’affaire a été fixée à l’audience du 18 janvier 2023.

MOTIFS

Sur la nullité du licenciement

En application de l’article L.1132-1 du code du travail, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié, ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n°2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations (‘) en raison, notamment, de son âge ou de son état de santé, de sa perte d’autonomie ou de son handicap.

En application de l’article L1132-4 du code du travail, toute disposition ou tout acte pris à l’égard d’un salarié en méconnaissance des dispositions du présent chapitre est nul.

Le licenciement prononcé en raison de l’état de santé d’un salarié est nul.

Mme [C] expose que son état de santé n’a eu de cesse de se dégrader (épine calcanéenne et fibromyalgie avec un état de fatigue intense apparue en 2011) ce qui l’a conduite à bénéficier de plusieurs arrêts de travail successifs notamment, au cours de l’année 2018, qu’elle devait, régulièrement, effectuer des cures thermales (durant ses congés), des séances de kinésithérapie et de médecine douce, que ces pathologies ont engendré un état de fatigue intense qui a considérablement été renforcé par le rythme de travail soutenu exigé dans le cadre de ses fonctions, son employeur lui imposant de travailler le week-end et d’occuper des missions polyvalentes d’accueil, de secrétariat classique, de facturation et de commercialisation.

Elle ajoute que la qualité de travailleur handicapé lui a été reconnue par la maison départementale des personnes handicapées pour la période du 28/08/2018 au 27/08/2023.

Mme [C] relate qu’à partir du 10 septembre 2018, elle a fait l’objet d’un nouvel arrêt de travail pour « burn out » renouvelé jusqu’au 11 novembre 2018, qu’au cours de cette période, elle envisageait une reconversion professionnelle et, sollicitait une formation « CAP Esthétique-spécialisation prothésie ongulaire » dans le cadre du FONGECIF, qu’elle a déposé un dossier de demande d’invalidité.

Elle reproche à son employeur de ne pas avoir tenu compte de ses doléances et de lui avoir imposé une charge de travail importante.

Elle considère que la concomitance entre le « burn-out » et la procédure disciplinaire ne laisse nul doute quant aux intentions de l’employeur et que la société SEDNA France se refusait de maintenir dans ses effectifs une salariée affaiblie par sa fibromyalgie alors même qu’il pouvait être envisagé un aménagement de son poste de travail en sorte que son licenciement repose entièrement sur son état de santé et donc un motif discriminatoire entraînant la nullité de la mesure.

Or, il n’est à aucun moment fait allusion à l’état de santé de la salariée dans le courrier de licenciement visant exclusivement une faute grave et rien ne permet d’établir une corrélation entre cet état de santé et la mesure de licenciement. En effet, la seule simultanéité d’un état de santé déficient et d’une mesure disciplinaire ne suffit pas à démontrer que cette dernière est intervenue en raison de cet état de santé.

Au surplus, Mme [C] s’est essentiellement plainte de la polyvalence des tâches et non de leur importance.

La société appelante relève que Mme [C] a passé une visite de reprise le 15 novembre 2018, au cours de laquelle le médecin du travail n’a émis aucune préconisation, ni aucune réserve quant à la reprise de son poste (cf pièce n°16 appelante). La société appelante rappelle également que Mme [C] a bénéficié d’un entretien relatif à son statut de travailleur handicapé dès novembre 2018 et que la salariée avait indiqué vouloir travailler jusqu’en juillet 2019 sur un poste à temps plein lors de son entretien d’évaluation du 19 novembre 2018 (cf entretien individuel d’évaluation accompagné de l’annexe travailleur handicapé pièce n°8 employeur).

Il n’y a pas lieu de prononcer la nullité du licenciement de Mme [C] sur le fondement des textes susvisés.

Sur le caractère disciplinaire du licenciement

Mme [C] soutient qu’au cours de l’entretien préalable, Mme [Z], directrice régionale, a expressément affirmé que les erreurs commises par elle sont des fautes d’inattention et révèlent un manque de concentration de cette dernière, qu’il lui serait ainsi reproché une insuffisance professionnelle exclusive de tout caractère disciplinaire.

Or, tels ne sont pas les motifs indiqués dans la lettre de licenciement qui seule délimite les termes du litige qui lui reprochait d’avoir transmis à une famille qui demandait une place dans l’établissement un dossier Excel contenant des données personnelles relatives aux résidents ainsi

que la carte de mutuelle d’une résidente.

Mme [C] prétexte que la communication des bilans individuels permet de se rendre compte qu’elle rencontrait des difficultés dans le cadre de son travail notamment du fait de la polyvalence qui était sollicitée de sa personne, ce dont elle avait fait part à son employeur, qu’elle s’est plainte à plusieurs reprises de cette surcharge de travail, le médecin du travail exigeant lui-même qu’elle sollicite un entretien avec la directrice pour revoir sa fiche de poste, que son surinvestissement a engendré une grande fatigue justifiant la prescription d’un traitement médical en 2017, que le 15 novembre 2018 elle indiquait lors de son bilan individuel qu’elle souhaitait bénéficier d’une formation sur la gestion du stress ainsi que des clarifications quant aux tâches occupées par chacun des salariés (« mise à jour des fiches de poste en fonction de la réalité du travail »).

Or ces éléments sont sans rapport avec la faute reprochée à la salariée qui se plaignait essentiellement d’une trop grande polyvalence. Au demeurant l’employeur, par courrier relatif au changement de fiche de poste du 1er février 2018, lui retirait de ses missions la facturation résident qui lui posait des difficultés (pièce n°7 de l’employeur).

De même Mme [C] fait état d’une modification de son rythme de travail à compter de 2013 ce qui est sans lien avec les faits reprochés.

Enfin, quand bien même une réorganisation des services serait intervenue postérieurement à son licenciement, rien ne permet d’affirmer que ce congédiement serait motivé par un motif économique qui n’est pas énoncé dans la lettre de licenciement. Au demeurant la société appelante a produit les registres uniques du personnel sur les années 2018, 2019 et 2020 confirmant qu’une secrétaire administrative a été embauchée à compter du 2 janvier 2020, sur le poste de Mme [C].

Il en résulte que la mesure de licenciement repose bien sur un motif d’ordre disciplinaire.

Sur le bien fondé du licenciement

La faute grave résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise et la poursuite du contrat. Il incombe à l’employeur qui l’invoque d’en apporter la preuve.

Mme [C] ne conteste pas la réalité de l’erreur commise dans l’envoi de documents à caractère confidentiel mais précise que lorsqu’elle s’est aperçue de l’erreur, elle s’est empressée de la corriger en demandant au destinataire de supprimer le fichier.

Elle considère que l’employeur ne démontre pas qu’elle serait à l’origine de cette erreur.

Or, il ressort du compte rendu d’entretien préalable que Mme [C] n’a pas contesté avoir envoyé à la famille en question un dossier administratif ainsi que des documents de présentation de la structure indiquant « avoir envoyé à la famille un dossier administratif plus les documents de présentation de la structure, et relève qu’elle à l’habitude de faire cette démarche, cependant elle ne peut expliquer ni justifier comment cette erreur a eu lieu concernant ce cas».

Mme [C] indique qu’elle n’a jamais reconnu avoir envoyé le fichier confidentiel dont fait état l’employeur mais a déclaré qu’elle ne comprenait pas comment cette erreur avait pu survenir se dégageant de toute responsabilité.

Elle précise que son poste informatique était également utilisé par d’autres collègues de travail, que la directrice de l’EHPAD et la secrétaire du service Ressources Humaines lui avaient demandé ses codes d’accès quelques jours avant son licenciement.

Or, il n’est pas discutable que Mme [C] est bien à l’origine de l’envoi d’un dossier à la famille qui a contacté l’EHPAD et c’est dans le cadre de cet envoi qu’a été adressé à la famille en question, par un même courriel un fichier Excel comprenant : les noms et prénoms des résidents et futurs résidents, et pour certains leur âge, date de naissance adresse personnelle, leur adresse email, les noms et prénoms de membres de leur famille, leurs numéros de téléphone et leur adresse personnelle, les liens qui les unissent aux résidents ou futurs résidents ainsi que la copie de la carte mutuelle comportant le nom, le prénom, la date de naissance et le numéro de sécurité sociale de la personne.

Cet envoi, effectué depuis l’adresse email de la salariée, ne pouvait qu’émaner de Mme [C] qui par courriel du 10 décembre 2018 soit immédiatement après l’envoi de message litigieux écrivait à la famille en question « suite à mon message téléphonique, veuillez détruire le message parti par erreur», ce message était parti de la boîte structurelle « accueil» de l’établissement portant comme nom d’expéditeur [W] [C]. Celle-ci prétend sans nullement l’établir que la directrice de l’EHPAD et la secrétaire du service Ressources Humaines lui avaient demandé ses codes d’accès quelques jours avant son licenciement.

L’envoi à un tiers de fichiers comportant des données à caractère éminemment personnel constitue bien une faute.

Pour caractériser la faute grave, la société appelante rappelle la grande ancienneté de la salariée qui ne permet pas de relativiser la gravité de la faute commise et la circonstance que dès le 1er février 2018, elle lui avait signalé avoir constaté un désordre total dans les différents locaux de stockage des archives ainsi que dans les meubles de rangement des dossiers administratifs des résidents, outre des erreurs ou des oublis dans les tâches, qui contribuent encore plus à la désorganisation du service.

Pour autant, aucune sanction n’a été prise à l’encontre de Mme [C] qui malgré une ancienneté de près de 30 ans n’avait aucun passé disciplinaire.

En outre, rien ne laissait présager la réitération d’une telle erreur de telle sorte que l’employeur n’a pas estimé nécessaire de placer la salariée sous le coup d’une mesure de mise à pied conservatoire pendant la procédure de licenciement.

Il en découle que rien ne faisait obstacle au maintien de la salariée pendant la période de préavis en sorte que la faute grave doit être en l’espèce écartée.

Mme [C] est donc en droit de prétendre au paiement :

– d’une indemnité compensatrice de préavis doublée et au plus égale à trois mois de salaire en raison de son statut de travailleur handicapé ( L.5213-9 du code du travail) qui, sur la base d’un salaire moyen de 1 830,075 euros s’établit à 5.490,25 euros outre 549,02 euros au titre des congés payés afférents ;

– d’une indemnité de licenciement qui, sur la base d’un salaire moyen de 1 830,075 euros s’établit à 16 623,43 euros bruts ( ¿ x 1830,075 x 10 = 4 575,4375 ; 1/3 x 1.830,075×19 = 11 590,475 ; 1/3×1830,075×9/12 = 457,52).

Mme [C] ne justifie pas de circonstances particulièrement vexatoires dans lesquelles se serait déroulé son licenciement se bornant à faire état de son ancienneté, de la considération dont elle jouissait auprès du personnel et des résidents et des conséquences résultant de la rupture de son contrat de travail.

C’est donc à tort que les premiers juges lui ont alloué des dommages et intérêts à ce titre, le jugement encourt la réformation de ce chef.

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de condamner la SAS Sedna France à payer à Mme [C] la somme de 1.500,00 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Par arrêt contradictoire, rendu publiquement en dernier ressort

– Réforme le jugement déféré en ce qu’il a condamné la SAS Sedna France, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à payer à Mme [W] [C], les sommes suivantes :

* 4 400 euros au titre du préavis et 440 euros au titre des congés payés afférents ;

* 19 983 euros au titre de l’indemnité de licenciement ;

* 3 000 euros au titre du licenciement vexatoire ;

– Statuant à nouveau de ces chefs réformés,

– Condamne la SAS Sedna France, prise en la personne de son représentant légal en exercice, à payer à Mme [W] [C], les sommes suivantes:

– 5.490,25 euros au titre du préavis et 549,02 euros au titre des congés payés afférents ;

– 16 623,43 euros bruts au titre de l’indemnité de licenciement;

– Déboute Mme [W] [C] de sa demande en paiement de dommages et intérêts au titre du licenciement vexatoire ;

– Confirme pour le surplus le jugement, y ajoutant,

– Condamne SAS Sedna France à payer à Mme [C] la somme de 1.500,00 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamne la SAS Sedna France aux dépens d’appel.

Arrêt signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, et par Monsieur Julian LAUNAY-BESTOSO, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 

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