La famille Manoncourt a obtenu gain de cause sur sa marque viticole « Château Figeac » (devenue célèbre car, entre autres, citée par Pierre Desproges dans son sketche « L’Aquaphile », 1986).
Marque non déceptive
La marque « Château Figeac » n’a pas été considérée comme déceptive. L’article L.711-3 c) du Code de la Propriété Intellectuelle dispose que « ne peut être adopté comme marque ou élément de marque (‘) un signe de nature à tromper le public, notamment sur la nature, la qualité ou la provenance géographique du produit ou des services ».
Privilège du tènement
Nonobstant les dispositions de l’article L.711-3 du CPI, par application du principe prétorien dit du « privilège du tènement » et à certaines conditions, le nom d’un vin peut incorporer le toponyme correspondant aux parcelles dont il est issu, et ce, quand bien même une autre marque viticole aurait été antérieurement déposée en référence au même toponyme.
Les critères d’application du « privilège du tènement » sont désormais clairement définis : les parcelles cultivées en vigne dont le nom est donné au vin doivent correspondre à une superficie significative de l’exploitation agricole. La production doit également voir fait l’objet d’une vinification séparée. En revanche, la notion même de « tènement » ne fait l’objet d’aucune acception globale et univoque, de fait qu’elle ne peut résulter que d’un faisceau d’éléments, de nature géographique, foncière, historique et juridique.
A cet égard, les simples énonciations du cadastre, montrant que les parcelles litigieuses relèvent de trois sections différentes, ne valent que comme de simples renseignements, et ne suffisent pas à elles-seules, compte tenu du caractère aléatoire de leur découpage et de leur mutabilité compte tenu de la succession d’un nouveau cadastre à l’ancien cadastre napoléonien, à exclure l’appartenance des parcelles à l’ancien domaine de Figeac. De même, on doit se garder de tirer d’anciens statuts juridiques, féodaux, ou postérieurs à la féodalité, tels que « métairies » ou « borderies », des considérations juridiques modernes sous peine de céder au défaut d’anachronisme.
Toutefois, au cas d’espèce, différents éléments ont permis de retenir le privilège du tènement. Historiquement, les parcelles en cause ont appartenu à la famille, alors propriétaires du grand domaine originel de Figeac, par la suite démembré au gré de plusieurs cessions. D’un point de vue géographique, la cartographie du 18e siècle des ouvrages historiques attribuaient au domaine de Figeac avec ses dépendances, une production de tonneaux de vin. Par ailleurs, l’expression « tènement de Figeac » est reprise plusieurs fois dans les actes notariés du 19e siècle, spécialement sous la rédaction du notaire, notamment un acte de donation du 28 juillet 1843.
Validation des marques « Château Figeac »
L’ensemble des jus entrant dans la composition du premier vin Château Figeac et La Grange Neuve de Figeac proviennent exclusivement de raisins récoltés sur les parcelles intégrées à l’assiette foncière du domaine du château de Figeac et sont vinifiés sur le domaine. Parmi ces documents établissant cette traçabilité, figuraient en particulier des registres de récolte qui associent chaque parcelle à une date et à une combinaison alphanumérique unique désignant la cuve dans laquelle sont stockés les jus. Les déclarations adressées à l’administration et à l’INAO permettent de vérifier que la quantité de vin produite sur le domaine de Figeac est conforme au cahier des charges de l’appellation Saint Emilion Grand Cru, qui en son article VIII, limite le rendement à un chiffre compris entre 46 et 55 hl par hectare, soit 49,31 hl par hectare pour le domaine de Figeac.
S’agissant de l’assemblage, aucune obligation légale ou règlementaire n’exige une vinification séparée des premiers, second et troisième vins d’un même domaine, étant souligné, au demeurant, que le principe même d’une telle classification, bien connue d’un public éclairé, est de sélectionner la part la plus qualitative de la récolte produite sur le domaine, et de l’affecter à l’assemblage du premier vin, généralement classé, afin de garantir à ce produit une qualité optimale et constante.
L’article 6 du décret du 4 mai 2012 dispose, notamment, que « Seuls les vins figurant au titre de la déclaration de récolte et au titre de la déclaration de production de l’exploitant, au sens des articles 8 et 9 du règlement du 26 mai 2009 susvisé, peuvent bénéficier du nom de l’exploitation, ce qui est les cas des vins commercialisés sous les marques Château Figeac et La Grange Neuve de Figeac.
Le Premier Grand Cru Classé Château Figeac apparaît quant à lui conforme à la réglementation prévue par l’article 7 du décret qui exige, notamment, que le vocable « château » soit réservé aux vins bénéficiant d’une Appellation d’Origine Protégée lorsque ces vins sont issus de raisins récoltés sur des parcelles d’une exploitation ainsi dénommée, ce qui est le cas du Château Figeac et vinifiés dans cette exploitation.
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