L’affaire concerne un litige entre les propriétaires de deux parcelles contiguës à Hauts-de-Seine. M. et Mme [K] ont effectué des travaux d’aménagement sur leur propriété, ce qui a entraîné des dommages pour les propriétaires voisins, Mme [V] et son fils M. [S]. Les parties ont tenté une expertise amiable sans succès, et les consorts [S] ont finalement assigné M. et Mme [K] devant le tribunal de proximité d’Antony.
Après une expertise judiciaire, le tribunal a rendu un jugement en août 2021, ordonnant diverses mesures, notamment le retrait de végétaux en limite de propriété et la suppression de certains aménagements. Les consorts [S] ont interjeté appel de ce jugement en septembre 2021. Les dernières conclusions des parties demandent à la cour d’infirmer certaines parties du jugement initial et de confirmer d’autres, tout en demandant des dommages et intérêts et le remboursement des frais. L’affaire est en attente de la clôture de l’instruction en juin 2023.
Sur les limites de l’appel
Il résulte des écritures susvisées que le jugement est querellé en toutes ses dispositions.
Sur la demande de bornage judiciaire
Les consorts [S] réitèrent leur demande de bornage judiciaire à frais partagés à hauteur d’appel, au fondement de l’article 246 du code de procédure civile. M. [K] et Mme [F] sollicitent le rejet de cette demande, arguant qu’elle était subsidiaire en première instance.
Sur la fixation des limites de propriété
Les consorts [S] contestent le choix de l’expert pour fixer les limites de propriété. M. [K] et Mme [F] soutiennent que l’expert a suivi les limites séparatives désignées par les parties.
Sur la prescription acquisitive trentenaire de la toiture et de ses éléments
Les consorts [S] revendiquent l’acquisition par prescription acquisitive trentenaire de la rive à ourlet. M. [K] et Mme [F] contestent cette revendication.
Sur les autres empiètements (clôture, plots en béton et végétaux)
Les consorts [S] demandent la confirmation du jugement concernant les empiètements. M. [K] et Mme [F] soutiennent que les consorts [S] n’ont pas remplacé la clôture en limite de propriété.
Sur les désordres de la cave des consorts [S] et leur demande de tour d’échelle
Les consorts [S] demandent des travaux dans leur cave. M. [K] et Mme [F] contestent la responsabilité des désordres.
Sur le retrait de la clôture posée par M. [K] et Mme [F] au pied du mur pignon
M. [K] et Mme [F] demandent la confirmation du retrait de la clôture. Les consorts [S] contestent le retrait de la clôture.
Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts
M. [K] et Mme [F] demandent une indemnisation. Les consorts [S] demandent le rejet de cette demande.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Les consorts [S] sont condamnés aux dépens. M. [K] et Mme [F] sont condamnés aux dépens de l’instance d’appel et à verser une somme aux consorts [S] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Réglementation applicable
– Code de procédure civile
– Code civil
Avocats
– Me Claire RICARD
– Me Jeanne GAILLARD
– Me Nathalie PANOSSIAN
Mots clefs
– Limites de l’appel
– Bornage judiciaire
– Expertise
– Propositions de bornage
– Prescription acquisitive trentenaire
– Rive à ourlet
– Limites de propriété
– Désordres de la cave
– Tour d’échelle
– Retrait de la clôture
– Demande reconventionnelle de dommages et intérêts
– Frais irrépétibles
– Dépens
Définitions juridiques
– Limites de l’appel : les restrictions ou conditions spécifiques qui s’appliquent à un appel judiciaire
– Bornage judiciaire : délimitation officielle des propriétés par un tribunal
– Expertise : évaluation professionnelle et impartiale d’une situation ou d’un problème
– Propositions de bornage : suggestions pour délimiter les propriétés de manière officielle
– Prescription acquisitive trentenaire : acquisition de propriété par possession continue et incontestée pendant 30 ans
– Rive à ourlet : bord d’un cours d’eau ou d’un lac
– Limites de propriété : frontières officielles d’une propriété
– Désordres de la cave : problèmes structurels ou de fondation dans un bâtiment
– Tour d’échelle : inspection visuelle de la propriété depuis une échelle
– Retrait de la clôture : enlèvement d’une barrière ou d’une clôture
– Demande reconventionnelle de dommages et intérêts : demande d’indemnisation formulée par le défendeur dans une affaire judiciaire
– Frais irrépétibles : frais non récupérables dans une procédure judiciaire
– Dépens : frais de justice et honoraires d’avocat dans une affaire judiciaire
* * *
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Chambre civile 1-1
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
Code nac : 70E
DU 09 JANVIER 2024
N° RG 21/05899
N° Portalis DBV3-V-B7F-UX7L
AFFAIRE :
[L], [D], [A] [V]
…
C/
[G], [O], [H] [F]
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 26 Août 2021 par le Juridiction de proximité d’ANTONY
N° RG : 11-17-0002
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Claire RICARD
Me Jeanne GAILLARD
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dont le délibéré a été prorogé les 24 octobre, 12 et 19 décembre 2023, les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :
Madame [L], [D], [A] [V]
née le 15 Octobre 1939 à [Localité 9]
de nationalité Française
et
Monsieur [U], [Z] [S]
né le 23 Décembre 1959 à [Localité 8]
de nationalité Française
demeurant ensemble [Adresse 1]
[Localité 4]
représentés par Me Claire RICARD, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 – N° du dossier 2211516 –
Me Nathalie PANOSSIAN, avocat – barreau de PARIS, vestiaire : C2033
APPELANTS
****************
Madame [G], [O], [H] [F]
née le 17 Août 1963 à [Localité 5]
de nationalité Française
et
Monsieur [N], [X] [K]
né le 16 Février 1964 à [Localité 3]
de nationalité Française
demeurant ensemble au [Adresse 2]
[Localité 3]
représentés par Me Jeanne GAILLARD de la SCP ACGR, avocat – HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 748 – N° du dossier 16M0151
INTIMÉS
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 03 Juillet 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anna MANES, Présidente et Madame Sixtine DU CREST, Conseiller chargée du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Anna MANES, Présidente,
Madame Pascale CARIOU, Conseiller,
Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame Françoise DUCAMIN,
FAITS ET PROCÉDURE
M. [K] et Mme [F] sont propriétaires d’une maison située sur une parcelle cadastrée [Cadastre 6] située [Adresse 2] à [Localité 4] (Hauts-de-Seine). Mme [V] et son fils, M. [S], sont propriétaires de la parcelle limitrophe cadastrée [Cadastre 7] et située [Adresse 1].
Courant mai 2001, M. [K] et Mme [F] ont procédé à des travaux d’aménagement de leur propriété et ont surélevé leur terrain en créant des plateformes de terre et des murets de terrassement.
M. [S] et Mme [V] (ci-après les consorts [S]) se sont plaints de dommages dû à l’adossement d’un des murets de terrassement sur leur mur pignon.
De leur côté M. [K] et Mme [F] invoquent un grief relatif à la présence de végétaux en limite de leur propriété, notamment de rhizomes issus de plantations de bambous.
Une expertise amiable a été diligentée par l’assureur de M. et Mme [S] en présence de M. [K] et Mme [F] et de leur expert.
A défaut de solution amiable entre les parties et considérant que ces aménagements leur causaient préjudice, les consorts [S] ont assigné M. et Mme [K] devant le tribunal de proximité d’Antony par acte du 8 mars 2017 aux fins d’ordonner le retrait de la terre adossée à leur mur pignon, le retrait de matériaux adossés à la clôture et le déplacement d’un abri de jardin.
Une expertise judiciaire a été ordonnée le 8 novembre 2018 et l’expert judiciaire, [R] [Y], géomètre expert, a remis son rapport le 3 février 2020.
Par un jugement contradictoire rendu le 26 août 2021, le tribunal de proximité d’Antony a :
– Rejeté la demande de bornage judiciaire de M. et Mme [V] ;
– Homologué les conclusions de l’expert sur les limites de propriétés selon la proposition N01 et en conséquence, condamné solidairement M. et Mme [V] à supprimer les végétaux placés à moins de 50 cm de la limite de propriété et à couper les arbres et haies situés à moins de deux mètres de la limite de propriété à moins de deux mètres de hauteur, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,
– Condamné par ailleurs, solidairement M. et Mme [V] à placer un anti-rhizome pour les bambous, à les limiter à deux mètres de hauteur, à supprimer tous ceux situés à moins de 50 cm de la limite de propriété et tous ceux ayant poussé sur le terrain de M. [K] et Mme [F], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement ;
– Dit que les travaux seront réalisés sous le contrôle d’un huissier de justice qui dressera un procès-verbal de constat avant et après les travaux aux frais exclusifs de M. et Mme [V] ;
– Ordonné à M. et Mme [V] de déposer à leurs frais la clôture, les plots béton et les végétaux ainsi que la zinguerie, élément de toiture, empiétant sur le terrain des défendeurs et à reposer à leurs frais la clôture en limite séparative conformément au plan N°1 de l’expert, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement ;
– Dit que les travaux seront réalisés sous le contrôle d’un géomètre qui vérifiera le respect du plan de M. [Y], proposition de limite et aux frais exclusifs de M. et Mme [V] ;
– Ordonné à M. [K] et Mme [F] de retirer la clôture située en parallèle du mur sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement ;
– Débouté en l’état, M. et Mme [V] de leur demande de tour d’échelle et de toutes demandes de condamnations au paiement de travaux dans la cave ;
– Condamné solidairement M. et Mme [V] à payer aux défendeurs la somme de 2500 euros à titre de dommages et intérêts pour leur préjudice moral ;
– Rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties ;
– Condamné solidairement M. et Mme [V] à verser à M. [K] et Mme [F] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné in solidum M. et Mme [V] aux entiers dépens comprenant le coût de l’expertise judiciaire ;
– Rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
M. [S] et Mme [V] ont interjeté appel de ce jugement le 27 septembre 2021 à l’encontre de Mme [F] et M. [K].
Par dernières conclusions notifiées le 16 mai 2023, Mme [V] et M. [S] demandent à la cour de :
– D’infirmer le jugement en ce qu’il a :
Rejeté la demande de bornage judiciaire de M. et Mme [V],
Homologué les conclusions de l’expert sur les limites de propriétés selon la proposition N01 et en conséquence, condamné solidairement M. et Mme [V] à supprimer les végétaux placés à moins de 50 cm de la limite de propriété et à couper les arbres et haies situés à moins de deux mètres de la limite de propriété à moins de deux mètres de hauteur, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,
Condamné par ailleurs, solidairement M. et Mme [V] à placer un anti-rhizome pour les bambous, à les limiter à deux mètres de hauteur, à supprimer tous ceux situés à moins de 50 cm de la limite de propriété et tous ceux ayant poussé sur le terrain de M. [K] et Mme [F], sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,
Dit que les travaux seront réalisés sous le contrôle d’un huissier de justice qui dressera un procès-verbal de constat avant et après les travaux aux frais exclusifs de M. et Mme [V],
Ordonné à M. et Mme [V] de déposer à leurs frais la clôture, les plots béton et les végétaux ainsi que la zinguerie, élément de toiture, empiétant sur le terrain des intimés et à reposer à leurs frais la clôture en limite séparative conformément au plan N°1 de l’expert, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,
Dit que les travaux seront réalisés sous le contrôle d’un géomètre qui vérifiera le respect du plan de M. [Y], proposition de limite et aux frais exclusifs de M. et Mme [V],
Débouté en l’état, M. et Mme [V] de leur demande de tour d’échelle et de toutes demandes de condamnations au paiement de travaux dans la cave,
Condamné solidairement M. et Mme [V] à payer aux intimés la somme de 2500 euros à titré de dommages et intérêts pour leur préjudice moral,
Rejeté toute demande plus ample ou contraire des parties,
Condamné solidairement M. et Mme [V] à verser à M. [K] et Mme [F] la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamné in solidum M. et Mme [V] aux entiers dépens comprenant le coût de l’expertise,
Rappelé que l’exécution provisoire est de droit.
– De confirmer le jugement entrepris pour le surplus,
Et, statuant à nouveau :
-De rejeter les conclusions du rapport d’expertise en ce qu’il propose de retenir sa proposition de limites n°1, qui aurait pour effet d’exproprier les demandeurs d’une partie de leur bien et de contraindre au retrait des éléments de toiture et des végétaux,
– De constater l’acquisition de la prescription trentenaire en ce qui concerne la rive à ourlet présente sur le mur pignon de la maison de M. [S] et Mme [V],
– D’ordonner un bornage judiciaire des deux propriétés et désigner un nouveau géomètre-expert avec la mission habituelle en la matière,
– De dire que les frais d’expertise en vue du bornage judiciaire sera partagé entre les parties comme présentant un intérêt commun,
– De dire que les désordres affectant la cave/chaufferie des époux [V] ont pour origine les terrassements réalisés par les consorts [K] [F],
– De condamner M. [K] et Mme [F] in solidum à indemniser les époux [V] de leur préjudice financier au titre de ces désordres subis dans leur cave chaufferie, à hauteur de 2.293,50 € TTC, somme qui sera réactualisée selon l’indice BT01,
– D’ordonner à M. [K] et Mme [F] in solidum de laisser les ouvriers pénétrer sur leur terrain pour réparer les microfissures sur le mur pignon, après que les terrassements auront été retirés, sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter d’un mois de la signification du jugement à intervenir,
Sur l’appel incident formé par les intimés :
– De débouter M. [K] et Mme [F] de leurs demandes, fins et conclusions au titre de leur appel incident,
– De condamner M. [K] et Mme [F] in solidum à verser à M. [S] et Mme [V] la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– De les condamner in solidum aux entiers dépens qui comprendront les frais d’expertise.
Par dernières conclusions notifiées le 2 juin 2023, Mme [F] et M. [K] demandent à la cour :
– D’infirmer le jugement rendu par le tribunal de proximité d’Antony le 26 août 2021 en ce qu’il a :
Ordonné à M. [K] et Mme [F] de retirer la clôture située en parallèle du mur sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,
Condamné solidairement M. et Mme [V] à payer aux défendeurs la somme de 2.500 euros à titre de dommages et intérêts pour leur préjudice moral,
Statuant à nouveau,
– De condamner M. et Mme [S] à payer à M. [K] et Mme [F] la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de leur préjudice moral,
– De confirmer le jugement entrepris pour le surplus
Y ajoutant,
– Condamner M. et Mme [S] à payer à M. [K] et Mme [F] la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– De condamner M. et Mme [S] aux entiers dépens exposés devant la cour.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 8 juin 2023.
SUR CE, LA COUR,
Sur les limites de l’appel
Il résulte des écritures susvisées que le jugement est querellé en toutes ses dispositions.
Sur la demande de bornage judiciaire
Moyens des parties
Poursuivant l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté leur demande de bornage judiciaire, les consorts [S] réitèrent leur demande de bornage judiciaire à frais partagés à hauteur d’appel, au fondement de l’article 246 du code de procédure civile, au motif qu’il n’a jamais été procédé à un bornage depuis la division des deux parcelles ([Cadastre 6] et [Cadastre 7]) et que l’expert, qui n’a pas été saisi d’une mission de bornage, a proposé deux méthodes de fixation de la limite de propriété et a retenu la première sans expliquer les raisons de ce choix et sans expliquer sa méthodologie. Les consorts [S] exposent que ce choix aboutit à réduire leur surface de propriété et à leur condamnation à la suppression de plusieurs empiétements, notamment des éléments de zinguerie de leur toiture (rive à ourlet), sur le fonds des intimés. Ils contestent donc ce choix opéré par l’expert qui leur est préjudiciable.
Poursuivant la confirmation du jugement sur ce point, M. [K] et Mme [F] sollicitent le rejet de cette demande et précisent qu’elle n’était que subsidiaire en première instance. Ils ajoutent que jamais au cours des opérations d’expertise, les appelants n’ont demandé d’étendre la mission de l’expert à un bornage. Selon eux, cette demande s’apparente en réalité à une contre-expertise qui est infondée puisque le rapport de M. [Y] est étayé et justifié.
Appréciation de la cour
La cour observe que si M. [Y] n’a pas été saisi d’une demande de bornage, il n’en demeure pas moins géomètre-expert et qu’il a fixé la limite séparative entre les parcelles [Cadastre 7] et [Cadastre 6] en traçant une ligne droite d’un point A au sud à un point B au nord. Le point A correspond à l’intersection des deux murs sur rue. Le point B correspond au prolongement d’un fer ancien de l’ancienne clôture jusqu’à l’angle d’un poteau à l’extrémité des terrains. Il résulte du rapport de l’expert que ces deux points ne sont pas contestés par les parties (pièce 1, 18 et 19 Appelants).
Par ailleurs, contrairement à ce que prétendent les appelants, l’expert indique avoir précisé sa méthodologie « très classique » dans une note aux parties n°2 page 16, note qui n’est pas versée aux débats. Les appelants la citent partiellement dans leurs écritures page 15, dont il résulte que Mme [V] considère que la limite passe au droit de sa toiture, alors que M. [K] estime qu’elle passe le long du pignon au sol de la maison des consorts [S].
L’expert propose de retenir la proposition n°1 (pièce 18 appelant)
La cour constate en outre que la demande de bornage judiciaire n’était que subsidiaire en première instance dans les dernières conclusions des consorts [S] après le dépôt du rapport d’expertise. De plus, cette demande n’était pas formulée avant que soit ordonnée une expertise judiciaire. Il se déduit de ses éléments que cette demande de bornage judiciaire résulte du fait que les conclusions du rapport d’expertise de M. [Y] sont défavorables aux appelants.
Il s’ensuit qu’il n’y a pas lieu d’ordonner un bornage judiciaire et de rallonger la procédure alors que cette demande n’était pas l’objet principal du litige.
Dès lors, le jugement, en ce qu’il a rejeté cette demande, sera confirmé.
Sur la fixation des limites de propriété
Moyens des parties
Poursuivant l’infirmation du jugement en ce qu’il a homologué les conclusions de l’expert sur les limites de propriétés selon la proposition n°1, les consorts [S] font valoir que l’expert a opté pour sa proposition n°1 au détriment de sa proposition n°2, sans expliquer les raisons de ce choix ni sa méthodologie. S’appuyant sur leur acte d’acquisition de 1999 et sur un constat d’huissier du 24 novembre 1999, ils indiquent que la largeur de leur propriété (13,73 m dans la proposition n°1 et 13,84m dans la proposition n°2) et celle des défendeurs (13,50 m dans la proposition n°1 et 13,49 m dans la proposition n°2) varient selon la proposition retenue sans que ces différences soient compréhensibles.
Poursuivant la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu la proposition n°1 de l’expert pour fixer les limites de propriété, M. [K] et Mme [F] font valoir que l’expert a repris les limites séparatives désignées par les parties et corroborées par des marques anciennes, puis a tracé une ligne droite entre ses deux points conformément aux plans initiaux qui représentaient une limite rectiligne.
Appréciation de la cour
L’acte d’acquisition des époux [S] du 30 juin 1999, qui a été analysé par l’expert, mentionne :
« Etant ici précisé par le vendeur :
Sur les clôtures et mitoyennetés :
A titre de simple renseignement et sans garantie de sa part :
Que la haie séparant la propriété vendue [J34] de celle située à sa droite [J222] dépend de la propriété vendue [J34] » (pièce 1 appelant).
Cette mention constituant un « simple renseignement », « sans garantie » est trop vague pour constituer un titre susceptible de déterminer la limite de propriété.
Par ailleurs, aucune conclusion quant à la limite de propriété ne peut être valablement tirée du procès-verbal de constat du 24 novembre 1999 (pièce 25 appelants), dans lequel l’huissier de justice ne s’est prononcé que sur la description des clôtures et la présence des végétaux (pièce 25 appelants).
Il résulte de ce qui précède que le jugement sera confirmé en ce qu’il a homologué les conclusions de l’expert sur les limites de propriétés telles que fixées dans la proposition n°1.
Sur la prescription acquisitive trentenaire de la toiture et de ses éléments (dont la rive à ourlet)
Moyens des parties
Poursuivant l’infirmation du jugement en ce qu’il a tiré les conséquences de la fixation des limites de propriété selon la proposition n°1 de l’expert et constaté un empiètement des éléments de zinguerie de la toiture, les consorts [S] demandent à la cour de constater qu’ils ont acquis la propriété de ces éléments par la prescription acquisitive trentenaire.
Ils expliquent que la maison édifiée sur leur parcelle est une maison d’architecte, édifiée par l’architecte [B] [J] en 1955 et que, dès l’origine, figurait sur le toit une rive à ourlet et un système original pour l’écoulement des eaux pluviales. Ils produisent le certificat de conformité des anciens propriétaires de 1958 et insistent sur le fait que si la construction n’avait pas respecté les règles d’urbanisme et notamment, le plan cadastral et les limites de propriété, ce certificat n’aurait pas été délivré. Ils précisent qu’en 1990 et 2021, le toit a été refait à l’identique avec l’approbation de l’architecte des bâtiments de France. Ils ajoutent que le couvreur (société THP), intervenu en 2021, a refusé d’exécuter le jugement et de supprimer la rive à ourlet compte tenu du caractère indissociable de cet élément avec la toiture. Ils produisent une attestation d’un architecte, M. [T], indiquant que la rive à ourlet ne peut être enlevée au risque d’endommager le mur pignon. Ils déduisent de la présence de la rive à ourlet dès l’origine et de son remplacement à l’identique en 1990 et 2001, l’acquisition de la prescription trentenaire. Ils soulignent enfin que des travaux de suppression de la rive à ourlet et de la zinguerie empiétant sur le fonds voisin seraient extrêmement coûteux et dénatureraient l’oeuvre originale de M. [J].
Poursuivant la confirmation du jugement en ce qu’il a rejeté cette demande, M. [K] et Mme [F] exposent que la toiture et la zinguerie sont des ouvrages réalisés depuis moins de 30 ans par les époux [S]. Ils considèrent que le remplacement de la zinguerie à l’identique en 1990 n’est pas démontré
Appréciation de la cour
L’article 2258 du code civil dispose que ‘La prescription acquisitive est un moyen d’acquérir un bien ou un droit par l’effet de la possession sans que celui qui l’allègue soit obligé d’en rapporter un titre ou qu’on puisse lui opposer l’exception déduite de la mauvaise foi.’
Selon l’article 2261 du même code, ‘Pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire.’
L’article 2272 du code civil précise que « le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans. Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans ».
L’usucapion est un mode d’acquisition de la propriété, par l’effet d’une possession trentenaire utile. Une possession n’est utile que si elle est véritable, impliquant le corpus et l’animus domini, qu’elle se fait à titre de véritable propriétaire, et qu’elle est exempte de vices (ni violente, ni clandestine, ni discontinue, ni équivoque).
Le corpus est l’élément fondamental de la possession et il appartient à celui qui invoque la prescription acquisitive de faire état d’actes matériels desquels on puisse déduire, de sa part, une prise de possession et l’intention d’exercer la possession conforme au droit invoqué.
Il revient donc au demandeur qui l’invoque de caractériser l’existence d’actes matériels de possession pour pouvoir utilement se prévaloir d’une usucapion, l’absence de vices ne suffisant pas. Ces actes de jouissance matériels invoqués doivent être suffisants dans leur intensité ou dans leur étendue.
Les faits de possession doivent également révéler, de façon explicite et certaine, que celui qui les accomplit se considère comme propriétaire. Les tiers ne doivent pas pouvoir se tromper et se demander à quel titre le possesseur agit.
Il sera ajouté que la preuve du droit de propriété est libre et que n’existe aucune hiérarchie entre les différentes preuves, bien qu’une possession trentenaire utile d’un fonds immobilier emporte généralement la conviction face à un titre contesté.
En l’espèce, il est établi par les productions des appelants que leur maison a été conçue par l’architecte [C] [J] et que le toit n’est pas pourvu d’une gouttière classique mais d’une rive à ourlet doublée d’un système original de collecte et d’évacuation des eaux pluviales via des gouttières en moignon crapaudine. La rive à ourlet et ce système d’évacuation sont interdépendants l’un de l’autre (pièces 3, 33, 37 et 50 des appelants). En effet, l’attestation du 9 novembre 2020 de M. [T], architecte, produite par les appelants, établit que la rive à ourlet était présente dès l’origine et que, par son débord de 3 cm, elle permet d’empêcher les eaux de pluie de s’infiltrer dans le mur. Cet architecte atteste en outre qu’ « il est impossible d’enlever cette rive à ourlet, au risque d’infiltrations majeures et de coulures inesthétiques sur le mur pignon. Par ailleurs, je pense qu’aucun couvreur n’acceptera de réaliser cette opération pour des raisons évidentes de responsabilité » (pièce 38 appelant). L’ordonnance de référé du 10 mars 2022 a notamment retenu cette attestation pour caractériser les conséquences manifestement excessives et suspendre l’exécution provisoire attachée au chef de dispositif ordonnant aux consorts [S] de déposer à leurs frais la clôture, les plots béton et les végétaux ainsi que la zinguerie, élément de toiture, empiétant sur le terrain des défendeurs.
Par ailleurs, il résulte de l’acte d’acquisition des époux [S] du 30 juin 1999 qu’ils ont acquis un bien immobilier sis [Adresse 1], à [Localité 4], cadastrée [Cadastre 7] correspondant à une superficie de six ares soixante-quinze centiares, correspondant à « une propriété composée d’un pavillon à usage d’habitation ». Les consorts [S] ont donc acquis le pavillon dans son entier, en ce compris l’intégralité de la toiture.
Cet acte indique également que les vendeurs (les époux [E]) ont acquis le bien suivant acte du 31 mars 1982 (page 12, pièce 1 des appelants) et qu’ils n’ont pas édifié de construction depuis leur acquisition (page 4, pièce 1 appelants).
L’acte d’acquisition de la parcelle [Cadastre 7] par les époux [E] précise que la maison a été construite en 1955 selon un permis de construire délivré en 1955 (pièces 4 des appelants). Il résulte de l’examen de la demande de permis de construire déposée par M. [M] le 15 mars 1955 et du devis des travaux signé par R. [J] que la toiture comporte une bande de rive en aluminium et deux gouttières en moignon crapaudine permettant l’évacuation des eaux fluviales (pièce 37 des appelants). Ce permis de construire a fait l’objet d’une décision référencée n°980 du Préfet de la Seine du 31 mai 1955 prononçant un sursis à statuer dans l’attente du projet d’aménagement de [Localité 4] (pièce 37). Le certificat de conformité du 30 juillet 1958 concernant cette même parcelle J34, après avoir rappelé la référence à la décision de sursis à statuer (« P.S. 980 »), précise qu’un permis de construire a finalement été accordé à M. [M] le 29 septembre 1955 et qu’à l’issue des travaux, un certificat de conformité a été accordée le 30 juillet 1958 (pièce 34 appelants).
En outre, les appelants justifient que des éléments de la toiture, dont de nouvelles bandes de rive, ont été refaits à l’identique en 1990 et 2021, par la production des pièces 39 (justificatifs des travaux entrepris par la société de couverture TSE) et 53 (attestation de M. [I], de la société THP qui a entrepris des travaux de couverture du toit en 2021).
Il s’ensuit que le pavillon, avec sa toiture, acquis par les époux [M] en 1955, puis les époux [E] en 1982 et enfin par les époux [S] en 1999 n’a pas été modifié depuis 1955. Ces propriétaires successifs ont tous acquis la parcelle [Cadastre 7], avec le pavillon et l’intégralité de sa toiture, sans que cette possession ne soit jamais contestée.
Le premier acte de contestation des limites de propriété est intervenu en 2017 lorsque dans leurs premières conclusions en défense, M. [K] et Mme [F], assignés par les consorts [S], ont sollicité la désignation d’un géomètre expert afin de rechercher les limites séparatives des fonds.
Les propriétaires successifs de la parcelle [Cadastre 7] se sont donc comportés en véritable propriétaire du pavillon dans son entier, en ce compris l’intégralité de la toiture comprenant la rive à ourlet, pendant plus de trente ans et leur possession a été continue, non interrompue, paisible, publique, non équivoque (les caractères de cette possession n’étant au demeurant pas contestés) pendant plus de trente ans, depuis 1955 et jusqu’en 2017.
Par conséquent, par l’effet de la prescription acquisitive trentenaire, les consorts [S] sont propriétaires des éléments de zinguerie (dont la rive à ourlet) qui, selon l’expert M. [Y], débordent de 3 à 4 centimètres de la limite de propriété telles que fixées dans sa proposition n°1.
La cour note d’ailleurs, surabondamment, que l’expert a précisé dans son rapport : « La maison est une maison ancienne avec un enjeu architectural clair dans un style très particulier, il nous apparaît peu probable que ce débord est (sic) moins de 30 ans » (pièce 11 appelants, page 40).
Dès lors, il y a lieu de faire droit à la demande des consorts [S] visant à dire qu’ils ont acquis par l’effet de la prescription acquisitive trentenaire la propriété de la rive à ourlet (qui déborde de la limite de leur propriété).
Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a ordonné à M. et Mme [V] de déposer à leurs frais la zinguerie, élément de toiture, empiétant sur le terrain des défendeurs conformément au plan N°1 de l’expert, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement.
Statuant à nouveau, la cour dira que les consorts [S] ont acquis par l’effet de la prescription acquisitive trentenaire la propriété de la rive à ourlet qui déborde de la limite de propriété telles que fixées dans la proposition n°1 de l’expert.
Sur les autres empiètements (clôture, plots en béton et végétaux)
Moyens des parties
Poursuivant l’infirmation du jugement en ce qu’il a fixé les limites de propriété selon la proposition n°1 de l’expert et ordonné le retrait des empiètements de la clôture, des plots en béton et des végétaux, les consorts [S] demandent à la cour de constater qu’ils ont retiré la clôture empiétant sur le fonds voisin et que, n’étant pas obligés de clôturer leur fonds, ils n’ont pas à ce stade érigé une nouvelle clôture en limite séparative.
Poursuivant la confirmation du jugement sur ce point, M. [K] et Mme [F] confirment qu’aucune nouvelle clôture conforme à la proposition n°1 de l’expert n’a été posée par les appelants. Ils font valoir que les intimés ne démontrent pas la raison pour laquelle le jugement devrait être réformé.
Appréciation de la cour
Les consorts [S] ne produisent aucun élément probant de nature à entraîner l’infirmation du jugement qui a très justement tiré les conséquences du rapport d’expertise du 31 janvier 2020.
Il y a lieu cependant, compte tenu des justificatifs de revenus des consorts [S] (pièce 46) de diminuer le montant de l’astreinte et d’en revoir les modalités.
Il s’ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu’il a :
– condamné solidairement M. et Mme [V] à supprimer les végétaux placés à moins de 50 cm de la limite de propriété et à couper les arbres et haies situés à moins de deux mètres de la limite de propriété à moins de deux mètres de hauteur ;
– Condamné par ailleurs, solidairement M. et Mme [V] à placer un anti-rhizome pour les bambous, à les limiter à deux mètres de hauteur, à supprimer tous ceux situés à moins de 50 cm de la limite de propriété et tous ceux ayant poussé sur le terrain de M. [K] et Mme [F] ;
– Dit que les travaux seront réalisés sous le contrôle d’un huissier de justice qui dressera un procès-verbal de constat avant et après les travaux aux frais exclusifs de M. et Mme [V] ;
– Ordonné à M. et Mme [V] de déposer à leurs frais la clôture, les plots béton et les végétaux empiétant sur le terrain des défendeurs et à reposer à leurs frais la clôture en limite séparative conformément au plan N°1 de l’expert ;
– Dit que les travaux seront réalisés sous le contrôle d’un géomètre qui vérifiera le respect du plan de M. [Y], proposition de limite et aux frais exclusifs de M. et Mme [V].
Il sera infirmé sur les astreintes prononcées et la cour dira que ces condamnations visant à supprimer des végétaux, placer un anti-rhizome, supprimer la clôture, les plots béton et les végétaux empiétant sur le terrain des intimés et reposer une nouvelle clôture conforme à la proposition n°1 de fixation des limites de propriété devront être exécutées dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et ce, pendant 18 mois.
Sur les désordres de la cave des consorts [S] et leur demande de tour d’échelle
Moyens des parties
Poursuivant l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté leur demande de travaux dans leur cave, les consorts [S] font valoir que les désordres constatés dans leur cave (infiltrations) affectent seulement le bas du mur pignon, et sont apparus avec les terrassement des intimés. S’appuyant sur un procès-verbal de constat du 9 juin 2022, ils soutiennent que les désordres dans leur cave ont empiré depuis l’expertise judiciaire et qu’ils ne peuvent intervenir sur leur mur pignon sans l’autorisation de leurs voisins. S’appuyant sur un devis de réparation de 2293,50 euros de la société Inov-Renov, ils demandent la condamnation des intimés à leur verser cette somme en réparation de leur préjudice financier. Ils demandent en outre que soit ordonné à M. [K] et Mme [F] d’autoriser l’intervention d’une entreprise sur leur fonds pour réparer les micro-fissures de leur mur pignon, sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans le délai d’un mois de la signification de l’arrêt à intervenir.
S’appuyant sur le rapport d’expertise de M. [Y], M. [K] et Mme [F] font valoir qu’aucun désordre ne peut être relié aux terrassements opérés par les appelants. Ils ajoutent que rien ne permet d’affirmer que les traces d’humidité seraient identiques
Appréciation de la cour
L’article 1240 du code civil dispose que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il résulte de l’expertise du 31 janvier 2020 que les micro-fissures et les infiltrations observées dans le mur pignon des consorts [S] sont dues en premier lieu au fait que le bâtiment ne dispose pas d’un système spécifique assurant l’étanchéité de la partie située au sous-sol ; que les travaux de terrassement entrepris par M. [K] sont minimes au prorata de la dimension du mur pignon et qu’il « ne peut être tenu pour responsable des déficiences de conception et éventuellement d’entretien du bâtiment [S] » (pièce 11 appelant).
Il s’ensuit qu’en l’absence de faute commise par M. [K] et de lien de causalité entre les infiltrations et la faute alléguée, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande d’indemnisation de leur préjudice financier formée par les consorts [S].
En revanche, il est établi par l’expert que le mur pignon des consorts [S] nécessite une intervention de nature à diminuer la porosité du mur et d’éviter les infiltrations. Ce mur se situant en limite de propriété, il est indispensable que les ouvriers passent par le fonds des intimés.
Il s’ensuit que le jugement sera infirmé en ce qu’il a débouté les consorts [S] de leur demande de tour d’échelle et la cour ordonnera à M. [K] et Mme [F] d’autoriser l’intervention d’une entreprise sur leur fonds pour réparer les micro-fissures du mur pignon des consorts [S], aux frais exclusifs de ces derniers, dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et ce, pendant 18 mois.
Sur le retrait de la clôture posée par M. [K] et Mme [F] au pied du mur pignon
Moyens des parties
Poursuivant la confirmation du jugement sur ce point, M. [K] et Mme [F] verses au débat des photographies qui démontrent, selon eux, qu’ils ont bien retiré la clôture située en parallèle du mur pignon et exécuté les préconisations du rapport d’expert.
Poursuivant la confirmation du jugement sur ce point, les consorts [S] font valoir que les intimés ne justifient pas avoir posé le système d’isolation qu’ils prétendent avoir installé sur leur mur pignon pour éviter que la terre ne s’y adosse, et l’avoir retiré juste après le rapport de M. [Y]. Ils ajoutent que M. [K] n’a pas respecté l’engagement qu’il avait pris lors de la conciliation notamment de respecter une distance de 50 cm nécessaire au ravalement du mur pignon des appelants. S’appuyant sur le rapport d’expertise du cabinet Eurexo, ils ajoutent que le mur pignon a été recouvert sur une hauteur de 20 à 30 cm par l’apport de terres.
Appréciation de la cour
Le rapport d’expertise conclut à la nécessité de supprimer la clôture installée en parallèle du mur pignon par M. [K] au risque de faire affluer les eaux de pluie en un endroit précis et d’avoir des conséquences négatives sur la porosité de la terre.
Les photographies produites par les intimés sont peu précises. On y voit un amas de terre directement posé contre un mur, sans que puissent être localisés cet amas de terre et sans mettre en mesure la cour de vérifier que le mur apparaissant sur les photographies correspond au mur pignon litigieux (pièce 19 intimés).
Il s’ensuit qu’il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu’il a ordonné à M. [K] et Mme [F] de retirer la clôture située en parallèle du mur et de l’infirmer sur l’astreinte. La cour dira que les intimés devront retirer cette clôture dans un délai de 3 mois à compter de la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et ce, pendant 18 mois
Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts
Moyens des parties
Poursuivant l’infirmation du jugement sur le montant, M. [K] et Mme [F] demandent une indemnisation à hauteur de 5000 euros. Ils invoquent le comportement procédurier de leurs voisins qui les ont assignés à deux reprises en justice sans motif valable, ainsi que le fait d’être continuellement « harcelés et épiés ». Ils ajoutent qu’ils sont les victimes des empiètements constatés, que les consorts [S] n’ont pas remplacé la clôture en limite de propriété et que ces derniers sont les seuls responsables des frais de procédure engagés depuis des années.
Poursuivant l’infirmation du jugement en ce qu’il les a condamnés à verser aux intimés 2500 euros en réparation de leur préjudice moral, les consorts [S] demandent à la cour de rejeter cette demande au motif qu’ils n’ont commis aucune faute. Selon eux, compte tenu du non-respect de ses engagements pris lors de la conciliation de 2022 par M. [K] et du fait que les terrassements sont à l’origine de leur problème d’infiltration, ils n’avaient pas d’autre choix que de passer par la voie judiciaire. Ils ajoutent que les intimés ne justifient pas du préjudice qu’ils invoquent.
Appréciation de la cour
Il est patent que les consorts [S] ont assigné M. [K] et Mme [F] en les estimant responsables de désordres dans leur cave et sur leur mur pignon, alors que l’expert a clairement établi d’une part, que les travaux de terrassement entrepris étaient minimes et ne pouvaient pas être considérés comme la cause des désordres, d’autre part, des empiètements sur le fonds des intimés.
Toutefois, le seul fait que les consorts [S] aient échoué dans leur action judiciaire ne suffit pas à démontrer un manquement fautif. Les intimés n’apportent aucun élément de preuve de nature à établir un abus par les appelants de leur droit d’ester en justice.
En outre, l’absence d’édification d’une nouvelle clôture par les consorts [S] n’est pas constitutive d’une faute, dans la mesure où le jugement a été frappé d’appel et où l’exécution provisoire concernant la clôture a été suspendue par ordonnance du 10 mars 2022.
Il s’ensuit que le jugement en ce qu’il a alloué à M. [K] et Mme [F] une indemnisation de 2500 euros en réparation de leur préjudice moral, sera infirmé. Les intimés seront déboutés de leur demande.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement en ce qu’il a condamné les consorts [S] aux dépens, en ce compris les frais d’expertise, et au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Partie majoritairement perdante, M. [K] et Mme [F] seront condamnés aux dépens de l’instance d’appel. Leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.
L’équité commande de les condamner in solidum à verser aux consorts [S] 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,
INFIRME le jugement en ce qu’il a ordonné à M. [S] et Mme [V] de déposer à leurs frais la zinguerie, élément de toiture, empiétant sur le terrain des défendeurs conformément au plan N°1 de l’expert, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement ;
INFIRME le jugement sur les astreintes prononcées au soutien des condamnations suivantes :
– à supprimer les végétaux placés à moins de 50 cm de la limite de propriété et à couper les arbres et haies situés à moins de deux mètres de la limite de propriété à moins de deux mètres de hauteur,
– à placer un anti-rhizome pour les bambous, à les limiter à deux mètres de hauteur, à supprimer tous ceux situés à moins de 50 cm de la limite de propriété et tous ceux ayant poussé sur le terrain de M. [K] et Mme [F],
– déposer à leurs frais la clôture, les plots béton et les végétaux empiétant sur le terrain des défendeurs et à reposer à leurs frais la clôture en limite séparative conformément au plan N°1 de l’expert ;
INFIRME le jugement en ce qu’il a débouté M. [S] et Mme [V] de leur demande de tour d’échelle pour pouvoir intervenir sur leur mur pignon ;
INFIRME le jugement sur l’astreinte assortissant l’ordre intimé à M. [K] et Mme [F] de retirer la clôture située en parallèle du mur ;
INFIRME le jugement en ce qu’il a alloué à M. [K] et Mme [F] une indemnisation de 2500 euros en réparation de leur préjudice moral ;
Le CONFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
DIT que M. [S] et Mme [V] ont acquis par l’effet de la prescription acquisitive trentenaire la propriété de la rive à ourlet ;
DIT que les condamnations visant à supprimer des végétaux, placer un anti-rhizome, supprimer la clôture, les plots béton et les végétaux empiétant sur le terrain de M. [K] et Mme [F] et reposer une nouvelle clôture conforme à la proposition n°1 de fixation des limites de propriété devront être exécutées dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et ce, pendant 18 mois ;
ORDONNE à M. [K] et Mme [F] d’autoriser l’intervention d’une entreprise sur leur fonds pour réparer les micro-fissures du mur pignon des consorts [S], aux frais exclusifs de ces derniers, dans un délai de 6 mois à compter de la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et ce, pendant 18 mois ;
DIT que M. [K] et Mme [F] devront retirer la clôture située en parallèle du mur pignon dans un délai de 3 mois à compter de la signification du présent arrêt et, passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard et ce, pendant 18 mois ;
DÉBOUTE M. [K] et Mme [F] de leur demande d’indemnisation d’un préjudice moral ;
Y ajoutant,
CONDAMNE in solidum M. [K] et Mme [F] à verser à M. [S] et Mme [V] 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [K] et Mme [F] aux dépens d’appel ;
REJETTE toutes autres demandes.
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,
– signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, La Présidente,