Appréciation du cautionnement disproportionné

Notez ce point juridique

1) Il est essentiel pour une caution de bien évaluer la proportionnalité de son engagement au moment de la signature de l’acte de cautionnement. Il est recommandé de fournir des preuves de sa situation financière à ce moment-là pour éviter toute contestation ultérieure.

2) En cas de disproportion manifeste de l’engagement de caution, il est important de démontrer que le patrimoine de la caution au moment où elle est appelée lui permet de faire face à ses obligations. Il est donc conseillé de conserver des documents prouvant l’évolution de son patrimoine et de ses dettes pour pouvoir justifier sa capacité de paiement.

3) En cas de litige sur le montant de la créance ou les délais de paiement, il est recommandé de fournir des preuves de tout paiement effectué pour éviter des imputations erronées. Il est également conseillé de formuler clairement ses demandes et de fournir des justificatifs pour appuyer sa position.


La société Banque CIC Est a interjeté appel d’un jugement du tribunal judiciaire de Sens rendu le 7 septembre 2022 dans une affaire l’opposant à M. [K] [G]. Le tribunal a déclaré nul l’acte de cautionnement lié à un prêt de 23 500 euros, déchu la banque de son droit de se prévaloir de ce cautionnement, et condamné la banque à payer 1 000 euros à M. [K] [G]. En appel, la banque demande la confirmation du cautionnement et réclame le paiement de 20 046,31 euros à M. [K] [G]. Ce dernier demande la confirmation du jugement initial et propose de payer 11 946,31 euros en plusieurs versements.

Sur la disproportion

En l’espèce, la cour a examiné la question de la disproportion manifeste de l’engagement de caution souscrit par M. [G] envers la société Banque CIC Est. Malgré les arguments avancés par la banque, la cour a confirmé la décision du tribunal en retenant la disproportion manifeste de l’engagement de caution de M. [G]. La cour a analysé les éléments financiers de M. [G] au moment de la signature de l’engagement et a conclu que celui-ci était effectivement disproportionné par rapport à ses revenus et à ses autres engagements de caution antérieurs.

Motifs de la décision

La cour a examiné les motifs de la décision rendue par le tribunal et a analysé les arguments avancés par les parties. En se basant sur les éléments financiers et les engagements antérieurs de M. [G], la cour a confirmé la disproportion manifeste de l’engagement de caution. Cependant, la cour a également examiné la capacité de M. [G] à faire face à ses obligations au moment où il a été appelé en paiement, et a infirmé la décision du tribunal sur ce point.

Sur le montant de la créance de la banque et les délais de paiement

La cour a également examiné la demande de M. [G] concernant le montant de sa dette envers la banque et les délais de paiement proposés. En se basant sur les remboursements effectués par M. [G] et les éléments financiers présentés, la cour a rejeté la demande de réduction de la dette et d’échelonnement des paiements. La cour a statué sur le montant total de la dette et les modalités de paiement.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Enfin, la cour a statué sur les dépens et les frais irrépétibles de la procédure. M. [G] a été désigné comme la partie perdante et a été condamné à supporter les dépens. La cour a également accordé une somme à la société Banque CIC Est au titre des frais irrépétibles, dans la limite de 1 000 euros.

– M. [K] [G] est condamné à payer à la société Banque CIC Est la somme de 20 046,31 euros
– M. [K] [G] est condamné à payer les entiers dépens de l’instance
– M. [K] [G] est condamné à payer à la société Banque CIC Est la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile


Réglementation applicable

– Articles cités par l’appelant:
– Article 1104 du code civil
– Article 2288 du code civil
– Articles L. 332-1 et L. 343-4 anciens du code de la consommation
– Article 700 du code de procédure civile

– Articles cités par l’intimé:
– Articles L. 341-2 et L. 341-4 anciens du Code de la consommation
– Article 700 du Code de procédure civile

– Autre article mentionné:
– Article 455 du code de procédure civile

Avocats

Bravo aux Avocats ayant plaidé ce dossier :

– Me Karym FELLAH de la SCP REGNIER-SERRE-FLEURIER-FELLAH-GODARD, avocat au barreau de SENS
– Me Rudy FARIA, avocat au barreau de SENS

Mots clefs associés

– Motifs de la décision
– Nullité du cautionnement
– Disproportion manifeste
– Article L. 341-4 du code de la consommation
– Caution solidaire
– Situation financière
– Engagements antérieurs
– Fiche patrimoniale
– Revenus suffisants
– Patrimoine de la caution
– Capacité de la caution à faire face à ses obligations
– Requête en injonction de payer
– Retour à meilleure fortune
Immeuble valorisé
– Revenus mensuels
– Tableau d’amortissement
– Montant de la créance de la banque
– Délais de paiement
– Remboursements effectués
– Dépens et frais irrépétibles
– Article 700 du code de procédure civile

– Motifs de la décision : Raisons légales et factuelles qui justifient la décision rendue par un tribunal.

– Nullité du cautionnement : Annulation légale d’un contrat de cautionnement en raison de vices de forme, de fond, ou de l’incapacité des parties.

– Disproportion manifeste : Situation où les obligations financières imposées à une caution sont excessivement élevées par rapport à ses revenus et son patrimoine.

– Article L. 341-4 du code de la consommation : Disposition légale qui protège la caution contre les engagements disproportionnés à sa situation financière au moment de la signature du cautionnement.

– Caution solidaire : Type de cautionnement où la caution s’engage à rembourser la totalité de la dette en cas de défaillance du débiteur principal.

– Situation financière : État des finances d’une personne ou d’une entreprise, incluant les actifs, les dettes, les revenus et les dépenses.

– Engagements antérieurs : Obligations financières ou légales contractées par une personne avant la souscription à un nouvel engagement.

– Fiche patrimoniale : Document détaillant la composition du patrimoine d’une personne, utilisé pour évaluer sa capacité à répondre à ses engagements financiers.

– Revenus suffisants : Niveau de revenus considéré comme adéquat pour couvrir les dépenses courantes et les obligations financières.

– Patrimoine de la caution : Ensemble des biens et droits financiers possédés par la caution.

– Capacité de la caution à faire face à ses obligations : Aptitude financière de la caution à remplir ses engagements contractuels, notamment le paiement de dettes.

– Requête en injonction de payer : Procédure judiciaire rapide permettant à un créancier de demander le paiement d’une dette non contestée.

– Retour à meilleure fortune : Amélioration de la situation financière d’une personne qui lui permet de faire face à ses obligations précédemment insoutenables.

– Immeuble valorisé : Estimation de la valeur marchande d’un bien immobilier.

– Revenus mensuels : Total des revenus perçus chaque mois par une personne ou une entreprise.

– Tableau d’amortissement : Document détaillant le remboursement périodique d’un prêt, incluant la répartition entre le capital et les intérêts.

– Montant de la créance de la banque : Total de la somme due à la banque par un emprunteur ou une caution.

– Délais de paiement : Période accordée pour le règlement d’une dette.

– Remboursements effectués : Paiements déjà réalisés par le débiteur ou la caution pour réduire ou solder une dette.

– Dépens et frais irrépétibles : Frais de justice non récupérables par la partie gagnante dans un litige.

– Article 700 du code de procédure civile : Disposition permettant à un tribunal de condamner une partie à payer à l’autre une somme couvrant les frais engagés pour sa défense qui ne sont pas compris dans les dépens.

* * *

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 6

ARRET DU 28 FEVRIER 2024

(n° , 8 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/18061 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CGSWT

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Septembre 2022 -tribunal judiciaire de Sens – RG n°19/00828

APPELANTE

S.A. BANQUE CIC EST

[Adresse 2]

[Localité 4]

N°SIRET : 754 800 712

prise en la personne de son président de son conseil d’administration domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Karym FELLAH de la SCP REGNIER-SERRE-FLEURIER-FELLAH-GODARD, avocat au barreau de SENS

INTIME

Monsieur [K] [G]

né le [Date naissance 5] 1981 à [Localité 7] (Tunisie)

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représenté par Me Rudy FARIA, avocat au barreau de SENS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Janvier 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Marc BAILLY, président de chambre

MME Pascale SAPPEY-GUESDON, conseillère

MME Laurence CHAINTRON, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie THOMAS

ARRET :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marc BAILLY, président de chambre et par Mélanie THOMAS, greffier, présent lors de la mise à disposition.

* * * * *

FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Par déclaration reçue au greffe de la cour le 20 octobre 2022, la société Banque CIC Est a interjeté appel du jugement du tribunal judiciaire de Sens rendu le 7 septembre 2022 dans l’instance l’opposant à M. [K] [G], et dont le dispositif est ainsi rédigé :

‘DIT que l’acte de cautionnement dont est assorti le prêt de 23.500 euros souscrit par la

société AUTO CONFIANCE auprès de la société BANQUE CIC EST le 4 mai 2016 est nul et de nul effet ;

DEBOUTE la société BANQUE CIC EST de la demande en paiement formée contre Monsieur [K] [G] sur la base de ce cautionnement ;

DIT que l’engagement de caution souscrit par Monsieur [K] [G] le 5 janvier 2016 au titre du compte courant de la société AUTO CONFIANCE est manifestement disproportionné à ses revenus et biens déclarés au moment de contracter ;

DIT que la société BANQUE CIC EST est, en conséquence, déchue du droit de se prévaloir

dudit cautionnement ;

DEBOUTE la société BANQUE CIC EST de la demande en paiement formée contre Monsieur [K] [G] sur la base de ce cautionnement ;

CONDAMNE la société BANQUE CIC EST à payer à Monsieur [K] [G] la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société BANQUE CIC EST aux dépens.’

*

À l’issue de la procédure d’appel clôturée le 28 novembre 2023 les prétentions des parties s’exposent de la manière suivante.

Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 30 décembre 2022, l’appelant

présente, en ces termes, ses demandes à la cour :

‘Vu les dispositions des articles 1104 et 2288 du code civil, les articles L. 332-1 et L. 343-4 anciens du code de la consommation, la jurisprudence visée, les moyens qui précèdent et les pièces versées aux débats,

Infirmer le jugement rendu par le Tribunal judiciaire de SENS le 7 septembre 2022 en ce qu’il a :

– Dit que l’engagement de caution souscrit par Monsieur [K] [G] le 5 janvier 2016 au titre du compte courant de la société AUTO CONFIANCE est manifestement disproportionné à ses revenus et bien déclarés au moment de contracter ;

– Dit que la société BANQUE CIC EST est, en conséquence, déchue du droit de se prévaloir dudit cautionnement ;

– Débouté la société BANQUE CIC EST de la demande en paiement formée contre Monsieur [K] [G] sur la base de ce cautionnement ;

– Condamné la société BANQUE CIC EST à payer à Monsieur [K] [G] la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamné la société BANQUE CIC EST aux entiers dépens.

Ce faisant et statuant à nouveau :

Dire et juger que l’engagement de caution souscrit par Monsieur [K] [G] le 5 janvier 2016 n’est pas manifestement disproportionné à ses biens et revenus déclarés au moment de la conclusion de l’acte.

Dire et juger que l’engagement de caution souscrit par Monsieur [K] [G] le 5 janvier 2016 n’est pas, au moment où celui-ci est appelé en paiement, manifestement disproportionné à son patrimoine.

Condamner Monsieur [K] [G], pris en sa qualité de caution tous engagements, à payer à la société BANQUE CIC EST la somme de 20.046,31 euros, au titre du solde débiteur du compte n°[XXXXXXXXXX03], arrêtée au 19 juillet 2019, avec intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2019 jusqu’à parfait paiement.

Débouter Monsieur [K] [G] de l’ensemble de ses demandes.

Le condamner également à payer à la société BANQUE CIC EST la somme de 2.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le condamner enfin aux entiers dépens.’

Au dispositif de ses dernières conclusions, communiquées par voie électronique le 29 mars 2023, l’intimé

présente, en ces termes, ses demandes à la cour :

‘Vu l’appel interjeté par la société BANQUE CIC EST à l’encontre du jugement rendu le 7 septembre 2022 par le Tribunal judiciaire de SENS (RG 19/00828), en ce que ladite juridiction a :

– dit que l’engagement de caution souscrit par Monsieur [K] [G] le 5 janvier 2016 au titre du compte courant de la société AUTO CONFIANCE est manifestement disproportionné à ses revenus et biens déclarés au moment de contracter ;

– dit que la société BANQUE CIC EST est, en conséquence, déchue du droit de se prévaloir dudit cautionnement ;

– débouté la société BANQUE CIC EST de la demande en paiement formée contre Monsieur [K] [G] sur la base de ce cautionnement ;

– condamné la société BANQUE CIC EST à payer à Monsieur [K] [G] la somme de 1.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamné la société BANQUE CIC EST aux dépens.

Vu les articles L. 341-2 et L. 341-4 anciens du Code de la consommation,

Recevoir Monsieur [K] [G] en ses explications et y faisant droit,

À titre principal

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

À titre subsidiaire

Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que l’engagement de caution souscrit par Monsieur [K] [G] le 5 janvier 2016 au titre du compte courant de la société AUTO CONFIANCE est manifestement disproportionné à ses revenus et biens déclarés au moment de contracter ;

Y ajoutant, dire que la société BANQUE CIC EST ne rapporte pas la preuve que le patrimoine de la caution lui permettait de faire face à son engagement au jour où elle a été appelée ;

En conséquence, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que la société BANQUE CIC EST est déchue du droit de se prévaloir dudit cautionnement et a débouté la société BANQUE CIC EST de la demande en paiement formée contre Monsieur [K] [G] sur la base de ce cautionnement ;

À titre infiniment subsidiaire

Fixer le montant dû par Monsieur [K] [G] à la société BANQUE CIC EST à la somme en principal de 11.946,31 € ;

Autoriser Monsieur [K] [G] à s’acquitter de sa dette moyennant 23 versements mensuels de 490,00 € chacun, le solde étant payable à la 24 ème et dernière échéance,

En tout état de cause

Condamner la société BANQUE CIC EST à payer à Monsieur [K] [G] une indemnité de 2.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.’

Par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, à leurs conclusions précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

À hauteur de cour il n’est plus discuté par les parties, de la question de la nullité du cautionnement de M. [G] en date du 4 mai 2016. La banque appelante a limité son appel et demande à la cour de dire et juger que l’engagement de caution souscrit par M. [G] le 5 janvier 2016 à son profit n’est pas manifestement disproportionné à ses biens et revenus déclarés au moment de la conclusion de l’acte, au vu de la fiche qui révèle des revenus suffisants et en l’absence de déclaration de cautionnements antérieurs.

Sur la disproportion

En droit (selon les dispositions de l’article L. 341-4 devenu L. 332-1 du code de la consommation) un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était lors de sa conclusion manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution au moment où celle-ci est appelée ne lui permette de faire face à son obligation.

A) La proportionnalité du cautionnement s’apprécie au jour de la signature de l’engagement de caution, soit en l’espèce au 5 janvier 2016, date à laquelle M. [G] s’est engagé en qualité de caution solidaire de la société à responsabilité limitée Auto Confiance en garantie de toutes sommes dues à la société Banque CIC Est. Ce cautionnement a été donné dans la limite de la somme de 24 000 euros, couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard, et pour la durée de 5 ans.

La charge de la preuve de la disproportion manifeste alléguée incombe alors à la caution, et non pas à la banque.

M. [G] produit aux fins d’éclairer la cour sur sa situation financière à la date de signature de son engagement de caution, et donc comme étant propre à démontrer, le cas échéant, l’état de disproportion manifeste qu’il invoque, son avis d’impôt 2015 sur les revenus de l’année 2014, dont il ressort qu’il n’est pas imposable, pour n’avoir perçu aucun revenu (il produit également, à toutes fins, l’avis d’impôt de sa compagne, Mme [I], dont les salaires et assimilés étaient de 4 291 euros).

Surtout, il fait état de cautionnements antérieurs, souscrits auprès de l’ancienne banque de la société Auto Confiance, pour des montants s’élevant respectivement à 41 600 euros et 39 000 euros. Si M. [G] ne produit pas lesdits actes de cautionnement, il verse au débat le jugement du tribunal de commerce de Sens du 25 juillet 2017 (pièce 10) dont il ressort qu’il s’est porté caution, le 28 mai 2015, dans la limite de 41 600 euros au profit de la société Caisse régionale de crédit agricole de Champagne Bourgogne pour la durée de 84 mois en garantie d’un prêt de 32 000 euros du même jour à la société Auto Confiance, et communique également un décompte dudit prêt mentionnant en entête la garantie de M. [G]. Ce cautionnement était donc bien en cours lorsque M. [G] s’est à nouveau engagé le 5 janvier 2016, cette fois au profit de la Banque CIC Est. M. [G] ne justifie par aucune pièce d’un cautionnement qu’il aurait donné à hauteur de 39 000 euros. Aussi, contrairement à ce qu’il prétend, il n’a été condamné solidairement avec la société Eurl Auto Confiance et en sa qualité de caution solidaire, qu’au paiement de la somme de 29 163,72 euros, la condamnation de 82 950,31 euros ayant été prononcée à l’encontre de la seule société Auto Confiance, au titre du solde débiteur de son compte courant.

Par ailleurs M. [G] produit l’acte notarié du 23 décembre 2015 relatif à la vente d’un bien immobilier à la société civile immobilière L’Avenir de Sens, laquelle est constituée de M. [G] et de sa compagne et dont il détient 80 % du capital social de 1 000 euros, vente consentie au prix de 240 000 euros, ce moyennant un prêt d’un montant de 220 874   euros accordé par la Banque CIC Est et dont l’échéance était de 1 204,51 euros par mois.

M. [G] ajoute que la fiche patrimoniale dont se prévaut la banque a été établie le 6 mai 2016, soit postérieurement à la souscription du cautionnement litigieux, du 5 janvier 2016, ce dont il doit être déduit, selon lui, que la banque ne rapporte pas la preuve de ce qu’elle s’était renseignée sur la situation de la caution avant ou, à tout le moins, au jour de la signature de l’acte, et que, ce faisant, elle s’est privée de découvrir l’existence des engagements antérieurs sus mentionnés, au vu desquels les cautionnements fournis pour la société Auto Confiance apparaissent disproportionnés.

De fait, la banque produit, en pièce 13, un document intitulé ‘Fiche Patrimoniale Caution’ rempli, daté et signé par M. [G], le 6 mai 2016, contemporain du second cautionnement donné par M. [G], le 5 mai 2016 (qui ne fait plus l’objet de débats en cause d’appel). Il n’est versé au débat aucune fiche patrimoniale de renseignements que la banque aurait spécifiquement établie à l’occasion de la signature du cautionnement du 5 janvier 2016.

Ceci étant, l’absence d’un tel document ne dispense pas la caution d’avoir à rapporter la preuve de la disproportion qu’elle invoque, et de son caractère manifeste.

La société Banque CIC Est quant à elle persiste à se référer à la fiche patrimoniale établie le 5 mai 2016, c’est à dire quatre mois après la signature du cautionnement présentement querellé, et dont il ressort que le revenu mensuel de M. [G] était de 1 500 euros. Elle fait observer que ce revenu était suffisant pour faire face aux échéances du prêt garanti, dont le montant mensuel s`élevait à 419,11 euros, et pour lui permettre de vivre décemment. Elle souligne que M. [G] n’a déclaré ni crédits en cours ni autres charges, en particulier n’a pas fait état des engagements souscrits auparavant au profit de l’ancienne banque de la société débitrice.

Le tribunal a approuvé le raisonnement de la banque, a relevé que la fiche est sans anomalie et qu’il n’y avait donc pas lieu pour la société Banque CIC Est, de vérifier notamment les engagements précédents, non déclarés. Cette déclaration de patrimoine constitue la seule référence, et il n’y pas lieu d’examiner les autres éléments produits par la caution.

Pourtant, et quand bien même M. [G] ne soutient pas que les éléments mentionnés dans la fiche patrimoniale tardivement établie serait erronés ni que sa situation financière aurait évolué au cours cette période de quatre mois, il ne saurait lui être interdit d’administrer librement la preuve de la disproportion qu’il invoque, en produisant tous autres éléments sur son patrimoine et son endettement.

Pour retenir la disproportion manifeste de l’engagement de M. [G] le tribunal a retenu que M. [G] a déclaré sur cette fiche percevoir un salaire mensuel de 1 500 euros, soit 18 000 euros par an, et n’avoir aucun patrimoine immobilier, ni financier. Le premier juge en a tiré la conséquence qu’au regard du montant nominal qui en constitue la limite, de 24 000 euros, ou du montant effectivement réclamé à la caution suite à la défaillance du débiteur, de 20 046,31 euros, l’engagement souscrit dépasse la totalité des revenus annuels qu’avait déclarés l’intéressé.

La disproportion est d’autant plus manifeste si l’on retient que l’endettement de M. [G], lorsqu’il s’est engagé le 5 janvier 2016, n’était pas nul, mais résultait d’un engagement de caution antérieur, souscrit le 28 mai 2015 à hauteur de la somme de 41 600 euros, portant à un total de (24 000 euros + 41 600 euros) 65 600 euros, l’endettement de M. [G] au seul titre de ses engagements de cautions, s’y ajoutant le remboursement de sa quote-part des mensualités du prêt immobilier consenti le 23 décembre 2015, par la société Banque CIC Est elle-même, à la société civile immobilière dont il est le principal associé.

À cet égard il doit être relevé que la valeur nette de l’immeuble détenu par la société civile immobilière L’Avenir de Sens correspondait à sa valeur d’acquisition, de 240 000 euros, dont à déduire le montant du prêt, de 220 874 euros, soit un solde de 19 126 euros. M. [G] détenant 80 % du capital social de la société civile immobilière L’Avenir de Sens, la valeur de ses droits immobiliers s’établissait donc à 15 300 euros. Cet actif est insuffisant à effacer la disproportion manifeste qui vient d’être mise en évidence.

Par conséquent, le jugement déféré est confirmé en ce que le tribunal a retenu le moyen de disproportion manifeste opposé par M. [G].

B) Néanmoins l’article L. 341-4 du code de la consommation, in fine, exclut de décharger la caution dans la mesure où son patrimoine au moment où elle est appelée lui permet de faire face à ses obligations.

La date de la requête en injonction de payer déposée par la société Banque CIC Est étant le 19 juillet 2019, il y a lieu de se placer à cette date en vue de se livrer à cette appréciation. La société Banque CIC Est demandait alors au tribunal de condamner M. [G] en sa qualité de caution solidaire de la société Auto Confiance à lui payer la somme de 20 046,31 euros.

Il est de principe que c’est alors au prêteur qu’il revient de faire la démonstration de ce que la caution était en capacité de s’acquitter de la somme réclamée à cette date.

À hauteur d’appel la banque appelante développe désormais sur le retour à meilleure fortune, en faisant valoir que M. [G], depuis le 23 septembre 2015, détient 80 % des parts de la SCI L’Avenir de Sens, propriétaire d’un immeuble valorisé à 240 000 euros lors de son acquisition le 23 décembre 2015, d’une valeur nette de 53 197,13 euros compte tenu du prêt en cours soit 42 557,70 euros aux droits de M. [G], et dans lequel est installée la société Mozaique Autos, dont il est président et unique associé, ce qui lui procure des revenus mensuels oscillant entre 1 000 et 1 500 euros.

Il sera fait observer que ladite société a été créée le 2 février 2017 et que M. [G] a effectué à cet occasion un apport en numéraire au capital social de 10 000 euros.

M. [G] répond sur les points soulevés par la banque, que selon le tableau d’amortissement, au 19 juillet 2019 il restait à régler 185 mensualités de 1 204,51 euros chacune, soit 222 834,35 euros, de sorte que la valeur du patrimoine immobilier allégué par la banque était en réalité nulle. D’autre part, celle-ci n’établit par aucune pièce que M. [G] aurait perçu ces revenus, et en toute hypothèse il n’y a pas à les considérer pour déterminer si la caution était en mesure de s’acquitter des sommes dues lorsqu’elle a été appelée en paiement, n’entrant en ligne de compte que son patrimoine.

Depuis la signature du cautionnement, date à laquelle la valeur nette du bien était de 19 126 euros, celle-ci s’est accrue du montant global des échéances du prêt remboursées depuis le 10 janvier 2016 jusqu’au 10 juillet 2019, de 1 204,51 euros chacune, en sorte qu’à la date de la requête en injonction de payer du 19 juillet 2019, et sur la base du tableau prévisionnel produit par l’une et l’autre des parties (pièce 22 de la banque CIC Est, et partiellement intra la pièce 12 de M. [G]) s’il restait certes 185 échéances à échoir, le capital restant dû était de 189 166,75 euros. Le prêt a sur cette période été amorti à hauteur de 31 707,25 euros, et la valeur nette du bien à la date du 19 juillet 2019 était de 50 833,25 (31 707,25 + 19 126) euros. M. [G] détenant 80 % du capital social de la société civile immobilière L’Avenir de Sens, la valeur de ses droits immobiliers s’établissait donc à 40 666,60 euros.

M. [G] rappelle ensuite, à juste titre, avoir été condamné par jugement du tribunal de commerce de Sens du 25 juillet 2017, à payer à la Caisse régionale de crédit mutuel agricole de Champagne Bourgogne une somme de 29 163,72 euros, sur laquelle il restait devoir, au 19 juillet 2019, la somme de 21 014,19 euros.

Au vu de ces éléments il doit être considéré qu’au sens des dispositions de l’article L. 341-4 du code de la consommation in fine, son patrimoine de 40 666,60 euros permettait à M. [G], lorsqu’il a été appelé en paiement en sa qualité de caution, de régler non seulement cette dette de 21 014,19 euros mais aussi et surtout la somme de 20 046,31 euros présentement réclamée par la société Banque CIC Est.

Par conséquent, le jugement déféré est infirmé en ce que le tribunal a jugé que la Banque CIC Est ne pouvait se prévaloir du cautionnement signé le 5 mai 2016 à son profit par M. [G].

Sur le montant de la créance de la banque et les délais de paiement

M. [G] demande ‘à titre infiniment subsidiaire’ de fixer le montant de sa dette à la somme en principal de 11 946,31 euros ‘ ce pour tenir compte des acomptes qu’il a versés et que la banque a imputés sur la dette au titre du prêt garanti par le cautionnement du 4 mai 2016 finalement déclaré nul et de nul effet sans qu’il n’ait été interjeté appel de ce chef du jugement du tribunal judiciaire de Sens du 7 septembre 2022. Il demande également, sur cette somme, à être autorisé à s’acquitter de sa dette moyennant vingt-trois versements mensuels de 490 euros chacun, le solde étant payable à la 24e et dernière échéance.

Il ressort de la pièce 4 de la banque que les ‘remboursements intervenus depuis le 3 octobre 2017 pour un total de (EUR) : 8 100,00’ tel qu’il est mentionné au bas du décompte de créance, en fait effectués entre cette date et le 19 juillet 2019, ont été imputés sur les sommes dues au titre du prêt professionnel (ventilés entre les sommes dues au titre du capital, des intérêts, de l’assurance, et autres frais).

M. [G], qui se contente de se référer à ce décompte (et à son courrier du 23 octobre 2017 par lequel il sollicitait le bénéfice d’un échéancier), ne rapporte pas la preuve suffisante d’un paiement libératoire qu’il aurait effectué personnellement.

Sa demande ne peut qu’être rejetée.

Par suite, il n’y a pas lieu de statuer sur sa demande d’échelonnement de la dette, qu’il ne soutient que dans l’hypothèse où la cour entrerait en voie de condamnation pour cette seule somme de 11 946,31 euros.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

M. [G], partie perdante, supportera la charge des dépens et ne peut prétendre à aucune somme sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. En revanche pour des raisons tenant à l’équité il y a lieu de faire droit à la demande de la société Banque CIC Est formulée sur ce même fondement, mais seulement dans la limite de la somme de 1 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant dans les limites de l’appel,

INFIRME le jugement déféré,

Et statuant à nouveau,

CONDAMNE M. [K] [G] en sa qualité de caution tous engagements de la société Auto Confiance, à payer à la société Banque CIC Est la somme de 20 046,31 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 20 juillet 2019 ;

CONDAMNE M. [K] [G] aux entiers dépens de l’instance ;

CONDAMNE M. [K] [G] à payer à la société Banque CIC Est la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 

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