Cotisations de sécurité sociale : le piège des statuts de société

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Une mauvaise rédaction des statuts de société a un impact sur le régime de cotisations sociales.

En l’espèce, l’activité de l’EURL, eu égard à l’objet social mentionné dans les statuts (« toutes formes de prestations de service, à l’attention des entreprises et des particuliers, et, plus généralement, toutes opérations industrielles, commerciales, financières, mobilières ou immobilières, se rapportant directement ou indirectement à l’objet social ou susceptibles d’en faciliter l’extension ou le développement »), qui ne se rattache à aucune autre organisation autonome, relevait donc du champ d’application des articles précités.

Il appartient à l’opposant de rapporter la preuve du caractère infondé de la créance faisant l’objet de la contrainte (en ce sens : Cass. Civ., 2e 26 mai 2016, n° 14-29.358).

La CIPAV est un organisme de sécurité sociale institué en application des articles L. 621-1, L. 621-3 et L. 622-5 du code de la sécurité sociale. Elle assure ainsi, pour le compte de la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Professions Libérales, en application des dispositions des articles L. 642-1 et L. 642-5 du code de la sécurité sociale, la gestion des trois régimes obligatoires des professions libérales mentionnées à l’article 1.3 de ses statuts, l’assurance vieillesse de base, la retraite complémentaire et l’invalidité-décès.

A ce titre, elle est notamment habilitée à recouvrer les cotisations de ce régime et à émettre des contraintes.

Il est par ailleurs de droit constant que l’obligation pour une personne exerçant une activité professionnelle relevant de l’organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales de cotiser aux régimes de protection sociale correspondants à son activité prend naissance par le seul effet de la loi dès que s’exerce l’activité concernée et n’est pas subordonnée à la notification préalable d’une décision d’affiliation par l’organisme de sécurité sociale.

L’obligation d’affiliation à la CIPAV ne peut toutefois pas se fonder sur les statuts de la section, inopérants en matière d’affiliation, mais sur les articles L. 622-5 (devenu L. 640-1 depuis le 1er janvier 2017) et R. 641-1, 11°, du code de la sécurité sociale (en ce sens : Cass. 2e civ., 4 mai 2016, n°15-18.204).

l résulte des articles L. 311-3 et D. 613-3 (puis D. 611-1) du code de la sécurité sociale que les gérants minoritaires ou égalitaires de SARL, sont affiliés au régime général de la sécurité sociale, alors que les gérants possédant ensemble ou individuellement plus de la moitié du capital social, relèvent du régime social des travailleurs indépendants. Il convient de préciser que le régime social du gérant d’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) est identique à celui du gérant de SARL.

Ainsi, les gérants majoritaires relèvent du régime des non-salariés et, plus précisément, du régime dont relève l’activité de l’entreprise.

Il convient donc de rechercher de quelle organisation autonome relevait l’activité de cette société.

Or, les dispositions applicables à sa situation au début de son activité, régissant son affiliation, étaient celles de l’article L. 622-5 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005.

Selon ce texte, « Les professions libérales groupent les personnes exerçant l’une des professions ci-après ou dont la dernière activité professionnelle a consisté dans l’exercice de l’une de ces professions :
1°) médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme, pharmacien, architecte, expert-comptable, vétérinaire ;
2°) notaire, avoué, huissier de justice, personne ayant la qualité de commissaire-priseur judiciaire ou habilité à diriger les ventes dans les conditions prévues à l’article L. 321-8 du code de commerce, syndic ou administrateur et liquidateur judiciaire, agréé, greffier, expert devant les tribunaux, courtier en valeurs, arbitre devant le tribunal de commerce, artiste non mentionné à l’article L. 382-1, ingénieur-conseil, auxiliaire médical, agent général d’assurances ;
3°) et d’une manière générale, toute personne autre que les avocats, exerçant une activité professionnelle non salariée et qui n’est pas assimilée à une activité salariée pour l’application du livre III du présent code, lorsque cette activité ne relève pas d’une autre organisation autonome en vertu des articles L. 622-3, L. 622-4, L. 622-6 ou d’un décret pris en application de l’article L. 622-7. […] »

Par ailleurs, aux termes de l’article R. 641-1, 11°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, « La Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales comprend dix sections professionnelles : […] La section professionnelle des architectes, agréés en architecture, ingénieurs, techniciens, géomètres, experts et conseils, artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1, enseignants, professionnels du sport, du tourisme et des relations publiques, et de toute profession libérale non rattachée à une autre section. »


La Caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (CIPAV) a émis deux contraintes à l’encontre de Monsieur [V] [H] pour le recouvrement de cotisations de sécurité sociale et majorations de retard pour les années 2017, 2018 et 2019. Monsieur [V] [H] a formé une opposition à ces contraintes. Suite à une première évocation de l’affaire, la caisse a été invitée à s’expliquer sur l’obligation d’affiliation de Monsieur [V] [H] à la CIPAV pour les années 2017 et 2018 en tant qu’agent immobilier indépendant. Les parties ont repris leurs écritures lors d’une audience en mars 2024 et la décision a été mise en délibéré pour avril 2024.

Sur la recevabilité de l’opposition :

La recevabilité de l’opposition n’est pas discutée et il ne ressort pas du dossier l’existence d’une fin de non-recevoir d’ordre public.

Sur le bien-fondé de l’opposition :

Suivant une jurisprudence constante, il appartient à l’opposant de rapporter la preuve du caractère infondé de la créance faisant l’objet de la contrainte. En l’espèce, Monsieur [V] [H] conteste son affiliation à la CIPAV, critiquant notamment les mises en demeure envoyées à une adresse erronée et la taxation d’office des cotisations. La caisse demande la validation de la contrainte pour les cotisations 2017 et 2018.

Sur l’affiliation du cotisant à la CIPAV :

Il est rappelé que l’obligation d’affiliation à la CIPAV ne peut se fonder sur les statuts de la section, mais sur les articles du code de la sécurité sociale. En l’espèce, l’opposant a été affilié à la CIPAV en raison de son activité professionnelle.

Sur le motif tiré de l’irrégularité de la mise en demeure du 8 juin 2019 :

La mise en demeure préalable doit être envoyée au redevable avant toute action de recouvrement. En l’espèce, la mise en demeure a été envoyée à une adresse erronée, ce qui entraîne l’annulation de la contrainte.

Sur la demande d’injonction de communication :

La demande d’injonction de communication de revenus n’est pas recevable dans le cadre de l’opposition à la contrainte.

Sur les frais irrépétibles et les dépens :

La CIPAV sera condamnée aux dépens et à verser une indemnité de 500,00 euros au titre des frais irrépétibles.

– Somme de 10.407,91 euros allouée à Monsieur [V] [H] pour les cotisations de sécurité sociale et majorations de retard pour les années 2017 et 2018
– Somme de 6.469,67 euros allouée à Monsieur [V] [H] pour les cotisations de sécurité sociale et majorations de retard pour l’année 2019
– Indemnité de 500,00 euros allouée à Monsieur [V] [H] au titre des frais irrépétibles


Réglementation applicable

– Code de la sécurité sociale
– Code de procédure civile
– Code civil

Texte de l’article L. 244-2 du code de la sécurité sociale:
« Toute action aux fins de recouvrement de cotisations de sécurité sociale doit être précédée, à peine de nullité, de l’envoi d’une mise en demeure adressée au redevable. »

Texte de l’article R. 613-26 du code de la sécurité sociale:
« Toute personne immatriculée doit, dans un délai de trente jours, faire connaître tout changement de résidence et toute modification intervenue dans ses activités professionnelles ou sa situation à l’égard des régimes légaux ou réglementaires d’assurance vieillesse ou d’assurance invalidité, qui peuvent soit entraîner son rattachement à une autre caisse de base ou son affiliation à un autre organisme conventionné, soit lui ouvrir droit aux prestations du régime institué par le présent titre, soit entraîner sa radiation de ce régime. »

Texte de l’article 696 du code de procédure civile:
« La partie succombant à l’instance est condamnée aux dépens, sauf si les circonstances particulières de l’affaire justifient qu’il soit fait application de l’article 700. »

Texte de l’article 1382 du code civil:
« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé, à le réparer. »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Patrice SANDRIN
– Maître Isabelle ANDRE ROBERT

Mots clefs associés

– Opposition
– Recevabilité
– Bien-fondé
– Affiliation
– Cotisations
– Mise en demeure
– Adresse
– Preuve
– Contrainte
– Frais irrépétibles

– Opposition : Action de s’opposer à quelque chose, de contester ou de résister à une décision ou à une proposition.
– Recevabilité : Qualité de ce qui est recevable, c’est-à-dire qui peut être admis ou accepté.
– Bien-fondé : Fondement légitime ou justifié d’une action, d’une demande ou d’une décision.
– Affiliation : Fait de faire partie d’une organisation, d’un groupe ou d’une association.
– Cotisations : Somme d’argent versée régulièrement par un membre à une organisation ou à un fonds.
– Mise en demeure : Acte par lequel on somme quelqu’un de faire quelque chose dans un délai déterminé, sous peine de poursuites.
– Adresse : Indication précise de l’endroit où se trouve une personne ou une entreprise.
– Preuve : Élément matériel ou témoignage qui permet d’établir la véracité ou la réalité d’un fait.
– Contrainte : Action de forcer quelqu’un à faire quelque chose contre sa volonté.
– Frais irrépétibles : Frais engagés dans le cadre d’une procédure judiciaire qui ne peuvent pas être récupérés par la partie perdante.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE
SAINT-DENIS DE LA RÉUNION

POLE SOCIAL

N° RG 21/00416 – N° Portalis DB3Z-W-B7F-F2YR

N° MINUTE 24/00180

JUGEMENT DU 10 AVRIL 2024

EN DEMANDE

URSSAF ILE-DE-FRANCE
Recouvrement antériorité CIPAV
DEPT Recouvrement Antériorité CIPAV
[Adresse 7]
[Localité 3]

représentée par Me Patrice SANDRIN, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION

EN DEFENSE

Monsieur [V] [H]
[Adresse 2]
[Localité 5]

représenté par Maître Isabelle ANDRE ROBERT de la SELARL MILLANCOURT – ANDRE ROBERT – FOURCADE – SPERA ET ASSOCIES, avocats au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION,

CROIX ROUGE FRANCAISE
[Adresse 1]
[Adresse 1]
[Localité 6]

représenté par Maître Isabelle ANDRE ROBERT de la SELARL MILLANCOURT – ANDRE ROBERT – FOURCADE – SPERA ET ASSOCIES, avocats au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION,

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Lors des débats en audience publique du 13 Mars 2024

Président :Madame DUFOURD Nathalie, Vice-présidente
Assesseur :Madame RAMASSAMY Nicaise, Représentant des employeurs et indépendants
Assesseur :Monsieur LAURET Janick, Représentant les salariés

assistés, lors des débats, par Madame BERAUD Marie-Andrée, Greffière et, lors du prononcé par mise à disposition, par Madame DORVAL Florence, Greffière

Le tribunal, après en avoir délibéré conformément à la loi, a statué en ces termes :

Formule exécutoire délivrée
le :
à :

Copie certifiée conforme délivrée
aux parties le :

EXPOSE DU LITIGE :

Vu les deux contraintes émises le 22 février 2021 par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (CIPAV) pour le recouvrement, pour la première, de la somme de 10.407,91 euros, au titre des cotisations de sécurité sociale et majorations de retard pour les années 2017 et 2018, pour la seconde, de la somme de 6.469,67 euros, au titre des cotisations de sécurité sociale et majorations de retard pour l’année 2019, et signifiées le 19 juillet 2021 à Monsieur [V] [H] ;

Vu l’opposition à ces deux contraintes formée le 20 juillet 2021 devant cette juridiction par Monsieur [V] [H] ;

Après une première évocation de l’affaire et une décision de réouverture des débats par mention au dossier du 10 avril 2024 pour que la caisse s’explique sur le caractère obligatoire de l’affiliation de Monsieur [V] [H] à la CIPAV pour 2017 et 2018 au regard de l’activité invoquée d’agent immobilier indépendant ;

Vu l’audience du 13 mars 2024, à laquelle les parties ont repris leurs écritures, déposées le 1er février 2024 par l’URSSAF ILE DE FRANCE, venant aux droits de la CIPAV, et le 13 mars 2024 par Monsieur [V] [H], et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens par application des article 446-1 et 455 du code de procédure civile ; la décision ayant été à l’issue des débats mise en délibéré au 10 avril 2024 ;

MOTIFS DE LA DECISION :

– Sur la recevabilité de l’opposition :

La recevabilité de l’opposition n’est pas discutée et il ne ressort pas du dossier l’existence d’une fin de non-recevoir d’ordre public.

– Sur le bien-fondé de l’opposition :

Suivant une jurisprudence constante, il appartient à l’opposant de rapporter la preuve du caractère infondé de la créance faisant l’objet de la contrainte (en ce sens : Cass. Civ., 2e 26 mai 2016, n° 14-29.358).

En l’espèce, au soutien de son opposition, Monsieur [V] [H] fait valoir en substance, d’abord, qu’il a été affilié à tort à la CIPAV alors qu’il exerçait en tant qu’agent immobilier indépendant, ensuite, que les mises en demeure ont été envoyées à une adresse erronée, alors que la caisse était informée de son adresse. Il critique enfin la mise en œuvre d’une taxation d’office pour les cotisations de l’année 2017, alors qu’il avait bien procédé à la déclaration DSI des revenus 2016, la fiabilité des décomptes de la CIPAV concernant les versements qu’il a effectués, et la motivation, considérée comme inexistante, de la mise en demeure du 8 juin 2019.

La caisse demande la validation de la contrainte concernant les cotisations 2017 et 2018 pour son entier montant – renonçant à poursuivre le recouvrement de celle concernant les cotisations 2019.

* Sur l’affiliation du cotisant à la CIPAV :

Il importe de rappeler que la CIPAV est un organisme de sécurité sociale institué en application des articles L. 621-1, L. 621-3 et L. 622-5 du code de la sécurité sociale. Elle assure ainsi, pour le compte de la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse des Professions Libérales, en application des dispositions des articles L. 642-1 et L. 642-5 du code de la sécurité sociale, la gestion des trois régimes obligatoires des professions libérales mentionnées à l’article 1.3 de ses statuts, l’assurance vieillesse de base, la retraite complémentaire et l’invalidité-décès.

A ce titre, elle est notamment habilitée à recouvrer les cotisations de ce régime et à émettre des contraintes.

Il est par ailleurs de droit constant que l’obligation pour une personne exerçant une activité professionnelle relevant de l’organisation autonome d’assurance vieillesse des professions libérales de cotiser aux régimes de protection sociale correspondants à son activité prend naissance par le seul effet de la loi dès que s’exerce l’activité concernée et n’est pas subordonnée à la notification préalable d’une décision d’affiliation par l’organisme de sécurité sociale.

L’obligation d’affiliation à la CIPAV ne peut toutefois pas se fonder sur les statuts de la section, inopérants en matière d’affiliation, mais sur les articles L. 622-5 (devenu L. 640-1 depuis le 1er janvier 2017) et R. 641-1, 11°, du code de la sécurité sociale (en ce sens : Cass. 2e civ., 4 mai 2016, n°15-18.204).

En l’espèce, la caisse se prévaut d’une affiliation à la CIPAV du 1er juillet 2008 au 31 décembre 2018 – les cotisations litigieuses étant réclamées au titre des années 2017 et 2018.

Il résulte des articles L. 311-3 et D. 613-3 (puis D. 611-1) du code de la sécurité sociale que les gérants minoritaires ou égalitaires de SARL, sont affiliés au régime général de la sécurité sociale, alors que les gérants possédant ensemble ou individuellement plus de la moitié du capital social, relèvent du régime social des travailleurs indépendants. Il convient de préciser que le régime social du gérant d’entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) est identique à celui du gérant de SARL.

Ainsi, les gérants majoritaires relèvent du régime des non-salariés et, plus précisément, du régime dont relève l’activité de l’entreprise.

Il convient donc de rechercher de quelle organisation autonome relevait l’activité de cette société.

Or, les dispositions applicables à sa situation au début de son activité, régissant son affiliation, étaient celles de l’article L. 622-5 du code de la sécurité sociale, dans sa version issue de la loi n° 2005-157 du 23 février 2005.

Selon ce texte, « Les professions libérales groupent les personnes exerçant l’une des professions ci-après ou dont la dernière activité professionnelle a consisté dans l’exercice de l’une de ces professions :
1°) médecin, chirurgien-dentiste, sage-femme, pharmacien, architecte, expert-comptable, vétérinaire ;
2°) notaire, avoué, huissier de justice, personne ayant la qualité de commissaire-priseur judiciaire ou habilité à diriger les ventes dans les conditions prévues à l’article L. 321-8 du code de commerce, syndic ou administrateur et liquidateur judiciaire, agréé, greffier, expert devant les tribunaux, courtier en valeurs, arbitre devant le tribunal de commerce, artiste non mentionné à l’article L. 382-1, ingénieur-conseil, auxiliaire médical, agent général d’assurances ;
3°) et d’une manière générale, toute personne autre que les avocats, exerçant une activité professionnelle non salariée et qui n’est pas assimilée à une activité salariée pour l’application du livre III du présent code, lorsque cette activité ne relève pas d’une autre organisation autonome en vertu des articles L. 622-3, L. 622-4, L. 622-6 ou d’un décret pris en application de l’article L. 622-7. […] »

Par ailleurs, aux termes de l’article R. 641-1, 11°, du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable, « La Caisse nationale d’assurance vieillesse des professions libérales comprend dix sections professionnelles : […] La section professionnelle des architectes, agréés en architecture, ingénieurs, techniciens, géomètres, experts et conseils, artistes auteurs ne relevant pas de l’article L. 382-1, enseignants, professionnels du sport, du tourisme et des relations publiques, et de toute profession libérale non rattachée à une autre section. »

Or, l’activité de l’EURL [H], eu égard à l’objet social mentionné dans les statuts (« toutes formes de prestations de service, à l’attention des entreprises et des particuliers, et, plus généralement, toutes opérations industrielles, commerciales, financières, mobilières ou immobilières, se rapportant directement ou indirectement à l’objet social ou susceptibles d’en faciliter l’extension ou le développement »), qui ne se rattache à aucune autre organisation autonome, relevait donc du champ d’application des articles précités.

A cet égard, le « contrat de mandataire immobilier indépendant » daté du 9 juin 2008, d’une durée de cinq ans renouvelable à la demande du mandataire, et le « mandat de prestation de services » daté du 9 juin 2008, d’une durée d’un an renouvelable par tacite reconduction, ne sont pas suffisants pour attester d’une activité exclusive d’agent immobilier indépendant comme le soutient Monsieur [V] [H].

Dès lors, l’opposant a été obligatoirement affilié à la CIPAV pour relever des article R. 641-1, 11°, et L. 622-5, du code de la sécurité sociale.

Par suite, c’est vainement que Monsieur [V] [H] conteste son affiliation à la CIPAV.

* Sur le motif tiré de l’irrégularité de la mise en demeure du 8 juin 2019 :

En vertu de l’article L. 244-2 du code de la sécurité sociale, toute action aux fins de recouvrement de cotisations de sécurité sociale doit être précédée, à peine de nullité, de l’envoi d’une mise en demeure adressée au redevable.

Il est constant que, la mise en demeure préalable délivrée par un organisme de sécurité sociale n’étant pas de nature contentieuse, elle échappe aux dispositions des articles 640 à 692 du code de procédure civile de sorte qu’il importe peu qu’elle n’ait pas été réclamée par le destinataire ou que l’avis de réception ait été signé par une autre personne que le débiteur (Ass. plén., 7 avril 2006, n° 04-30.353).

Par ailleurs, selon l’article R. 613-26 du code de la sécurité sociale, « Toute personne immatriculée doit, dans un délai de trente jours, faire connaître tout changement de résidence et toute modification intervenue dans ses activités professionnelles ou sa situation à l’égard des régimes légaux ou réglementaires d’assurance vieillesse ou d’assurance invalidité, qui peuvent soit entraîner son rattachement à une autre caisse de base ou son affiliation à un autre organisme conventionné, soit lui ouvrir droit aux prestations du régime institué par le présent titre, soit entraîner sa radiation de ce régime.
Les personnes affiliées à un organisme conventionné adressent cette déclaration à l’organisme dont elles relèvent, à charge pour celui-ci de la transmettre à la caisse de base dans un délai de huit jours ; les personnes immatriculées mais non affiliées à un organisme conventionné envoient directement cette déclaration à la caisse de base intéressée. »

C’est au cotisant de rapporter la preuve du respect de cette obligation et non à la caisse de collecter les informations afin de s’enquérir du fait que la dernière adresse connue soit encore valable.

En l’espèce, la CIPAV entend justifier de l’envoi à Monsieur [V] [H] d’une mise en demeure préalable, du 8 juin 2019, portant sur les cotisations et majorations réclamées au titre des années 2017 et 2018 pour un montant de 10.407,91euros.

Le tribunal relève que ce courrier recommandé avec accusé de réception a été expédié à une date non déterminable sur la photocopie produite aux débats – l’avis de réception ne mentionnant aucune date.

Cette mise en demeure a par ailleurs été expédiée à l’adresse « [Adresse 4] » et a été retournée à la CIPAV avec la mention « destinataire inconnu à l’adresse».

La caisse fait valoir que le cotisant ne l’a pas informée de son changement d’adresse en méconnaissance de l’obligation mise à sa charge par l’article R. 613-26 du code de la sécurité sociale – ce que conteste l’intéressé qui affirme que la caisse avait parfaitement connaissance de son adresse.

Or Monsieur [V] [H] produit aux débats une attestation d’affiliation émanant de la CIPAV, datée du 15 août 2015, et libellée à l’adresse suivante : « [Adresse 2] », qui correspond à l’adresse à laquelle la contrainte litigieuse, en date du 22 février 2021, a été libellée (et signifiée), ainsi que la mise en demeure préalable du 6 novembre 2020, support de la seconde contrainte (concernant les cotisations de l’année 2019).

Ces éléments, antérieurs et postérieurs à la date d’émission de la mise en demeure préalable, constituent des présomptions graves, précises et concordantes, au sens de l’article 1382 du code civil, permettant au tribunal de retenir que Monsieur [V] [H] prouve que la caisse a envoyé la mise en demeure préalable du 8 juin 2019, exigée à peine de nullité de la contrainte, à une adresse erronée, et en outre à une date indéterminée.

Par suite, faute de mise en demeure préalable régulière, la contrainte litigieuse ne peut qu’être annulée.

– Sur la demande d’injonction de communication :

Monsieur [V] [H] demande au tribunal d’enjoindre sous astreinte à la CIPAV de communiquer les revenus 2008 à 2018 à la caisse générale de sécurité sociale de la Réunion afin de réajustement de la pension d’invalidité servie par la caisse.

Cette demande formée à l’occasion d’une opposition à contrainte et non soumise préalablement à la caisse, puis à la commission de recours amiable, n’est pas recevable.

– Sur les frais irrépétibles et les dépens :

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la CIPAV, qui succombe à l’instance, sera condamnée aux dépens.

L’équité et la situation respective des parties commandent de condamner la CIPAV au paiement d’une indemnité de 500,00 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, mis à disposition au greffe,

DECLARE recevable l’opposition aux deux contraintes émises le 22 février 2021 par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse pour le recouvrement, pour la première, de la somme de 10.407,91 euros, au titre des cotisations de sécurité sociale et majorations de retard pour les années 2017 et 2018, pour la seconde, de la somme de 6.469,67 euros, au titre des cotisations de sécurité sociale et majorations de retard pour l’année 2019, et signifiées le 19 juillet 2021 à Monsieur [V] [H] ;
DIT que ce jugement se substitue à ces contraintes ;

DONNE ACTE à l’URSSAF Ile de France, venant aux droits de la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse, de ce qu’elle renonce à poursuivre le recouvrement de la contrainte du 22 février 2021, portant sur les cotisations de l’exercice 2019, la contrainte ayant été annulée ;

ANNULE la contrainte émise le 22 février 2021 par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse pour le recouvrement de la somme de 10.407,91 euros, au titre des cotisations de sécurité sociale et majorations de retard pour les années 2017 et 2018 ;

REJETTE la demande en paiement formée par la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse ;

DECLARE irrecevable la demande d’injonction ;

CONDAMNE la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse à payer à Monsieur [V] [H] une indemnité de 500,00 euros au titre des frais irrépétibles ;

CONDAMNE la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse aux dépens.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition du jugement au greffe du pôle social du tribunal judiciaire de Saint-Denis de la Réunion, le 10 Avril 2024, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, la minute étant signée par la présidente et la greffière.

La greffière, La présidente,
Florence DORVALNathalie DUFOURD

 

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