Poursuivre en contrefaçon de marque un site ne s’adressant pas au public français (hors UE) n’est possible que dans le pays d’établissement dudit site. En l’absence de preuve de commercialisation ou de risque de commercialisation en France de produits allégués d’être contrefaisant, il n’y a pas non plus lieu à référé sur les demandes de concurrence déloyale.
Réseaux sociaux et contrefaçon
La publication de photographie sur le compte Instagram d’une société (exemple : lancement d’une nouvelle gamme de vêtements) ne constitue pas un acte de commercialisation. Des blogs et des comptes Instagram ne constituent pas des sites permettant d’acquérir les produits argués de contrefaçon. Le fait que ces outils de communication, qui annoncent le lancement de ces produits, soient accessibles à partir du territoire français ne saurait, en conséquence, suffire à établir qu’il peut exister un risque d’atteinte aux droits conférés à une société par ses marques sur ce territoire ou de concurrence déloyale à son préjudice et, partant, fonder la compétence du juge français.
Contrefaçons au sein de l’UE
Concernant les contrefaçons au sein de l’UE et aux termes des dispositions de l’article 125, paragraphe 5, du règlement UE n° 2017/1001, les procédures résultant des actions et demandes visées à l’article 124, à l’exception des actions en déclaration de non-contrefaçon d’une marque de l’Union européenne, peuvent être portées devant les tribunaux de l’État membre sur le territoire duquel le fait de contrefaçon a été commis ou menace d’être commis ou sur le territoire duquel un fait visé à l’article 11, paragraphe 2, a été commis. Et selon l’article 126, paragraphe 2, du même règlement, un tribunal des marques de l’Union européenne dont la compétence est fondée sur l’article 125, paragraphe 5, est compétent uniquement pour statuer sur les faits commis ou menaçant d’être commis sur le territoire de l’État membre dans lequel est situé ce tribunal. En outre, selon l’article 6 du règlement UE n° 1215/2012, si le défendeur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre, la compétence est, dans chaque État membre, réglée par la loi de cet État. En vertu de l’article 46 du code de procédure civile, le demandeur peut saisir à son choix, outre la juridiction du lieu où demeure le défendeur, en matière délictuelle, la juridiction du lieu du fait dommageable ou celle dans le ressort de laquelle le dommage a été subi.
Les actions civiles et les demandes relatives aux marques, y compris lorsqu’elles portent également sur une question connexe de concurrence déloyale, sont exclusivement portées devant des tribunaux de grande instance, déterminés par voie réglementaire. Le tribunal de grande instance de Paris est compétent pour connaître des affaires de marque en vertu de l’article R 211-7 du code de l’organisation judiciaire.
Question des livraisons en France
Le juge française conserve sa compétence juridictionnelle lorsque le site de vente établi hors UE et poursuivi pour contrefaçon, comporte une fenêtre rédigée en français contenant les mentions suivantes « Bienvenue Livraison vers la France, Nous facilitons vos achats depuis la France avec des prix affichés en euros, des frais de douane et TVA calculés au moment de valider votre commande, des frais d’expédition internationale modérés, des prix à quai garantis (pas de frais supplémentaires lors de la livraison). Vous trouverez plus d’infos sur les livraisons internationales sur le site web »
Toutefois, un seul achat d’un vêtement susceptible d’être contrefaisant, effectué à partir du domicile personnel de l’huissier de justice mandaté par le demandeur, c’est-à-dire pour les besoins de la cause, et les rares extraits de commentaires publiés en Français sur le compte Instagram de la société, ne sauraient suffire à démontrer ni qu’il existait un risque imminent d’atteinte à ses droits lorsqu’elle a saisi le premier juge ni que des actes de contrefaçon se seraient poursuivis.
Le demandeur n’a pas démontré que les produits litigieux avaient fait l’objet d’une campagne publicitaire à destination du public français ni qu’ils aient donné lieu à des commentaires d’internautes, en particulier sur le site Instagram, susceptibles d’attester de la conclusion de ventes par des acheteurs français. Au vu de ces éléments, il n’y a pas lieu à référé sur des demandes fondées sur l’article L 716-6 du code de la propriété intellectuelle. Télécharger la décision