Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
→ RésuméLa société Cooperl Arc Atlantique a engagé une procédure arbitrale contre le GAEC Morlier La Lande suite à un défaut de livraison d’orge en 2022. Malgré l’absence de réponse du GAEC, l’arbitre a déclaré son incompétence, estimant que Cooperl n’avait pas prouvé le consentement du GAEC à l’arbitrage. En mai 2024, la cour a rejeté le recours de Cooperl, validant la décision arbitrale et condamnant Cooperl à verser 5000€ au GAEC. La cour a souligné que l’arbitre avait respecté le principe de la contradiction et que la question de sa compétence avait été correctement examinée.
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La société Cooperl Arc Atlantique, coopérative agricole en Bretagne, a conclu un contrat d’achat avec le GAEC Morlier La Lande pour une récolte d’orge en 2021. En septembre 2022, Cooperl a constaté un défaut de livraison d’une seconde commande, mise en demeure le GAEC de livrer sous 48 heures, et a facturé des pénalités de 2400€. En février 2023, Cooperl a saisi la chambre arbitrale internationale pour résoudre le litige. Le GAEC n’a pas participé à l’arbitrage. Le 6 juillet 2023, l’arbitre a déclaré son incompétence, estimant que Cooperl n’avait pas prouvé le consentement du GAEC à l’arbitrage. Cooperl a alors demandé l’annulation de cette sentence. Le GAEC a contesté cette demande et a demandé des condamnations pécuniaires. Le 14 mai 2024, la cour a rejeté le recours de Cooperl, validé la sentence arbitrale, et condamné Cooperl à verser 5000€ au GAEC.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/14113
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
POLE 5 CHAMBRE 16
ARRET DU 08 OCTOBRE 2024
(n° 82/2024 , 8 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/14113 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CIEKK
Décision déférée à la Cour : sentence arbitrale rendue le 6 juillet 2023 à [Localité 3] (AFF P.A.R N°3372), sous l’égide de la Chambre Arbitrale Internationale de [Localité 3] par Mme [U] [R], arbitre unique.
DEMANDERESSE AU RECOURS :
Société COOPERL ARC ATLANTIQUE
société coopérative agricole à capital variable,
immatriculée au RCS de SAINT BRIEUC sous le n°383 986 874,
ayant son siège social : [Adresse 5],
prise en la personne de ses représentants légaux,
Ayant pour avocat postulant : Me Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocat au barreau de PARIS, toque : L34
Ayant pour avocat plaidant : Me Franck BARBIER, avocat plaidant du barreau de RENNES
DEFENDEUR AU RECOURS :
GAEC MORLIER LA LANDE
Groupement Agricole d’Exploitation en Commun à capital variable,
immatriculé au RCS de RENNES sous le n° D 423 842 970,
ayant son siège social : [Adresse 2],
prise en la personne de ses représentants légaux,
Ayant pour avocat postulant : Me Na-ima OUGOUAG, de la SCP BENICHOU OUGOUAG, avocat au barreau de [Localité 3], toque : P0203
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 20 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère, faisant fonction de présidente lors des débats et Mme Marie LAMBLING, conseillère, chargées du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Hélène FILLIOLprésidente de chambre
Mme Marie-Catherine GAFFINEL, conseillère
Madame Marie LAMBLING, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Mélanie PATE
ARRET :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Mme Marie LAMBLING, conseillère ayant participé au délibéré conformément aux dispositions de l’article 452 du code de procédure civile et par Mme Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSE DU LITIGE
La société Cooperl Arc Atlantique est une société coopérative agricole dont le siège se situe en Bretagne, et qui regroupe des éleveurs de porcs de l’ouest de la France.
Le Groupement agricole d’exploitation (GAEC) Morlier La Lande vend ses récoltes de céréales en vue de la fabrication d’aliments pour bétail, destinés aux élevages des adhérents de la coopérative ou à la vente à des tiers.
Par un courriel du 19 juillet 2021, la société Cooperl Arc Atlantique a adressé au GAEC Morlier La Lande une confirmation de contrat d’achat pour sa récolte d’orge de l’année 2021.
Le 12 septembre 2022, la société Cooperl Arc Atlantique a adressé une lettre recommandée avec avis de réception au GAEC Morlier La Lande par laquelle elle a constaté le défaut de livraison d’une seconde commande qu’elle indique avoir contractée par courriel en date du 28 octobre 2021, l’a mis en demeure de lui livrer les marchandises sous 48 h à compter de la délivrance de la lettre, et l’a informé qu’à défaut, elle facturerait les pénalités, évaluées à la somme de 2400€.
Le 18 octobre 2022, elle lui a adressé une seconde lettre recommandée par laquelle elle lui a transmis une facture de pénalité d’un montant de 2400€.
Le 15 février 2023, la société Cooperl Arc Atlantique a saisi la chambre arbitrale internationale de [Localité 3] (CIP) du litige sur le fondement de l’article 36 des conditions RUFRA applicables au contrat allégué conclu le 21 octobre 2021 avec le GAEC Morlier La Lande qui dispose que « Toute contestation survenant entre acheteur, vendeur et/ou intermédiaire de commerce à l’occasion d’un contrat se référant aux présentes règles sera résolue par voie d’arbitrage par la Chambre Arbitrale Internationale de [Localité 3] (..), selon la procédure arbitrale dotée d’un double degré de juridiction conformément au règlement d’arbitrage de celle-ci que les parties déclarent expressément connaître et accepter, sauf accord écrit des parties pour utiliser la procédure à un seul degré de juridiction (‘). »
Le GAEC Morlier La Lande n’a pas participé à l’arbitrage, n’étant ni présent, ni représenté.
Par sentence du 6 juillet 2023, Mme [U] [R], arbitre unique, statuant en dernier ressort, s’est dit incompétent pour statuer sur le litige, et a condamné la société Cooperl Arc Atlantique au frais de l’arbitrage.
Pour statuer ainsi, l’arbitre a notamment retenu, après s’être assuré de l’existence d’une clause d’arbitrage dans le contrat allégué, et tranché la difficulté liée à l’existence de deux clauses compromissoires distinctes prévues respectivement par les conditions générales et les clauses particulières du contrat, que la société Cooperl Arc Atlantique n’établissait pas le consentement du GAEC Morlier La Lande à contracter et à voir les litiges résultant du contrat conclu résolus par l’arbitrage.
Le 19 juillet 2023, La société Cooperl Arc Atlantique a saisi cette cour d’un recours en annulation de la sentence.
Par conclusions signifiées le 12 février 2024, elle demande à la cour de :
– Prononcer l’annulation de la sentence déférée rendue le 6 juillet 2023 par Maître [U] [R] en qualité d’arbitre unique dans le litige opposant la société Cooperl Arc Atlantique et le GAEC Morlier La Lande.
– Débouter le GAEC Morlier La Lande de toutes ses demandes, fins et conclusions.
– Renvoyer les parties devant la Chambre arbitrale internationale de [Localité 3] aux fins d’organisation d’une nouvelle procédure d’arbitrage du litige qui les oppose.
– Condamner le GAEC Morlier La Lande à payer à la société Cooperl Arc Atlantique une somme de 5 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– Condamner le GAEC Morlier La Lande aux dépens.
Par conclusions signifiées le 11 janvier 2024, le GAEC Morlier La Lande demande à la cour de :
– Recevoir le GAEC Morlier La Lande en ses conclusions, et l’y déclarer bien fondé.
– Juger que le tribunal arbitral n’avait pas l’obligation de réouvrir les débats, son incompétence n’ayant pas été soulevée d’office mais suite à un débat instauré par la demanderesse elle-même.
– Juger en conséquence que la sentence arbitrale a respecté le principe du contradictoire.
– Rejeter la demande d’annulation de la sentence prononcée le 6 juillet 2023 par Mme [U] [R] en qualité d’arbitre unique.
– Rejeter toutes les demandes de condamnations pécuniaires présentées par la société Cooperl Arc Atlantique.
– La condamner au paiement d’une indemnité de 5.000 € en application de l’article 700 du code de procédure Ccvile, ainsi qu’aux entiers dépens de la présente procédure, dont distraction est requise au profit de la SCP Benichou-Ougouag Avocats aux offres de droit dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 14 mai 2024.
Sur le premier moyen d’annulation tiré de la violation du principe de la contradiction (article 1492 4° du code de procédure civile)
Moyens des parties
La société Cooperl Arc Atlantique reproche à l’arbitre d’avoir soulevé d’office son incompétence. Elle indique qu’alors que l’audience s’est tenue en l’absence des parties, l’arbitre ne l’a pas invitée à présenter des observations sur la question de sa compétence juridictionnelle, ni n’a sollicité la communication d’éléments complémentaires relatifs à la formation et l’exécution des relations contractuelles entre les parties. Elle ajoute qu’il a estimé d’office, arguant d’une contradiction entre les conditions particulières du contrat renvoyant au règlement de la Chambre arbitrale internationale de [Localité 3], sans autre précision, et les conditions générales du contrat renvoyant à l’application des règles RUFRA prévoyant une procédure avec double degré de juridiction, qu’il fallait faire application de la procédure d’arbitrage à un seul degré de juridiction. Elle précise que le GAEC Morlier La Lande, ni présent, ni représenté, n’a exprimé aucune contestation sur la compétence de l’arbitre et soutient que le rappel par ses soins, dans une note en bas de page de son mémoire en demande, des dispositions de l’article 36 du code RUFRA désignant la chambre arbitrale internationale de [Localité 3] pour régler par voie d’arbitrage les contestations, ne saurait permettre de considérer qu’elle a elle-même levé une discussion sur la compétence arbitrale.
En réponse, le GAEC Morlier La Lande fait valoir que l’arbitre a été appelé par la société Cooperl Arc Atlantique à examiner sa compétence, compte tenu de l’argumentation développée par celle-ci, consistant à invoquer l’application des dispositions de l’article 36 du code RUFRA, et leur acceptation. Elle soutient que l’arbitre n’était en conséquence pas tenu de rouvrir les débats ni d’interroger la société Cooperl Arc Atlantique avant de rendre sa décision.
Réponse de de la cour
Il résulte de l’article 1492 4° du code de procédure civile que le recours en annulation est ouvert si le principe de la contradiction n’a pas été respecté par le tribunal arbitral.
Aux termes de l’article 1464 du même code, sont toujours applicables, en matière d’arbitrage interne, les principes directeurs du procès aux termes desquels figure notamment le principe énoncé à l’article 16 du code de procédure civile.
L’article 16 du code civil dispose que « Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement. Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ».
Ainsi, le principe de la contradiction exige que les parties aient pu faire connaître leurs prétentions de fait et de droit, et discuter celles de leur adversaire, de telle sorte que rien de ce qui a servi à fonder la décision des arbitres n’ait échappé à leur débat contradictoire.
Contrairement à ce que soutient la société Cooperl Arc Atlantique, aucune violation du contradictoire ne saurait être caractérisée du seul fait qu’aucune audience ne s’est tenue comme cela ressort des termes mêmes de la sentence, compte tenu de l’absence de demande de débats oraux formée, et de l’autorisation présumée donnée en l’espèce à l’arbitre de statuer sur pièces (point 17 page 4 de la sentence).
De même, il ne saurait être reproché à l’arbitre d’avoir analysé et interprété les clauses compromissoires figurant tant dans les conditions RUFRA (conditions générales de vente) que dans les conditions générales d’achat My Price (conditions particulières du contrat) dès lors que ces dispositions contractuelles étaient dans le débat, le contrat produit en pièce 3 du mémoire en demande renvoyant au recto aux conditions générales RUFRA, également versées en pièce 2 du mémoire, et comportant au verso un paragraphe 5 prévoyant que « toute contestation survenant à l’occasion du présent contrat sera, à défaut d’accord amiable, jugée en dernier ressort par arbitrage organisé par la chambre arbitrale de [Localité 3] conformément au règlement de celle-ci que le vendeur déclare connaitre et accepter ».
Enfin, la société Cooperl Arc Atlantique ne saurait sérieusement soutenir qu’il appartenait à l’arbitre de solliciter ses observations avant de se déclarer incompétent.
En premier lieu, en application du principe compétence-compétence, l’arbitre saisi d’une demande d’arbitrage est seul juge de sa propre compétence. Il doit donc nécessairement, avant tout examen des demandes des parties au fond, vérifier si, aux termes des actes d’arbitrage, il est compétent pour connaitre du différend qui lui est soumis (Com. 22 févr. 1949, Civ. 6 mai 1971), de sorte que la question de la compétence de l’arbitre pour statuer était nécessairement, dès l’origine, dans le débat.
En deuxième lieu, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour de cassation que le respect de la contradiction n’exige pas que la juridiction invite les parties à formuler leurs observations dès lors qu’elle se borne à vérifier la réunion des conditions d’application de la règle de droit invoquée par les parties (Civ 1ère, 6 juillet 2011 n010-11.921). Ainsi, il appartenait bien en l’espèce à l’arbitre, saisi sur le fondement de l’article 36 du code RUFRA soumettant les contestations survenant entre acheteur, vendeur et/ou intermédiaire à l’arbitrage de la Chambre Arbitrale Internationale de [Localité 3], d’une demande de condamnation du GAEC Morlier La Lande au paiement de pénalités en raison de l’inexécution de ses engagements de vente et de livraison de céréales (page 3 du mémoire en demande), d’apprécier notamment si sa compétence pouvait être retenue sur ce fondement.
En troisième lieu, l’arbitre n’a pas à soumettre préalablement au prononcé de sa sentence son raisonnement juridique dès lors qu’il tient compte des éléments de fait et de droit débattus devant lui (Cass. 1re civ., 14 mars 2006, 03-18.801). La cour observe à cet égard que l’arbitre a décliné sa compétence en se fondant exclusivement sur les conditions RUFRA, les conditions générales d’achat My price telles qu’elles résultaient du contrat My price Moisson n°7122 du 28 octobre 2021, ledit contrat, ainsi que les lettres envoyées à la défenderesse et les copies écran versées par la demanderesse mentionnant « consultation des contrats de vente Moisson Adhérant : Gaec Morlier La Lande » , soit les seuls éléments produits par la société Cooperl Arc Atlantique au soutien de sa prétention.
Il s’ensuit qu’aucune violation du principe du contradictoire susceptible d’entrainer l’annulation de la sentence n’est caractérisée.
Le moyen est en conséquence rejeté.
Sur le second moyen d’annulation tiré de l’incompétence du tribunal arbitral (art. 1492 1°du code de procédure civile)
Moyens des parties
La société Cooperl Atlantique soutient que la confirmation de contrat, adressée par courriel le 28 octobre 2021 au GAEC Morlier La Lande se réfère expressément à l’article 36 des RUFRA. Elle affirme que le GAEC Morlier La Lande est par conséquent réputé avoir accepté les termes de cette confirmation de contrat notamment en ce qu’il s’agit du règlement des litiges par voie d’arbitrage organisé par la Chambre arbitrale internationale de [Localité 3], peu important qu’il n’ait pas expressément indiqué son acceptation du contrat et de la clause compromissoire. Elle ajoute que le GAEC Morlier La Lande a au demeurant exécuté, dans les termes convenus, une précédente commande résultant d’une confirmation de contrat reçue le 19 juillet 2021, qui avait été adressée par courriel dans les mêmes conditions. Elle affirme justifier de plusieurs années de relations contractuelles entre elle et le GAEC Morlier La Lande conclues et exécutées dans les conditions prévues par les règles RUFRA. Enfin elle fait valoir que l’arbitre a décidé de recourir à une procédure d’arbitrage à un seul degré en arguant d’une contradiction inexistante entre les conditions générales du contrat renvoyant à l’article 36 des règles RUFRA et donc à une procédure d’arbitrage à double degré de juridiction, et ses conditions particulières reproduites au verso du contrat, renvoyant au règlement de la chambre d’arbitrage, et ne dérogeant pourtant pas, selon elle, à ce principe du double degré de juridiction.
Le GAEC Morlier La Lande répond que l’arbitre a pris soin d’examiner chaque pièce versée aux débats afin de vérifier si sa volonté de contracter pouvait se déduire des documents produits et d’en conclure à juste titre que la preuve de son acceptation du contrat n’était pas rapportée.
Réponse de la cour
L’article 1492, 1° du code de procédure civile dispose que le recours en annulation est ouvert si le tribunal arbitral s’est déclaré à tort compétent ou incompétent.
Il résulte de ce texte que, sans s’arrêter aux dénominations retenues par les arbitres ou proposées par les parties, le juge de l’annulation contrôle la décision du tribunal arbitral sur sa compétence, en recherchant tous les éléments de droit ou de fait permettant d’apprécier la portée de la convention d’arbitrage. Ce contrôle est exclusif de toute révision au fond de la sentence.
Selon l’article 1443 du code de procédure civile la convention d’arbitrage est, à peine de nullité, écrite. Elle peut résulter d’un échange d’écrits ou d’un document auquel il est fait référence dans la convention principale.
Il résulte de l’article 1447 du code de procédure civile que la convention d’arbitrage est indépendante du contrat auquel elle se rapporte et qu’elle n’est pas affectée par la seule inexistence de celui-ci.
L’article 2061 du code civil précise par ailleurs que la clause compromissoire doit avoir été acceptée par la partie à laquelle on l’oppose, à moins que celle-ci n’ait succédé aux droits et obligations de la partie qui l’a initialement acceptée. Lorsque l’une des parties n’a pas contracté dans le cadre de son activité professionnelle, la clause ne peut lui être opposée
Pour exclure sa compétence, l’arbitre a relevé d’une part, que le contrat produit par la demanderesse, ne contenait pas de référence à une offre du GAEC Morlier La Lande, qu’il n’était pas justifié de son envoi, le courriel en date du 28 octobre 2021 ayant été adressé à une adresse non lisible, et qu’il n’était pas signé ni accompagné d’aucun accusé de réception ou réaction de son destinataire. Il a ajouté d’autre part, que l’existence d’une relation d’affaires ne pouvait être établie par la seule production d’une copie écran mentionnant « consultation des contrats de vente Moisson Adhérent : GAEC Morlier La Lande » comportant 4 lignes correspondant à des ventes de blé et d’orge sans que ne soient versées copie des contrats précédemment conclus.
La société Cooperl Arc Atlantique produit comme devant l’arbitre le contrat allégué en date du 28 octobre 2021, envoyé par courriel du même jour depuis la boite [Courriel 1] à l’adresse « [Courriel 4] » (pièces 3 et 4).
La Cooperl Arc Atlantique verse toutefois pour la première fois devant la cour en premier lieu une confirmation d’achat n°5765 du 19 juillet 2021 non signée, adressée à cette même adresse courriel, et rédigée dans les mêmes termes, puisque renvoyant d’une part au recto au conditions générales RUFRA et mentionnant d’autre part au verso les conditions générales d’achat My price faisant état de la clause compromissoire (pièces 1 et 2). Elle indique que cette commande a été livrée, comme en attestent la facture et la capture d’écran versées en pièces 13 et 14. Mais la cour relève que la facture produite correspond à des céréales qui ont été livrées le 16 juillet 2021, et mentionne un contrat portant un numéro et une date distincts (n° 4215, 2 décembre 2020), qui n’est pas versé. Il n’est pas justifié par d’autres documents de l’acceptation ou de l’exécution par le GAEC Morlier La Lande de la confirmation d’achat n°5765 du 19 juillet 2021, adressée à l’adresse « [Courriel 4] ».
Il s’ensuit que la Cooperl Arc Atlantique ne saurait, contrairement à ce qu’elle allègue, rapporter par la production de la confirmation d’achat n°6765 adressée par courriel le 19 juillet 2021, la preuve de l’acceptation par le GAEC Morlier La Lande de relations d’affaires régies par les règles RUFRA, et de la fiabilité des modalités techniques qu’elle utilise pour la transmission des contrats.
Elle produit également en second lieu une troisième confirmation d’achat n°4262 en date du 10 décembre 2020, également rédigée en des termes identiques (pièce 15) ainsi qu’une facture et une copie écran justifiant de la livraison effective de cette commande (pièces 16 et 17), ainsi qu’un ensemble de factures et bordereaux de règlements relatifs aux récoltes de blé et d’orge adressés entre 2013 et 2015 à l’EARL de l’Avenir devenue ultérieurement GAEC Morlier La Lande (pièces 19 à 23).
Toutefois, les contrats correspondants aux factures adressées entre 2013 et 2015 ne sont pas versés.
En outre, la seule confirmation d’achat en date du 10 décembre 2020 ne saurait suffire à rapporter la preuve de l’existence entre les parties de relations habituelles d’affaires leur assurant une parfaite connaissance des stipulations écrites régissant couramment leurs rapports commerciaux, et ainsi du consentement du GAEC Morlier La Lande à voir les litiges résultant du contrat allégué résolus par l’arbitrage.
Le moyen est en conséquence rejeté.
Il résulte de ce qui précède que le recours en annulation doit être rejeté.
En application de l’article 1498 alinéa 2 du code de procédure civile, ce rejet du recours en annulation emporte automatiquement l’exequatur à cette sentence arbitrale.
Sur l’article 700 et les dépens
Succombant à l’instance, la société Cooperl Arc Atlantique est condamnée à verser au GAEC Morlier la Lande la somme de 5.000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Cooperl Atlantique est condamnée aux dépens qui seront recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
Rejette le recours en annulation formé par la société Cooperl Arc Atlantique,
Dit que ce rejet confère l’exequatur à la sentence rendue le 6 juillet 2023 par l’arbitre unique Mme [U] [R],
Condamne la société Cooperl Arc Atlantique à verser au GAEC Morlier la Lande la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société Cooperl Arc Atlantique aux dépens qui seront recouvrés dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE, LA MAGISTRATE
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