Protection internationale de la marque Bioderma
En application du principe de territorialité de la protection attachée à la marque, la validité de la marque française Bioderma déposée à l’INPI doit s’apprécier au regard des dispositions du droit interne français. S’agissant de la partie française de la marque verbale internationale Bioderma, selon les dispositions de l’article 5.6 de cette convention internationale le titulaire d’un enregistrement de marque dans son pays d’origine peut effectuer, sur la base de celui-ci, un enregistrement international. L’enregistrement international vaut alors comme dépôt national dans les pays adhérents désignés ; néanmoins chacun ces pays décide ensuite, au regard de sa loi interne, de la validité de cet enregistrement sur son territoire. Il en résulte que chaque pays désigné est autorisé à invalider en tout ou en partie, sur son territoire, l’enregistrement international, dans les mêmes conditions qu’un enregistrement national.
En application du principe de territorialité rappelé ci – dessus les décisions prises dans ce cadre par des juridictions ou des administrations de pays étrangers ne peuvent recevoir application en France. La validité des deux marques verbales Bioderma considérées doit donc être déterminée selon les dispositions du droit interne français. La validité d’une marque désignant un produit destiné au grand public s’apprécie : i) d’une part en considération des dispositions légales applicables au moment du dépôt de la marque, (cass. Com 16 décembre 2008 ); ii) et d’autre part, en recherchant qu’elle était, à la date du dépôt de la marque, la manière dont le signe qui la constitue, était compris par le consommateur.
Conditions de la validité d’une marque
Aux termes de l’article 3 de la loi du 31 décembre 1964, ne peut être considérées comme marques : i) celles qui sont constituées exclusivement de la désignation nécessaire ou générique du produit ou du service ou qui comportent des indications propres à tromper le public ; ii) celles qui sont composées exclusivement de termes indiquant la qualité essentielle du produit ou du service ou la composition du produit.
Appréciation des termes Bio et Derma
En l’espèce, à l’époque du dépôt de la marque Bioderma (en 1963 et 1986), l’élément ‘Bio’ n’était pas mentionné en tant que mot dans les extraits de dictionnaires de cette période (éditions Larousse, Hachette, et Flammarion principalement). Dans le langage courant l’élément verbal ‘bio’ évoquait seulement de manière imprécise, par l’étymologie du mot ‘biologie’, l’idée de vie, celle de cellules, ou encore de produit provenant d’un laboratoire de biologie. N’ayant ainsi, à l’époque de chacun des dépôts de marque concernés, aucune signification directe particulière, l’élément Bio n’indiquait, lui même, ni l’usage des produits désignés par la marque Bioderma, ni les qualités essentielles ou les caractéristiques de ces produits.
La notion de ‘bio’ ainsi définie, est apparue progressivement dans les milieux spécialisés pour ne s’y imposer que dans le courant des années 1980 ; d’autre part l’appréciation du caractère distinctif ne peut se faire à partir de la connaissance du mot qu’avaient alors les professionnels ou les spécialistes du domaine considéré, mais à partir de la signification que, le cas échéant, à l’époque des dépôts, le consommateur moyen pouvait attacher au terme ‘bio’. Il n’était donc pas démontré qu’en 1963 ni même en 1986 le terme Bio évoquait pour le consommateur moyen français le sens de produit élaboré dans le respect de l’environnement. Ce n’est que plus tard que le terme ‘bio’ a acquis un sens propre dans le langage courant pour évoquer désormais l’idée de respect de l’environnement, d’ utilisation de matières naturelles, et de procédés de fabrication écologiques.
S’agissant de l’élément ‘derma’, celui – ci ne figure pas comme tel dans les dictionnaires des périodes concernées lesquels le présentent exclusivement comme un élément entrant dans la composition de nombreux mots ; ces dictionnaires définissent le terme voisin ‘derme’ comme désignant la couche profonde de l’épiderme, ainsi que comme étant le tissu qui fait le corps de la peau ; ils précisent qu’il vient du grec derma ‘peau’. L’élément derma était donc compris à la période des dépôts de marque concernés comme désignant la peau et donc en l’occurrence un produit pour la peau. Si l’élément ‘derma’ présente un caractère évocateur pour désigner les produits en relation avec la peau, la juxtaposition de cet élément et de bio donne à l’ensemble Bioderma un pouvoir distinctif propre.
La combinaison de l’élément ‘bio’, trop général pour être descriptif, et de l’élément ‘derma’ confère en effet à l’ensemble de la dénomination Bioderma, qui constitue la marque, un caractère distinctif dans la mesure où, à l’époque des dépôts concernés, la dénomination verbale ‘Bioderma’ n’avait pas dans le langage courant de signification propre, et qu’elle offrait ainsi plusieurs interprétations possibles.
Le signe Bioderma ne peut être considéré comme étant constitué exclusivement de la désignation nécessaire ou générique du produit, de la qualité essentielle, ou de la composition de celui – ci ; les marques verbales Bioderma sont donc distinctives et valides.