Dans le cadre d’un service de lutte contre la fraude en ligne, la pratique consistant à contrôler de façon plus poussée les clients dont l’origine peut sembler africaine ou maghrébine est illégale.
Nullité du licenciement
Une salariée, mise à pied et licenciée à la suite de sa dénonciation de ces pratiques illégales de son employeur, a obtenu la nullité de son licenciement contraire à l’article 1132-4 du code du travail.
Pratique discriminatoire non écrite
Pour la hiérarchie de la salariée, les pratiques de vérifications approfondies fondées sur l’origine présumée des clients ou leur accent ne devaient pas faire l’objet de mails mais l’employeur ne voyait aucun obstacle à ce que ces soupçons soient évoqués de façon orale pour éviter de « laisser une trace ». Il en découle que l’employeur ne voulait pas laisser de traces écrites d’une procédure de contrôle qu’il savait discriminatoire, raison pour laquelle il prohibait toute mention écrite d’une pratique qu’il avait instaurée. La convocation de la salariée, immédiatement après qu’elle a indiqué dans un courrier électronique qu’elle désapprouvait cette politique discriminatoire et qu’elle trouvait inadmissible d’être menacée de poursuites disciplinaires, montrait, sans aucune ambiguïté, que le motif réel du licenciement était fondé sur cette dénonciation.
Protection du lanceur d’alertes
C’est à tort que le conseil de prud’hommes a refusé de retenir la nullité du licenciement parce que la salariée avait participé à la discrimination dénoncée avant de juger que la rupture était malgré tout abusive. La discrimination ayant été imposée par l’employeur, la protection due au « lanceur d’alerte » a justement pour objet de permettre de dénoncer des faits condamnables et d’y mettre fin, y compris lorsque le salarié a été contraint d’y participer en raison de sa subordination. L’adage ‘nul ne peut se prévaloir de ses propres turpitudes’, sur lequel s’est fondé le conseil de prud’hommes, ne saurait ni empêcher de prononcer la nullité d’un acte illicite, ni permettre à l’employeur d’échapper aux conséquences d’une sanction aussi illicite que la discrimination mise en place, ni faire obstacle à l’application de l’article L. 1132-4 du code du travail dont les dispositions d’ordre public sont nécessaires à la lutte contre les discriminations.
Rappel sur les mesures discriminatoires
Pour rappel, il résulte des dispositions de l’article L.1132-1 du code du travail qu’aucun salarié ne peut faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en matière de rémunération, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation, une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son appartenance physique, de son nom de famille, de son lieu de résidence ou en raison de son état de santé ou de son handicap. Au sens de l’article L. 1132-3 du code du travail, aucun salarié ne peut non plus être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire pour avoir témoigné des agissements de discrimination ou pour les avoir relatés.
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