50 000 euros pour dénigrement d’un concurrent

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Évaluation du préjudice

En matière de dénigrement entre concurrents, le montant de l’indemnisation peut être conséquent lorsque le préjudice est occasionné par une société bénéficiant d’une certaine notoriété à une société de taille plus modeste et plus récente cherchant à pénétrer le même marché (en l’occurrence celui des produits de haute technologie dans le domaine spatial).

Propos dénigrants entre concurrents

La société Spacekey  spécialisée dans la distribution de composants électroniques et la  fourniture de conseil et d’ingénierie a obtenu la condamnation pour dénigrement de la société 3D Plus, spin-off de la société Thomson-CSF renommée Thales. Cette dernière, s’estimant victime de contrefaçon de brevets par la diffusion de produits très ressemblants aux siens par la société Spacekey, a sur autorisation judiciaire, fait procéder à des constats et à des saisies-contrefaçon et a ensuite fait assigner devant le juge des référés du TGI de Paris la société Spacekey et son dirigeant. Par la suite, la société a adressé une « lettre d’information » aux partenaires potentiels de la société Spacekey pour dénoncer ces agissements de contrefaçon.

Lettre de mise en cause

Au sens de l’article 1240 du code civil dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er octobre 2016, le dénigrement s’entend comme étant le fait, de jeter publiquement le discrédit sur les produits, l’entreprise ou la personnalité d’un concurrent pour en tirer profit.

La missive faisait état d’une procédure judiciaire en cours, énonçant notamment sans réserve ou mesure, que d’anciens salariés de la société 3DPlus ayant constitué la société Spacekey auraient détournés des informations permettant de fabriquer des produits concurrents contrefaisants.  Les termes employés par le conseil de la partie adverse pour la mettre en garde contre une réalité plausible de contrefaçon ainsi que contre l’existence de poursuites judiciaires pour contrefaçon, étaient mesurés mais ont suffi à constituer le dénigrement.

Les propos et énonciations étaient au contraire à connotation péjorative puisque faisant état d’infractions pénales commises (vols) par d’anciens salariés de la société 3D Plus ayant depuis constitué la société Spacekey, ces infractions étant présentées comme établies et avérées (« ont volés ») et comme, ayant permis de contrefaire des produits fabriqués par la société 3D Plus ainsi qu’une décision de justice ne pourra que prochainement le confirmer (« une telle décision sera rendue ».). La forme de cette mise en garde qui au demeurant ne précisait pas les références du brevet prétendument enfreint, exprimée sous forme de critique dépréciante et non pas dans un but d’information objective d’une société cliente, n’offrait en réalité à son destinataire pas d’autre choix, que d’abandonner la diffusion des produits concernés. Le dénigrement était caractérisé, peu important de savoir si la société 3D Plus avait ou non agi de manière intentionnelle.

Appréciation du préjudice

Un préjudice s’infère nécessairement de tout acte de concurrence déloyale. En l’espèce, le marché des modules 3 D étant un marché assez restreint a fortiori s’agissant comme en l’espèce de produits affectés à une niche précise (le spatial), il est aisé de ruiner la réputation de l’un de ses acteurs par une lettre telle que la lettre dénigrante litigieuse. Cette lettre qui n’a pas été isolée, tendait par intimidation à mettre à l’écart une société de tous les circuits économiques. L’image de la société en a été gravement et irrémédiablement atteinte.

En matière de contrefaçon, sont dénigrants, le fait d’informer des tiers sur le risque de contrefaçon de produits concurrents, le fait de faire connaître par courrier électronique et de publier sur un site internet l’accusation de contrefaçon portée contre une société alors qu’aucune décision de justice n’a reconnu ces faits et encore, toute information portant sur une action en contrefaçon, engagée ou non. La jurisprudence condamne au titre du dénigrement toute information sur une instance en cours, en considérant que l’on peut craindre qu’elle préjuge de la décision à venir et crée un tort considérable et irréversible au concurrent désigné. La mise en garde n’est permise et licite que si elle est mesurée, toute dérive étant  systématiquement sanctionnée.

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