Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 3 mars 2010, 09-87.924, Publié au bulletin

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Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 3 mars 2010, 09-87.924, Publié au bulletin

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

– X… Momir,

contre l’arrêt de la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE, en date du 12 novembre 2009, qui, dans l’information suivie contre lui des chefs d’enlèvement ou séquestration inférieure à sept jours avec libération volontaire, enlèvement ou séquestration inférieure à sept jours sans libération volontaire, violences commises en réunion suivies d’une incapacité n’excédant pas huit jours, menace de mort avec arme, dégradation ou détérioration de biens appartenant à autrui et vols, a rejeté sa requête en annulation d’actes de la procédure ;

Vu l’ordonnance du président de la chambre criminelle, en date de ce jour, prescrivant l’examen immédiat du pourvoi ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 de la Convention européenne des droits de l’homme, 80-1, 116-1, 174-1, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

« en ce que la chambre de l’instruction a rejeté la requête aux fins d’annulation de sa mise en examen présentée par Momir X… et déclaré irrecevable sa demande de mise en liberté subséquente ;

« aux motifs que, aux termes du procès-verbal de première comparution, le juge d’instruction a informé Momir X… des faits pour lesquels sa mise en examen était envisagée et, en présence de son avocat commis d’office, l’a avisé qu’il avait le choix, soit de se taire, soit de faire des déclarations, soit d’être interrogé, mais qu’il ne pouvait être interrogé immédiatement qu’avec son accord donné en présence de son avocat et que s’il désirait faire des déclarations, celles-ci seraient reçues immédiatement ; que Momir X… a exprimé le souhait de faire des déclarations ; qu’à l’issue de celles-ci, son conseil, entendu en ses observations, a fait observer que « la mise en examen va faire la lumière sur le dossier mais que la détention ne se justifiait pas » ; que le juge d’instruction a notifié à Momir X… qu’il était mis en examen pour les faits qui lui sont notifiés ; que l’article 116-1 du code de procédure pénale dispose qu’en matière criminelle, les interrogatoires des personnes mises en examen, y compris l’interrogatoire de première comparution et les confrontations, font l’objet d’un enregistrement audiovisuel ; que l’article 116 du code précité dispose que le juge d’instruction notifie le cas échéant à la personne qu’elle est mise en examen après avoir recueilli ses déclarations ou procédé à son interrogatoire ; qu’aux termes de l’article 171 du code de procédure pénale, il y a nullité lorsque la méconnaissance d’une formalité substantielle a porté atteinte aux intérêts de la personne qu’elle concerne ; qu’en l’espèce, s’agissant de déclarations spontanées, à l’exclusion de tout interrogatoire, faites par Momir X… en présence de son avocat qui n’a émis aucune protestation mais a tout au contraire acquiescé à la mise en examen, l’absence d’enregistrement audiovisuel prévu par le texte susvisé n’a pas porté atteinte à ses droits ; que, dès lors, aucune nullité n’est encourue ;

« alors que l’enregistrement audiovisuel de l’interrogatoire de première comparution en matière criminelle est une mesure prescrite à peine de nullité, édictée dans l’intérêt de toutes les parties et destinée à leur permettre de contester ultérieurement la portée des déclarations recueillies par le juge d’instruction ; que son absence fait nécessairement grief, dès lors qu’il empêche les parties de faire valoir leur droit à sa consultation et à contester la portée des déclarations émises devant le magistrat instructeur ; qu’en refusant d’annuler l’interrogatoire de première comparution de Momir X… et ordonner, en conséquence, sa remise en liberté, aux motifs erronés qu’il n’a pas été porté atteinte à ses droits, sans faire mention d’une impossibilité technique ni retenir une exception légale à la réalisation de cette mesure, la chambre de l’instruction a méconnu le sens et la portée de l’article 116-1 du code de procédure pénale » ;

Vu l’article 116-1 du code de procédure pénale ;

Attendu qu’il résulte de ce texte qu’en matière criminelle, les interrogatoires des personnes mises en examen réalisés dans le cabinet du juge d’instruction, y compris l’interrogatoire de première comparution et les confrontations, font l’objet d’un enregistrement audiovisuel ; que l’omission de cette formalité, hors les cas où ce texte l’autorise, porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, lors de la première comparution de Momir X…, le juge d’instruction lui a fait connaître qu’il envisageait de le mettre en examen des chefs d’enlèvement ou séquestration inférieure à sept jours avec libération volontaire, enlèvement ou séquestration inférieure à sept jours sans libération volontaire, violences commises en réunion suivies d’une incapacité n’excédant pas huit jours, menace de mort avec arme, dégradation ou détérioration de biens appartenant à autrui et vols ; qu’il l’a ensuite averti qu’il avait le choix, soit de se taire, soit de faire des déclarations, soit d’être interrogé ; que l’intéressé a choisi de faire de simples déclarations ; que sa première comparution n’a pas fait l’objet d’un enregistrement audiovisuel ;

Attendu que, pour écarter le moyen de nullité pris du défaut d’enregistrement audiovisuel de la première comparution de Momir X…, la chambre de l’instruction retient que cette irrégularité n’a pas porté atteinte à ses intérêts dès lors que, d’une part, celui-ci a fait le choix de faire de simples déclarations et n’a pas été interrogé, et, que, d’autre part, ses déclarations spontanées ont été faites en présence de son avocat qui n’a émis aucune protestation sur la mise en examen mais qui a, au contraire, acquiescé à celle-ci ;

Mais attendu qu’en se déterminant ainsi, alors que le défaut d’enregistrement audiovisuel, en matière criminelle, de la première comparution d’une personne mise en examen, hors les cas où l’article 116-1 du code de procédure pénale l’autorise, porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée, qu’elle ait fait de simples déclarations ou qu’elle ait accepté d’être interrogée, la chambre de l’instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;

D’où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt susvisé de la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, en date du 12 novembre 2009, et pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Aix-En-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l’arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Louvel président, Mme Lazerges conseiller rapporteur, Mmes Chanet, Ponroy, MM. Arnould, Corneloup, Pometan, Foulquié, Castel conseillers de la chambre, Mme Leprieur conseiller référendaire ;

Avocat général : M. Charpenel ;

Greffier de chambre : Mme Villar ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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