Contrat de Vendeur à Domicile : 15 avril 2022 Cour d’appel de Lyon RG n° 19/07035

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AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 19/07035 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MUID

Association UNEDIC DÉLEGATION AGS CGEA DE TOULOUSE

C/

DELEPLACE

SELARL MJ SYNERGIE

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOURG EN BRESSE

du 13 Septembre 2019

RG : F 18/00243

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 15 AVRIL 2022

APPELANTE :

Association UNEDIC DÉLEGATION AGS CGEA DE TOULOUSE

[Adresse 3] [Localité 6]

Représentée par Me Pascal FOREST de la SELARL BERNASCONI-ROZET-MONNET SUETY-FOREST-DE BOYSSON, avocat au barreau de l’AIN

INTIMÉS :

[C] [I]

né le 18 Avril 1993 à [Localité 7] ([Localité 7])

[Adresse 4] [Localité 2]

Représenté par Me Laurence BENNETEAU DESGROIS, avocat au barreau de l’AIN

SELARL MJ SYNERGIE ès qualités de mandataire ad’hoc de la société PRO & NERGY

[Adresse 5] [Localité 1]

non représentée

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 04 Février 2022

Présidée par Sophie NOIR, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Patricia GONZALEZ, présidente

– Sophie NOIR, conseiller

– Catherine CHANEZ, conseiller

ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 15 Avril 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Patricia GONZALEZ, Présidente et par Gaétan PILLIE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Par jugement du 15 juin 2016, le tribunal de commerce de Béziers a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre de la société Pro & Nergy.

Le 25 avril 2016, M. [C] [I] a saisi le conseil des prud’hommes de Bourg-en-Bresse pour voir reconnaître l’existence d’un contrat de travail conclu avec la société Pro & Nergy et obtenir le paiement de diverses indemnités.

Par jugement du 18 octobre 2017, le tribunal de commerce de Béziers a prononcé la clôture de la liquidation judiciaire de la société Pro & Nergy pour insuffisance d’actif.

Par ordonnance du président du tribunal de commerce de Béziers du 31 janvier 2020, la Selarl MJ Synergie a été désignée en qualité de mandataire ad hoc pour représenter les intérêts de la société Pro & Nergy dans le cadre de l’instance.

Par jugement du 13 septembre 2019, le conseil des prud’hommes de Bourg-en-Bresse a :

– dit que M. [C] [I] était titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminé avec la société Pro & Nergy

– fixé les créances de M. [C] [I] sur la liquidation judiciaire de la société Pro & Nergy aux sommes suivantes :

5830,08 euros au titre des salaires du 1er septembre 2015 au 31 décembre 2015

8799,72 euros au titre des salaires du 1er janvier 2016 au 30 juin 2016

1462,98 euros au titre des congés payés afférents

– déclaré le jugement opposable à l’AGS CGEA de Toulouse.

L’AGS CGEA de Toulouse a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 11 octobre 2019.

Moyens

Motivation

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, la cour rappelle qu’elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de «constatations» ou de « dire » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques ou qu’elles constituent en réalité des moyens.

Sur l’existence d’un contrat de travail :

Il résulte des dispositions des articles L120-3 ancien et L8221-6 du code du travail que les personnes physiques, dans l’exécution de l’activité donnant lieu à immatriculation sur les registres ou répertoires que ce texte énumère, sont présumées ne pas être liées avec le donneur d’ordre par un contrat de travail mais que l’existence d’un contrat de travail peut toutefois être établie lorsque ces personnes fournissent, directement ou indirectement, des prestations dans des conditions qui les placent dans un lien de subordination juridique permanente à l’égard du donneur d’ordre.

Il est constant que pour qu’une convention soit qualifiée de contrat de travail, il faut qu’une personne (le salarié) accepte de fournir contre rémunération une prestation de travail au profit d’une autre personne (l’employeur) en se plaçant dans un état de subordination juridique vis-à-vis de cette dernière. Il est par ailleurs constant que ce lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur, qui a le pouvoir de lui donner des ordres des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

L’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité du travailleur. Il appartient au juge de vérifier la commune intention des parties, conformément à l’article 12 du code de procédure civile.

Il résulte de l’article 1315, devenu l’article 1353 du code civil et de l’article L. 1221-1 du code du travail qu’en présence d’un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui invoque son caractère fictif d’en rapporter la preuve.

En l’espèce, M. [C] [I] soutient qu’il était lié à la société Pro & Nergy par un contrat de travail à durée indéterminée au poste de VRP en ce que :

– en l’absence de tout contrat de travail écrit, la relation de travail ne peut s’inscrire que dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet

– l’existence d’un contrat de travail apparent est caractérisée par :

* l’attestation de Mme [G], responsable régionale de la société Pro & Nergy

*sa participation à la formation VRP pour le compte de la société Pro & Nergy le 5 août 2015

* il a démarré son activité de vente le 1er septembre 2015 sur le département de l’Ain avec Mme [G] qui le ‘coachait’

* il respectait les objectifs qui lui étaient demandés

* il a été licencié pour motif économique par le liquidateur judiciaire de la société Pro & Nergy ce qui démontre qu’il figurait dans les registres de l’entreprise en qualité de salarié.

Il ajoute que de son côté, l’AGS CGEA ne rapporte pas la preuve de l’absence de contrat de travail.

L’AGS CGEA de Toulouse conteste l’existence d’un contrat de travail et soutient que M. [C] [I] a exercé son activité dans le cadre d’un contrat de vendeur à domicile indépendant. Elle ajoute que ce dernier ne rapporte pas la preuve de l’existence du lien de subordination caractérisant le contrat de travail en ce que :

* le liquidateur judiciaire a notifié le licenciement sous réserve d’une éventuelle requalification par la juridiction prud’homale du contrat de vendeur à domicile indépendant conclu entre les parties en contrat de travail et que la lettre de licenciement a uniquement pour but de préserver les droits de M. [C] [I] dans l’hypothèse d’une action devant le conseil des prud’hommes

* l’accréditation versée aux débats par M. [C] [I] ne concerne pas la société Pro & Nergy mais la société EDF GDF SUEZ

* il résulte d’un courrier de la société Pro & Nergy adressé au conseil de M. [C] [I] en date du 22 février 2016 que la société a débuté son activité le 1er septembre 2016, qu’il devait signer un contrat de vendeur à domicile indépendant mais qu’il ne s’est pas présenté au rendez-vous et qu’il a perçu un commissionnement déclaré à l’URSSAF

* le fait que M. [I] ait suivi une formation de VRP ne suffit pas à établir l’existence d’un lien de subordination.

Contrairement à ce que soutient M. [I], aucun des éléments qu’il verse aux débats – dont la plupart n’émanent pas de la société Pro & Nergy – ne caractérise un contrat de travail apparent.

D’autre part, ces éléments ne permettent pas de caractériser l’existence d’un lien de subordination juridique en ce que :

– aucun d’entre eux ne vient corroborer les déclarations de Mme [G], VRP exclusif au sein de la société Pro & Nergy, sur l’existence d’une formation de VRP dispensée à M. [C] [I] le 5 août 2015 dans les locaux de la société Pro & Nergy, cette dernière affirmant pour sa part dans un courriel du 22 février 2016 que M. [C] [I] était embauché en qualité de vendeur à domicile indépendant par contrat qu’il devait signer le 5 septembre 2016

– l’accréditation versée aux débats ne concerne pas la société Pro & Nergy mais la société GDF SUEZ

– l’existence d’un accompagnement de M. [C] [I] sur le terrain pour compléter la formation, le fait qu’il lui soit demandé de ‘faire ses preuves le premier mois’, éléments qui ne sont encore corroborés par aucune autre pièce, ne suffisent pas à établir que la société Pro & Nergy exerçait un pouvoir de direction, de contrôle et de sanction sur M. [C] [I]

– le licenciement a été prononcé par le liquidateur judiciaire sous réserve d’une éventuelle requalification de la relation de travail en contrat de travail.

L’existence d’un contrat de travail, dont la charge incombe au salarié en l’absence de contrat de travail apparent, n’est donc pas établie.

En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il a :

– dit que M. [C] [I] était titulaire d’un contrat de travail durée indéterminé et a fixé les créances de ce dernier sur la liquidation judiciaire de la société la société Pro & Nergy aux sommes suivantes :

5830,08 euro au titre des salaires du 1er septembre 2015 au 31 décembre 2015

8799,72 euros au titre de salaires du 1er janvier 2016 au 30 juin 2016

1462,98 euros au titre des congés payés afférents.

– déclaré le jugement opposable à L’AGS CGEA de Toulouse.

La demande présentée au titre de l’indemnité compensatrice de préavis sera également rejetée pour le même motif.

Sur la demande de restitution des sommes versées en exécution du jugement :

L’AGS CGEA de Toulouse demande que soit ordonnée la restitution des sommes qu’elle a versées sur le fondement de l’exécution provisoire, avec les intérêts au taux légal.

Cependant, le présent arrêt, infirmatif sur ce point, constitue le titre ouvrant droit à la restitution des sommes versées en exécution du jugement.

En conséquence, il n’y a pas lieu de statuer spécialement sur cette demande.

Sur les demandes accessoires :

Partie perdante, M. [C] [I] supportera la charge des dépens de première instance et d’appel.

Dispositif

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau et y ajoutant :

REJETTE l’intégralité des demandes de M. [C] [I] ;

DIT n’y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en exécution du jugement ;

CONDAMNE M. [C] [I] aux dépens de première instance et d’appel.

Le GreffierLa Présidente

Gaétan PILLIEPatricia GONZALEZ

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