Recevabilité de l’appel et qualification des infractions : enjeux procéduraux en matière pénale

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Recevabilité de l’appel et qualification des infractions : enjeux procéduraux en matière pénale

L’Essentiel : L’affaire concerne un individu mis en examen pour des infractions liées à la législation sur les stupéfiants, ainsi que pour association de malfaiteurs et blanchiment, en récidive. Un juge d’instruction a rendu une ordonnance de non-lieu partiel et a renvoyé cet individu devant le tribunal correctionnel. L’individu mis en examen a interjeté appel de cette décision, contestant la non-recevabilité de son recours. L’appelant soutient que la recevabilité de son appel devrait être appréciée en tenant compte des motifs qu’il exposera ultérieurement. La Cour a conclu que le président de la chambre de l’instruction a agi de manière inappropriée en statuant sans permettre à l’appelant d’exposer ses motifs.

Contexte de l’affaire

L’affaire concerne un individu mis en examen pour des infractions liées à la législation sur les stupéfiants, ainsi que pour association de malfaiteurs et blanchiment, en récidive. Un juge d’instruction a rendu une ordonnance de non-lieu partiel et a renvoyé cet individu devant le tribunal correctionnel pour les chefs d’accusation susmentionnés.

Appel de la décision

L’individu mis en examen a interjeté appel de la décision du juge d’instruction. Cet appel vise à contester la déclaration de non-recevabilité de son recours par le président de la chambre de l’instruction, qui a jugé que l’appel n’était pas fondé.

Arguments de l’appelant

L’appelant soutient que la recevabilité de son appel devrait être appréciée non seulement sur la base des indications de l’acte d’appel, mais également en tenant compte des motifs qu’il a l’intention d’exposer dans un mémoire ultérieur. Il affirme que le président de la chambre de l’instruction a excédé ses pouvoirs en déclarant l’appel non admis avant que les motifs ne soient présentés.

Réponse de la Cour

La Cour a rappelé que, selon la législation, un individu mis en examen peut interjeter appel d’une ordonnance de renvoi s’il estime que les faits constituent un crime. Cependant, le président de la chambre de l’instruction a déclaré que l’appel n’était pas recevable, arguant que l’acte d’appel ne faisait pas référence à l’article pertinent du code de procédure pénale.

Conclusion de la Cour

La Cour a conclu que le président de la chambre de l’instruction a agi de manière inappropriée en statuant sur l’appel sans permettre à l’appelant d’exposer ses motifs. Par conséquent, l’annulation de la décision est encourue, car la procédure initiale n’excluait pas la possibilité d’une qualification criminelle des faits.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité de l’appel interjeté par la personne mise en examen contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel ?

La recevabilité de l’appel interjeté par la personne mise en examen contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel est régie par l’article 186-3 du Code de procédure pénale.

Selon le premier alinéa de cet article, la personne mise en examen peut interjeter appel des ordonnances prévues par le premier alinéa de l’article 179 du Code de procédure pénale dans le cas où elle estime que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l’objet d’une ordonnance de mise en accusation.

Il est donc essentiel que l’appel soit fondé sur la qualification des faits. Si la personne mise en examen indique dans son acte d’appel qu’elle justifiera les motifs de son recours par mémoire, le président de la chambre de l’instruction ne peut pas déclarer l’appel non admis avant que ce mémoire ne soit déposé.

En l’espèce, la décision contestée a été jugée non conforme à ces dispositions, car le président de la chambre de l’instruction a statué sans attendre le dépôt du mémoire, ce qui constitue une violation des droits de la défense.

Quelles sont les conditions pour qu’un appel d’ordonnance de renvoi soit recevable ?

Les conditions de recevabilité de l’appel d’ordonnance de renvoi sont également précisées dans l’article 186 du Code de procédure pénale.

Cet article stipule que l’appel d’une ordonnance de renvoi est recevable à condition que l’acte qui en est le support vise l’article 186-3 ou fasse apparaître de manière non équivoque que le recours est exercé en application de ce texte.

Dans le cas présent, le président de la chambre de l’instruction a affirmé que l’appel n’était pas recevable car l’avocat de la personne mise en examen n’avait pas apporté de précisions sur le motif de son recours, ni fait référence à l’article 186-3.

Cependant, cette interprétation a été jugée erronée, car la personne mise en examen avait explicitement indiqué qu’elle fournirait des précisions dans un mémoire ultérieur. Ainsi, le président de la chambre de l’instruction a excédé ses pouvoirs en statuant sur l’appel sans attendre ce mémoire.

Comment la qualification des faits influence-t-elle la procédure d’appel ?

La qualification des faits est cruciale dans la procédure d’appel, notamment en ce qui concerne la possibilité d’une qualification criminelle.

L’article 186-3 du Code de procédure pénale précise que l’appel est recevable si la personne mise en examen estime que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime. Cela implique que si les faits peuvent être qualifiés de manière criminelle, l’ordonnance de renvoi aurait dû faire l’objet d’une mise en accusation devant la cour d’assises.

Dans cette affaire, les faits pour lesquels la personne mise en examen a été renvoyée étaient susceptibles de recevoir une qualification criminelle, ce qui aurait justifié un appel. Le président de la chambre de l’instruction a donc commis une erreur en déclarant l’appel non admis sans avoir vérifié si la qualification des faits permettait une telle possibilité.

En conséquence, la bonne administration de la justice exigeait que l’appel soit examiné en tenant compte de la qualification des faits, ce qui n’a pas été fait dans cette affaire.

N° M 24-83.780 F-D

N° 00106

SL2
4 FÉVRIER 2025

ANNULATION

M. BONNAL président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 4 FÉVRIER 2025

M. [L] [O] a formé un pourvoi contre l’ordonnance du président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, en date du 24 mai 2024, qui, dans l’information suivie contre lui des chefs d’infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs et blanchiment, en récidive, a déclaré non admis son appel de l’ordonnance du juge d’instruction le renvoyant devant le tribunal correctionnel.

Par ordonnance du 23 septembre 2024, le président de la chambre criminelle a prescrit l’examen immédiat du pourvoi.

Un mémoire a été produit.

Sur le rapport de M. Hill, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [L] [O], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l’audience publique du 7 janvier 2025 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Hill, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. M. [L] [O] a été mis en examen des chefs d’infractions à la législation sur les stupéfiants, association de malfaiteurs et blanchiment, en récidive.

3. Par ordonnance du 25 avril 2024, le juge d’instruction a rendu une ordonnance de non-lieu partiel et de renvoi devant le tribunal correctionnel des chefs susvisés.

4. M. [O] a relevé appel de cette décision.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

5. Le moyen critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré non admis l’appel interjeté par M. [O] contre l’ordonnance en date du 25 avril 2024 par laquelle le juge d’instruction a notamment renvoyé M. [O] devant le tribunal correctionnel des chefs de détention, transport, emploi, acquisition et offre ou cession de stupéfiants, participation à une association de malfaiteurs et blanchiment de trafic de stupéfiants, alors :

« 1°/ d’une part que la recevabilité de l’appel interjeté par le mis en examen contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel peut être appréciée, non seulement au vu des indications figurant dans l’acte d’appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la chambre de l’instruction ; que si le président de ladite chambre peut déclarer non-admis l’appel du mis en examen avant d’avoir permis à ce dernier d’expliciter par mémoire les motifs de son appel, c’est à la condition sine qua non qu’une bonne administration de la justice le justifie ; que tel n’est pas le cas lorsque l’intéressé a explicitement indiqué dans son acte d’appel qu’il justifierait les motifs de son recours dans un mémoire ; qu’au cas d’espèce, il résulte des mentions de l’acte d’appel que l’exposant y a explicitement indiqué que « les motifs de recevabilité de l’appel seront explicités par mémoire » ; qu’il ne pouvait dès lors être exclu, avant le dépôt de ce mémoire, que l’exposant entendait faire valoir, au visa de l’article 186-3 du Code de procédure pénale, que les faits pour lesquels il a été renvoyé devant le tribunal correctionnel constituaient en réalité un crime, et qu’il aurait dû faire l’objet d’une ordonnance de mise en accusation devant la cour d’assises ou devant la cour criminelle départementale ; qu’il s’ensuit que la bonne administration de la justice ne justifiait pas que le président de la chambre de l’instruction statue sans attendre le dépôt par l’exposant du mémoire annoncé dans la déclaration d’appel ; qu’en déclarant toutefois l’appel non-admis et en affirmant à tort que « l’appel d’une ordonnance de renvoi est recevable à condition que l’acte qui en est le support vise l’article 186-3 ou fasse apparaître de manière non équivoque que le recours est exercé en application de l’article 186-3 », le président de la Chambre de l’instruction, qui a excédé ses pouvoirs, a violé les articles 186 et 186-3 du code de procédure pénale, ensemble l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ;

2°/ d’autre part que la recevabilité de l’appel interjeté par le mis en examen contre une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel peut être appréciée, non seulement au vu des indications figurant dans l’acte d’appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la chambre de l’instruction ; que si le président de ladite chambre peut déclarer non-admis l’appel du mis en examen avant d’avoir permis à ce dernier d’expliciter par mémoire les motifs de son appel, c’est à la condition que la procédure ait été suivie dès l’origine sous une qualification délictuelle et qu’il n’existe aucune possibilité de qualification criminelle des faits retenus ; qu’au cas d’espèce, les faits pour lesquels Monsieur [O] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel, qualifiés d’infractions à la législation sur les stupéfiants, participation à une association de malfaiteurs et blanchiment, étaient, tels que présentés par le juge d’instruction dans son ordonnance, susceptibles de recevoir une qualification criminelle d’importation ou de complicité d’importation en bande organisée de stupéfiants en application de l’article 222-36, alinéa 2, et 121-7 du Code pénal, ou encore de blanchiment de ce crime, en application des articles 222-38, alinéa 2, et 324-4 du même Code ; qu’en retenant à tort que, si « la personne mise en examen peut interjeter appel de l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel dans le cas où elle estime que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l’objet d’une ordonnance de mise en accusation devant la cour d’assises, ou lorsque l’information a fait l’objet d’une cosaisine, en l’absence de cosignature par les juges d’instruction cosaisis », « force est de constater que [L] [O] ne se trouve dans aucune de ces deux situations », le président de la Chambre de l’instruction, qui a excédé ses pouvoirs, a violé les articles 186 et 186-3 du Code de procédure pénale, ensemble l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 186-3 du code de procédure pénale :

6. Selon le premier alinéa de ce texte, la personne mise en examen peut interjeter appel des ordonnances prévues par le premier alinéa de l’article 179 du code de procédure pénale dans le cas où elle estime que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l’objet d’une ordonnance de mise en accusation.

7. Pour dire non admis l’appel de M. [O], l’ordonnance attaquée énonce que la décision contestée n’est pas de celles dont l’article 186 du code de procédure pénale autorise l’appel.

8. Le juge ajoute que l’appel d’une ordonnance de renvoi est recevable à condition que l’acte qui en est le support vise l’article 186-3 susvisé ou fasse apparaître de manière non équivoque que le recours est exercé en application de ce texte et que l’avocat de M. [O] a formé appel sans apporter aucune précision sur le motif de son recours, aucune référence à l’article 186-3 du code de procédure pénale n’étant faite.

9. En prononçant ainsi, le président de la chambre de l’instruction a excédé ses pouvoirs.

10. En effet, ce magistrat ne pouvait statuer sur l’appel de l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, avant que le demandeur ait exposé les motifs de son recours par mémoire devant la chambre de l’instruction, sans constater que la procédure suivie dès l’origine sous une qualification délictuelle ne comportait aucune possibilité de qualification criminelle des faits retenus.

11. L’annulation est de ce fait encourue.


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