Affaire Coluche

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Affaire Coluche

L’Essentiel : Les héritiers de Coluche ont remporté une victoire judiciaire contre les Productions Paul Lederman (PPL) concernant l’exploitation des enregistrements de l’ARCEPiste. Coluche, qui avait des contrats d’enregistrement et de cession avec PPL, avait vu ses droits d’auteur transférés à son ex-épouse après leur divorce. Les consorts Colucci ont contesté que 31 enregistrements fassent partie de la succession et ont accusé PPL de ne pas avoir respecté son obligation d’exploitation. Bien que PPL ait été jugée non coupable de manquement, la Cour de cassation a statué en faveur des consorts sur la définition de la fixation des œuvres, précisant que la date d’enregistrement doit être retenue.

Consorts Colucci c/ Lederman

Les héritiers de Coluche dans le contentieux les opposant aux productions Paul Lederman, ont emporté une manche judiciaire devant les juges suprêmes. Coluche, auteur-interprète de sketches et de chansons, et interprète d’oeuvres dont il n’était pas l’auteur, avait conclu avec la société Productions et éditions Paul Lederman (PPL), des contrats d’enregistrement en tant qu’artiste-interprète et des contrats de cession et d’édition des oeuvres dont il était l’auteur. En 1981, Coluche a divorcé de son épouse qui a reçu, au titre du partage des acquêts de communauté, la totalité des redevances attachées à l’exploitation des enregistrements phonographiques effectués en tant qu’interprète par son ex-époux entre 1975 et 1981, ainsi que la totalité des droits d’auteur relatifs aux oeuvres publiées ou déclarées au répertoire des sociétés d’auteurs pendant la même période.

Les héritiers de Coluche ont assigné la société PPL aux fins de voir juger, d’une part, que 31 enregistrements relevaient de la succession et que la société PPL était tenue de régler aux consorts Colucci les redevances provenant de la vente des phonogrammes et de l’exploitation de ces enregistrements, d’autre part, que celle-ci a manqué à son obligation d’exploiter les oeuvres et enregistrements de Coluche.

Obligation d’exploitation de l’éditeur/producteur

L’éditeur et le Producteur sont tenus d’assurer à l’oeuvre une exploitation permanente et suivie et une diffusion commerciale, conformément aux usages de la profession.  Le producteur a également l’obligation d’exploiter les enregistrements qu’il a produits. En l’espèce, aucun manquement n’a été retenu contre la société PPL.  L’exploitation moindre du catalogue pendant la période litigieuse pouvait s’expliquer par les relations conflictuelles entre les parties ayant pu entraîner une réaction attentiste de la société PPL Par ailleurs, les enregistrements litigieux avaient tout de même été exploités pendant la période considérée et avaient fait l’objet d’une exploitation accessoire sous forme graphique des oeuvres dans deux ouvrages.

Fixation des sketches de Coluche

En revanche, les consorts Colucci ont obtenu gain de cause sur le droit, pour la société PPL, de fixer certaines œuvres de l’artiste. Selon l’article 212-3 du code de la propriété intellectuelle, sont soumises à l’autorisation écrite de l’artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l’image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et l’image. La fixation est constituée par la première incorporation de la prestation de l’artiste dans un support.

Les juges d’appel avaient retenu à tort que la fixation doit permettre la communication de l’oeuvre au public dans la mesure où ce qui déclenche l’application du droit est un acte d’exploitation. La simple captation du son n’a  pas été qualifiée de fixation, dès lors que ce son doit être ensuite travaillé en vue de l’établissement du master permettant la reproduction en nombre. Partant, la date de fixation pour chacun des sketches litigieux avait été celle du master et non de l’enregistrement.  Or, cette notion de la fixation d’une œuvre a été censurée par la Cour de cassation. La convention de ROME, en son article 3 alinéa b), a défini le phonogramme comme étant « toute fixation exclusivement sonore des sons ». L’article 2 b du traité OMPI définit la fixation comme étant « l’incorporation de sons ou de représentations de ceux-ci dans un support qui permet de les percevoir, de les reproduire ou de les communiquer à l’aide d’un dispositif ». La fixation est une notion juridique qui correspond à l’incorporation de sons dans un support, et qui intervient  au moment où la prestation de l’artiste-interprète est pour la première fois enregistrée sur ce support. Les consorts Colucci ont fait valoir avec succès que c’est donc la date à laquelle chacun des sketches a été enregistré par Coluche qui doit être prise en compte. Il ne convient donc pas nécessairement de faire une distinction entre la notion de captation et celle de fixation.  La date de fixation retenue pour chacun des sketches litigieux n’a pas été celle du master. La fixation peut donc s’entendre de la toute première incorporation matérielle sur un support permettant sa reproduction ultérieure, c’est-à-dire de son enregistrement et dès lors  au jour de l’enregistrement des interprétations de l’artiste (lors de spectacles s’agissant des enregistrements publics).

Pour rappel, le code de la propriété intellectuelle ne donne aucune définition de la fixation d’une interprétation ; seul le traité de l’OMPI de 1996 complétant sur ce point la Convention de Rome, définit en son article 2, sous c), la fixation comme « l’incorporation de sons, ou des représentations de ceux-ci, dans un support qui permette de les percevoir, de les reproduire ou de les communiquer à l’aide d’un dispositif ».

Télécharger la décision

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le contexte du litige entre les héritiers de Coluche et la société PPL ?

Les héritiers de Coluche ont engagé un contentieux contre les Productions Paul Lederman (PPL) concernant des droits d’exploitation des œuvres de l’artiste. Coluche, célèbre auteur-interprète, avait signé des contrats avec PPL pour l’enregistrement et l’édition de ses œuvres.

Après son divorce en 1981, son ex-épouse a reçu la totalité des redevances et droits d’auteur liés à son travail entre 1975 et 1981. Les héritiers ont donc assigné PPL pour faire reconnaître que 31 enregistrements faisaient partie de la succession et que la société devait leur verser les redevances correspondantes.

Quelles obligations pèsent sur un éditeur ou un producteur concernant l’exploitation des œuvres ?

L’éditeur et le producteur ont l’obligation d’assurer une exploitation permanente et suivie des œuvres, ainsi qu’une diffusion commerciale conforme aux usages de la profession. Cela inclut l’exploitation des enregistrements qu’ils ont produits.

Dans cette affaire, la société PPL n’a pas été jugée en manquement de ses obligations. Bien que l’exploitation du catalogue ait été moindre durant la période litigieuse, cela a été attribué aux relations conflictuelles entre les parties, qui ont pu entraîner une attitude attentiste de PPL.

Quel a été le jugement concernant la fixation des œuvres de Coluche ?

Les consorts Colucci ont obtenu gain de cause sur le droit de PPL à fixer certaines œuvres de Coluche. Selon le code de la propriété intellectuelle, la fixation d’une prestation nécessite l’autorisation écrite de l’artiste-interprète.

La Cour de cassation a censuré une interprétation erronée des juges d’appel, qui avaient confondu la fixation avec l’exploitation. La fixation est définie comme l’incorporation de sons dans un support, et doit être considérée à la date de l’enregistrement des œuvres, et non celle du master.

Comment la notion de fixation est-elle définie dans le cadre juridique ?

La fixation est une notion juridique qui correspond à l’incorporation de sons dans un support, permettant leur reproduction ou communication. Le traité de l’OMPI définit la fixation comme l’incorporation de sons dans un support qui permet de les percevoir.

Dans le cas de Coluche, la date de fixation retenue doit être celle de l’enregistrement des interprétations, et non celle du master. Cela signifie qu’il n’est pas nécessaire de distinguer entre captation et fixation, car la fixation se réfère à l’enregistrement initial de l’œuvre.

Quelles implications a cette décision pour les droits des artistes-interprètes ?

Cette décision renforce les droits des artistes-interprètes en clarifiant que la fixation de leurs œuvres doit être reconnue à la date de l’enregistrement initial. Cela protège les intérêts des artistes et de leurs héritiers en garantissant qu’ils peuvent revendiquer des droits sur les œuvres dès leur première incorporation dans un support.

Cela souligne également l’importance de l’autorisation écrite pour toute exploitation de la prestation de l’artiste, ce qui est déterminant pour la protection de leurs droits d’auteur et d’interprète.


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