Bail d’habitation verbal : le juge des contentieux de la protection compétent

Notez ce point juridique

Bien qu’une grange se situe dans une zone agricole protégée, ne contienne pas de système de ventilation ni même de chauffage fixe, il n’en demeure pas moins que le bien loué est pourvu d’un coin cuisine, de toilettes et d’une salle de bain, si bien que le locataire a pu le louer en tant que logement sur la base d’un bail d’habitation verbal. Le juge des contentieux de la protection est donc pleinement compétent pour connaître d’un litige portant sur ladite location (loyer, expulsion …).


L’affaire oppose la SCI [U] [M] et les époux [M] à Monsieur [G] [L], locataire de la grange appartenant à la SCI. Les demandeurs demandent la résiliation du bail et l’expulsion de Monsieur [G] [L] pour non-paiement des loyers, travaux non autorisés et non-respect des obligations locatives. Monsieur [G] [L], de son côté, conteste la nature du bail, soutenant qu’il s’agit d’un bail d’habitation et non d’un bail commercial, et invoque l’insalubrité du logement. La décision est mise en délibéré pour le 15 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon l’article L. 213-3-4 du code de l’organisation judiciaire, le juge des contentieux de la protection est compétent pour les actions d’expulsion liées à l’habitation. L’article L. 213-4-4 précise que le juge des contentieux de la protection est compétent pour les actions liées à un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation. Les éléments du dossier démontrent qu’un bail verbal d’habitation a été conclu entre la SCI et Monsieur [L].

Sur la recevabilité de la demande de résiliation de bail

L’assignation a été régulièrement dénoncée à la préfecture, respectant ainsi les conditions de recevabilité. Un diagnostic social a été réalisé, confirmant la recevabilité de la demande de résiliation de bail.

Sur le bien fondé de la demande de résiliation de bail

Monsieur [L] n’a pas justifié d’une assurance habitation, manquant ainsi à ses obligations de locataire. Le bail sera résilié pour ce motif, avec une indemnité d’occupation fixée.

Sur l’exception d’inexécution soulevée par Monsieur [L]

Le logement loué ne respecte pas les critères du logement décent, empêchant l’expulsion de Monsieur [L]. La demande d’expulsion est rejetée.

Sur la demande en paiement des loyers échus

Monsieur [L] est redevable d’un arriéré de loyers, dont le montant est déterminé à partir des relevés de compte produits.

Sur la demande de dommages et intérêts

La demande de dommages et intérêts des bailleurs est rejetée, aucun préjudice indépendant n’ayant été démontré.

Sur les demandes accessoires

Les demandes au titre des frais irrépétibles sont rejetées, mais Monsieur [L] est condamné aux dépens de l’instance. L’exécution provisoire de la décision est maintenue.

– Monsieur [G] [L] est condamné à payer à la SCI [U] [M]:
– 2 250,72 euros pour l’arriéré de loyers au 1er janvier 2023.
– Une indemnité mensuelle d’occupation de 400 euros par mois, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la restitution complète des lieux.

– Déboutement:
– SCI [U] [M] déboutée de sa demande d’expulsion.
– Monsieur et Madame [M] déboutés de leurs demandes de dommages et intérêts et de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
– Monsieur [G] [L] débouté de ses autres demandes.

– Autres dispositions:
– Maintien de l’exécution provisoire de la décision.
– Monsieur [G] [L] condamné aux entiers dépens de l’instance.


Réglementation applicable

Aux termes de l’article L. 213-3-4 du code de l’organisation judiciaire,  » Le juge des contentieux de la protection connaît des actions tendant à l’expulsion des personnes qui occupent aux fins d’habitation des immeubles bâtis sans droit ni titre.  »

Selon l’article L. 213-4-4 du même code,  » Le juge des contentieux de la protection connaît des actions dont un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation ou un contrat portant sur l’occupation d’un logement est l’objet, la cause ou l’occasion « .

En vertu de l’article 2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, cette loi s’applique  » aux locations de locaux à usage d’habitation ou à usage mixte professionnel et d’habitation, et qui constituent la résidence principale du preneur, ainsi qu’aux garages, aires et places de stationnement, jardins et autres locaux, loués accessoirement au local principal par le même bailleur.  »

L’article 1709 du code civil dispose que  » Le louage des choses est un contrat par lequel l’une des parties s’oblige à faire jouir l’autre d’une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s’oblige de lui payer.  »
L’article 1713 du même code précisant que  » On peut louer toutes sortes de biens meubles ou immeubles.  »

L’article 1217 du code civil permet notamment à la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, de provoquer la résolution du contrat.

L’article 1227 du même code précise que la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice.

L’article 7g de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 prévoit que le locataire est obligé :  » De s’assurer contre les risques dont il doit répondre en sa qualité de locataire et d’en justifier lors de la remise des clés puis, chaque année, à la demande du bailleur. La justification de cette assurance résulte de la remise au bailleur d’une attestation de l’assureur ou de son représentant.  »

L’article 1219 du code civil prévoit que :  » Une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.  »

L’article 1719 dispose que :  » Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière :
1° De délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d’habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l’expulsion de l’occupant ; (…)  »
L’article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 ajoute que  » Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale, défini par un seuil maximal de consommation d’énergie finale par mètre carré et par an, et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation. (…)  »

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Lara BAKHOS
– Me Marie-gaëlle BERNARD
– Me Mathilde TESSIER

Mots clefs associés

– Motifs de la décision
– Exception d’incompétence du juge des contentieux de la protection
– Contrat de bail
– Article L. 213-3-4 du code de l’organisation judiciaire
– Article L. 213-4-4 du code de l’organisation judiciaire
– Loi n°89-462 du 6 juillet 1989
– Bail verbal
– Attestation de propriété
– Relevés de compte
– Echanges de SMS
– Sommation interpellative
Association LA GRANGE
– Bail d’habitation
– Bail commercial
– Diagnostique social et financier
– Logement social
– Zone agricole protégée
– Logement décent
– Assurance habitation
– Irrecevabilité de la demande de résiliation de bail
– Assignation
– Diagnostic social et financier
– Résiliation du bail
– Article 1217 du code civil
– Article 1227 du code civil
– Article 7g de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989
– Justification d’une assurance
– Exception d’inexécution
– Article 1219 du code civil
– Article 1719 du code civil
– Article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989
– Rapport de l’ARS
– Désordres du logement
– Demande en paiement des loyers échus
– Article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989
– Article 1709 du code civil
– Article 1728 du code civil
– Dommages et intérêts
– Article 1231-1 du code civil
– Demande accessoires
– Article 700 du code de procédure civile
– Article 696 du code de procédure civile
– Exécution provisoire

– Accident du travail : Événement survenu par le fait ou à l’occasion du travail, causant une lésion corporelle à un salarié.

– Certificat médical : Document émis par un médecin attestant de l’état de santé d’une personne, nécessaire pour justifier médicalement une incapacité de travail ou une maladie professionnelle.

– Indemnités journalières : Sommes versées par la sécurité sociale ou l’employeur pour compenser la perte de salaire due à une incapacité temporaire de travail résultant d’un accident du travail ou d’une maladie.

– CPAM de Seine et Marne : Caisse Primaire d’Assurance Maladie située dans le département de Seine-et-Marne, chargée de l’assurance maladie dans ce secteur géographique.

– Lettre de réserves : Courrier envoyé par l’employeur ou l’assureur à la CPAM exprimant des doutes ou des réserves concernant le caractère professionnel d’un accident ou d’une maladie déclarée.

– Procédure contradictoire : Procédure permettant à toutes les parties concernées (employeur, employé, assureurs) de présenter leurs observations avant qu’une décision définitive soit prise.

– Délai de trente jours francs : Période de 30 jours complets pendant laquelle certaines actions doivent être entreprises ou complétées, sans tenir compte du jour de départ.

– Délai de quatre-vingt-dix jours francs : Période de 90 jours complets utilisée pour certaines procédures administratives ou juridiques, calculée de manière similaire au délai de trente jours francs.

– Enquête complémentaire : Investigation supplémentaire menée par la CPAM ou l’employeur pour obtenir plus d’informations sur un accident du travail ou une maladie professionnelle avant de prendre une décision sur le dossier.

– Présomption d’imputabilité : Principe selon lequel un accident survenu dans le temps et le lieu de travail est présumé être lié au travail, sauf preuve contraire.

– Lésion corporelle : Dommage physique subi par une personne, pouvant être reconnu comme conséquence d’un accident du travail.

– Contestation du caractère professionnel de l’accident : Démarche par laquelle l’employeur ou la CPAM remet en question le lien entre l’accident et l’activité professionnelle du salarié.

– Preuve des circonstances de l’accident : Éléments de preuve nécessaires pour établir comment, quand et où l’accident s’est produit, afin de déterminer s’il peut être qualifié d’accident du travail.

– Matérialité de l’accident : Élément de preuve tangible ou concret concernant l’existence réelle de l’accident.

– Lien entre l’accident et le travail : Connexion nécessaire à établir pour qu’un accident soit reconnu comme accident du travail, impliquant que l’accident est survenu en raison ou lors de l’exécution du travail.

– Dorsalgies : Douleurs situées au niveau du dos, pouvant être reconnues comme maladie professionnelle si elles sont causées par les conditions de travail.

– Dépens : Frais de justice qui doivent être payés par une partie à une autre dans le cadre d’une procédure judiciaire, selon la décision du tribunal.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE RENNES
Cité Judiciaire
Service des contentieux de la protection
[Adresse 3]
[Adresse 3]
[Localité 8]
JUGEMENT DU 15 Mars 2024

N° RG 22/08114 – N° Portalis DBYC-W-B7G-KCA2

JUGEMENT DU :
15 Mars 2024
N° 24/153

S.C.I. [U] [M]
[U] [M]
[F] [T] épouse [M]

C/

[G] [L]

EXÉCUTOIRE DÉLIVRÉ
LE 15/03/24
à Me BAKHOS Lara
COPIE CERTIFIEE CONFORME
à Me TESSIER Mathilde
Au nom du Peuple Français ;

Rendu par mise à disposition le 15 Mars 2024 ;

Par Caroline ABIVEN, Vice-Président au Tribunal judiciaire de RENNES statuant en qualité de juge des contentieux de la protection, assisté de Annie SIMON, Greffier ;

Audience des débats : 12 Janvier 2024.

Le juge à l’issue des débats a avisé les parties présentes ou représentées, que la décision serait rendue le 15 Mars 2024, conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de Procédure Civile.

Et ce jour, le jugement suivant a été rendu par mise à disposition au greffe ;

ENTRE :

DEMANDEURS

S.C.I. [U] [M]
[Adresse 6]
[Localité 4]
représentée par Me Lara BAKHOS, avocat au barreau de RENNES substitué par Me Marie-gaëlle BERNARD, avocat au barreau de RENNES

M. [U] [M]
[Adresse 6]
[Localité 4]
représenté par Me Lara BAKHOS, avocat au barreau de RENNES substitué par Me Marie-gaëlle BERNARD, avocat au barreau de RENNES

Mme [F] [T] épouse [M]
[Adresse 6]
[Localité 4]
représentée par Me Lara BAKHOS, avocat au barreau de RENNES substitué par Me Marie-gaëlle BERNARD, avocat au barreau de RENNES

ET :

DEFENDEUR :

M. [G] [L]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Mathilde TESSIER, avocat au barreau de RENNES
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro C-352382023001698 du 24/03/2023 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de RENNES)

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [U] [M] et Madame [F] [T], épouse [M], sont propriétaires, par l’intermédiaire de la SCI [U] [M], de locaux à usage d’habitation ainsi que d’une grange situés [Adresse 5] à [Localité 4].

Monsieur [G] [L] a pris possession de la grange de la SCI [U] [M], située [Adresse 2] à [Localité 4], puis s’y est installé.

La SCI [U] [M] et Monsieur [G] [L] ont alors convenu du versement par ce dernier de la somme de 400 € par mois en contrepartie de la jouissance de la grange.

Le 18 mai 2022, Monsieur [G] [L] a déclaré à la préfecture d’Ille-et-Vilaine la création d’une association dénommée  » LA GRANGE « , laquelle a pour objet d’accueillir des animaux abandonnés, dont le siège social est situé au [Adresse 2] à [Localité 4].

Par sommation interpellative en date du 22 septembre 2022, la SCI [U] [M] a reproché à Monsieur [G] [L] d’avoir réalisé des travaux sans son autorisation et d’être redevable de loyers impayés.

Par acte de commissaire de justice en date du 27 octobre 2022, la SCI [U] [M] et les époux [M] ont fait assigner Monsieur [G] [L] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rennes aux fins de voir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
« Constater l’existence d’un bail verbal conclu entre la SCI [U] [M] et Monsieur [G] [L] portant sur les locaux d’habitation situés [Adresse 2] à [Localité 4] à compter du 1er août 2018,
« Prononcer la résiliation du bail,
« Ordonner l’expulsion de Monsieur [G] [L] ainsi que celle de tous occupants de son chef avec, au besoin, le concours de la force publique et l’assistance d’un serrurier,
« Débouter Monsieur [G] [L] de l’ensemble de ses demandes,
« Condamner Monsieur [G] [L] au paiement des sommes suivantes :
-3 479 € au titre des loyers impayés,
-une indemnité d’occupation mensuelle d’un montant égal à celui du loyer et des charges, soit la somme de 400 €, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération des lieux,
-2 000 € sur le fondement du préjudice moral subi par les époux [M],
-1 500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir.

A l’audience du 12 janvier 2024, intervenue après plusieurs renvois, la SCI [U] [M] et les époux [M], comparant par ministère d’avocat, sollicitent, à titre principal, que le juge des contentieux de la protection se déclare incompétent pour connaître du présent litige et renvoie les parties devant le tribunal judiciaire de Rennes, soutenant que le bail verbal en cause est un contrat de louage d’immeuble régi par les articles 1708 et suivants du code civil et non un bail d’habitation.
A titre subsidiaire, les demandeurs sollicitent la résiliation du bail ainsi que l’expulsion de Monsieur [G] [L], outre sa condamnation au paiement des sommes suivantes : 3 850,72 € au titre de l’arriéré locatif, une indemnité d’occupation mensuelle, 2 000 € en réparation du préjudice moral subi, 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, les entiers dépens, outre les intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir.

A titre principal, au soutien de l’exception d’incompétence du juge des contentieux de la protection, la SCI et les époux [M] soutiennent que le bail accordé à Monsieur [G] [L], portant sur la grange, n’est pas un bail d’habitation. Ils indiquent que le bail verbal a été consenti, à compter du mois d’août 2018, afin que Monsieur [L] y entrepose du bois pour ses chantiers puis l’utilise dans le cadre de son association  » LA GRANGE « , et non pour qu’il y habite. Les demandeurs indiquent d’ailleurs que, jusqu’en 2020, Monsieur [L] disposait de son propre logement. Les demandeurs précisent, en outre, que les précédents baux consentis sur la grange étaient des baux commerciaux. Ils indiquent, par ailleurs, qu’ils assurent eux-mêmes la grange en tant que bien professionnel et précisent qu’elle se trouve, en vertu du plan local d’urbanisme, dans une zone agricole protégée rendant impossible la construction d’une maison à usage d’habitation.

A titre subsidiaire, dans le cas où l’existence d’un bail d’habitation serait reconnue, les demandeurs sollicitent la résiliation du bail. A ce titre, ils soutiennent que Monsieur [G] [L] manque à ses obligations locatives. Les demandeurs indiquent, en effet, que le preneur ne justifie pas d’une assurance locative, ne règle pas les loyers et les charges aux termes convenus, procède à des aménagements des lieux sans leur autorisation et ne respecte pas son obligation d’user paisiblement du logement en troublant la tranquillité des voisins.

Au soutien de leur demande de dommages et intérêts, les époux [M] expliquent que le comportement de Monsieur [G] [L], notamment son irrégularité dans le paiement des loyers, leur occasionne un préjudice moral, Monsieur [M] ayant été placé sous antidépresseur à cause du litige les opposant à Monsieur [L].

Pour s’opposer à l’exception d’inexécution soulevée par Monsieur [G] [L] en raison du caractère insalubre du logement, les demandeurs soutiennent que la grange n’a pas été louée pour un usage d’habitation. Ils indiquent ainsi que Monsieur [L] s’est attribué de façon unilatérale la grange en tant que logement en sachant que celle-ci n’était pas destinée à un tel usage et qu’il ne peut, dès lors, se prévaloir de son insalubrité. Ils précisent, en outre, que Monsieur [L] n’a jamais formulé aucune demande de mise aux normes à la SCI [U] [M].

Monsieur [G] [L], régulièrement assisté de son conseil, sollicite :
« In limine litis, de :
-Constater que le bail conclu entre la SCI [U] [M] et Monsieur [G] [L] est un bail d’habitation,
-Dire que la présente juridiction est compétente pour connaître du litige,
-Constater la nullité de l’assignation devant le juge des contentieux de la protection signifiée le 27 octobre 2022,
-Débouter les demandeurs de toute autre demande,
« A titre principal, de :
-Constater qu’en application du principe de l’exception d’inexécution, les éventuels manquements constatés sont justifiés,
-Constater l’existence d’un logement non décent, impropre à l’usage d’habitation,
-Rejeter toutes les demandes de la SCI [U] [M] et des époux [M],
« A titre subsidiaire, de :
-Constater qu’il n’existe aucun manquement grave de nature à justifier la résiliation,
-Rejeter toutes les demandes formulées par la SCI [U] [M] et les époux [M],
« A titre très subsidiaire, de :
-Suspendre les effets de la résiliation judiciaire,
-Accorder à Monsieur [G] [L] un échelonnement de la dette sur une période de 17 mois permettant un remboursement à hauteur de 100 € par mois de la dette locative,
-Dire qu’en cas de respect des délais de paiement tels que définis, la résiliation judiciaire sera réputée n’avoir jamais produit d’effet,
« A titre infiniment subsidiaire, d’accorder un délai de 12 mois à Monsieur [G] [L] afin qu’il puisse se reloger avant l’expulsion,
« En tout état de cause, de :
-Rejeter la demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
-Dire que chaque partie conservera la charge de ses propres dépens,
-Débouter la SCI [U] [M] et les époux [M] de toutes leurs demandes, fins et conclusions plus amples et contraires.
En réponse à l’exception d’incompétence du juge des contentieux de la protection, Monsieur [G] [L] soutient que la SCI et les époux [M] ont initialement saisi la présente juridiction afin de solliciter la résiliation du bail en application des dispositions de la loi du 6 juillet 1989, loi applicable aux baux d’habitation. Il souligne, en outre, que la sommation interpellative en date du 22 septembre 2022 demande à Monsieur [L] s’il a souscrit une assurance habitation. Il soutient donc que les demandeurs ne pouvaient ignorer louer le bien dans le cadre d’un bail d’habitation puisqu’ils se sont toujours comportés comme des bailleurs. Il ajoute, en outre, que la grange est aménagée comme un lieu d’habitation puisqu’elle comprend une salle de bain, deux chambres et une cuisine.

Au soutien de sa demande de nullité de l’assignation (sic), Monsieur [G] [L] soutient que ni la saisine préalable de la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives ni la signification de l’assignation au représentant de l’Etat dans le département n’ont été effectuées, en violation de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989. Il indique, en outre, que les bailleurs ne lui ont délivré aucun commandement de justifier d’une assurance locative, en violation de l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989.

A titre principal, au soutien de sa demande d’application de l’exception d’inexécution fondée sur l’article 1219 du code civil, le défendeur soutient que les bailleurs ont été à l’origine d’inexécutions suffisamment graves en délivrant au preneur un logement manifestement insalubre et indécent. Monsieur [G] [L] fait ainsi état du rapport de la visite réalisée le 24 mai 2023 par une technicienne sanitaire et de sécurité sanitaire relevant de l’Agence Régionale de Santé, lequel mentionne que le logement présente des désordres constituant un danger pour la santé et la sécurité des personnes relevant d’une situation d’insalubrité au sens de l’article L. 1331-22 du code de la santé publique.
Le défendeur soutient, en outre, que les époux [M] n’hésitent pas à couper l’eau et l’électricité de la grange en cas de retard de paiement. Il indique également que Monsieur [M], refusant de conclure un bail d’habitation, a exigé de lui qu’il crée une association afin de conclure un bail commercial.
Au surplus, le logement étant indécent, Monsieur [G] [L] s’oppose à la demande de résiliation du bail sur le fondement de l’article 1719 du code civil prévoyant l’impossibilité pour le bailleur de se prévaloir de la résiliation du bail lorsque les locaux loués à usage d’habitation sont impropres à cet usage.

A titre subsidiaire, Monsieur [G] [L] soutient qu’aucun de ces manquements n’est suffisamment grave pour justifier la résiliation du bail. En ce qui concerne l’absence d’assurance locative, il indique que Monsieur [M] n’a jamais sollicité une telle assurance. Il conteste en outre le montant de l’arriéré locatif, estimant que celui-ci s’élève à la somme de 1 750,72 € et soutient que celui-ci résulte de sa situation de grande précarité et non d’une quelconque mauvaise foi. Il sollicite, par ailleurs, la compensation de sa dette locative avec les sommes qu’il aurait indûment versées aux demandeurs depuis 2018. Quant aux aménagements réalisés sans l’autorisation des propriétaires, il indique que ceux-ci sont amovibles et ne transforment pas la chose louée. Enfin, il conteste avoir manqué à son obligation de jouissance paisible des lieux loués, les comportements reprochés par les époux [M] n’étant pas suffisamment graves ou répétés.

A titre très subsidiaire, il sollicite l’octroi de délais de paiement sur une période de 17 mois sur le fondement de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 ainsi que la suspension des effets de la résolution judiciaire.

A titre infiniment subsidiaire, si l’expulsion était ordonnée, le défendeur sollicite l’octroi d’un délai avant l’expulsion conformément aux dispositions de l’article L.412-3 du code des procédures civiles d’exécution, dès lors qu’il s’estime de bonne foi et justifie avoir accompli les diligences nécessaires afin de faire cesser ses difficultés. En outre, il indique avoir débuté les démarches pour trouver un logement social.

Il conteste la demande de frais irrépétibles formée par la SCI [U] [M] et les époux [M] au regard de ses importantes difficultés économiques et sociales.

A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 15 mars 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

« Sur l’exception d’incompétence du juge des contentieux de la protection et la nature du contrat de bail liant les parties

Aux termes de l’article L. 213-3-4 du code de l’organisation judiciaire,  » Le juge des contentieux de la protection connaît des actions tendant à l’expulsion des personnes qui occupent aux fins d’habitation des immeubles bâtis sans droit ni titre.  »

Selon l’article L. 213-4-4 du même code,  » Le juge des contentieux de la protection connaît des actions dont un contrat de louage d’immeubles à usage d’habitation ou un contrat portant sur l’occupation d’un logement est l’objet, la cause ou l’occasion « .

En vertu de l’article 2 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, cette loi s’applique  » aux locations de locaux à usage d’habitation ou à usage mixte professionnel et d’habitation, et qui constituent la résidence principale du preneur, ainsi qu’aux garages, aires et places de stationnement, jardins et autres locaux, loués accessoirement au local principal par le même bailleur.  »

L’article 1709 du code civil dispose que  » Le louage des choses est un contrat par lequel l’une des parties s’oblige à faire jouir l’autre d’une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s’oblige de lui payer.  »
L’article 1713 du même code précisant que  » On peut louer toutes sortes de biens meubles ou immeubles.  »

Les parties reconnaissent qu’un bail verbal a été conclu entre elles relativement à l’occupation par Monsieur [L] de la grange située au [Adresse 5] à [Localité 4].

Le bail verbal liant la SCI [U] [M] et Monsieur [L] est corroboré par les éléments suivants :
-Attestation de propriété,
-Les relevés de compte de la SCI [U] [M] qui établissent que Monsieur [L] lui verse un loyer,
-Les échanges de SMS produits,
-Les différentes pièces produites par la SCI [U] [M] qui établissent que Monsieur [L] se domicilie [Adresse 1] à [Localité 4],
-La sommation interpellative du 19 septembre 2022 dans laquelle Monsieur [G] [L] reconnait notamment occuper constamment les lieux depuis 2020 et s’engage à régler rapidement les loyers.

Les relevés de compte de la SCI et les échanges de SMS produits démontrent que le bail liant la SCI à Monsieur [L] était déjà conclu à l’automne 2018 puisque Monsieur [L] a notamment effectué des virements de 400 € sur le compte de la SCI les 13 novembre 2018, 7 février 2019 et15 mars 2019 et que Monsieur [M] a notamment écrit le SMS suivant à Monsieur [L] le 14 août 2018 :  » Bonjour [G] pour la location pourrais-tu m’amener ton la photocopie de ton dernier bulletin de salaire (juillet) merci… [U] « .

La SCI [U] [M] et les époux [M] soutiennent que le bail verbal portant sur la grange, objet du litige, n’est pas un bail d’habitation mais un contrat de louage d’immeuble qui, en tant que tel, ne relève pas de la compétence du juge des contentieux de la protection.

Il ressort des éléments du dossier que la grange a fait l’objet, avant l’entrée dans les lieux de Monsieur [G] [L], de baux commerciaux et non de baux d’habitation, mais il n’est pas démontré que c’est un bail commercial que la SCI [U] [M] a entendu conclure avec Monsieur [L]. En effet, les échanges de SMS produits échangés au moment de la conclusion du contrat en 2018 n’évoquent pas l’intention de Monsieur [L] de se livrer à une activité commerciale dans le local loué. Au contraire, dans un SMS du 20 août 2018, Monsieur [L] a écrit à Monsieur [M]  » …moi je travaille en intérim je suis a jour sur mes loyers a [Localité 8] « , démontrant ainsi qu’il a donné à Monsieur [M] des informations sur son contrat de bail d’habitation précédent et le fait qu’il exerçait un emploi salarié. Ces éléments sont à mettre en lien avec le diagnostique social et financier figurant au dossier dans lequel l’assistante sociale qui a rencontré Monsieur [L] a notamment écrit que ce dernier  » habitait en logement social sur le [Adresse 7] avant son arrivée à [Localité 4]. Il explique qu’un ami lui a parlé de cette maison qu’il occupait sans bail, donnant l’argent liquide au propriétaire. Mr [L] supportant difficilement de vivre en ville a saisi cette opportunité.
Lors de son arrivée à [Localité 4] au [Adresse 5] en 2018, le propriétaire lui demande une création d’association, pour établir un bail commercial. Mr [L] a fait la démarche en ligne avec une assistante sociale du CDAS [Adresse 7], qui l’accompagnait alors. Cette démarche n’a pas abouti(…) et Mr [L] a dû refaire manuellement la démarche, ce qui a pris du temps et n’a eu le document qu’en mai 2022.  »

Dès lors, le seul fait que les demandeurs démontrent que Monsieur [L] a créé, le 18 mai 2022, l’association LA GRANGE dont le siège social est situé au [Adresse 1] à [Localité 4] et dont l’objet est l’accueil d’animaux abandonnés, ne peut suffire à établir que lors de la conclusion du contrat de location à la fin de l’année 2018, les parties ont entendu conclure un bail commercial, sans quoi M. [L] n’aurait pas pu attendre plus de trois avant de créer son association.

Les pièces produites par Monsieur [L] démontrent que ce dernier est domicilié au [Adresse 5] à [Localité 4] au moins depuis l’année 2020, ce qu’il a d’ailleurs déclaré dans la sommation interpellative qui lui a été délivrée le 22 septembre 2022 par les demandeurs.

Les époux [M] qui vivaient à proximité ne pouvaient l’ignorer. Ils ont d’ailleurs démontré qu’ils savaient parfaitement que Monsieur [L] résidait dans les lieux en lui délivrant la sommation interpellative.

Dans l’assignation qu’ils ont ensuite fait délivrer à Monsieur [L] le 27 octobre 2022, les époux [M] et la SCI [U] [M] ont clairement indiqué avoir conclu un bail d’habitation puisqu’ils ont saisi le juge des contentieux de la protection de leur demande de résiliation de bail en visant l’application de la loi du 6 juillet 1989 relative aux baux d’habitation. Ils ne peuvent donc aujourd’hui, pour faire échec aux demandes reconventionnelles présentées par Monsieur [L], soutenir le contraire.

Enfin, bien que le logement se situe dans une zone agricole protégée, ne contienne pas de système de ventilation ni même de chauffage fixe, il n’en demeure pas moins que le bien loué est pourvu d’un coin cuisine, de toilettes et d’une salle de bain, si bien que Monsieur [L] a pu le louer en tant que logement.

L’ensemble de ces éléments démontre que les parties ont entendu conclure un bail d’habitation, si bien que le juge des contentieux de la protection est compétent pour connaître des demandes.
L’exception d’incompétence sera, en conséquence, rejetée.

« Sur la recevabilité de la demande de résiliation de bail

Il résulte de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version applicable au jour de la délivrance de l’assignation que :

 » III.-A peine d’irrecevabilité de la demande, l’assignation aux fins de constat de la résiliation est notifiée à la diligence de l’huissier de justice au représentant de l’Etat dans le département au moins deux mois avant l’audience, afin qu’il saisisse l’organisme compétent désigné par le plan départemental d’action pour le logement et l’hébergement des personnes défavorisées, suivant la répartition de l’offre globale de services d’accompagnement vers et dans le logement prévue à l’article 4 de la loi n° 90-449 du 31 mai 1990 précitée. Cette notification s’effectue par voie électronique par l’intermédiaire du système d’information prévu au dernier alinéa de l’article 7-2 de la même loi. La saisine de l’organisme mentionné à la première phrase du présent III peut s’effectuer par voie électronique, selon des modalités fixées par décret. L’organisme saisi réalise un diagnostic social et financier, selon des modalités et avec un contenu précisés par décret, au cours duquel le locataire et le bailleur sont mis en mesure de présenter leurs observations, et le transmet au juge avant l’audience, ainsi qu’à la commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives ; le cas échéant, les observations écrites des intéressés sont jointes au diagnostic.
IV.-Les II et III sont applicables aux assignations tendant au prononcé de la résiliation du bail lorsqu’elle est motivée par l’existence d’une dette locative du preneur. Ils sont également applicables aux demandes additionnelles et reconventionnelles aux fins de constat ou de prononcé de la résiliation motivées par l’existence d’une dette locative, la notification au représentant de l’Etat dans le département incombant au bailleur.  »
En l’espèce, contrairement à ce que soutient Monsieur [L], l’assignation a été régulièrement dénoncée à la préfecture d’Ille et Vilaine le 28 octobre 2022, comme en témoigne la pièce n°9 produite par les demandeurs, si bien que la préfecture a été informée de la délivrance de l’assignation bien plus de deux mois avant la première audience qui s’est tenue le 31 mars 2023. Un diagnostic social a d’ailleurs été dressé.

Aucune irrecevabilité de la demande en résiliation de bail pour défaut de paiement des loyers n’est donc encourue de ce chef.

Dans la mesure où la demande ne tend pas au constat de la résiliation du bail, mais à son prononcé, la SCI [U] [M] n’avait pas l’obligation de notifier un commandement de payer à la CCAPEX, ni de délivrer un commandement de justifier d’une assurance à son locataire. Aucune irrecevabilité n’est donc encourue de ce chef.

La demande de résiliation de bail est donc recevable

« Sur le bien fondé de la demande de résiliation de bail

L’article 1217 du code civil permet notamment à la partie envers laquelle l’engagement n’a pas été exécuté, ou l’a été imparfaitement, de provoquer la résolution du contrat.

L’article 1227 du même code précise que la résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice.

L’article 7g de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 prévoit que le locataire est obligé :  » De s’assurer contre les risques dont il doit répondre en sa qualité de locataire et d’en justifier lors de la remise des clés puis, chaque année, à la demande du bailleur. La justification de cette assurance résulte de la remise au bailleur d’une attestation de l’assureur ou de son représentant.  »

En l’espèce, le bailleur justifie avoir adressé à Monsieur [L] le 22 septembre 2022, une sommation interpellative dans laquelle il lui a notamment demandé :  » pouvez-vous justifier d’une assurance habitation pour ce logement ? « , question à laquelle le locataire lui a répondu par la négative et lui avoir fait délivrer, le 27 octobre 2022, une assignation dans laquelle il sollicite la résiliation du bail pour différents motifs, et notamment pour défaut de justification d’une assurance.
Malgré ces demandes, Monsieur [L] ne justifie pas d’une assurance locative. Il se contente d’indiquer ne pouvoir assurer ce bien, mais il ne justifie d’aucune demande auprès d’une compagnie d’assurance.

Dès lors, Monsieur [L] ne justifie pas avoir rempli son obligation de s’assurer contre les risques locatifs, ce qui constitue un manquement grave aux obligations du locataire de nature à justifier la résiliation du bail, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres motifs de résiliation de bail avancés par la SCI [U] [M] et les époux [M].

Le contrat de bail sera donc résilié pour ce motif, à compter de ce jour, aux torts du locataire.

Il convient de fixer, à la charge de Monsieur [L], une indemnité d’occupation de 400 euros par mois, courant à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la complète libération des lieux.

« Sur l’exception d’inexécution soulevée par Monsieur [L]

L’article 1219 du code civil prévoit que :  » Une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.  »

L’article 1719 dispose que :  » Le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière :
1° De délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d’habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l’expulsion de l’occupant ; (…)  »
L’article 6 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 ajoute que  » Le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé, exempt de toute infestation d’espèces nuisibles et parasites, répondant à un critère de performance énergétique minimale, défini par un seuil maximal de consommation d’énergie finale par mètre carré et par an, et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation. (…)  »

En l’espèce, il résulte du rapport de l’ARS du 28 juillet 2023 que le logement présente :
– d’importantes fissures au niveau du bâti pouvant avoir un impact sur la solidité du bâti et entrainer des infiltrations,
– un escalier intérieur insuffisamment sécurisé puisqu’exigu, sans rampe et étroit et dangereux,
– une absence de garde-corps au niveau des fenêtres de l’étage,
– une absence de ventilation ou d’arrivée d’air,
– de la moisissure dans la salle d’eau,
– des champignons dans la pièce côté nord,
– de fuites d’eau au niveau de l’installation sanitaire,
– une absence de moyen de chauffage suffisant et sécurisé.

L’ARS en déduit que le logement présente des désordres constituant un danger pour la santé ou la sécurité physique des personnes relevant d’une situation d’insalubrité et des désordres liés à la sécurité.

Ces éléments, corroborés par les photographies figurant au dossier laissant apparaître que le logement est une grange non correctement aménagée pour l’habitation et située en zone agricole, établissent que le logement loué par la SCI [U] [M] à Monsieur [L] ne respecte manifestement pas les critères du logement décent.

En application de l’article 1719 du code civil, le caractère indécent du logement interdit à la présente juridiction d’ordonner l’expulsion de Monsieur [L]. Les demandeurs seront donc déboutés de cette demande. Les dispositions de cet article ne font, en revanche, pas obstacle au prononcé de la résiliation du bail.

« Sur la demande en paiement des loyers échus

Aux termes de l’article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est notamment obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus. De même, l’article 1709 du code civil définit le louage de choses comme  » un contrat par lequel l’une des parties s’oblige à faire jouir l’autre d’une chose pendant un certain temps, et moyennant un certain prix que celle-ci s’oblige de lui payer « . Enfin, l’article 1728 du même code dispose que  » le preneur est tenu (…) 2° de payer le prix du bail aux termes convenus « , et
En l’espèce, les relevés de compte et SMS produits démontrent que le loyer a été fixé à la somme de 400 euros par mois. Aucun élément ne démontre qu’il a été convenu que Monsieur [L] devrait, en outre, s’acquitter de charges.
Les demandeurs indiquent que Monsieur [L] leur est redevable de la somme totale de 3850,72 euros, ainsi décomposée :
-400 € au titre de l’année 2020,
-1050,72 € au titre de l’année 2021,
-2 400 € au titre de l’année 2022.
Contrairement à ce que soutient Monsieur [L], il a été ci-dessus démontré que le contrat de location a débuté en 2018, si bien que Monsieur [L] ne saurait sérieusement solliciter un remboursement des loyers qu’il a versé à la SCI [U] [M] en 2018 et 2019.
Monsieur [L] conteste les sommes sollicitées par le bailleur et au titre des années 2021 et 2022, soutenant n’être redevable que de la somme de 150,72 € au titre de l’année 2021 et de celle de 1 600 € au titre de l’année 2022.
Il produit ses relevés de compte qui laissent apparaitre le versement, en 2021, de la somme totale de 4 649,28 € à la SCI [U] [M], mais seulement de celle de 3 100 € en 2022, alors même que les loyers dus au titre d’une année s’élèvent à la somme de 400 x 12 = 4 800 euros.
Monsieur [L] est donc redevable envers la SCI [U] [M] des sommes suivantes, au titre de l’arriéré de loyers :
-Pour 2020 : 400 € (somme non contestée)
-Pour 2021 : 4 800 € – 4 649,28 € = 150,72 €
-Pour 2022 : 4 800 € – 3 100 € = 1700 €
Monsieur [L] sera donc condamné à verser à la SCI [U] [M] la somme totale de 2 250,72 euros au titre de l’arriéré de loyers arrêté au 1er janvier 2023.

« Sur la demande de dommages et intérêts

L’article 1231-1 du code civil dispose que  » Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure.  »

En l’espèce, Monsieur et Madame [M] sollicitent des dommages et intérêts à hauteur de 2 000 euros, faisant état d’un préjudice moral.

Or, l’irrégularité de paiement de ses loyers par le locataire ne constitue pas un préjudice indépendant du retard de paiement déjà réparé par l’allocation d’intérêts moratoires.

Il n’est pas démontré que le comportement de Monsieur [L] dont font état les bailleurs constitue une faute de nature à justifier l’octroi de dommages et intérêts.

Monsieur et Madame [M] seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

« Sur les demandes accessoires

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.
En l’espèce, l’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, si bien que la demande présentée par les demandeurs au titre des frais irrépétibles sera rejetée.
Monsieur [L], qui succombe à la cause, sera, en revanche, condamné aux dépens de la présente instance, conformément à l’article 696 du code de procédure civile.
Selon l’article 514 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement.
Toutefois, selon l’article 514-1 du même code, le juge peut écarter l’exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire. Il statue, d’office ou à la demande d’une partie, par décision spécialement motivée.
En l’espèce, il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision, laquelle sera donc maintenue.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection, statuant après débats publics, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

DIT que le contrat de bail liant la SCI [U] [M] et Monsieur [G] [L] est un bail d’habitation,

REJETTE, en conséquence, l’exception d’incompétence,

CONSTATE la recevabilité de la demande de résiliation de bail,

PRONONCE, à compter de ce jour, la résiliation bail liant la SCI [U] [M] et Monsieur [G] [L] relativement au locaux situés [Adresse 1],

CONDAMNE Monsieur [G] [L] à payer à la SCI [U] [M] la somme de 2 250,72 euros au titre de l’arriéré de loyers arrêté au 1er janvier 2023,

CONDAMNE Monsieur [G] [L] à payer à la SCI [U] [M] une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant de 400 euros par mois, à compter de la résiliation du bail intervenant ce jour et jusqu’à la complète restitution des lieux,

DEBOUTE la SCI [U] [M] de sa demande d’expulsion,

DEBOUTE Monsieur et Madame [M] de leurs demandes de dommages et intérêts et de leur demande présentée au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

DEBOUTE Monsieur [G] [L] de ses autres demandes,

MAINTIENT l’exécution provisoire de la présente décision,

CONDAMNE Monsieur [G] [L] aux entiers dépens de la présente instance,

Ainsi jugé par mise à disposition au greffe le 15 mars 2024, et signé par la juge et la greffière susnommées.

La Greffière,Le Juge,

 

0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x
Scroll to Top