Audiovisuel : conditions de l’entente illicite

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Un distributeur de chaines ne peut faire qualifier d’entente illicite, la création d‘une plateforme commune de distribution en ligne de contenus audiovisuels par ses cocontractants. Un parallélisme des comportements de ses partenaires ne suffit pas à lui seul à qualifier une entente.  

Notion de parallélisme des comportements

Les juges n’ont pas considéré que les comportements des groupes M6 et TF1 vis-à-vis de la société Molotov pouvaient être qualifiés de « concertation illicite ». Le nouveau positionnement de chacun des deux groupes peut s’expliquer par l’évolution du paysage audiovisuel et notamment par la stagnation des ressources publicitaires des éditeurs de télévision nécessitant de rechercher de nouvelles sources de revenu.

Comme l’Autorité de la concurrence l’a rappelé dans sa décision « Dstorage » du 31 juillet 2019, un parallélisme des comportements ne suffit pas à qualifier une entente anticoncurrentielle. Elle a ainsi retenu dans cette affaire que « la circonstance que plusieurs prestataires de services de paiement aient adopté le même comportement à l’égard de la société Dstorage et aient, de la même façon, résilié leurs contrats ou refusé de contracter, ne saurait suffire à démontrer l’existence d’une entente entre eux ».

Selon la pratique décisionnelle de  l’Autorité, illustrée notamment par la décision n° 09-D-38 du 17 décembre 2009 relative à des pratiques mises en œuvre par les sociétés Ethicon SAS, Tyco Healthcare France et le syndicat national des industries des technologies médicales, un parallélisme de comportement de la part de concurrents prenant des décisions autonomes, sur le fondement d’informations accessibles à tous et selon une rationalité économique propre, ne suffit pas, à lui seul, à démontrer l’existence d’une entente (Décision n° 19-D-18 du 31 juillet 2019).

Indices excluant l’entente anticoncurrentielle

Dans l’affaire soumise, les décisions respectives des groupes M6 et TF1 de rompre et/ou ne pas renouveler leurs contrats respectifs avec Molotov ont pris des formes différentes et ont eu lieu à des périodes différentes : clause de paywall pour M6 à la fin de l’année 2017 et rupture des relations en mars 2018 ; offre Premium pour TF1 en 2016 et résiliation du contrat expérimental le 30 juin 2019, soit plus d’un an après l’échec des négociations entre Molotov et le groupe M6.

Par ailleurs, ces décisions s’expliquaient aussi par l’existence de manquements contractuels répétés de Molotov, dont des factures impayées ainsi que plusieurs inexécutions contractuelles, notamment l’absence de fourniture mensuelle du nombre d’utilisateurs et d’envoi de données détaillées sur l’utilisation de la fonctionnalité d’enregistrement. À l’appui de leurs allégations sur ce point, les groupes TF1 et M6 ont fourni des éléments documentaires, dont des courriers adressés à Molotov faisant état de ces manquements. Les éléments du dossier ont également révélé les doutes de ces deux éditeurs quant à la pérennité financière de Molotov, considération étayée par les retards de paiement dont FTV a fait également état.

Si l’Autorité de la concurrence n’est pas juge des manquements contractuels susceptibles d’intervenir entre opérateurs sur le marché, il n’en demeure pas moins que les éléments fournis par les groupes TF1, M6 et FTV étaient susceptibles de fournir une explication plausible à la position que chacun des groupes TF1 et M6 a prise vis-à-vis de Molotov.

Ainsi, s’il existait un certain parallélisme entre l’évolution des relations entre M6 et Molotov d’une part, et entre TF1 et Molotov d’autre part, dans la mesure où M6 et TF1 ont chacun à leur tour rompu leurs contrats de distribution avec Molotov, tandis que les négociations respectives en vue de la conclusion d’un nouveau contrat n’ont pas abouti, la saisine et les éléments au dossier ne contenaient aucun élément tendant à démontrer l’existence d’un accord de volonté, explicite ou tacite, entre les groupes TF1 et M6 ayant pour objet ou pour effet de restreindre la concurrence, en excluant Molotov du marché.

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