L’Essentiel : La société créancière a engagé une procédure de saisie-attribution des sommes détenues par une banque pour le compte d’un débiteur, désigné ici comme un occupant. Cette saisie a permis de récupérer partiellement une somme de 1.106,23 euros. L’occupant a contesté la saisie en assignant la société créancière, demandant la mainlevée partielle et arguant que la créance ne devrait pas dépasser 13.099,19 euros. En réponse, la société créancière a réclamé des dommages et intérêts. Le tribunal a constaté que l’occupant était redevable d’une indemnité d’occupation de 36.891,15 euros et a rejeté sa demande de délais de paiement.
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Contexte de l’affaireLa société ERAX TRADING INTERNATIONAL a engagé une procédure de saisie-attribution des sommes détenues par le CREDIT LYONNAIS pour le compte d’un débiteur, désigné ici comme un occupant. Cette saisie a été effectuée le 30 mai 2024, suite à une ordonnance de référé rendue par le tribunal de grande instance de Caen le 14 juin 2018. La saisie a permis de récupérer partiellement une somme de 1.106,23 euros, qui a été notifiée à l’occupant le 6 juin 2024. Demande de mainlevée par l’occupantL’occupant a contesté la saisie en assignant la société ERAX TRADING INTERNATIONAL devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Caen. Il a demandé la mainlevée partielle de la saisie et a présenté plusieurs arguments concernant le montant de la créance, qui selon lui, ne devrait pas dépasser 13.099,19 euros, correspondant à une indemnité d’occupation due suite à la résiliation d’un bail commercial. Il a également demandé des délais de paiement et a sollicité des dommages et intérêts. Réponse de la société créancièreEn réponse, la société ERAX TRADING INTERNATIONAL a demandé le rejet des demandes de l’occupant et a réclamé des dommages et intérêts d’un montant de 6.054 euros, ainsi qu’une somme de 2.000 euros au titre des frais de justice. Elle a soutenu que l’occupant devait des montants plus élevés en raison de l’indemnité d’occupation non réglée. Évaluation de la créanceLe tribunal a examiné le montant de la créance et a constaté que l’occupant était redevable d’une indemnité d’occupation pour la période allant du 1er janvier 2020 au 29 février 2024. Le montant de la créance a été cantonné à 36.891,15 euros, correspondant à l’indemnité d’occupation impayée. Le tribunal a également noté que l’occupant n’avait pas fourni de preuves suffisantes pour justifier les paiements qu’il prétendait avoir effectués. Demande de délais de paiementConcernant la demande de délais de paiement formulée par l’occupant, le tribunal a jugé que celle-ci n’était pas fondée, car l’occupant n’avait pas démontré sa situation financière ni proposé d’échéancier de paiement. La société ERAX TRADING INTERNATIONAL a contesté cette demande, arguant qu’elle avait déjà accordé des délais à l’occupant. Décision du tribunalLe tribunal a rendu sa décision en cantonnant la saisie-attribution à la somme de 36.891,15 euros, rejetant la demande de délais de paiement de l’occupant et déclarant irrecevable la demande indemnitaire de la société ERAX TRADING INTERNATIONAL. L’occupant a été condamné à verser 1.500 euros à la société créancière pour couvrir les frais de justice, ainsi qu’à supporter l’intégralité des dépens de l’instance. La décision a été notifiée avec exécution provisoire. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de la créance détenue par la société ERAX TRADING INTERNATIONAL ?La créance détenue par la société ERAX TRADING INTERNATIONAL à l’encontre de l’occupant sans droit ni titre est fondée sur l’indemnité d’occupation résultant de la résiliation d’un bail commercial. Conformément à l’ordonnance de référé en date du 14 juin 2018, l’occupant a été condamné à payer une somme de 26.164,61 euros, correspondant aux sommes dues jusqu’au 17 mai 2018, ainsi qu’à une indemnité d’occupation provisionnelle jusqu’à la libération effective des lieux. Il est précisé que l’indemnité d’occupation est due à partir du 1er juin 2019 jusqu’à la remise des clés, soit le 29 février 2024. La créance a été cantonnée à la somme de 36.891,15 euros, correspondant au montant impayé de l’indemnité d’occupation pour la période du 1er janvier 2020 au 29 février 2024. Quelles sont les conditions de l’indexation de l’indemnité d’occupation ?La question de l’indexation de l’indemnité d’occupation est abordée dans l’avis de la Cour de cassation du 4 juillet 2017, qui stipule que les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain pour évaluer le montant d’une indemnité due par un occupant sans droit ni titre. Il est également précisé que l’indemnité peut être assortie des modalités que les juges estiment nécessaires, mais dans le cas présent, le juge des référés n’a pas prévu d’indexation de l’indemnité d’occupation. Ainsi, la société ERAX TRADING INTERNATIONAL n’est pas fondée à procéder à une indexation de cette indemnité, car cela n’a pas été prévu par le juge des référés. Quelles sont les preuves requises pour justifier des paiements effectués par l’occupant ?Selon l’article 1342-8 du Code civil, le paiement se prouve par tout moyen. L’occupant a prétendu avoir réglé une somme de 42.368,11 euros, mais le décompte produit est jugé insuffisant pour justifier du paiement de sa dette. Il est nécessaire de produire des preuves tangibles, telles que des chèques et des justificatifs d’encaissement, pour attester des paiements effectués. Les reçus établis par l’occupant ne sont pas considérés comme suffisants, car ils ne permettent pas de prouver que les paiements ont été effectués au profit de la société ERAX TRADING INTERNATIONAL. En conséquence, le juge a recalculé la dette de l’occupant en tenant compte uniquement des montants dûment justifiés. Quelles sont les conditions pour obtenir des délais de paiement selon le Code civil ?L’article 1343-5 du Code civil prévoit que le juge peut, en tenant compte de la situation du débiteur et des besoins du créancier, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues, dans la limite de deux années. Cependant, cette suspension ne doit pas être assimilée à une mainlevée et s’applique dans l’état où se trouve la mesure d’exécution au jour de l’octroi des délais. Dans le cas présent, l’occupant a demandé des délais de paiement, mais n’a pas produit d’éléments suffisants pour justifier sa situation financière. De plus, il n’a pas proposé d’échéancier, ce qui a conduit le juge à rejeter sa demande de délais de paiement. Quelle est la compétence du juge de l’exécution concernant les demandes indemnitaire ?L’article L 213-6 du Code de l’organisation judiciaire stipule que le juge de l’exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires, mais ne peut pas modifier le dispositif de la décision qui sert de fondement aux poursuites. La société ERAX TRADING INTERNATIONAL a sollicité une indemnité de 6.054 euros pour l’absence d’indexation des indemnités d’occupation, mais cette demande ne relève pas de la compétence du juge de l’exécution. En effet, faire droit à cette demande impliquerait de modifier le dispositif de l’ordonnance de référé, ce qui n’est pas autorisé. Ainsi, la demande indemnitaire a été déclarée irrecevable par le juge. |
JUGE DE L’EXECUTION
MINUTE N° : 25/
AFFAIRE N° RG 24/02941 – N° Portalis DBW5-W-B7I-I4YM
Code NAC 78F Demande en nullité et/ou en mainlevée, en suspension ou en exécution d’une saisie mobilière
JUGEMENT DU 04 Février 2025
Laurène POTERLOT, Juge de l’Exécution au Tribunal judiciaire de CAEN,
Assistée lors des débats de Séverine HOURNON, Greffière ;
DANS L’INSTANCE
ENTRE
Monsieur [F] [Y]
demeurant [Adresse 1]
EN DEMANDE
représenté par Me Nicolas DELAPLACE, avocat au Barreau de CAEN, Case 115, substitué par Me Laura MURIS, avocat au Barreau de CAEN
ET
S.A.R.L. ERAX TRADING INTERNATIONAL
dont le siège social est sis [Adresse 2]
EN DEFENSE
représenté par Me Mickaël DARTOIS, avocat au Barreau de CAEN, Case 129, substitué par Me Jean-Michel DELCOURT, avocat au Barreau de CAEN
Après débats à l’audience publique du 10 Décembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 04 Février 2025.
La présente décision a été signée par Laurène POTERLOT, et par Séverine HOURNON, Greffière, présente lors du prononcé.
Déclarant agir en vertu d’une ordonnance de référé rendue par la vice-présidente du tribunal de grande instance de Caen en date du 14 juin 2018, la société ERAX TRADING INTERNATIONAL a procédé le 30 mai 2024 à la saisie-attribution des sommes détenues par le CREDIT LYONNAIS pour le compte de Monsieur [F] [Y].
La mesure, partiellement fructueuse à hauteur de 1.106,23 euros, lui a été dénoncée le 6 juin 2024.
Par acte de commissaire de justice du 8 juillet 2024, Monsieur [F] [Y] a fait assigner la société ERAX TRADING INTERNATIONAL devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Caen afin d’obtenir principalement la mainlevée partielle de la mesure et des délais de paiement.
A l’audience du 10 décembre 2024, les parties sont représentées par leurs conseils qui se réfèrent oralement à leurs écritures.
Aux termes de celles-ci, Monsieur [F] [Y] sollicite du juge de l’exécution de :
– Dire et juger la demande de Monsieur [F] [Y] recevable et bien fondée ;
A titre principal,
– Constater que le montant de la créance détenue par la SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL à l’encontre de Monsieur [F] [Y] en application de l’ordonnance de référé en date du 14 juin 2018, s’élève à la somme de 13.099,19 €, correspondant à l’indemnité d’occupation restant due par ce dernier suite à la résiliation du bail commercial en date du 03 janvier 2011, et au titre de la période allant du 1 er juin 2019 au 31 décembre 2022, date de libération effective des lieux par Monsieur [F] [Y] ;
– Cantonner en conséquence la somme due par Monsieur [F] [Y] à la SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL à la seule somme de 13.099,19 € précitée ;
A titre subsidiaire,
– Constater que le montant de la créance détenue par la SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL à l’encontre de Monsieur [F] [Y] en application de l’ordonnance de référé en date du 14 juin 2018, s’élève à la somme de 14.638,97 €, correspondant à l’indemnité d’occupation restant due par ce dernier suite à la résiliation du bail commercial en date du 03 janvier 2011, et correspondant à la saisie-attribution contestée au titre de la période allant du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2022, date de libération effective des lieux par Monsieur [F] [Y] ;
– Cantonner en conséquence la somme due par Monsieur [F] [Y] à la SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL à la seule somme de 14.638,97 € ;
En tout état de cause,
– Débouter la SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– Ordonner la mainlevée immédiate de la saisie-attribution pour le surplus ;
– Octroyer à Monsieur [Y] les plus larges délais de paiement de la somme de 13.099,19 €, subsidiairement la somme de 14.638,97 €, due à la SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL ;
– Condamner la SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL à verser à Monsieur [F] [Y] la somme de 2.000 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamner la SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL à supporter les entiers dépens de la présente instance et tous les frais afférents à la saisie indument pratiquée, ainsi qu’à sa mainlevée partielle à intervenir.
La société ERAX TRADING INTERNATIONAL sollicite du juge de l’exécution de :
– Débouter Monsieur [F] [Y] de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions.
– Condamner Monsieur [F] [Y] à verser une somme d’un montant de 6.054 euros à la
SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL, à titre de dommages et intérêts,
– Condamner Monsieur [F] [Y] à verser à la société ERAX TRADING INTERNATIONAL une somme d’un montant de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance comprenant les frais d’actes relatifs au commandement de payer en date du 3 avril 2024, à la saisie-attribution réalisée le 30 mai 2024 et ses suites et au constat d’huissier effectué le 8 mars 2024.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures.
Le jugement a été mis en délibéré au 4 février 2025.
Sur le montant de la créance
Sur l’indexation de l’indemnité d’occupation
La Cour de cassation, dans un avis du 4 juillet 2017 a considéré que les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain pour évaluer le montant d’une indemnité due par un occupant sans droit ni titre et peuvent donc, conformément au principe de la réparation intégrale, l’assortir des modalités qu’ils estiment nécessaires (Cass., avis, 4 juill. 2017, P+B+R+I, n° 17-70.008).
Par ordonnance de référé en date du 14 juin 2018, Monsieur [F] [Y] a notamment été condamné à payer à la société ERAX TRADING INTERNATIONAL la somme de 26.164,61 euros au titre des sommes dues selon décompte arrêté au 17 mai 2018, outre intérêt au taux légal. Le juge des référés a également prévu qu’en cas de non-respect du délai de paiement de 24 mois octroyé, la clause résolutoire serait acquise et que le tout deviendrait exigible. Il serait alors débiteur d’une indemnité d’occupation provisionnelle équivalente au montant du loyer actuel et des charges jusqu’à libération effective des lieux par remise des clefs.
Il s’en déduit qu’il n’a pas été prévu par le juge des référés d’indexation de l’indemnité d’occupation de sorte que la société ERAX TRADING INTERNATIONAL n’est pas fondée à y procéder.
Sur la durée de l’indemnité d’occupation
Monsieur [F] [Y] fait valoir que l’indemnité d’occupation ne serait due que du 1er juin 2019 au 31 décembre 2022 et qu’à compter de cette date il se serait maintenu dans les lieux avec l’accord de la société ERAX TRADING INTERNATIONAL moyennant le versement d’une somme de 900 euros par mois en liquide.
Si la société ERAX TRADING INTERNATIONAL considère que l’indemnité d’occupation est due depuis le 1er juin 2019 et jusqu’au 8 mars 2024, date du constat d’état des lieux suite à la remise des clefs intervenue le 29 février 2024.
En l’espèce, Monsieur [F] [Y] échoue à rapporter la preuve d’un accord intervenu entre les parties concernant le montant de l’indemnité d’occupation due à compter du 1er janvier 2023 qui dérogerait aux dispositions de l’ordonnance de référé. Les reçus dont ils se prévaut en ce qu’ils ont été établis par ces soins et ne portent que sur le montant des sommes prétendument versées à Monsieur [Z] [X] sont en effet insuffisants pour en justifier.
De même, il ne justifie pas d’une remise de clefs antérieurement au 29 février 2024.
Dans ces conditions, et conformément à l’ordonnance de référé, il y a lieu de considérer que Monsieur [F] [Y] est redevable d’une indemnité d’occupation équivalente au montant du loyer de juin 2018, et des charges, soit 1.584,78 euros, du 1er juin 2019 au 29 février 2024, date de remise des clefs.
Sur les versements effectués
Conformément aux dispositions de l’article 1342-8 du code civil, le paiement se prouve par tout moyen.
Monsieur [F] [Y] prétend avoir réglé la somme de 42.368,11 euros selon un relevé d’un cabinet d’expertise comptable du 7 juin 2024 et avoir procédé à d’autres règlements à hauteur de 7.200 euros en liquide.
Toutefois, le décompte produit par Monsieur [F] [Y] est insuffisant pour justifier du paiement de sa dette en l’absence de production des chèques et justification de leur encaissement par la société ERAX TRADING INTERNATIONAL.
Il en va notamment ainsi des règlements de 500 euros en août 2021 et de 566 euros en février 2022 dont il n’a pas été tenu compte dans le décompte du créancier.
En outre, le règlement du 13 janvier 2020 ne peut concerner que l’échéance de décembre 2019 de sorte qu’il n’y a pas lieu de déduire ce montant.
S’agissant de la somme de 7.200 euros réglée en liquide, les « reçus » dont il se prévaut sont insuffisants pour justifier du règlement de l’indemnité d’occupation dont il était redevable en ce qu’ils ont été élaborés par ses soins sur des fiches d’atelier émanant de son garage et que la société ERAX TRADING INTERNATIONAL conteste que Monsieur [X] ait apposé sa signature pour accuser réception de ces versements pour son compte. Les captures de SMS ne permettent pas non plus d’établir l’existence de ces paiements au profit de la société ERAX TRADING INTERNATIONAL.
Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de tenir compte d’autre règlements que ceux déduit par la société ERAX TRADING INTERNATIONAL du décompte des sommes dues.
Ainsi, à la lecture du décompte joint à l’acte de saisie-attribution, la dette de Monsieur [F] [Y] doit être recalculée comme suit :
Période
Montant réclamé
Montant dû
Montant réglé
Dette
Depuis juin 2019
Il n’est pas justifié par Monsieur [F] [Y] que le montant réclamé par la société ERAX TRADING INTERNATIONAL et effectivement réglé serait supérieur au montant de l’indemnité d’occupation fixé par l’ordonnance de référé
0
2020
1.596,67 x 12
1.584,78 x 12 = 19.017,36 €
(1.527,19 € x 3) + (1.596,67 x 6) + 1000 € =
15.161.59 €
3.855,77 €
2021
(1.596,57 € x 7) + (1.614,05 € x 5) – 51,74 €
(1.584,78 x 12) – 51,74 € = 18.965,62 €
(1.596,57 € x 7) + (1.614,05 x 3) =
16.018,14 €
2.947,48 €
2022
(1.724,70 x 12) – 768,18 €
(1.584,78 x 12) – 51,74 € = 18.249,18 €
(1.724,70 x 6) = 10.348.20 €
7.900,98 €
2023
(1.862,78 € x 12) + 609 € (taxe foncière non produite)
1.584,78 x 12 = 19.017,36 €
0
19.017,36 €
Jusqu’en février 2024
(1.862,78 € x 2) + (1.862,78 € x 8/30)
1.584,78 x 2 = 3.169,56 €
0
3.169,56 €
TOTAL
43.171,31 €
78.419,08 €
41.527,93 €
36.891,15 €
En conséquence, la créance de la société ERAX TRADING INTERNATIONAL au titre du capital restant dû doit être cantonnée à la somme de 36.891,15 euros correspondant au montant impayé de l’indemnité d’occupation pour la période du 1er janvier 2020 au 29 février 2024
Sur la demande de délais de paiement de Monsieur [F] [Y]
L’article 1343-5 du Code civil, qui encadre les délais qui pourraient être accordés par le juge de l’exécution, prévoit que la décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées. Cependant, cette suspension, qui ne saurait être assimilée à une mainlevée, s’opère nécessairement dans l’état où se trouve la mesure d’exécution au jour de l’octroi des délais.
Or, en matière de saisie-attribution, la suspension des voies d’exécution visée par l’article 1343-5 du Code civil, ne peut avoir pour effet de faire obstacle à l’attribution matérielle des fonds au créancier dans le mois suivant la mise en place de cette voie d’exécution, puisqu’en application des dispositions de l’article L. 211-2 du code des procédures civiles d’exécution, l’acte de saisie a déjà emporté attribution juridique des fonds au saisissant.
En l’espèce, les fonds saisis par l’acte du 30 mai 2024 pour un montant de 1.106,23 euros, n’ont pas permis de couvrir la totalité de la créance due. La demande de délais de paiement est donc recevable.
Il résulte des dispositions de l’article 1343-5 du Code civil, que « Le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues. Par décision spéciale et motivée, il peut ordonner que les sommes correspondant aux échéances reportées porteront intérêt à un taux réduit au moins égal au taux légal, ou que les paiements s’imputeront d’abord sur le capital. Il peut subordonner ces mesures à l’accomplissement par le débiteur d’actes propres à faciliter ou à garantir le paiement de la dette. La décision du juge suspend les procédures d’exécution qui auraient été engagées par le créancier. Les majorations d’intérêts ou les pénalités prévues en cas de retard ne sont pas encourues pendant le délai fixé par le juge. Toute stipulation contraire est réputée non écrite. Les dispositions du présent article ne sont pas applicables aux dettes d’aliment ».
Au soutien de sa demande de délais de paiement, Monsieur [F] [Y] explique que sa situation est « indiscutablement obérée depuis plusieurs années et ne lui permettra pas de s’acquitter du règlement de la somme restant due à la SARL ERAX TRADING INTERNATIONAL ».
La société ERAX TRADING INTERNATIONAL s’y oppose, expliquant avoir déjà accordé de larges délais à son débiteur et que la situation qu’il invoque ne lui permettra pas de régler sa dette à échéance.
En l’espèce, outre le fait que Monsieur [F] [Y] ne produit aucun élément pour justifier de la situation financière qu’il invoque, il ne formule aucune proposition d’échéancier et n’explique pas dans quelle mesure il sera en capacité de s’acquitter de sa dette.
Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de faire droit à sa demande de délais de paiement.
Sur la demande indemnitaire de la société ERAX TRADING INTERNATIONAL
Aux termes de l’article L 213-6 du code de l’organisation judiciaire, « Le juge de l’exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives aux titres exécutoires et même si elles portent sur le fond du droit à moins qu’elles n’échappent à la compétence des juridictions de l’ordre judiciaire ».
L’article R. 121-1 du code des procédures civiles d’exécution dispose en son second alinéa « le juge de l’exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l’exécution ».
Il s’en déduit qu’en dehors des cas prévus par les textes, le juge de l’exécution ne peut pas délivrer de titre exécutoire.
Au visa de l’article 1240 du code civil, la société ERAX TRADING INTERNATIONAL sollicite une somme de 6.054 euros au titre du montant dont elle est privée en raison de l’absence d’indexation annuelle des indemnités d’occupation de janvier 2020 à mars 2024.
Toutefois, cette demande indemnitaire n’entre pas dans le champ de compétence du juge de l’exécution en ce qu’elle ne porte pas sur une difficulté d’exécution et qu’y faire droit conduirait à modifier le dispositif de l’ordonnance de référé du 14 juin 2018 et conduirait à la délivrance d’un titre exécutoire au profit de la société ERAX TRADING INTERNATIONAL.
En conséquence, la demande de la société ERAX TRADING INTERNATIONAL doit être déclarée irrecevable.
Sur les dépens, les frais irrépétibles et l’exécution provisoire
Monsieur [F] [Y], qui succombe à la présente instance, sera tenu des entiers dépens.
Par ailleurs, il serait inéquitable de laisser à la société ERAX TRADING INTERNATIONAL la charge de la totalité des frais qu’elle a dû exposer pour faire valoir ses droits et qui ne sont pas compris dans les dépens. En conséquence, Monsieur [F] [Y] sera condamné à lui payer la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l’article 37 de la loi sur l’aide juridictionnelle.
Enfin, il est rappelé qu’en vertu de l’article R. 121-21 du code des procédures civiles d’exécution, les décisions du juge de l’exécution bénéficient de l’exécution provisoire de droit.
Le juge de l’exécution, statuant publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort et mis à disposition au greffe de la juridiction,
CANTONNE la saisie-attribution à la somme de 36.891,15 euros au titre du capital restant dû correspondant au montant impayé de l’indemnité d’occupation pour la période du 1er janvier 2020 au 29 février 2024 ;
REJETTE la demande de délais de paiement de Monsieur [F] [Y] ;
DÉCLARE irrecevable la demande indemnitaire de la société ERAX TRADING INTERNATIONAL ;
CONDAMNE Monsieur [F] [Y] à verser à la société ERAX TRADING INTERNATIONAL la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [F] [Y] aux dépens ;
RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de droit dès sa notification.
LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXECUTION
S. HOURNON L. POTERLOT
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