1. Vérifiez toujours que les formalités de publicité requises par la loi du domicile du débiteur cédé ont été accomplies avant de procéder à une cession de créances.
2. Assurez-vous que les actes de cession de créances respectent les conditions exigées par le code civil, notamment en ce qui concerne l’écrit et la notification au débiteur cédé.
3. En cas de contestation de la qualité de cessionnaire, il est essentiel de prouver la validité de la cession et de démontrer que les paiements ont été effectués conformément aux termes de la délégation de paiement.
L’affaire concerne un litige entre plusieurs sociétés autour de la réalisation de logements à Localité 6. La société Bouygues Immobilier, maître de l’ouvrage, a confié des travaux à la société ATB Construction, qui a sous-traité une partie à la société MCBI. Des conventions de délégation de paiement ont été signées entre Bouygues, ATBC et MCBI, stipulant que les paiements devaient être effectués via la plateforme Edebex, à laquelle MCBI avait cédé ses créances à la société BNI.
Des problèmes sont survenus lorsque MCBI a fait faillite, et BNI a réclamé à Bouygues le paiement de factures impayées. Bouygues a contesté ces demandes, arguant que BNI n’avait pas de droit d’agir valide car elle n’était pas partie aux conventions originales de délégation de paiement et que les cessions de créances étaient imparfaites.
Le tribunal de commerce de Nanterre a jugé en faveur de Bouygues, rejetant les demandes de BNI, qui a ensuite fait appel. BNI soutient que les cessions de créances étaient valides et que Bouygues doit les paiements, tandis que Bouygues conteste la validité des cessions et l’existence d’une dette.
L’affaire est en cours d’appel, avec des arguments centrés sur la validité des cessions de créances, la notification de ces cessions, et la question de savoir si Bouygues est effectivement redevable des sommes en question.
Application du droit français
Dans cette affaire, le juge a rappelé l’importance de l’application du droit français, notamment en ce qui concerne la loi de la créance cédée. La convention de Rome I du 19 juin 1980 a été évoquée pour déterminer la loi applicable.
Recevabilité de la demande de la société BNI
La société Bouygues a contesté la qualité de cessionnaire de la société BNI pour deux créances, soulevant des questions de recevabilité et de fond. Les règles du code monétaire et financier ont été examinées pour déterminer si les cessions de créances étaient conformes au droit commun.
Bien-fondé de la demande de la société BNI
La société BNI a prouvé sa qualité de cessionnaire des créances litigieuses et son intérêt à agir pour le recouvrement de leur paiement. La société Bouygues a été condamnée à payer les sommes réclamées par la société BNI en application de la délégation de paiement.
Demande de dommages et intérêts
La société BNI a demandé des dommages et intérêts en raison des problèmes financiers causés par le refus de paiement de la société Bouygues. Cependant, le préjudice n’a pas été démontré et la demande a été rejetée.
Dépens et autres frais de procédure
La société Bouygues a été condamnée aux dépens de première instance et d’appel. Elle a également été condamnée à payer une indemnité de 10’000 euros à la société BNI au titre des frais exposés en dehors des dépens.
– Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales d’[Localité 3] (URSSAF): Charge des dépens.
– Madame [L] [V] [U]: Aucun montant spécifié, bénéficie de l’extinction de l’instance sans frais à sa charge, sauf convention contraire.
Réglementation applicable
– Article L.218-1 du Code de l’organisation judiciaire : Ce texte réglemente la composition et les modalités de fonctionnement des tribunaux judiciaires, notamment en ce qui concerne la possibilité de statuer à juge unique.
Les autres articles de loi ou codes spécifiques mentionnés dans le texte ne sont pas listés explicitement. Pour fournir une liste complète des articles des codes cités, il faudrait que ces codes soient explicitement mentionnés avec leurs articles respectifs dans le texte d’origine.
Avocats
Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :
– Me Oriane DONTOT
– Me Martine DUPUIS
– Me Christine SARAZIN
– Me Jérôme MARTIN
Mots clefs associés
– Logements d’habitation
– Société Bouygues Immobilier
– Société ATB construction
– Convention de délégation parfaite de paiement
– Société MCBI
– Plate-forme en ligne de vente de créances commerciales
– Société Edebex
– Société Banco de negocios international (BNI)
– Tribunal de commerce de Valenciennes
– Redressement judiciaire
– Liquidation judiciaire
– Société Euler-Hermès recouvrement France
– Tribunal de commerce de Nanterre
– Créances commerciales
– Délégation de paiement
– Cession de créance
– Intérêts de retard
– Dommages et intérêts
– Article 700 du code de procédure civile
– Dépens
– Cour d’appel
– Motifs de la décision : Raisons juridiques et factuelles qui justifient la décision rendue par un juge.
– Opposition à contrainte : Procédure permettant à un débiteur de contester une contrainte (acte de poursuite pour le recouvrement de créances) devant le tribunal compétent.
– Qualité de défendeur : Aptitude à être partie défenderesse dans un procès, c’est-à-dire la personne contre laquelle une action en justice est engagée.
– Article 385 alinéa 1 du code de procédure civile : Disposition légale spécifique du code de procédure civile, nécessitant la consultation du texte pour une définition précise.
– Péremption, désistement d’instance, caducité de la citation :
– Péremption : Extinction d’une action en justice due à l’inactivité des parties pendant un délai légal.
– Désistement d’instance : Acte par lequel le demandeur renonce à son action en justice après son introduction.
– Caducité de la citation : Perte d’effet d’une citation à comparaître si certaines formalités ne sont pas respectées ou si l’action n’est pas poursuivie dans les délais requis.
– Articles 394 et suivants du code de procédure civile : Règles concernant la procédure civile, nécessitant la consultation des textes pour des détails spécifiques.
– Désistement de la demande : Acte par lequel le demandeur retire officiellement sa demande initiale devant le tribunal.
– Acceptation du défendeur : Accord du défendeur sur les prétentions ou les faits exposés par le demandeur.
– Défense au fond ou fin de non-recevoir :
– Défense au fond : Arguments du défendeur contestant le bien-fondé de la demande.
– Fin de non-recevoir : Argument du défendeur qui, sans entrer dans le fond de l’affaire, vise à faire déclarer la demande irrecevable pour des raisons de forme ou de procédure.
– Désistement parfait : Désistement qui met fin à l’instance sans possibilité de réintroduire ultérieurement la même demande.
– URSSAF [Localité 3] : Organisme de recouvrement des cotisations sociales et d’allocations familiales, spécifique à une localité donnée.
– Extinction de l’instance : Fin de l’instance judiciaire sans qu’une décision sur le fond ne soit rendue, due à diverses causes comme le désistement, la conciliation entre les parties, etc.
– Article 399 du code de procédure civile : Disposition légale du code de procédure civile, à consulter pour une définition précise.
– Charge des dépens : Obligation pour une partie (généralement la partie perdante) de payer les frais judiciaires engagés pendant le procès.
– Convention contraire entre les parties : Accord entre les parties qui modifie les règles normalement applicables, par exemple en matière de frais de procédure ou de compétence juridictionnelle.
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 54D
Ch civ. 1-4 construction
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 05 FEVRIER 2024
N° RG 21/06747 – N° Portalis DBV3-V-B7F-U2TE
AFFAIRE :
Société BANCO DE NEGOCIOS INTERNACIONAL
C/
S.A.S. BOUYGUES IMMOBILIER
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Septembre 2021 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 20219F0178
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Oriane DONTOT,
Me Martine DUPUIS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE CINQ FEVRIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Société BANCO DE NEGOCIOS INTERNACIONAL
[Adresse 7]
[Adresse 2] (PORTUGAL)
Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 et Me Christine SARAZIN de la SCP AVENS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0286
APPELANTE
S.A.S. BOUYGUES IMMOBILIER
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 et Me Jérôme MARTIN de la SELARL D’AVOCATS MARTIN ET ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0158
INTIMÉE
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 27 Novembre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Fabienne TROUILLER, Présidente, et Madame Séverine ROMI, Conseillère chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Fabienne TROUILLER, Présidente,
Madame Séverine ROMI, Conseillère,
Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée,
Greffière, lors des débats : Madame Jeannette BELROSE,
FAITS ET PROCÉDURE
‘
Dans le cadre de la réalisation de logements d’habitation à [Localité 6] (59), la société Bouygues Immobilier (ci-après la société Bouygues), en qualité de maître de l’ouvrage, a confié, selon marché du 26 mars 2018, à la société ATB construction (ci-après la société ATBC), les lots terrassement et gros ‘uvre.
La société ATBC a sous-traité des travaux de gros-‘uvre à la société MCBI pour un montant total de 1’952’000 euros.
Une première convention dite «’de délégation parfaite de paiement’», du 18 avril 2018, portant sur la totalité de ce montant, a été signée entre la société Bouygues, déléguée, la société ATBC, délégant, et la société MCBI, délégataire.
Une deuxième convention de délégation parfaite de paiement, du 14 juin 2018, a été signée entre les mêmes parties, en leur même qualité, rappelant le montant global du marché, mais portant sur la somme de 1’917’224,96 euros.
Cette convention stipule de plus que « tout paiement lié à ce projet » en faveur de la société MCBI « doit être exécuté sur le compte » de la société Edebex. De son côté, il est ajouté que la société Bouygues, déléguée, a pris connaissance de l’intervention de cette société et « s’engage à régler toute facture/situation du délégant » dans le cadre de ce projet « sur le compte d’Edebex. »
En effet, la société MCBI a adhéré à une plate-forme en ligne de vente de créances commerciales non échues, gérée par une fintech de droit belge, Edebex.
Une troisième convention de délégation parfaite de paiement, du 25 juin 2018, portant sur la somme de 651’227,99 euros, a été signée entre les trois mêmes parties, en leur même qualité.
Ce document indique de plus que le sous-traitant a été accepté par le maître de l’ouvrage et que ses conditions ont été agréées.
La société Edebex a informé la société ATBC, selon quatre courriers des 27 juin, 6 juillet, 3 août et 14 septembre 2018, que la société MCBI avait cédé quatre factures non échues d’un montant respectif de 253’595,82 euros, 341’559,50 euros, 316’558,31 euros et 263’216,45 euros, toutes hors taxes, à la société de droit portugais Banco de negocios international (ci-après la société’BNI) et a demandé à la société ATBC de verser chacune de ces sommes, à leur échéance, à la société BNI sur le compte de la société Edebex, précisant que seul le paiement à la société BNI sur ce compte était libératoire.
Les deux premières factures ont été payées’par la société Bouygues sur le compte de la société Edebex.
La société Edebex et son assureur la société Euler-Hermès recouvrement France ont réclamé à la société Bouygues le paiement des deux dernières factures au profit de la société BNI sur le compte de la société Edebex.
La société MCBI a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire convertie en liquidation judiciaire suivant jugement rendu le 29 avril 2019 du tribunal de commerce de Valenciennes.
Le conseil de la société BNI, par LRAR du 29 mai 2019, a mis en demeure la société Bouygues de payer la somme correspondant aux deux dernières factures, soit la somme totale de 579’774,76 euros.
C’est dans ces circonstances que par acte d’huissier de justice du 2 octobre 2019, délivré à personne, la société BNI a assigné la société Bouygues devant le tribunal de commerce de Nanterre.
Par un jugement contradictoire du 13 octobre 2021, le tribunal de commerce de Nanterre a’:
– débouté la société Bouygues de sa demande tendant à voir écarter les pièces n°13 et 14 versées aux débats par la société BNI,
– dit recevable et bien fondée la fin de non-recevoir opposée par la société Bouygues à la société BNI pour défaut de droit d’agir,
– débouté la société Bouygues de sa demande de condamnation de la société BNI à une amende civile,
– condamné la société BNI à régler à la société Bouygues la somme de 4’000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, débouté la société BNI de sa demande à ce titre,
– ordonné l’exécution provisoire,
– condamné la société BNI aux dépens.
Le tribunal a retenu, faisant suite à la demande de la société Bouygues de faire écarter les pièces 13 et 14 de la société adverse, que la traduction libre en français dont elles avaient fait l’objet les rendaient en l’état recevables.
Sur la fin de non-recevoir soulevée par la société Bouygues, le tribunal a retenu sur le fondement de l’article 122 du code de procédure civile et des articles 1103, 1321 et 1336 du code civil et des conventions présentées par les parties, que pour tenter de justifier d’une qualité ou d’un intérêt à agir à l’encontre de la société Bouygues, la société BNI mélangeait deux mécanismes indépendants, la délégation de paiement entre les sociétés Bouygues, ATBC et MCBI, dans laquelle la société BNI n’était pas partie, et deux cessions de créances émises par la société MCBI sur la société ATBC, imparfaitement cédées à la société BNI à travers la plate-forme de la société Edebex.
Dans ces conditions, le tribunal a retenu que la société BNI ne rapportait pas la preuve d’une créance certaine, liquide et exigible à l’encontre de la société Bouygues.
Sur la demande reconventionnelle de la société Bouygues de paiement d’une amende civile pour procédure abusive, le tribunal a retenu, sur le fondement de l’article 32-1 du code de procédure civile, que cette demande ne pouvait être mise en ‘uvre que de la propre initiative du tribunal et que l’ensemble des faits ne pouvait aboutir à qualifier l’action intentée par la société BNI de procédure abusive.
La société BNI a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 12 novembre 2021.
Aux termes de ses conclusions n°3 remises le 31 mars 2023, la société BNI demande à la cour de’:
– réformer le jugement en ce qu’il a dit recevable et bien fondée la fin de non-recevoir opposée par la société Bouygues à la société BNI pour défaut de droit d’agir, condamné la société BNI à régler à la société Bouygues la somme de 4’000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, débouté la société BNI de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et condamné la société BNI aux dépens,
– condamner la société Bouygues à lui régler la somme de 579’774,76 euros augmentée des intérêts de retard, au taux appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage, à compter de l’exigibilité des sommes dues, soit le 30 septembre 2018 pour la facture n°2018/07/677 et le 31 octobre 2018 pour la facture n°2018/08/685,
– condamner la société Bouygues à lui régler la somme de 50’000 euros à titre de dommages et intérêts,
– débouter la société Bouygues de toutes ses demandes, fins et conclusions,
– condamner la société Bouygues à lui régler la somme de 15’000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en sus des entiers dépens qui seront recouvrés par son avocat.
La société BNI fait valoir, sur sa qualité et son intérêt à agir, que conformément à l’article 1113 du code civil, il y a eu rencontre d’une offre ferme et précise de la part de la société MCBI de sorte que la seule acceptation de la société BNI, expresse et extériorisée, suffit pour qu’il y ait formation du contrat de vente, lui-même constaté par écrit par la société Edebex.
Elle ajoute, sur la régularité de l’acte de cession que, conformément aux conditions générales d’utilisation de la plateforme Edebex acceptée par les sociétés BNI et MCBI, la société Edebex était habilitée par elles à régulariser au nom et pour le compte de ces dernières les actes de cession.
De plus, elle énonce qu’au titre de l’article 1321 du code civil, la société Bouygues étant tiers à la cession de créance, son consentement n’était pas requis, d’où il ressort que cette dernière n’a pas la qualité pour invoquer une inopposabilité d’un défaut de pouvoir du signataire de l’acte de cession.
Elle fait également valoir que, conformément à l’article 1322 du code civil, un écrit simple suffit, ce qui est le cas en l’espèce.
La société BNI soutient par ailleurs, sur la notification de la cession à la société Bouygues, conformément aux articles 1321, 1323 et 1324 du code civil, qu’une notification simple dans un acte suffit, ce qui est le cas par la procédure effectuée sur la plateforme de la société Edebex.
Elle énonce, sur la superposition entre la délégation de paiement et la cession de créance, sur le fondement des articles 1336 et 1337 du code civil, qu’en l’espèce, la délégation de paiement régularisée entre les parties emporte novation par changement de débiteur, ce qui a pour conséquence de faire de la société Bouygues le seul et unique débiteur de la société MCBI, société qui a pu céder ses factures à la société BNI.
La société BNI soutient aussi que sa créance est certaine, liquide et exigible, ce qui résulte de la convention de délégation parfaite de paiement, des factures, des cessions de créance intervenues et des notifications qui leur sont associées.
Elle fait valoir, au visa de l’article 1324 du code civil, que le paiement libératoire doit être fait au créancier et que la notification ayant été valablement effectuée, la société Bouygues lui doit le paiement, sans pouvoir lui opposer un quelconque paiement effectué postérieurement entre les mains de la société MCBI.
Par ailleurs, elle affirme que la société Bouygues a reconnu sa dette à deux reprises, lors d’un audit réalisé par la société Edebex et en réglant l’intégralité des factures à la société MCBI, et ne peut donc plus opposer de contestation concernant les factures cédées. De plus, le règlement intégral de sa dette auprès de la société MCBI a pour conséquence, de jurisprudence constante, une renonciation à soulever toute exception.
Enfin, elle soutient, sur le fondement de l’article 1240 du code civil, que la société Bouygues a fait preuve d’une résistance injustifiée et abusive lui causant un préjudice certain, contrainte de mobiliser des moyens humains et financiers pour recouvrer sa créance.
Aux termes de ses conclusions n°2 remises le 3 avril 2023, la société Bouygues demande à la cour de’:
– confirmer l’ensemble des chefs de jugement,
– à titre subsidiaire, si la cour déclarait recevable la demande de la société BNI, de déclarer nuls les prétendus actes de cession de créance produits par la société BNI et en tout cas, inopposables à la société Bouygues,
– rejeter la demande de paiement de la somme de 579’774,76 euros au titre des factures n°2018/07/677 et n°2018/08/685 de la société MCBI telle que présentée par la société BNI,
– rejeter la demande de paiement d’intérêts de retard au taux réclamé par la société BNI,
– rejeter la demande de paiement de la somme de 50’000 euros à titre de dommages et intérêts présentée par la société BNI,
– condamner la société BNI à lui payer la somme de 20’000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens d’appel.
La société Bouygues fait valoir, sur le défaut de qualité à agir fondé sur les articles 31 et 122 du code de procédure civile, qu’au titre des articles 1199 et 1103 du code civil ainsi que des dispositions de l’article 1321 du même code ainsi que de l’article 1336 de ce code, que l’appelante ne justifie pas d’un mandat spécial régulier permettant à la société Edebex d’intervenir et qu’elle ne peut se constituer de preuve elle-même comme c’est le cas en l’espèce.
De plus, elle affirme que les conditions générales d’utilisation de la plateforme Edebex ne donnent aucun mandat à la société Edebex pour représenter l’acheteur et le vendeur à l’acte de cession de créance, ni pour le rédiger.
Elle fait également valoir que du fait de ce qui a été invoqué, la prétendue acceptation, document informel, ne saurait prouver l’acceptation expresse des conditions générales d’adhésion à la cession de commerce par la société MCBI au sens de l’article 1353 du code civil, ce qui est une condition de validité de la cession.
La société Bouygues soutient également que les prétendus actes de cession de créance sont dépourvus des mentions obligatoires définies par l’article L. 313-23 du code monétaire et financier.
Elle soutient qu’en tout état de cause, il y a un défaut d’intérêt à agir de la part de la société BNI dans la mesure où les acquéreurs de créances sont assurés sur cette plateforme et que de ce fait, la société BNI a déjà été indemnisée par la société Euler Hermès à hauteur du montant assuré. Elle ne saurait agir sans être subrogée dans les droits de l’assureur de la créance, ce qui n’est d’ailleurs ni allégué ni justifié.
Elle ajoute, sur la prétendue superposition entre la délégation de paiement et la cession de créance, que la délégation de paiement et la cession de créance ne peuvent valablement se superposer dans la mesure où ces mécanismes ne visent pas les mêmes parties.
Subsidiairement, la société fait valoir que la société BNI ne rapporte pas la preuve d’une cession de créance valable au regard du droit français et qu’aucun acte de cession de créance n’est produit conformément au droit français.
Elle soutient également que la société BNI ne rapporte pas la preuve de la date certaine de la cession de créance qu’elle invoque. De plus, en vertu de l’article 1322 du code civil et L. 313-23 du code monétaire et financier, la cession doit être formalisée par un écrit et le respect de mentions obligatoires non présentes en l’espèce.
Elle fait aussi valoir, concernant la notification des cessions de créance alléguées, qu’en application de l’article 1324 du code civil et des articles L. 313-28 et R. 313-15 du code monétaire et financier, les deux lettres de notification adressées par la société Edebex ne respectent pas les exigences légales et réglementaires et sont donc irrégulières.
Elle énonce, par ailleurs, sur le prétendu respect partiel de la convention de délégation de paiement, que la société BNI est un tiers aux conventions de délégation de paiement conclues entre les sociétés ATB Construction, MCBI et Bouygues, et ne peut donc pas demander l’exécution d’un contrat auquel elle n’est pas partie.
Elle soutient également qu’il n’y a pas de reconnaissance de dette et aucun élément probant qui pourrait justifier du contraire.
Elle rappelle qu’il a été expressément prévu dans la convention de délégation de paiement qu’elle ne sera pas tenue de payer la société MCBI en cas de mauvaise exécution des travaux de la société ATB Construction, ce qui a été le cas.
Elle fait valoir que les intérêts de retard ne sont pas dus car l’article L. 441-6 ancien du code de commerce n’est pas applicable au contrat de louage d’ouvrage.
Enfin, elle conteste les dommages et intérêts demandés en raison de l’absence de préjudice démontré.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 avril 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 27 novembre 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION
A titre liminaire, sur l’application du droit français, il faut rappeler que dans le rapport cessionnaire débiteur cédé, comme c’est le cas en l’espèce, c’est la loi de la créance cédée qui a vocation à s’appliquer selon la convention de Rome I du 19 juin 1980 (publiée au JOCE n° L 266, 9 oct. 1980, remplacée PE et Cons. UE, règl. n° 593/2008, 17 juin 2008, art. 14-2′ : JOUE n° L 177, 4 juillet 2008).
L’établissement de crédit doit donc avoir accompli les formalités de publicité requises par la loi du domicile du débiteur cédé.
Le juge de première instance a appliqué la loi française, ce qui n’a pas fait l’objet de contestation des parties.
Sur la recevabilité la demande de la société BNI
L’article 122 du code de procédure civile dispose «’constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée’».
‘
En l’espèce, la société Bouygues conteste à la société BNI sa qualité de cessionnaire de deux créances, ce qui mêle des problèmes de recevabilité et de fond.
‘
Ce sont les règles du code civil qui s’appliquent.
‘
En effet, pour partie de ses contestations, la société Bouygues se fonde sur les dispositions du code monétaire et financier en ses articles L.313-23 à L.313-35, concernant la cession de créances professionnelles par bordereau à des établissements de crédit.
Ce mécanisme de cession est réalisé par la remise d’un bordereau qui est un titre formalisme dans la mesure où il doit comporter certaines mentions. À défaut, le bordereau est dépourvu d’effets. Si la cession peut être réalisée de façon électronique, il n’y a, en ce cas, pas de certitude quant au formalisme exigé.
Quoi qu’il en soit, il est certain que les deux actes de cession présentés par la société BNI ne remplissent pas les conditions exigées par l’article L.313-23 du code monétaire et financier, notamment en ce qu’ils n’indiquent pas que ces articles sont applicables. Dans son dernier alinéa cet article sanctionne «’le titre dans lequel une des mentions indiquées (…) fait défaut ne vaut pas comme acte de cession ou de nantissement de créances professionnelles au sens des articles L.’313-23 à L.’313-34’».
La nullité du bordereau n’est pourtant pas la sanction prévue dans cet article, sa rédaction permet au contraire d’admettre que l’acte produit ses effets dans les conditions prévues par d’autres dispositions. Il peut s’agir d’une cession de créances de droit commun si les dispositions du code civil relatives à ces opérations sont respectées. L’établissement de crédit peut ainsi se prévaloir d’une signification ou d’un acte équivalant à une signification au débiteur cédé.
Il conviendra donc d’examiner si les cessions de créances sont conformes au droit commun.
L’article 1321 du code civil dispose que la cession de créance est un contrat par lequel le créancier cédant transmet, à titre onéreux ou gratuit, tout ou partie de sa créance contre le débiteur cédé à un tiers appelé le cessionnaire. Elle peut porter sur une ou plusieurs créances présentes ou futures, déterminées ou déterminables. Elle s’étend aux accessoires de la créance. Le consentement du débiteur n’est pas requis, à moins que la créance ait été stipulée incessible.
L’article 1322 précise que la cession de créance doit être constatée par écrit, à peine de nullité.
Un simple écrit est donc exigé sans autres précisions, l’article 1322 ne faisant pas état de mention obligatoire.
‘
L’article 1324 ajoute que la cession n’est opposable au débiteur, s’il n’y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s’il en a pris acte. Le débiteur peut opposer au cessionnaire les exceptions inhérentes à la dette, telles que la nullité, l’exception d’inexécution, la résolution ou la compensation des dettes connexes. Il peut également opposer les exceptions nées de ses rapports avec le cédant avant que la cession lui soit devenue opposable, telles que l’octroi d’un terme, la remise de dette ou la compensation de dettes non connexes. Le cédant et le cessionnaire sont solidairement tenus de tous les frais supplémentaires occasionnés par la cession dont le débiteur n’a pas à faire l’avance. Sauf clause contraire, la charge de ces frais incombe au cessionnaire.
En l’espèce, il faut rappeler qu’avant la cession de créance, les créances cédées s’inscrivaient dans le contexte d’une délégation parfaite de créance.
La délégation, est selon l’article 1336 du code civil, une opération par laquelle une personne, le délégant, obtient d’une autre, le délégué, qu’elle s’oblige envers une troisième, le délégataire, qui l’accepte comme débiteur. Le délégué ne peut, sauf stipulation contraire, opposer au délégataire aucune exception tirée de ses rapports avec le délégant ou des rapports entre ce dernier et le délégataire.
L’article suivant précise que lorsque le délégant est débiteur du délégataire et que la volonté du délégataire de décharger le délégant résulte expressément de l’acte, la délégation opère novation. La délégation est dite dans ce cas parfaite.
En l’espèce, par trois conventions des 18 avril, 14 et 25 juin 2018 dites «’de délégation parfaite de paiement (finale)’», une délégation parfaite de paiement a été signée entre la société Bouygues, le délégué, la société ATBC, le délégant, et la société MCBI, le délégataire, stipulant le paiement par la société Bouygues’au profit de la société MBCI pour le compte de la société ATBC.
Par cette convention, la société MCBI est devenue le créancier de la société Bouygues pour les créances litigieuses.
Cette délégation s’inscrivait dans le cadre de la loi n°75-1334 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance, puisque la société MCBI était le sous-traitant de la société ATBC.
Les conventions de délégation sont toutes les trois rédigées ainsi :
«’Afin d’assurer au délégataire le paiement des sommes en principal, intérêts, frais et accessoires qui lui sont dues. Ainsi que mentionnées dans l’exposé préalable, le délégant délègue au délégataire dans les conditions prévues par les articles 1275 et suivants du Code Civil, son débiteur, le délégué, lequel intervenant aux présentes, déclare accepter la présente délégation et se reconnaît en conséquence désormais tenu personnellement et directement envers le délégataire.
Ainsi, le délégué s’engage à effectuer tous ses paiements directement auprès du délégataire, ceci à due concurrence de la somme de (‘) suivant les modalités ci-dessous énoncées.
Tout versement ainsi effectué libérera le délégué à due concurrence à l’égard du délégant.
A ce titre, le délégué ne pourra opposer aucune exception qu’elle soit tirée du contrat d’affaire des relations avec le délégant, ni en cas de modification de la situation juridique ou financière du délégant (procédure collective ou autre), à quelque titre que ce soit.
En conséquence, le délégué s’engage de manière formelle et irrévocable, à payer le délégataire. Sans qu’il ne puisse invoquer la moindre exception liée à l’exécution défectueuse, inexécution au retard de prestations et/ou travaux qu’il a confié au délégant à l’exclusion de tout retard de livraison ou non produit avec les prescriptions contractuelles.
Dès lors, le délégué s’engage à régler le délégataire par virement bancaire à 45 jours fin de mois par rapport à la date de livraison des marchandises (et correspondant à la date d’émission de la facture) dans les locaux du délégant, étant entendu que ladite livraison devra être conforme à la commande passée par le délégant au profit du délégataire.’»
Une des conventions, celle du 14 juin 2018 portant sur la somme de 1’917’224,96 euros, stipule que tout paiement lié à ce projet en faveur de la société MCBI doit être exécuté sur le compte de la société Edebex, plate-forme en ligne internationale de vente de créances commerciales non échues, la société Bouygues s’engageant à régler toute facture du délégant sur le compte d’Edebex.
Les 3 août et 14 septembre 2018, le délégataire a opéré une cession de deux créances détenues sur la société Bouygues, dans le cadre de cette délégation, en faveur de la société BNI.
Il ressort des pièces présentées que les actes de cession sont ainsi rédigés, sur papier à en-tête «’Edebex’», pour celui du 3 août 2018’:
«’ACTE DE CESSION DE CRÉANCE
La S.A.R.L unipersonnelle M.C.B.I., société de droit français, dont le siège social est situé à [Adresse 4], enregistrée sous le numéro de SIREN 812.730.216, représentée par toute personne dament habilitée aux fins des présentes (le « Cédant »)
Cède sans garantie ni recours quelconques autres que l’existence des créances et des sûretés, garanties et accessoires qui s’y attachent et ceux prévus dans les conditions générales (les « Conditions Générales » et les conditions particulières applicables aux pays du cédant (les « Conditions Françaises Particulières ») de la plateforme électronique gérée par Edebex SA, une société agréée en qualité d’établissement de paiement en Belgique immatriculée à la Banque-Carrefour des Entreprises (BCE) sous le numéro 0502.697.352, et dont le siège social est situé [Adresse 8], Belgique, selon les modalités et obligations décrites dans les Conditions Générales et les Conditions Françaises Particulières, à la société de droit portugais BNI-BANCO DE NEGOCIOS INTERNACIONAL dont le siège social est situé à [Adresse 1], enregistrée sous le numéro 509007333, représentée par toute personne dûment habilitée aux fins des présentes (le « Cessionnaire »),
Une créance commerciale (y compris ses accessoires) présentée comme suit :
Facture 2018/07/677 (Chantier : [Localité 6]) du 28/07/2018 pour un montant TTC de 316.558,31 € à échéance le 30/09/2018
La cession emporte l’obligation pour l’établissement chargé du recouvrement desdites Créances de procéder, à la demande du Cessionnaire, à tout acte nécessaire à la conservation des sûretés, à leur modification éventuelle, à leur mise en jeu, à leur mainlevée et à leur exécution forcée. Tout nouvel établissement désigné par Edebex est tenu des mêmes obligations.
Bruxelles, le 03/08/2018.
Pour la S.A. EDEBEX, agissant pour le compte de M.B.C.I (suivant mandat du12/12/2017) et de BNI(‘) ( suivant mandat du 27/06/2016)’»
et portant en fin de page la signature manuscrite de «'[H] [K] CEO’».
Une deuxième créance a été cédée dans les mêmes termes’le 14 septembre 2018 :
«’Facture 2018/08/685 (Chantier: [Localité 6]) du 30/08/2018 pour un montant TTC de 263’216,45 € à échéance le 31/10/2018 »».
La société Edebex a notifié la cession de la première créance par la société MCBI correspondant à la facture 2018/07/677 du 28 juillet 2018 d’un montant de 316’558,31 euros à la société Bouygues, le 8 août 2018 par lettre recommandée avec accusé de réception.
Elle a notifié, dans les mêmes formes, la cession de la deuxième créance par la société MCBI correspondant à la facture 2018/08/685 du 30 août 2018 d’un montant de 263’216,45 euros à la société Bouygues, le 18 septembre 2018.
La société Bouygues dit avoir payé directement ces factures à la société MCBI.
Pour preuve, elle produit deux documents intitulés «’attestation de paiement’» sur papier à entête de la société ATBC, indiquant «’Je soussigné, Monsieur [Y] [L], gérant de la SARL ATB Construction, demande à BOUYGUES IMMOBILIER de bien vouloir effectuer le règlement de sa situation à MCBI (‘) ‘DIRECT MCBI’: (…)’» s’en suit les sommes litigieuses.
Ces documents sont datés des 31 juillet et 31 août 2018. Il faut remarquer que ces créances étaient à terme et que le paiement allégué par la société Bouygues est intervenu bien avant leur terme, les 30 septembre et 31 octobre 2018.
Même si ces documents en dépit de leur intitulé «’attestation de paiement’» n’établissent pas la réalité des paiements -paiement dont la société Bouygues aurait pu facilement rapporter la preuve- la société BNI ne les conteste pas.
Quant à la date des paiements effectués par la société Bouygues, en l’absence de documents, elle reste inconnue. De telle sorte, que la cour ignore si lors des deux cessions de créances, intervenues après les dates indiquées sur les documents «’attestations de paiement’», le paiement de la société Bouygues à la société MCBI a pu valablement éteindre sa dette, les créances étant régulièrement payées au délégataire, ainsi éteintes, elles n’auraient pu être cédées. Un consensus semble s’être formé entre les parties pour considérer que le paiement était intervenu mais qu’il l’a été après la notification de la cession des deux créances.
En effet, les deux cessions de créances effectuées par la société MCBI sur la société ATBC au profit de la société BNI par l’intermédiaire de la plate-forme de la société Edebex ont été réalisées le 3 août 2018, pour la première faisant l’objet d’une «’attestation de paiement’» du 31 juillet 2018, et le 14 septembre 2018, pour la seconde attestation de paiement du 31 août 2018.
Les trois conventions de délégation ne comportaient pas toutes la mention du paiement obligatoire à la société Edebex et il n’est pas possible, comme le reconnaît elle-même la société BNI, de rattacher le paiement des deux factures à l’une des trois, spécialement. Pour exemple la première qui ne mentionne pas la société Edebex, comporte le montant total du marché, le paiement peut se rattacher à celle-ci ou à la deuxième ou à la troisième. La mention du paiement par cette plateforme n’est donc pas déterminant pour la résolution du litige.
Sur ce point la société BNI se contente d’affirmer que la délégation parfaite a eu pour effet la novation par changement de débiteur, ce qui est exact mais est sans effet puisque la société Bouygues déclare avoir payé la société MCBI et qu’en application l’article 1342-3 du code civil, le paiement fait de bonne foi à un créancier apparent est valable.
En sa qualité de délégataire créancier, la société MCBI pouvait céder une créance à condition qu’elle existe encore et qu’elle soit transmise dans les formes requises.
Il faut donc vérifier en premier lieu si les créances ont été régulièrement cédées en application des textes précités.
Les deux actes de cessions ont été rédigés par la société Edebex qui se prétend mandataire du cédant, la société MCBI, et du cessionnaire, la société BNI. C’est la société Edebex qui a également notifié la cession aux sociétés ATBC et Bouygues par courriers avec accusés de réception.
Un mandataire peut rédiger un acte de cession de créance et représenter le cédant et le cessionnaire pour autant que son mandat soit valable.
À cet égard, les mandats évoqués dans les actes de cession, tant pour la société MCBI «’suivant mandat du 27/06/2016’» que pour la société BNI «’suivant mandat du12/12/2017» ne sont pas produits.
Il est produit à la place et pour preuve de ces mandats, par la société BNI une «’Attestation de mandat spécial de la société BNI’» daté du 17 juin 2020 qui concerne seulement un mandat pour la notification de la cession de créances et un document dénommé «’justificatif d’acceptation des conditions générales’» d’utilisation de la plateforme de la société Edebex par la société MCBI, en date du 11 décembre 2017, avec une photocopie de ces conditions générales selon lesquelles les créances mises en ligne et acceptées par la société Edebex sont offertes à la vente irrévocablement et inconditionnellement valant, en cas d’acceptation, contrat de vente.
Or il faut constater que la cession de sa créance par la société MCBI à la société BNI sur la plate-forme gérée par Edebex prouve que cette dernière avait mandat pour réaliser la cession, le mandat tacite pouvant résulter de son exécution. D’autre part, la contestation du mandat ne peut être faite que par le représenté, la société BNI ou la société MCBI, donc ne peut être alléguée par la société Bouygues.
Enfin, pour dénier à la société BNI un droit à agir, la société Bouygues prétend que la société BNI a été remboursée par son assureur dans les droits duquel elle ne démontre pas être subrogée.
Cependant, cette allégation n’est en rien prouvée.
En conséquence, la société BNI rapporte la preuve de sa qualité de cessionnaire des deux créances litigieuses et de son intérêt à agir pour le recouvrement de leur paiement.
Sa demande est recevable, le jugement est infirmé sur ce point.
Sur le bien fondé de la demande de la société BNI
La cession des deux créances litigieuses a été faite comme il a été rappelé ci-avant par la société Edebex pour la première correspondant à la facture 2018/07/677 du 28 juillet 2018 d’un montant de 316’558,31 euros à la société Bouygues, le 8 août 2018 par LRAR et pour la seconde correspondant à la facture 2018/08/685 du 30 août 2018 d’un montant de 263’216,45 euros à la société Bouygues, le 18 septembre 2018 par LRAR.
La société Bouygues qui prétend les avoir payées directement à la société MCBI sans en justifier, donc sans prouver les avoir payées avant la notification de la cession, par ces paiements s’est reconnue débitrice de ces sommes. En application de la délégation parfaite, la société Bouygues, « s’engage(ait) à régler toute facture/situation du délégant’», la société ATCB, à la société MCBI, délégataire.
Dans les deux documents datés des 31 juillet et 31 août 2018 intitulés «’attestation de paiement’», la société ATBC lui a demandé «’de bien vouloir effectuer le règlement de sa situation à MCBI (‘) ‘DIRECT MCBI’: (…)’» des sommes litigieuses.
La société Bouygues en payant directement la société MCBI s’est reconnue débitrice de celle-ci et doit, en application de la cession de créance intervenue, payer les sommes réclamées par la société BNI.
De plus, en application de la délégation de paiement, dont la société MCBI est bénéficiaire et dont la société BNI est cessionnaire, la société Bouygues a expressément renoncé à opposer toute exception au délégataire.
En conséquence, la société Bouygues est condamnée à payer à la société BNI la somme de 579’774,76 euros.
Sur les intérêts il est invoqué l’article L.441-6 du code de commerce, dans sa version ancienne, qui dispose «’Par dérogation aux deux premiers alinéas du présent article, pour les produits mentionnés au I de l’article L. 441-4, le non-respect de l’échéance du 1er mars prévue au IV de l’article L. 441-3 est passible d’une amende administrative dont le montant ne peut excéder 200’000 € pour une personne physique et 1’000’000 € pour une personne morale. Le maximum de l’amende encourue est porté à 400’000 € pour une personne physique et à 2’000’000 € pour une personne morale en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. »
Toutefois, la société BNI ne démontre pas que cet article est applicable aux faits de l’espèce, s’agissant d’intérêts moratoires les intérêts au taux légal sont dus à compter de la demande soit du 2 octobre 2019.
Sur la demande de dommages et intérêts
En application de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
En l’espèce, la société BNI qui prétend avoir été confrontée à des problèmes financiers du fait du refus de paiement de la société Bouygues, ne démontre en rien son préjudice.
Le retard de paiement est compensé par les intérêts moratoires alloués.
En conséquence, la demande est rejetée.
Sur les dépens et les autres frais de procédure
La société Bouygues Immobilier, qui succombe, doit être condamnée aux dépens de première instance et d’appel, conformément à l’article 696 du code de procédure civile. Les dépens pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l’article 699 du même code. Le jugement est infirmé sur ce point.
Selon l’article 700 1° de ce code, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
Le jugement est infirmé également sur ce point, les circonstances de l’espèce justifient de condamner la société Bouygues Immobilier à payer à la société Banco de negocios international une indemnité de 10’000 euros au titre des frais exclus des dépens exposés en cause d’appel, elle sera elle-même déboutée de sa demande à ce titre.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant après débats en audience publique, par arrêt contradictoire,
Infirme le jugement déféré dans les limites de l’appel interjeté,
Statuant de nouveau,
Dit recevables les demandes de la société Banco de negocios international’;
Condamne la société Bouygues Immobilier à payer à la société Banco de negocios international la somme de 579’774,76 euros outre les intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2019′;
Déboute la société Banco de negocios international de sa demande de dommages et intérêts’;
Condamne la société Bouygues Immobilier aux dépens de première instance et d’appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile’;
Condamne la société Bouygues Immobilier à payer à la société Banco de negocios international une indemnité de 10’000 euros, par application de l’article 700 du code de procédure civile, et la déboute de sa demande à ce titre.
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Fabienne TROUILLER, Présidente et par Madame Jeannette BELROSE,
Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,