Contrat de distribution exclusive | Compétence juridictionnelle

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L’article 25-1 du règlement n°1215/2012 du 12 décembre 2012 applicable à l’espèce dispose que « si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d’une juridiction ou de juridictions d’un état membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes (…) Cette compétence est exclusive. La convention attributive de juridiction est conclue : a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite, b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établi entre elles ou c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties ont connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée.

L’article 25-2 du règlement indique que ‘toute transmission par voie électronique qui permet de consigner durablement la convention est considérée comme revêtant une forme écrite’. L’article 25-5 précise qu’une convention attributive de juridiction faisant partie d’un contrat est considérée comme un accord distinct des autres clauses du contrat . La validité de la convention attributive de juridiction ne peut être contestée au seul motif que le contrat n’est pas valable.

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

12e chambre

ARRET DU 26 SEPTEMBRE 2019

N° RG 18/04118

AFFAIRE :

Société CALIBRE UK LTD

C/

SARL OBV.TV

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 08 Juillet 2016 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2016F00241

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Martine DUPUIS

Me Claire RICARD,

LE VINGT SIX SEPTEMBRE DEUX MILLE DIX NEUF,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Société CALIBRE UK LTD

Cornwall House

BD87J S BRADFORD ROYAUME-UNI

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 1758655 – Représentant : Me Léopold FARQUE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R073

APPELANTE

****************

SARL OBV.TV

N° SIRET : 529 634 727

[…]

[…]

Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 – N° du dossier 2018242

Représentant : Me Alexandre MALAN de l’AARPI BELOT MALAN & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0574

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 04 Juin 2019 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Thérèse ANDRIEU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Thérèse ANDRIEU, Président,

Madame Florence SOULMAGNON, Conseiller,

Mme Véronique MULLER, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,

EXPOSE DU LITIGE

La société à responsabilité limitée Obv.tv est une société de distribution de matériels de dernière technologie aux clients du monde de la production et de la diffusion audiovisuelle.

La société de droit anglais Calibre Uka Ltd, est spécialisée dans les produits de traitement d’images. Elle développe une technologie spécifique dite Fovea HD.

A partir du 17 septembre 2012, les sociétés Obv.tv et Calibre vont avoir des échanges par mails dans une perspective de collaboration. La société Calibre propose à la société Obv.tv d’être son revendeur en France pour divers produits dans le domaine de l’audiovisuel et en particulier le Fovea HD.

Par courriel du 6 novembre 2012, la société Calibre propose à la société Obv.tv la mise en place d’une relation commerciale, avec en particulier une distribution exclusive des produits ‘broadcast’. La société Obv.tv lui répond favorablement le lendemain, remettant à plus tard la formalisation du contrat par écrit.

Par courriel du 27 août 2013, la société Calibre envoie un modèle de contrat à la société Obv.tv dans lequel figure une clause attributive de compétence.

Le 21 septembre 2013, la société Obv.tv régularise avec la société Calibre un contrat de prêt d’un appareil Fovea HD, moyennant le versement d’un dépôt de garantie. Après réception de l’appareil, la société Obv.tv en fait la promotion auprès de clients, notamment la société suisse Eurovision. Le contrat de prêt sera prorogé à la demande de la société Obv.tv jusqu’au 17 décembre 2013.

La société Eurovision a finalement acheté directement auprès de la société Calibre des Fovea HD. La société Calibre évoque des conditions particulières d’exécution du contrat ainsi que des relations antérieures avec cette société. Le 28 janvier 2018, elle propose néanmoins à la société Obv.tv. de lui verser la somme de 20 000 euros au titre de commission d’intermédiaire.

La société Obv.tv n’accepte pas cette proposition estimant que la transaction aurait due être effectuée entre elle-même et la société Eurovision, ce dont il en serait résulté une marge extrêmement plus importante à son bénéfice que la compensation proposée.

C’est dans ces conditions que le 2 décembre 2015, la société Obv.tv a assigné la société Calibre devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de la voir lui verser des dommages et intérêts en raison de la violation d’un contrat de distribution.

Par jugement du 8 juillet 2016, le tribunal de commerce de Nanterre a :

— Dit la société Calibre irrecevable en son exception d’incompétence ;

— S’est déclaré compétent ;

— Renvoyé les parties à l’audience du 14 septembre 2016 à 10h30 pour conclure sur le fond.

— Droits et dépens réservés.

Par déclaration du 12 juin 2018, la société Calibre a interjeté appel du jugement du 8 juillet 2016.

Le tribunal de commerce de Nanterre s’est prononcé sur le fond par jugement du 21 septembre 2017. La société Obv.tv en a relevé appel par déclaration du 12 octobre 2017. La société Calibre a formé un appel incident le 11 juin 2018. La procédure est actuellement pendante devant la cour d’appel.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 10 avril 2019, la société Calibre a demandé à la cour de :

— Infirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre le 8 juillet

2016 ;

— Déclarer le tribunal de commerce de Nanterre incompétent au profit des juridictions anglaises ;

— Renvoyer la société Obv.tv à mieux se pourvoir ;

— Débouter la société Obv.tv de l’ensemble de ses moyens, fins et conclusions ;

— Condamner la société Obv.tv à verser à la société Calibre la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Condamner la société Obv.tv aux entiers dépens de l’instance.

Par dernières conclusions notifiées le 5 février 2019, la société Obv.tv a demandé à la cour de :

— Confirmer le jugement du 8 juillet 2016 en ce qu’il a déclaré irrecevable l’exception d’incompétence soulevée

;

Subsidiairement,

— Confirmer le même jugement, le cas échéant par substitution de motifs, en ce qu’il s’est déclaré compétent pour statuer sur la demander de la société Obv.tv ;

— Condamner la société Calibre à payer à Obv.tv la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que les entiers dépens de l’instance.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 9 mai 2019.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE LA COUR

Sur la régularité de l’exception d’incompétence :

Les premiers juges ont prononcé l’irrecevabilité de l’exception d’incompétence au motif que la société Calibre ne pouvait désigner deux juridictions comme étant compétentes.

L’article 75 du code de procédure civile dispose que « s’il est prétendu que la juridiction saisie est incompétente, la partie qui soulève cette exception doit, à peine de nullité, la motiver et faire connaître dans tous les cas devant quelle juridiction elle demande que l’affaire soit portée. »

La société Obv.tv soutient que la société Calibre désigne comme étant compétentes les juridictions britanniques ou les juridictions suisses. Elle estime que l »exception d’incompétence soulevée par la société Calibre est en conséquence irrecevable, celle-ci indiquant comme pouvant être compétentes deux juridictions au lieu d’une.

La société Calibre rétorque que le moyen n’est pas applicable en l’espèce. Elle a visé deux juridictions pour répondre aux prétentions de la société Obv.tv qui se prévalait à titre principal de la responsabilité contractuelle et à titre subsidiaire de la responsabilité délictuelle, ces deux actions entraînant des compétences territoriales distinctes qu’il lui convenait d’énoncer.

La cour relève en tout état de cause que dans ses conclusions notifiées le 10 avril 2019, la société Calibre ne désigne plus comme étant compétentes que les juridictions britanniques, que l’exception de nullité soulevée a été régularisée en application des dispositions de l’article 121 du code de procédure civile.

Dès lors, l’exception soulevée est recevable, le jugement entrepris étant infirmé.

Sur l’exception d’incompétence :

La société Calibre considère que seul l’article 4 du règlement européen n° 1215/2012 doit recevoir application lequel dispose que ‘sous réserve du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un Etat membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet Etat membre’.

Elle en conclut que les juridictions anglaises ont donc compétence pour connaître du litige.

La société Obv.tv soutient qu’il résulte des mails échangés avec la société Calibre que les parties s’étaient engagées pour un contrat de distribution exclusive portant sur la promotion des produits télévisuels de la marque Calibre sur le territoire français. Elle fait valoir à cet effet qu’un tel contrat est consensuel et se forme donc par le simple échange des consentements sans qu’il soit besoin d’un écrit. Elle estime que les parties

étaient d’accord sur les produits concernés, l’exclusivité de la relation et le territoire concerné au terme des mails échangés, que la relation contractuelle a été exécutée. Elle conclut donc à la compétence des juridictions françaises lieu d’exécution du contrat.

La société Obv.tv fait valoir que si la relation contractuelle l’unissant à la société Calibre est qualifiée de mandat, les tribunaux français sont compétent en application de l’article 7.1 du règlement 1215/2012.

Elle ajoute que si aucun contrat ne devait être reconnu entre les parties, alors le tribunal compétent serait celui du lieu du fait dommageable en application de l’article 5.3 du règlement 1215/2012. Ayant subi un dommage financier du fait de la conclusion du contrat entre les sociétés Calibre et Eurovision, celui-ci est matérialisé au lieu de son siège social, soit en France. Les juridictions françaises sont donc également compétentes.

La société Calibre rétorque qu’aucun contrat de distribution exclusive n’a été conclu entre les parties, que les courriels échangés en novembre 2012 mentionnent les modalités d’un potentiel futur contrat de distribution de produits télévisuels en France qui n’a jamais été signé. Par ailleurs, elle rapporte qu’aucun prix n’a été convenu. Elle a communiqué des prix à la société Obv.tv par mail du 27 août 2013 précisant qu’ils étaient soumis à la signature de l’accord de distribution joint au mail.

Elle fait valoir que la preuve d’un contrat de mandat n’est pas davantage rapportée.

Sur la matérialisation du dommage, elle invoque que le fait générateur serait une vente intervenue en suisse entre une entreprise anglaise et une entreprise suisse, que dès lors le dommage aurait été subi en Suisse et non en France, qu’il en résulte que les juridictions françaises ne pourraient pas être compétentes de ce chef.

Sur l’existence d’un contrat entre les parties :

Le contrat de distribution exclusive est celui par lequel un fournisseur, s’engage à réserver l’exclusivité de ses ventes sur un territoire déterminé à un revendeur indépendant, le distributeur. Il est à durée déterminée ou indéterminée.

Il a été jugé qu’un tel contrat, est consensuel et se forme en conséquence par le simple échange des consentements.

L’article L. 110-3 du code de commerce dispose que la preuve est libre en matière commerciale

L’indétermination du prix n’affecte pas les contrats-cadres.

Il ressort des pièces produites que la société Calibre a envoyé un courriel le 6 novembre 2012 à la société Obv.tv disant « Je pense que nous pouvons préparer un contrat disant que vous serez notre distributeur exclusif s’agissant seulement des produits « broadcast ». Vous pourrez également vendre nos appareils audiovisuels, mais cela ne sera pas un contrat exclusif. De toute évidence nous avons besoin d’un distributeur spécialisé dans les appareils audiovisuels. » Le lendemain, la société Obv.tv accepte en ces termes : « cette proposition me convient, je suggère que nous signions le contrat après le Satis. »

C’est donc à juste titre que la société Obv tv soutient que les parties étaient d’accord sur les produits concernés, l’exclusivité de la relation et le territoire concerné.

La cour relève qu’après cet échange, la relation contractuelle a été exécutée. Ainsi la société Obv.tv rapporte ainsi avoir fait la promotion du Fovea HD au salon Satis 2012, puis l’a exposé au Satis 2013. Elle signe un contrat de prêt du Fovea HD afin d’en faire la promotion. Elle réalise une démonstration auprès d’un client, la société Eurovision. Elle demande alors à la société Calibre un devis pour concrétiser la vente. La société Calibre répond le 8 novembre 2013 et fait bénéficier la société d’une remise, ce qui démontre que la société Calibre la traite comme un distributeur. Suite au contact direct de la société Eurovision avec la société

Calibre, celle-ci écrit à la société Obv.tv « je leur ai expliqué que nous ne pouvions leur fournir de renseignement directement et qu’ils devaient vous parler. »

La société Obv.tv sollicite un allongement du prêt du Fovea pour satisfaire d’autres clients intéressés.

Informée, la société Calibre accepte et lui demande par mail du 3 décembre 2013 « penses-tu que ton client achètera le produit. »

Par mail du 28 janvier 2014, la société Calibre dit encore « Nous apprécions le travail que vous avait fait avec Eurovision […] il est juste que Obv.tv ait le droit d’être payée au regard de sa contribution et de son travail […] je comprends que tu aies d’autres opportunités pour le Fovea HD et pour les produits de Calibre et je voudrais t’assurer qu’on continuera à te soutenir pour celles-ci et pour toute perspective que tu pourrais avoir dans le futur. Bryan Roddie continuera à t’appuyer depuis notre bureau des vente (…) Je resterai disponible pour t’assister à tout moment. »

Il résulte ainsi des termes des échanges entre les parties qu’elles avaient établi un accord sur la distribution du  produit de la société Calibre par la société Obv.tv en France s’agissant du produit Fovea HD qui est un produit de la gamme ‘broadcast’ ; que les parties avaient prévu une exclusivité pour la vente de ce produit de la société

Calibre par la société Obv.tv notamment suivant mail du 6 novembre 2012 ; que la société Obv.tv a exécuté son obligation ; que la société Calibre s’est comportée comme considérant la société Obv.tv comme son distributeur puisqu’elle lui a produit une assistance, a souhaité la rétribuer pour la prestation fournie de promotion de son produit auprès de la société Eurovision, et n’a pas contesté les actes de promotion qui avaient été faits en sa faveur par la société Obv.tv malgré sa connaissance de leur existence.

Dès lors, au vu des éléments, il convient de retenir l’existence d’un accord de distribution entre les parties avec une exclusivité concernant le produit Fovea HD.

Sur la clause attributive de juridiction :

La société Calibre au cas où la cour retiendrait l’existence d’un contrat fait valoir qu’elle a par mail du 27 août 2013, transmis en pièce jointe un projet de contrat de distribution à la société Obv.tv qui comportait une clause attributive de juridiction au bénéfice des juridictions anglaises (article 19 du contrat) et qui dès lors s’impose aux parties, qu’en effet ses termes en sont clairs et précis, qu’elle n’a fait l’objet d’aucune contestation de la part de la société Obv.tv

La société Obv.tv réplique qu’elle n’a jamais accepté la clause attributive de compétence qui lui est opposée laquelle est seulement mentionnée dans le projet de contrat qui lui a été communiqué dans le cadre d’une négociation visant à formaliser les conditions de l’accord de distribution sur lequel elle n’a pas répondu.

L’article 25-1 du règlement n°1215/2012 du 12 décembre 2012 applicable à l’espèce dispose que « si les parties, sans considération de leur domicile, sont convenues d’une juridiction ou de juridictions d’un état membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ces juridictions sont compétentes (…) Cette compétence est exclusive.

La convention attributive de juridiction est conclue :

  1. a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite,

  1. b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établi entre elles ou

  1. c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties ont connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée.

L’article 25-2 du règlement indique que ‘toute transmission par voie électronique qui permet de consigner durablement la convention est considérée comme revêtant une forme écrite’.

L’article 25-5 précise qu’une convention attributive de juridiction faisant partie d’un contrat est considérée comme un accord distinct des autres clauses du contrat . La validité de la convention attributive de juridiction ne peut être contestée au seul motif que le contrat n’est pas valable’;

En l’espèce, l’article 19 du projet de contrat proposé par la société Calibre à la société Obv.tv, intitulé « clause attributive de compétence » est placé dans le corps du contrat et sur la même page et au-dessus de l’encart de signature des parties, de sorte qu’il est très apparent pour les parties.

Cependant le projet de contrat n’a pas été daté et signé par la société Calibre ni accepté et signé par la société Obv.tv.

Si une clause attributive de juridiction peut être considérée comme un accord distinct des autres clauses du contrat, il n’en demeure pas moins que la société Calibre n’établit pas l’existence d’un accord exprimé par écrit de manière claire et précise par la société Obv.tv concernant la clause attributive de juridiction.

Elle ne peut davantage soutenir que le fait pour la société Obv.tv de ne pas s’ être opposée

à la clause suffit à la rendre valable , l’envoi d’un projet global d’un contrat non daté et non signé incluant une clause attributive de juridiction par la société Calibre n’étant pas suffisant pour retenir que le silence de la société Obv.tv sur la clause vaut acceptation tacite de celle-ci en l’absence d’autres éléments.

Il y a lieu en conséquence de considérer qu’aucune clause attributive de compétence n’a été convenue entre les parties.

Sur la juridiction compétente :

L’article 7. 1. a et b du règlement européen n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 précise « une personne domiciliée dans un état membre peut être attraite dans un autre état membre en matière contractuelle, devant la juridiction du lieu de l’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande » et « aux fins d’application de la présente disposition, et sauf convention contraire, le lieu de l’exécution qui sert de base à la demande est : (…) – pour la fourniture de services, le lieu d’un état membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis. »

La société Obv.tv fait valoir que l’article 7.1 du règlement 1215/2012 s’applique en matière de contrat de distribution, que la prestation caractéristique de la relation contractuelle prévue entre les parties est la diffusion des produits Fovea HD de la société Calibre par la société Obv.tv en France, qu’ainsi en vertu du contrat existant entre les parties, la prestation est ou doit être réalisée en France, de sorte que les juridictions françaises sont compétentes pour connaître des litiges relatifs à ce contrat.

La société Calibre ne discute pas ce point.

Sur ce :

La cour de justice de l’Union Européenne a dit pour droit que la fourniture de services est une activité déterminée en contrepartie d’une rémunération.

En l’espèce, il a déjà été démontré qu’un contrat de distribution a été conclu entre les parties, que ce contrat prévoit une exclusivité s’agissant de la promotion du produit Fovea HD de la société Calibre par la société Obv.tv en France.

Une rémunération est entendue entre les parties puisque la société Calibre propose à la société Obv.tv le versement d’une « commission d’intermédiaire », à charge pour la société OBV d’établir une facture.

Il convient de considérer que le contrat de distribution exclusive passé entre les sociétés Calibre et Obv.tv peut être assimilé à un contrat de fourniture de services dans la mesure où la prestation caractéristique du contrat consiste dans la distribution de produits par la société Ob.tv pour participer au développement de leur diffusion en France .

Les dispositions de l’article 7 précité doivent dès lors s’appliquer.

La juridiction compétente est celle du lieu de l’exécution de l’obligation qui sert de base à la demande soit pour la fourniture de services, le lieu de l’Etat membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis, en l’espèce, la France.

Le fait que le produit Fovea HD ait été vendu à une société de droit suisse est sans incidence sur la détermination de la juridiction compétente.

En conséquence, les juridictions françaises sont compétentes.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile :

Le jugement entrepris est confirmé en ce qu’il a réservé les dépens.

La société Calibre qui succombe en appel est condamnée aux dépens d’appel et à verser à la société Obv.tv la somme de 3000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre le 8 juillet 2016 en ses dispositions sauf en ce qui concerne les dépens,

Statuant à nouveau,

Déclare recevable l’exception d’incompétence soulevée,

Y ajoutant,

— Déclare le tribunal de commerce de Nanterre compétent ;

— Condamne la société Calibre aux entiers dépens d’appel,

— Condamne la société Calibre à verser à la société Obv.tv la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 code de procédure civile.

prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

signé par Madame Thérèse ANDRIEU, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

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