Concurrence déloyale par un ancien salarié

Notez ce point juridique

Départ d’anciens salariés

De simples soupçons de concurrence déloyale vis-à-vis d’un ancien salarié ne peuvent suffire à diligenter une procédure de visite domiciliaire chez ce dernier. Dans cette affaire, une société de doublage et de post synchronisation de programmes audiovisuels a poursuivi en concurrence déloyale l’un de ses anciens salariés ayant accepté d’occuper un poste de directeur général au sein d’une société concurrente nouvellement créée (ce dernier n’était pas tenu par une clause de non-concurrence). La société a également vu le départ de quatre de ses collaboratrices accompagné de la disparition de documents stratégiques et l’effacement de l’intégralité de correspondances professionnelles.

Preuve par visite domiciliaire

L’employeur, soupçonnant ainsi des agissements constitutifs d’actes de concurrence déloyale, a déposé auprès du président du TGI une requête afin d’obtenir une mesure d’instruction in futurum sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile. Par ordonnance, le président du TGI a accueilli (à tort) cette demande et commis un huissier de justice chargé de se rendre au domicile de l’ancien salarié avec pour mission de prendre copie de tous fichiers informatiques et correspondances échangés dans le cadre de son départ.

L’ordonnance autorisant cette visite intrusive a été sanctionnée en appel. La requête déposée par la société faisait état d’une suspicion d’actes de concurrence déloyale orchestrés de concert par son ancien directeur de production et son nouveau concurrent sur le marché,  dans le but de détourner et de s’approprier de manière illicite ses données, ses ressources et sa clientèle et s’inscrit dans la perspective d’un procès futur en concurrence déloyale.

Or, l’existence d’un motif légitime n’était pas établie. Le juge de la rétractation doit apprécier l’existence du motif légitime au jour du dépôt de la requête initiale, à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui. Il n’existait pas le moindre indice pouvant suggérer l’existence d’un débauchage de « postes-clés » au sein de la société, tels qu’allégués, s’agissant de personnel mis à disposition ponctuellement, ni d’une désorganisation « considérable » de l’entreprise induite par ces départs. En réalité, la société qui émettait de simples hypothèses et dénonçait des intentions supposées, n’avait pas mis en évidence des indices suffisamment plausibles à l’appui des griefs présentés ; aucune des pièces justificatives n’accréditait la désorganisation ou la captation déloyale de sa clientèle invoquées. En conséquence, la requête de la société ne pouvait être accueillie, ne reposant pas sur un motif légitime au sens des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile. Par voie de conséquence, les mesures réalisées en exécution de l’ordonnance étant dénuées de tout fondement juridique, la nullité des opérations de constat a été ordonnée.

Recevabilité des mesures in futurum

Pour rappel, aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé. L’application des dispositions de l’article 145 du code de procédure civile suppose que soit constaté qu’il existe un procès  » en germe  » possible, sur la base d’un fondement juridique suffisamment déterminé et dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée à condition que cette mesure ne porte pas une atteinte illégitime aux droits d’autrui.

Le juge, saisi d’une demande de rétractation d’une ordonnance sur requête ayant ordonné une mesure sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile et tenu d’apprécier au jour où il statue les mérites de la requête, doit s’assurer de l’existence d’un motif légitime, au jour du dépôt de la requête initiale et à la lumière des éléments de preuve produits à l’appui de la requête et de ceux produits ultérieurement devant lui, à ordonner la mesure probatoire et des circonstances justifiant de ne pas y procéder contradictoirement.

L’urgence n’est pas une condition requise pour que soient ordonnées sur requête des mesures d’instruction sur le fondement de l’article 145 ; l’existence de contestations sérieuses ne constitue pas un obstacle à la mise en oeuvre de la mesure sollicitée, l’application de cet article n’impliquant aucun préjugé sur la responsabilité des parties appelées à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé.

Il résulte enfin de l’article 145 que le demandeur à la mesure d’instruction n’a pas à démontrer l’existence des faits qu’il invoque puisque cette mesure ‘in futurum’ est destinée à les établir, mais qu’il doit justifier d’éléments rendant crédibles ses allégations. Il appartient au requérant, défendeur au référé-rétractation, de justifier que sa requête était fondée et non au demandeur à la rétractation de prouver qu’elle ne l’était pas.

[toggles class= »yourcustomclass »]

[toggle title= »Télécharger la Décision » class= »in »]Télécharger [/toggle]

[toggle title= »Réseau social juridique B2B »]Rejoignez le 1er réseau social juridique B2B LexSider.com : vos futures relations d’affaires vous y attendent.[/toggle]

[toggle title= »Poser une Question »]Posez une Question Juridique sur cette thématique, la rédaction ou un abonné vous apportera une réponse en moins de 48h.[/toggle]

[toggle title= »Surveillance & Analyse de Marque » class= »in »]Surveillez et analysez la réputation d’une Marque (la vôtre ou celle d’un concurrent), d’une Personne publique (homme politique, acteur, sportif …) sur tous les réseaux sociaux (Twitter, Facebook …). Testez gratuitement notre plateforme de Surveillance de Marque et de Réputation numérique.[/toggle]

[toggle title= »Paramétrer une Alerte »]Paramétrez une alerte de Jurisprudence sur ce thème pour être informé par email lorsqu’une décision est rendue sur ce thème[/toggle]

[/toggles]

Scroll to Top